Zoran Milanovic, chef de l’État sortant, a échoué de peu à remporter l’élection présidentielle dès le 1er tour de scrutin le 29 décembre en Croatie. Donné gagnant en début de soirée, il a finalement recueilli 49,09% des suffrages et devra donc affronter au 2e tour le 12 janvier Dragan Primorac, (indépendant), soutenu par l’Union démocratique croate (HDZ) du Premier ministre Andrej Plenkovic, le Mouvement patriotique (DP), le Parti croate des retraités (HSU), le Parti chrétien démocrate (HDS), le Parti social-libéral (HSLS), le Parti populaire/libéraux-démocrates (HNS-LD) et les Indépendants, qui a obtenu 19,35% des voix.
Le résultat de Zoran Milanovic, soutenu par le Parti social-démocrate (SDP), le Parti paysan (HSS), le Parti populaire-Réformistes (NS-R), la Plateforme indépendante du nord (NPS), le Bloc des retraités (BUZ), Dalija Oreskovic et les gens qui ont un prénom et un nom (DO i SIP), l’Alliance civique libérale (GLAS), l’Alliance démocratique de Medimurje (MDS) le Parti des retraités (SU) et le Parti du centre (Centar), constitue une surprise même si les enquêtes d’opinion le donnaient devant ses adversaires. Le dernier sondage publié le 27 décembre le créditait « seulement » de 37% des suffrages. 
Depuis que la Croatie a recouvré son indépendance en 1991, seul Franjo Tudjman (HDZ), considéré comme le père de l’indépendance, a réussi à remporter l’élection présidentielle dès le 1er tour, à deux reprises, en 1992 et en 1997.

Les députées Marija Selak Raspudic (indépendante) et Ivana Kekin (Nous pouvons ! Mozemo !) ont pris respectivement les 3e et 4e places avec 9,25% et 8,89% des suffrages. Chacun des 4 autres candidats a obtenu moins de 6% des voix.

La participation a été faible : 46,03%, soit -5,15 points par rapport au 1er tour de la précédente élection présidentielle du 22 décembre 2019. Cette importante abstention s’explique sans doute en partie par la date du scrutin, organisé entre Noël et le Nouvel an, époque où de nombreuses personnes sont en vacances. Ce scrutin conclut une super année électorale pour les Croates qui ont renouvelé les 151 sièges du Sabor, chambre unique du Parlement le 17 avril dernier et un mois et demi plus tard, leurs 12 représentants au parlement européen de Strasbourg.

Résultats du 1er tour de l’élection présidentielle du 29 décembre 2024
Participation : 46,03%

Source : https://www.izbori.hr/pre2024/rezultati/1/ 

« Il y a 2 manches, inévitablement. Pour la 1ère, il faut bien affûter les skis. Pour la 2e (...), il faut juste descendre avec assurance, et je crois que ce sera bon. Aujourd’hui, c’était la 1ère manche (…) Ne soyons pas triomphalistes, soyons réalistes (…) mais je suis convaincu que nous nous dirigeons vers la victoire » a déclaré Zoran Milanovic à l’annonce des résultats.
« A première vue, la différence (entre mon résultat et celui de Zoran Milanovic) est grande (...) mais elle représente un défi pour moi (...) Notre patrie ne peut plus supporter la division et la marginalisation dans le monde » a affirmé Dragan Primorac, ajoutant « Cette élection montrera si la Croatie se tourne vers l'Est ou l'Occident (...), vers les divisions ou vers l'unité ».

Le résultat du 1er tour constitue un revers important pour le Premier ministre Andrej Plenkovic. Zoran Milanovic et le chef du gouvernement entretiennent des relations houleuses et cette élection présidentielle constitue une bataille de plus entre les 2 hommes qui dirigent la Croatie. « Il s'agit toujours du conflit entre le Premier ministre et le président de la République. Tout le reste n'est qu'accessoire » a déclaré Zarko Puhovski, ancien professeur de philosophie politique et analyste politique.
Zoran Milanovic accuse Andrej Plenkovic et son parti de corruption et il a affirmé qu’il constituait une « menace sérieuse pour la démocratie ». Le Premier ministre reproche au chef de l’État d’être opposé au soutien de la Croatie à l’Ukraine et à la participation des soldats croates à la mission de formation des soldats ukrainiens dirigée par l'OTAN. Il a affirmé que Zoran Milanovic se comportait « de façon dictatoriale et pharaonique », qu’il faisait le jeu de la Russie, qu’il détruisait la crédibilité de Zagreb auprès de l'OTAN et de l'Union européenne, qu’il compromettait la sécurité nationale et qu’il déstabilisait le pays.
Zoran Milanovic, qui plaide pour la neutralité de la Croatie dans le conflit qui oppose Kiev à Moscou, s'est en effet opposé à plusieurs reprises à l'envoi d'armes en Ukraine. Il affirme travailler à empêcher que son pays soit entraîné dans la guerre en Ukraine. « Tant que je suis président de la République, aucun soldat croate n’ira faire les guerres des autres » a-t-il déclaré. La Croatie a tout de même fourni à ce pays une aide, en partie militaire, à hauteur de 300 millions €. « La différence entre Zoran Milanovic et Dragan Primorac est relativement simple : l’un nous conduit vers l’Est et le second vers l’Ouest » répète Andrej Plenkovic.

Zoran Milanovic a adopté au cours des années un discours de plus en plus populiste vilipendant les minorités, les associations féministes, les membres du gouvernement, l'Union européenne, l'OTAN, ce qui lui a valu le surnom de « Trump des Balkans ». « Il a été Premier ministre et s'agissant de sa gouvernance, nous remarquons un glissement à droite, une tendance populiste, en vue de représenter la totalité des électeurs, donc les citoyens qui ont une orientation politique plus à droite, ce qu’il pense être sa fonction de président de la République » a analysé Andjelko Milardovic, chercheur à l’Institut des migrations et des études ethniques de Zagreb. S'il est reconduit à son poste à la présidence de la République, « Zoran Milanovic se limitera à un rôle passif sur la scène nationale mais il pourrait être plus actif pour ralentir le gouvernement dans sa politique d'aide à l'Ukraine et de collaboration avec l'OTAN » a-t-il souligné.