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La Plateforme civique est reconduite à l'issue des élections parlementaires polonaises

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

-

10 octobre 2011
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Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

La Plateforme civique est reconduite à l'issue des élections parlementaires polo...

PDF | 150 koEn français

La Plateforme civique (PO) du Premier ministre sortant Donald Tusk est arrivée en tête des élections parlementaires en Pologne le 9 octobre. Elle a recueilli 38,96% des suffrages et 206 sièges (- 3 par rapport au précédent scrutin du 21 octobre 2007), loin devant son principal adversaire conservateur, Droit et justice (PiS), principal parti d'opposition dirigé par Jaroslaw Kaczynski, qui a obtenu 30,03% et 157 sièges (- 9). Un nouveau parti a créé la surprise : le Mouvement Palikot (RPP), parti anticlérical fondé en juin 2011 par l'homme d'affaires Janusz Palikot, ancien membre de la Plateforme civique qu'il a quitté l'an passé, arrive en 3e position avec 9,94% et 40 sièges dans un pays où plus 90% des habitants se déclarent catholiques. Le Parti populaire (PSL) de Waldemar Pawlak, membre de la coalition gouvernementale sortante, a recueilli 8,55% et 30 sièges (- 1). Enfin, l'Alliance de la gauche démocratique (SLD) dirigée par Grzegorz Napieralski est en net recul obtenant 8,19% et 26 sièges (- 27). Rappelons qu'il y a 4 ans le parti s'était présenté avec le Parti démocrate (PD), le Parti social-démocrate (SDPL) et l'Union du travail (UP) au sein de l'alliance Gauche et démocrates (LiD). Enfin, La Pologne d'abord (Polska jest Najwazniejsza, PJN), fondée en novembre 2010 par d'anciens membres de l'aile libérale du PiS et dirigée par Pawel Kowal, a échoué à passer le seuil des 5% de suffrages obligatoires pour entrer au parlement (2,18%).

La PO a remporté 62 sièges au Sénat, le PiS 31 et le PSL 2.

Moins de la moitié des Polonais (48,63%) se sont rendus aux urnes, une participation en baisse de 5,25 points par rapport aux dernières élections parlementaires du 21 octobre 2007.

"C'est la victoire d'une Pologne optimiste. Je veux remercier tous ceux qui ont voté pour nous et tous ceux qui ne l'ont pas fait car nous aurons ensemble la responsabilité de diriger la Pologne pour quatre années supplémentaires" a déclaré le Premier ministre sortant Donald Tusk, ajoutant "Ces 4 années seront un enjeu encore plus important parce qu'il faudra travailler deux fois plus fort et agir deux fois plus rapidement. Les Polonais ont le droit de vivre mieux". "Le plus important est de préserver la Pologne d'une catastrophe politique, économique et financière, et d'achever ce qui nous avons commencé il y a quatre ans" avait averti le chef du gouvernement sortant au cours de sa campagne électorale où il avait multiplié les mises en garde contre la menace que ferait peser sur le pays une victoire du PiS.

Sans majorité absolue, le Premier ministre devra trouver des partenaires pour former une coalition gouvernementale. "Je ne pense pas que Donald Tusk approchera Janusz Palikot pour former une coalition. Si la coalition PO-PSL est trop juste, le chef du gouvernement tentera probablement de débaucher quelques députés de l'ALD" a indiqué Jacek Raciborski, chercheur en sciences politiques à l'université de Varsovie. Le PSL a affirmé être prêt à poursuivre sa collaboration avec la PO au sein du gouvernement.

La tâche sera ardue pour Donald Tusk durant les 4 années à venir. La modernisation des infrastructures a pris du retard et de nombreuses réformes (notamment celles concernant le système de santé, les finances publiques ou la simplification du système administratif pour les entreprises et les particuliers) piétinent. "La décade d'or est derrière nous et nous percevons déjà les premiers symptômes d'un ralentissement économique avec la chute des exportations et de la consommation" a indiqué Pawel Swieboda, politologue. "Nous sommes une cabane sur l'océan. Nous pouvons être submergés par les vagues de la crise. Près de 60% de nos exportations vont vers la zone euro, 80% vers l'Europe" a affirmé Ryszard Petru, économiste.

"Nous respectons les résultats des élections parlementaires mais notre tâche durant les 4 prochaines années sera de convaincre les millions de Polonais que notre pays a besoin de changements importants et qu'une autre forme de République est indispensable. Tôt ou tard, nous gagnerons parce que nous avons raison" a souligné le leader du PiS, Jaroslaw Kaczynski. "Il faudra que des choses changent au PiS car Jaroslaw Kaczynski n'arrivera pas à mobiliser son électorat au cours des 4 prochaines années sans rien lui offrir en contrepartie" a déclaré Stanislaw Mocek, politologue de l'Académie polonaise des Sciences.

"On pourrait croire que c'est un miracle mais nous ne sommes pas croyants. C'est vous qui avez créé ce miracle. C'est un énorme espoir de savoir qu'il y a en Pologne des millions de gens qui veulent un Etat laïque, civique et ouvert, dans lequel la foi reste une question privée" a déclaré Janusz Palikot. "Je veux être le nouveau messie de la gauche, celui qui va changer la politique polonaise" avait-il indiqué à l'hebdomadaire Newsweek Polska durant la campagne électorale. Homme d'affaires, Janusz Palikot a été élu député en 2005 sur les listes de la PO et réélu lors des élections parlementaires du 21 octobre 2007.

Le Mouvement Palikot (RPP) rassemble environ 30 000 adhérents. Il défend l'imposition du clergé, la libéralisation de l'interruption volontaire de grossesse et du cannabis, l'euthanasie et l'adoption d'enfants par les couples homosexuels et souhaite faire cesser les cours d'instruction religieuse dans les écoles publiques. Pro-européen et libéral, il est également favorable à un rapprochement de la Pologne avec l'Allemagne.

"Dans les années 1990, l'ensemble des partis étaient proches de l'Église. Mais la donne a changé et 20 ans ont passé. Désormais, 33% des Polonais affirment ne plus avoir confiance en l'Église, un chiffre en constante augmentation. Les Polonais en ont assez de l'instrumentalisation et de la récupération" affirme Lena Kolarska-Bobinska, députée européenne, directrice de l'institut des affaires publiques de Pologne, ajoutant "L'Église reste encore très puissante en Pologne, notamment auprès des institutions. Mais vis-à-vis des jeunes, son influence est de plus en plus faible. Le mouvement sera le même ici que dans l'ensemble des autres pays d'Europe. Le processus de sécularisation a démarré plus tardivement, il est certainement plus lent, mais la Pologne va petit à petit ressembler à ses voisins".

"Je ne serai pas un partenaire de coalition facile. Je ne participerai à aucun gouvernement qui ne sera pas disposé à entreprendre des mesures radicales comme une refonte complète du système éducatif ou une modernisation du système de gouvernement local" a déclaré Janusz Palikot.

Agé de 54 ans et originaire de Poméranie orientale (il est membre de la communauté cachoube, minorité slave de la région de Gdansk longtemps disputée entre la Pologne et l'Allemagne), Donald Tusk est diplômé d'histoire de l'université de Gdansk, où il a été durant sa jeunesse un militant actif du syndicat Solidarnosc. Membre du Congrès libéral-démocrate (KLD) puis de l'Union de la liberté (UW), il a fondé la Plateforme civique en mars 2001 avec Andrzej Olechowski et Maciej Plazynski.

Elu député en 1991, il devient vice-président de la Diète, chambre basse du parlement, de 2001 à 2005. Candidat à l'élection présidentielle du 23 octobre 2005, il recueille 45,53% et est battu par Lech Kaczynski (PiS) (54,47%). Deux ans plus tard, Donald Tusk devient Premier ministre à l'issue des élections parlementaires du 21 octobre 2007 remportées avec 41,51% des suffrages.

Son premier mandat à la tête du gouvernement a constitué une pause dans une décennie agitée par plusieurs scandales politiques et de nombreuses tensions entre les partis comme entre les hommes. Le Premier ministre est parvenu à donner de la Pologne l'image d'une nation modérée et conciliatrice, améliorant nettement les relations de son pays avec ses deux voisins allemand et russe. Donald Tusk a également pu s'enorgueillir du fait que la Pologne soit le seul pays de l'Union européenne à ne pas avoir connu de récession à la suite de la crise économique internationale qui a débuté à l'automne 2008. En 2009, Varsovie a vu son PIB croître de 1,7%. La croissance devrait encore atteindre 4%, l'an prochain. L'augmentation des salaires et le recul du chômage ont entraîné une hausse des recettes fiscales. Enfin, l'état des finances publiques est très correct comparé à celui des autres Etats européens même si les dépenses de l'Etat restent trop élevées (le déficit public a atteint 7,9% en 2010).

La Plateforme civique est donc le premier parti à être reconduit au pouvoir depuis l'effondrement du système communiste en 1989 en Pologne. Donald Tusk est le 2e chef de gouvernement (avec l'actuel président du Parlement européen, Jerzy Buzek, Premier ministre entre 1997 et 2001) à être allé au bout de son mandat de 4 ans à la tête du gouvernement. "Ce résultat témoigne du fait que la démocratie se consolide en Pologne" a déclaré Jacek Raciborski.

Source : Site internet de la Commission électorale nationale

(http://www.wybory2011.pkw.gov.pl )

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