Elections législatives en Autriche, Le point à une semaine du scrutin

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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22 septembre 2008
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Plus de 6 millions d'Autrichiens sont appelés à renouveler le 28 septembre prochain les 183 membres du Conseil national (Nationalrat), Chambre basse de leur Parlement. Ces élections législatives sont anticipées de 2 ans, la coalition gouvernementale formée par le Parti social-démocrate (SPÖ) et le Parti populaire (ÖVP) ayant éclaté le 7 juillet dernier, après plusieurs mois de tensions et de querelles incessantes.

Le président de la République, Heinz Fischer, a demandé que le prochain gouvernement soit rapidement formé après les élections législatives (la constitution du précédent avait pris 99 jours) et a tenu à rappeler le soutien de l'Autriche à l'Union européenne. "L'Europe, ce n'est pas les autres, l'Europe, c'est nous" a-t-il déclaré. Le vice-Chancelier et leader du Parti populaire, Wilhelm Molterer (ÖVP), a également loué la mondialisation et "l'unité de l'Europe", affirmant que l'Autriche avait bénéficié des deux phénomènes : "De nombreuses questions importantes, comme les problèmes énergétiques et le réchauffement climatique, ne peuvent être résolues qu'au niveau européen. L'Union européenne nous offre de multiples solutions et nous devons absolument rendre cela visible aux Autrichiens".

Il y a quelques jours, le Parti libéral (FPÖ) a déposé au Conseil national un projet de loi pour que toute future modification des traités européens qui toucherait aux intérêts autrichiens soit décidée par référendum. Cette initiative, soutenue par le SPÖ et l'Alliance pour l'avenir de l'Autriche (BZÖ), rappelle le souhait exprimé par le Chancelier sortant Alfred Gusenbauer (SPÖ) et le leader du SPÖ, Werner Fayman, dans une lettre ouverte publiée le 26 juin dernier dans le quotidien Kronen Zeitung. Ce projet sera soumis au vote des députés le 24 septembre.

Opposés sur la scène électorale, les 2 partis d'extrême droite (BZÖ et FPÖ) partagent une hostilité envers l'Union européenne. "Durant les dernières années, nous avons perdu beaucoup de nos compétences nationales au profit de Bruxelles. Cela a provoqué une réaction négative parmi nos concitoyens. Par exemple, avec le traité de Lisbonne, nous perdons notre pouvoir en matière de justice, de droit d'asile, etc." affirme le leader du BZÖ, Jörg Haider, ajoutant "nous voulons un référendum parce que nous pensons que le peuple doit être consulté sur les changements fondamentaux qui sont apportés dans nos relations avec Bruxelles et avec les autres Etats membres de l'Union européenne".

Les 3 partis (SPÖ, FPÖ et BZÖ) qui regroupent 96 des 183 sièges du Nationalrat ne devraient pas atteindre la majorité des 2/3 indispensable pour toute modification de la Constitution. Comme elle l'avait fait précédemment, la ministre des Affaires étrangères Ursula Plassnik (ÖVP) a vivement critiqué ce projet de loi.

Le 26 août dernier, 800 000 personnes ont regardé le débat télévisé entre Werner Faymann (SPÖ) et Alexandre van der Bellem, leader des Verts. Au cours de l'émission, ce dernier a exclu toute participation de son parti à une coalition gouvernementale incluant le BZÖ de Jörg Haider. Il n'a pas non plus indiqué avec lequel des 2 "grands" partis (SPÖ ou ÖVP) il préfèrerait coopérer, indiquant cependant qu'il souhaitait voir l'ÖVP adopter un discours plus mesuré sur l'immigration et qu'il n'appréciait pas le nouveau discours du SPÖ sur l'Europe. Les Verts se sont fixés pour objectif de recueillir 15% des suffrages le 28 septembre.

Le 2 septembre, Wilhelm Molterer (ÖVP) et Heinz-Christian Strache, leader du FPÖ, se sont, à leur tour, affrontés à la télévision. Le leader d'extrême droite a reproché au vice-Chancelier sa politique sociale et affirmé que le recours à l'immigration, rendu nécessaire par la baisse de la natalité, n'était que la conséquence de cette politique. Wilhelm Molterer a tenu à rappeler que les étrangers en règle étaient les bienvenus en Autriche.

Selon les analystes politiques, à cause de la courte durée de la campagne, les débats télévisés entre les différents candidats pourraient peser plus lourd dans ce scrutin qu'ils ne l'ont fait pour les précédents.

Un débat agite la classe politique à la veille du scrutin : l'avenir de la compagnie nationale d'aviation, Austrian Airlines. Le leader de Citoyens pour l'Autriche, Fritz Dinkhauser, s'est emparé de la question et n'a pas hésité à qualifier la privatisation d'Austrian Airlines de "crime contre le peuple autrichien". Le leader populiste affirme que le pays perdra son indépendance et deviendra une filiale de l'Allemagne si elle cède sa compagnie aérienne.

La dernière enquête d'opinion, réalisée par la Société de marketing et de communication et publiée le 10 septembre dernier, crédite le SPÖ de 30% des suffrages, contre 27% pour l'ÖVP. Les 2 "grands" partis sont suivis de Citoyens pour l'Autriche (19%), du FPÖ (18%), des Verts (11%) et du BZÖ (6%). Le Forum libéral (LIF) ne parviendrait pas à passer le seuil des 4% obligatoires pour être représenté au Nationalrat.

Werner Faymann (SPÖ) est également préféré à Wilhelm Molterer (ÖVP) pour occuper le poste de Chancelier. Selon une enquête d'opinion réalisée par l'institut OGM pour le magazine Profil, 24% des Autrichiens souhaiteraient voir la prochaine coalition gouvernementale dirigée par le leader du SPÖ, contre 17% à Wilhelm Molterer. L'institut Gallup confirme ce résultat en indiquant que selon le sondage qu'elle a effectué pour Österreich, 45% des personnes interrogées aimeraient que Werner Faymann dirige le prochain gouvernement, contre 28% qui lui préfèrent Wilhelm Molterer.

Le Parti social-démocrate (SPÖ) reste pourtant sur deux revers importants enregistrés lors des élections régionales qui se sont déroulées depuis son retour au pouvoir au niveau fédéral. En effet, le 9 mars dernier, il a recueilli 25,6% des voix dans le Land de Basse-Autriche, soit son résultat le plus faible à des élections régionales. Pour la première fois, le SPÖ est tombé en-dessous des 30% de suffrages. Trois mois plus tard, le 8 juin, il a chuté de 10,44 points en obtenant 15,46% des voix, devancé par la liste Forum des citoyens du Tyrol emmenée par Fritz Dinkhauser, qui a largement bénéficié du discrédit des 2 "grands" partis et recueilli 18,35% des voix.

A une semaine du scrutin, une part importante des électeurs (1/3) se déclarent encore indécis. Au vu du nombre des partis en lice pour ce scrutin législatif (10, un record dans l'histoire autrichienne) et du résultat des dernières élections du 1er octobre 2006 qui avaient vu le SPÖ s'imposer à la surprise générale devant l'ÖVP pourtant donné grand favori, l'issue du scrutin du 28 septembre reste encore très incertaine.

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