L'opposition en tête des sondages pour les élections législatives danoises

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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7 septembre 2011
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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L'opposition en tête des sondages pour les élections législatives danoises

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Les questions économiques, et notamment la relance de la croissance, l'augmentation de l'emploi et la préservation de l'Etat-providence, sont au cœur de la campagne électorale législative danoise. Le scrutin se déroulera le 15 septembre prochain. La crise économique actuelle a évincé l'enjeu de l'immigration, sujet central lors des précédents scrutins de 2001, 2005 et 2007, années où l'économie danoise était florissante.

"Les gens sont lassés du thème de l'immigration qui a été au cœur de l'agenda politique au cours des 10 dernières années. De plus, les Danois sont, dans ce domaine, satisfaits de l'action de leur gouvernement qui a, selon eux, réduit en grande partie l'immigration" affirme Jacob Mchangama, co-directeur du think tank du Centre des études politiques.

Le Parti du peuple danois (DP), d'extrême droite, dirigé par Pia Kjaersgaard et soutien parlementaire du gouvernement dirigé par le Premier ministre sortant Lars Lokke Rasmussen (Parti libéral, V), a tenté à plusieurs reprises de mettre l'accent sur son sujet de prédilection. Elle a ainsi proposé de déplacer les centres d'accueil des demandeurs d'asile que compte le Danemark dans les pays d'où sont originaires les demandeurs d'asile comme le Pakistan mais aussi les Etats de la corne de l'Afrique ou du Moyen Orient. Le Parti du peuple continue à se battre pour un plus grand contrôle des frontières du pays. Il a ainsi obtenu du gouvernement le rétablissement le 1er juillet dernier des contrôles douaniers permanents à ses frontières en échange de son soutien à la réforme sur les pensions des retraites anticipées. "Dans un monde globalisé, il est important de protéger notre Etat-providence des personnes qui viennent d'ailleurs et qui profitent des bénéfices de notre société" a déclaré Peter Skaarup, porte-parole du DP pour la justice.

Le Premier ministre sortant a répété qu'il ne formerait pas d'alliance gouvernementale avec le Parti du peuple à l'issue du scrutin du 15 septembre. Après ce qui a été perpétré par Anders Behring Breiving en Norvège le 22 juillet dernier (76 morts dans un attentat et une fusillade), le gouvernement de Lars Lokke Rasmussen a tenté, ces dernières semaines, de marquer sa distance avec le parti du peuple.

L'Institut national de la statistique a revu à la hausse ses données socioéconomiques pour le 1er trimestre 2011 (augmentation de 0,1% du PIB). Ainsi, le Danemark échappe à la récession (deux trimestres consécutifs de croissance négative), le PIB danois ayant reculé de 0,2% lors du 4e trimestre 2010. La dernière période de récession qu'a connue Copenhague remonte à 2009. "Cela confirme que nous connaissons une reprise modérée et que le plan mis en place par le gouvernement pour relancer la consommation était le bon" a commenté Claus Hjort Frederiksen (V), ministre des Finances.

Le gouvernement a dévoilé le 23 août dernier son "plan de croissance durable" destiné à stimuler la croissance durant les 2 années à venir. D'un montant de 10,8 milliards de couronnes (1,4 milliard €), celui-ci prévoit plusieurs investissements dans le secteur de la construction (nouvelles dépenses publiques notamment dans les infrastructures routières et ferroviaires , aide au marché immobilier suspension de certaines taxes d'habitation ainsi que des frais d'enregistrement des propriétés et soutien à l'investissement et à la consommation privés). "L'économie va dans la bonne direction" a déclaré Kristian Thulesen Dahl, responsable des questions financières au Parti du peuple.

Steen Bocian, économiste de la Danske Bank, voit dans les derniers chiffres publiés par l'Institut national statistique un signe encourageant mais met en garde sur le fait que les données ne prennent pas en compte la crise financière et économique de cet été dont les effets ne devraient apparaître que dans les statistiques des 3e et 4e trimestres 2011. "Le Danemark a évité la récession de justesse. Nous devrions être heureux mais les chiffres révèlent la fragilité de l'économie danoise" a indiqué Michael Staehr, analyste en chef de la Sydbank.

Le Danemark devrait connaître une croissance de 1,7% cette année et de 2% en 2012 selon les derniers chiffres de la Banque centrale. Selon cette institution, le recul de la consommation des ménages a été plus qu'équilibré par l'accroissement des dépenses publiques et des investissements. La baisse de la consommation, l'atonie du marché immobilier et le niveau élevé des salaires (qui figurent parmi les plus hauts du monde) qui empêchent la croissance et réduisent la compétitivité demeurent cependant un problème au Danemark.

Le gouvernement pense que la consolidation fiscale et les coupes sociales sévères (notamment la réforme sur les pensions des retraites anticipées et la baisse des aides accordées aux étudiants) devraient empêcher la dette publique de se creuser et permettre de parvenir à l'équilibre budgétaire d'ici à 2020. Les forces de l'opposition souhaitent financer la dette par la croissance. Elles proposent de relancer les investissements publics et d'allonger d'une heure hebdomadaire ("douze minutes par jour" disent les forces gouvernementales) le temps de travail des salariés pour améliorer la productivité et les rentrées fiscales. " Les Danois doivent choisir entre une dette incontrôlée et le maintien de leur Etat providence" a déclaré le Premier ministre Lars Lokke Rasmussen qui affirme que le gouvernement a choisi une politique de limite des dépenses et se bat contre les hausses d'impôts (le Parti conservateur (KF), allié du Parti libéral à la tête de l'Etat, est favorable à de nouvelles baisses d'impôts pour stimuler la demande) tandis que l'opposition, qu'il dépeint comme irresponsable, prévoit de créer de la croissance à travers de nouveaux emprunts. Les forces de gauche mettent régulièrement en avant les chiffres du budget : le Danemark est en effet passé d'un surplus de 5% du PIB à un déficit budgétaire de 4,6%.

Le Parti social-démocrate (SD) a remporté les scrutins municipaux et régionaux du 17 novembre 2009. Au niveau municipal, il a recueilli 30,7% des suffrages devançant le Parti libéral (V) qui a obtenu 24,8% des voix. Au total, la gauche a remporté 51,2% des suffrages pour 43,9% à la droite. Les sociaux-démocrates s'étaient imposés à Copenhague, Aalborg et Odense. Au niveau régional, ils avaient remporté 3 régions (Hovedstaden, Midtjylland et Nordjylland) et le Parti libéral 2 (Sjaelland et Syddanmark).

"Le Parti libéral et le Parti conservateur se rendent aux urnes avec le désir de collaborer avec l'ensemble de la classe politique danoise" a déclaré le Premier ministre sortant Lars Lokke Rasmussen.

Selon les enquêtes d'opinion, la coalition dite rouge, qui rassemble les partis de l'opposition (Parti social-démocrate, Parti socialiste populaire (SF), Parti social-libéral (RV) et Liste de l'unité (E)), devrait remporter les élections législatives du 15 septembre. L'institut Ramboell la crédite de 53,8% des suffrages (95 députés au parlement) pour 46% à la coalition dite bleue (80 sièges) qui réunit le Parti libéral, le Parti conservateur et le Parti du peuple danois dans un sondage publié par le quotidien Jyllands-Posten.

L'écart entre les deux coalitions est tout aussi important dans l'enquête réalisée par l'institut Voxmeter et publiée par l'agence de presse Ritzau : 54,6% pour les partis de l'opposition (97 députés) et 44,6% pour les partis du gouvernement (78 sièges).

Enfin, selon le Berlingske Barometer du 6 septembre dernier, 52,4% des électeurs s'apprêteraient à voter pour la coalition rouge (92 députés) et 47,6% en faveur de la bleue (83 sièges). Les sociaux-démocrates recueilleraient 25,8% des suffrages, un résultat peu élevé (tout juste supérieur à celui qu'ils avaient recueilli lors des dernières élections législatives du 13 novembre 2007) mais qui leur permettrait de retrouver la place de 1er parti du Danemark devant les libéraux qui obtiendraient 23,7%. Le Parti du peuple danois est crédité de 12,3% des suffrages.

Si son parti est en recul dans les sondages, le Premier ministre sortant Lars Lokke Rasmussen est cependant considéré par ses compatriotes comme le leader politique le plus crédible du pays selon une enquête réalisée par l'institut Ramboell pour le quotidien Jyllands-Posten. Près de deux Danois sur dix (19,4%) appelés à désigner l'homme politique le plus crédible citent le chef du gouvernement ; 16,4% mentionnent Marghrethe Vestager, présidente du Parti social-libéral (RV), 14,2% Helle Thorning-Schmidt, présidente des sociaux-démocrates et 9,2% Pia Kjaersgaard, présidente du Parti du peuple.

"Les Danois sont fatigués d'avoir le même gouvernement depuis dix ans. Ils veulent voir autre chose. Nous avons une tradition dans le pays : les gouvernements durent dix ans. Nous allons maintenant être dirigés par les sociaux-démocrates durant quelques années" a déclaré Svenning Dalgaard, éditorialiste politique de la chaîne de télévision TV2. "Nous allons avoir un nouveau gouvernement à l'issue des élections législatives du 15 septembre prochain mais les négociations post-électorales seront difficiles entre les différents partis" a souligné Soren Risberg Thomsen, professeur de science politique à l'université Aarhus.

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