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Elections législatives en Croatie 23 novembre 2003

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

-

23 novembre 2003
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Le 17 octobre dernier, le Parlement prononçait son autodissolution.

Le 20 octobre, le Président de la République Stepjan Mesic, élu le 7 février 2000 à la tête de l'Etat, annonçait la tenue d'élections législatives pour le 23 novembre prochain.

Une enquête d'opinion réalisée en octobre par l'institut Globus révèle que 60,90% des Croates se déclarent insatisfaits du travail des parlementaires durant la dernière législature (janvier 2000-octobre 2003), pour seulement 27,30% de satisfaits.

Le système politique croate

Le Sabor, Parlement croate, ne comprend qu'une seule Chambre. La Chambre des comitats, ancienne Chambre haute qui comptait soixante-huit membres, soit trois par région élus au suffrage universel et cinq membres désignés par le Président de la République, a été supprimée par la réforme du 28 février 2001. Le Sabor compte cent cinquante et un députés, élus pour quatre ans au scrutin proportionnel. Chaque liste doit obtenir au minimum 5% des suffrages pour être représentée au Parlement. Dans le Parlement actuel, cent quarante députés représentent les Croates (le pays est divisé en dix circonscriptions élisant chacune quatorze députés), cinq députés les minorités nationales (un Serbe, un Hongrois, un Tchèque ou Slovaque et un député représentant les autres minorités). Lors des prochaines élections, le nombre des représentants des minorités passera de cinq à huit (la minorité serbe aura trois représentants). Enfin, six députés représentent les Croates de l'étranger (leur nombre est dépendant du nombre de votants). Lors des élections législatives du 3 janvier 2000, 126 000 Croates de l'étranger, dont 109 000 de Bosnie-Herzégovine, se sont rendus aux urnes.

Treize formations politiques sont représentées au Sabor :

le Parti social-démocrate (SDP), formation du Premier ministre Ivica Racan, majoritaire en sièges (quarante-cinq) ;

l'Union démocratique (HDZ), formation de l'ancien Président de la République Franjo Tudjman ;

le Parti social libéral (HSLS) ; ancien membre de la coalition majoritaire et aujourd'hui formation d'opposition ;

le Parti paysan (HSS), dont est issu le président du parlement, Zlatko Tomcic ;

le Parti démocrate d'Istrie (IDS), formation régionaliste ;

le Parti du droit (HSP), formation d'opposition ;

le Centre démocrate (DC), parti d'opposition ;

le Parti populaire (HNS), formation de l'actuel Président de la République Stepjan Mesic ;

le Parti libéral (LS), formation appartenant à la coalition gouvernementale ;

le Parti du Primorje et du Gorski Kotar (PGS), formation régionaliste ;

l'Union démocrate chrétienne (HKDU), formation d'opposition ;

le Parti de Slavonie-Baranya (SBHS), formation régionaliste ;

les Démocrates indépendants (HND), formation d'opposition.

Les enjeux des élections législatives

La campagne électorale devrait se concentrer en grande partie sur le thème de l'intégration de la Croatie à l'Union européenne, soutenue par 85% de la population selon les dernières enquêtes d'opinion et actuelle priorité du pays en matière de politique extérieure. Le Premier ministre Ivica Racan a remis la demande officielle d'adhésion de son pays à l'Union européenne le 21 février dernier. Depuis l'arrivée d'une nouvelle majorité au parlement en janvier 2000, le gouvernement tente de rattraper son retard par rapport aux critères européens. Le pays a signé en octobre 2001 un accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne, première étape d'une adhésion future. Cependant, les démarches de la Croatie sont mises à mal par les accusations portées contre elle de refus de coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de La Haye. Le Tribunal et plusieurs Etats membres de l'Union européenne lui reprochent en effet de faire preuve d'un grand manque de volonté pour arrêter le général Ante Gotovina, recherché par le Tribunal et en fuite depuis deux ans. Ainsi, début octobre, dans son dernier rapport devant le Conseil de sécurité des Nations Unies, le procureur général du Tribunal pénal international, Carla Del Ponte, a expressément reproché à la Croatie de ne pas avoir arrêté le général Gotovina, déclarant qu'elle considérait les autorités croates « responsables de l'absence d'arrestation et de transfert du général vers La Haye ». Le Sabor a pris le 17 octobre, juste avant son autodissolution, une décision controversée qui pourrait contraindre le gouvernement à fournir des documents aux avocats d'Ante Gotovina. Cette mesure a provoqué la colère du vice Premier ministre Goran Granic, qui a aussitôt présenté sa démission de chef du bureau chargé de la coopération avec le Tribunal pénal international de La Haye. Le TPI a qualifié la décision du Parlement croate d'illégale, les documents étant généralement remis aux avocats des inculpés lors de la présentation de ces derniers devant le Tribunal.

Mais si l'adhésion à l'Union européenne constituera l'un des principaux thèmes de la campagne électorale, c'est l'éventuel retour au pouvoir de l'Union démocratique (HDZ) qui sera le grand enjeu des élections législatives du 23 novembre. Le HDZ, formation politique de droite, a en effet gouverné le pays depuis l'indépendance (25 juin 1991) et pourrait, après une éclipse de quatre ans, faire son grand retour à la tête de l'Etat. L'actuelle coalition au pouvoir, qui rassemble cinq formations politiques (le Parti social-démocrate, SPD, le Parti social libéral, HSLS, le Parti paysan, HSS, le Parti libéral, LS, et le Parti populaire, HNS – le Parti démocratique d'Istrie, IDS, insatisfait du statut de l'Istrie, principale presqu'île de la mer Adriatique, a quitté la coalition en juin 2001), affiche désormais sa désunion. La mauvaise entente entre le Parti social-démocrate et le Parti paysan à propos de la coopération avec les Etats voisins de l'ancienne Yougoslavie et des droits territoriaux sur la mer Adriatique entre la Croatie et la Slovénie devrait empêcher les actuels partenaires de la majorité gouvernementale de se présenter unis devant les électeurs. En revanche, l'Union démocratique (HDZ) devrait faire alliance avec deux formations de l'actuelle opposition, le Parti social libéral (HSLS) et les Démocrates centristes (DC) qui viennent de se regrouper. Cette récente coalition, obtenue après de longs efforts, pourrait permettre aux deux formations de passer la barre des 5% de suffrages nécessaires pour être représentées au Sabor et, en cas de victoire, d'aider l'Union démocratique à former un gouvernement. Les analystes politiques prévoient pour ces élections législatives une forte abstention, de l'ordre de 35%, qui devrait principalement handicaper les formations de gauche.

Selon les dernières enquêtes d'opinion, l'Union démocratique recueillerait 28% des suffrages, pour 18% seulement au Parti social-démocrate. Le Parti paysan obtiendrait 11% des voix, l'ensemble des autres formations se situant en dessous de la barre des 10%. A la faveur d'une faible participation, l'Union démocratique, battue lors des dernières élections législatives du 3 janvier 2000, pourrait prendre sa revanche et retrouver le pouvoir lors du scrutin du 23 novembre.

Rappel des résultats des élections législatives du 3 janvier 2000:

Participation : 69,3%

Source : Ambassade de Croatie en France

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