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Andris Berzins remplace Valdis Zatlers à la présidence de la République de Lettonie

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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6 juin 2011
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Andris Berzins (Union des paysans et des Verts, ZZS) est devenu le 2 juin le nouveau président de la République de Lettonie. L'ancien président de la banque Latvijas Unibanka a recueilli les suffrages de 53 des 100 membres de la Saeima, chambre unique du parlement. Son adversaire, le président sortant Valdis Zatlers, soutenu par la coalition gouvernementale du Premier ministre Valdis Dombrovskis, Unité (V), a obtenu 41 voix.

Lors du 1er tour de scrutin, Andris Berzins avait recueilli 50 suffrages et le président sortant Valdis Zatlers, 43 voix. Un député était absent du parlement pour ce vote.

Le coup de tonnerre de la décision de Valdis Zatlers

Ce résultat constitue indéniablement une défaite pour la coalition du chef du gouvernement Valdis Dombrovskis, Unité, qui rassemble Nouvelle ère, dirigée par Solvita Aboltina, l'Union civique, présidée par Girts Valdis Kristovskis, et la Société pour une autre politique (SCP), conduite par Aigars Stokenbergs. L'Union nationale, coalition qui regroupe Tous pour la Lettonie (VL) de Ratvis Dzintars et l'Union pour la patrie et la liberté (TB/LNNK) dirigée par Roberts Zile, avait également apporté son soutien au président sortant.

Le résultat du scrutin s'explique en grande partie par le coup de tonnerre qu'a suscité la décision de Valdis Zatlers, alors grand favori de l'élection présidentielle, de dissoudre le parlement 5 jours avant le vote. Une partie des membres du parlement se sont alors détournés du chef de l'Etat qui avait d'ailleurs indiqué être conscient des conséquences que sa décision pouvait avoir sur ses chances d'être réélu à son poste.

Le 28 mai dernier, le président sortant était intervenu sur la chaîne de télévision LNT pour faire part à ses compatriotes de sa décision, autorisée par l'article 48 de la Constitution, de dissoudre la Saiema. "Je veux donner l'espoir de changer les choses. Nous devons mettre un point final à des comportements qui vont contre les intérêts de notre peuple et de notre pays. C'est la raison pour laquelle je voulais vous dire que j'ai signé le décret présidentiel demandant la dissolution du parlement et soumis celui-ci à la Cour constitutionnelle. Le décret prend effet immédiatement" avait déclaré le chef de l'Etat.

Valdis Zatlers justifiait son geste par le refus, le 26 mai, des parlementaires de lever l'immunité d'un député, Ainars Slesers, leader de Premier de Lettonie-Voie lettone (LPP-LC) et vice-maire de Riga (et président du port de commerce de la ville), soupçonné de versement et d'acquisition de pots-de-vin, de blanchiment d'argent, de fausses déclarations et d'abus de pouvoir. Le vote des parlementaires a empêché le parquet d'effectuer une perquisition à son domicile. Plusieurs entreprises, parmi lesquelles le port commercial de Riga et Euroline, avaient déjà été perquisitionnées. Ainars Slesers dément cependant que ces sociétés, qui n'apparaissent pas dans sa déclaration d'impôt, lui appartiennent et affirment qu'elles sont la propriété de son partenaire en affaires, Viesturs Koziols.

Le 20 mai dernier, le Bureau anti-corruption (KNAB) a ouvert une enquête sur des allégations de blanchiment d'argent, corruption, transactions frauduleuses, abus de pouvoir et fausses déclarations mettant en cause plusieurs hommes politiques. Lors d'une perquisition menée au domicile d'Aivars Lembergs, maire de Ventspils depuis 1988 et poursuivi par la justice depuis de nombreuses années pour corruption et blanchiment d'argent, les forces de police ont saisi des documents concernant l'ancien Premier ministre (1995-1997 et 1999-2000) et leader du Parti populaire (TP), Andris Skele, et l'ancien ministre Ainars Slesers. Les partis de ces 2 hommes se sont unis le 26 avril 2010 au sein d'un mouvement, Pour une bonne Lettonie.

"Le vote de la Saiema résonne comme une alarme qui révèle un conflit sérieux entre le pouvoir législatif et l'autorité judiciaire, deux des trois pouvoirs sur lesquels notre pays est fondé" a affirmé le président sortant Valdis Zatlers qui a précisé que ce n'était pas la première fois que la Saeima faisait fi du système judiciaire, faisant allusion au fait que les parlementaires se sont opposés en avril 2010 à la réélection de Janis Maizitis au poste de procureur général. "Le parlement a manqué de respect et fait preuve de méfiance à l'égard de la compétence des autorités judiciaires et a davantage défendu les intérêts d'un groupe restreint de personnes que ceux de l'Etat. Les Lettons ont fait des sacrifices, était-ce pour autoriser le vol de l'Etat ? Les hommes politiques doivent conclure une nouvelle entente avec le peuple afin d'agir dans l'intérêt public" a ajouté le chef de l'Etat.

La coalition Unité du Premier ministre Valdis Dombrovskis avait voté le 26 mai en faveur de la levée de l'immunité parlementaire d'Ainars Slesers tandis que son partenaire au sein du gouvernement, l'Union des paysans et des Verts, dont Aivars Lembergs, également soupçonné, est une personnalité centrale, s'y était opposé. Le chef du gouvernement Valdis Dombrovskis a assuré avoir eu une conversation sérieuse avec ses alliés qu'il a accusé d'avoir tout entrepris pour que la loi sur le financement des partis politiques ne soit pas votée. "Nous avons atteint un certain seuil et la coalition gouvernementale pourrait ne pas survivre à un vote similaire. Ceci est un carton jaune et deux cartons jaunes équivalent à un carton rouge" a indiqué le Premier ministre aux députés de l'Union des paysans et des Verts.

Pour être effective, la dissolution souhaitée par le président sortant Valdis Zatlers devra être confirmée par un référendum populaire. Celui-ci a été fixé au 23 juillet prochain. Les Lettons devront répondre à la question suivante : "Etes vous pour ou contre la dissolution du parlement ?". S'ils répondent "oui", un scrutin législatif sera organisé dans les 2 mois suivants la consultation populaire pour élire un nouveau parlement. Dans le cas contraire, le chef de l'Etat devra démissionner et la Saeima restera en place. Aucun quorum de participation minimum n'est exigé pour valider le résultat du référendum qui sera décidé à la majorité simple des suffrages.

Qui est le nouveau président de la République ?

Agé de 67 ans, Andris Berzins est originaire de Nitaure, ville située dans la province de Vidzeme. Il est diplômé en ingénierie de l'Institut polytechnique de Riga et en économie de l'université de Lettonie. En 1990, il est élu au Conseil suprême où il est membre du groupe du Front populaire et où il vote en faveur de la restauration de l'indépendance de la Lettonie le 4 mai. Andris Berzins est nommé président de la banque Latvijas Unibanka en 1993, poste qu'il conservera jusqu'en 2004, année où l'établissement sera racheté par la banque suédoise SEB. De décembre 2006 à avril 2009, il préside le conseil de la compagnie nationale d'électricité Latvenergo. Elu au conseil municipal de Riga sur la liste de l'Union des paysans et des Verts (dont il n'est pas encore membre à l'époque) lors des élections locales du 13 mars 2005, Andris Berzins est entré à la Saeima à l'occasion du scrutin législatif du 2 octobre 2010.

Premier président de la République à utiliser son pouvoir de dissolution du parlement, Valdis Zatlers est devenu un héros aux yeux de certains en décidant de convoquer un référendum sur ce sujet. D'autres en revanche regrettent que le chef de l'Etat ait pris le risque de plonger dans une crise politique un pays qui retrouve difficilement le chemin de la croissance après avoir été fortement ébranlé par une violente crise économique.

Andris Berzins prendra ses fonctions le 8 juillet prochain. Sa première tâche devrait être d'organiser le référendum du 23 juillet sur la dissolution de la Saeima.

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