Le chef de l'Etat sortant, Valdis Zatlers, grand favori de l'élection présidentielle du 2 juin prochain en Lettonie

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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27 mai 2011
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Le 16 mars dernier, le président de la République de Lettonie sortant Valdis Zatlers annonçait qu'il était candidat à sa succession à la tête de l'Etat. Quelques jours plus tard, le 23 mars, il a reçu le soutien du Premier ministre Valdis Dombrovskis (Unité, V). Le chef de l'Etat a consulté début mai l'ensemble des groupes parlementaires de la Saeima, chambre unique du parlement. Il est désormais soutenu pour l'élection présidentielle qui se déroulera le 2 juin prochain par le groupe majoritaire Unité (33 députés) et l'Union nationale qui regroupe Tous pour la Lettonie (VL) de Raitvis Dzintars et l'Union pour la patrie et la liberté (TB/LNNK) dirigée par Roberts Zile (7 parlementaires). Valdis Zatlers sera opposé lors de ce scrutin à Andris Berzins, président de la banque Latvijas Unibanka, nommé par 5 députés de l'Union des paysans et des Verts (ZZS), présidée par Augusts Brigmanis, qui compte au total 22 parlementaires.

La fonction présidentielle

Le chef de l'Etat letton est élu pour un mandat de 4 ans (renouvelable une fois) à la majorité absolue des 100 membres de la Saeima qui votent à bulletins secrets. Le poste est accessible à tout Letton âgé d'au moins 40 ans à condition que celui-ci ne possède aucune autre nationalité. Les candidats doivent se déclarer au plus tôt 50 jours et au plus tard 45 jours avant l'expiration du mandat du chef de l'Etat en exercice, soit cette année précisément entre le 19 et le 24 mai.

Si aucun des candidats ne recueille les 51 suffrages indispensables à son élection après deux tours, un nouveau scrutin présidentiel est organisé dans les deux semaines suivantes. Les candidats ont alors 5 jours pour se déclarer. Si de nouveau aucun d'entre eux n'obtient la majorité absolue, une nouvelle élection est organisée.

Le président letton représente l'Etat au niveau international, ratifie les traités internationaux, nomme les représentants diplomatiques du pays et accrédite les représentants diplomatiques étrangers. Il est le chef des forces armées du pays, dirige le Conseil national de sécurité et possède un droit d'amnistie.

Le président de la République peut proposer des lois ainsi qu'un référendum sur la dissolution de la Saeima. Si la majorité des électeurs se prononcent pour, le Parlement est dissout et de nouvelles élections législatives sont organisées dans les deux mois qui suivent. En revanche, si plus de la moitié des électeurs se prononcent contre la dissolution, le président de la République doit démissionner de ses fonctions et la Saeima élit son successeur pour la durée du mandat du président présidentiel restant à courir. A la demande d'au moins la moitié des députés, le chef de l'Etat peut être destitué par le Parlement lors d'une séance à huis clos à la majorité des 2/3 au moins de ses membres. Dans ce cas, la Saeima élit immédiatement un nouveau président de la République.

La campagne électorale

Le 26 avril dernier, le président sortant Valdis Zatlers a prononcé à l'université de Lettonie une intervention intitulée "Un Etat stratège et intelligent, une vision de l'avenir de la Lettonie", conférence faisant partie du cycle des discours présidentiels.

Le chef de l'Etat a fixé au pays 4 objectifs pour les 4 années à venir : la mise en place de réformes structurelles, une amélioration de l'emploi et du climat des affaires, le développement des régions et la préparation à l'adoption de l'Euro comme monnaie.

"Il faut réduire les barrières administratives à l'égard des investissements. La simplification des procédures administratives réduirait également les risques de corruption" a souligné Valdis Zatlers qui a déclaré qu'il souhaitait créer une nouvelle institution, le Conseil de la discipline fiscale. Sur le plan institutionnel, il a exprimé le souhait de voir la Constitution amendée de façon à ce que le Parlement puisse voter contre le gouvernement en place, sous réserve cependant de proposer un nouveau gouvernement.

Le chef de l'Etat sortant a fait part de sa volonté d'étendre la double nationalité (pour les ressortissants de pays alliés de la Lettonie, membres de l'OTAN, de l'Union européenne ou de l'Association européenne de libre-échange (AELE)) et d'accorder la nationalité lettone à tout enfant né après le 21 août 1991, jour de l'indépendance retrouvée du pays. La double nationalité est interdite en Lettonie depuis 1995. "Les intérêts du pays ne doivent pas être liés à des intérêts ethniques" a déclaré Valdis Zatlers, faisant implicitement référence aux inquiétudes toujours présentes et toujours justifiées d'interférences russes dans la vie politique nationale.

"Je vois la démographie comme un enjeu majeur" a enfin déclaré le président de la République qui a déploré la réduction du nombre de naissances, le vieillissement de la population et l'émigration des Lettons.

Les anciens présidents de la République Guntis Ulmanis (1993-1999) et Vaira Vike-Freiberga (1999-2007) ont apporté leur soutien au chef de l'Etat sortant. "Quelqu'un qui possède une expérience de 4 ans a bien entendu de façon évidente un avantage sur tout autre candidat" a déclaré Vaira Vike-Freiberga. "Ma conviction est que le président de la République sortant est la bonne personne à la bonne place et je voterai pour lui à la prochaine élection" a affirmé Guntis Ulmanis, membre de Pour une bonne Lettonie qui rassemble le Parti populaire (TP) et Premier de Lettonie-Voie lettone (LPP-LC).

L'expérience est également la qualité mise en valeur par la députée européenne Sandra Kalniete (V), ancien Commissaire européen et ancien ministre des Affaires étrangères, qui s'est prononcée en faveur du chef de l'Etat sortant. "Si Valdis Zatlers remporte le scrutin, il devra travailler activement à modifier la Constitution pour que la Lettonie rejoigne les rangs des démocraties où le président de la République est élu par le peuple" a-t-elle déclaré.

Le leader de Tous pour la Lettonie/Union pour la patrie et la liberté, Roberts Zile, a expliqué le 12 mai dernier son soutien à Valdis Zatlers par son désir d'éviter toute instabilité politique dans le pays et sa volonté de ne pas laisser le Centre de l'harmonie (principal parti d'opposition dirigé par Janis Urbanovics et rassemblant 29 députés) accroître son influence. Ce parti a déclaré qu'il soutiendrait le 2 juin prochain le candidat qui lui "garantirait une place au gouvernement".

Nommé par 5 députés de l'Union des paysans et des Verts, Andris Berzins pourrait cependant ne pas recueillir les voix de l'ensemble des parlementaires de ce parti. En effet, en l'absence d'unanimité sur son nom au sein du groupe, les députés de l'Union des paysans et des Verts sont autorisés à voter pour le candidat de leur choix.

Le serpent de mer de l'élection présidentielle au suffrage universel

Le président sortant Valdis Zatlers s'est déclaré favorable à l'élection du président de la République au suffrage universel direct et a exprimé le souhait qu'une discussion soit engagée sur ce sujet. Selon lui, le vote du peuple rendrait le scrutin plus transparent et plus juste. Le Premier ministre Valdis Dombrovskis a également tenu des propos allant dans ce sens. Selon les enquêtes d'opinion, plus de 3/4 des Lettons (77%) sont favorables à l'élection du chef de l'Etat au suffrage universel direct.

L'ancien président de la Cour constitutionnelle Aivars Endzins a souligné que la désignation du président de la République par la population ne résoudrait pas tous les problèmes de la Lettonie. Ivars Ijabs, professeur de science politique de l'université de Lettonie, a mis en garde sur le danger que comporterait un tel changement. Selon lui, la société civile serait trop faible pour s'opposer à une éventuelle utilisation autoritaire du pouvoir par le président de la République.

Solvita Aboltina (V), présidente de la Saeima, a proposé d'augmenter le nombre de suffrages de parlementaires nécessaires pour être élu à la magistrature suprême et de créer un conseil public qui évaluerait les candidats au scrutin présidentiel. Elle a cité l'exemple de Rolandas Paksas (ancien président de la République de Lituanie destitué le 6 avril 2004 de sa fonction par le parlement après avoir été reconnu coupable d'avoir violé la Constitution et les secrets d'Etat du pays et d'avoir été soutenu par des groupes d'intérêt russes) pour montrer que l'élection au suffrage universel direct possède plus d'inconvénients que d'avantages. Enfin, le président sortant Valdis Zalters a suggéré d'augmenter le délai entre la nomination des candidats et l'élection de façon à ce que les Lettons puissent mieux connaître et évaluer les personnes en lice. Selon une enquête d'opinion réalisée par TNS Latvia, plus de 3/4 des Lettons (79%) considèrent la sélection des candidats à la magistrature suprême non transparente et peu compréhensible.

Selon un sondage réalisé par l'institut TNS Latvia et la chaîne de télévision LNT, la moitié des Lettons (49%) seraient opposés à une nouvelle candidature du chef de l'Etat sortant Valdis Zatlers à la tête de l'Etat. Interrogés sur les personnalités qu'ils aimeraient voir concourir au scrutin présidentiel, 27,4% des personnes interrogées ont cité le maire de Ventspils, Aivars Lembergs (ZZS). Le président de la République sortant arrive cependant en 2e position (24,9%).Vaira Vike-Freiberga est mentionnée par 19,3% des personnes interrogées.

Les deux candidats Valdis Zatlers et Andris Berzins ont participé le 25 mai à un débat télévisé dans l'émission Que se passe t-il en Lettonie ? animée par le journaliste Janis Domburs. Pour répondre au désir exprimé par le Centre de l'harmonie de trouver une place au gouvernement, le chef de l'Etat sortant a déclaré que le parti devrait en effet se voir confier des responsabilités de façon à ce qu'il réalise les difficultés de la tâche gouvernementale. Andris Berzins a souligné que le parti devait tout d'abord parvenir à un accord avec les autres partis politiques.

Selon le politologue Ivars Ijabs, un 2e tour pourrait être nécessaire pour l'élection du président de la République.

La décision du Président de la République sortant le 28 mai de dissoudre le parlement et d'organiser un référendum pour cela a plongé le pays en pleine crise politique.

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