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Elections législatives entachées de fraudes massives en Biélorussie.

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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3 octobre 2008
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Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Fondation Robert Schuman

Les élections législatives organisées le 28 septembre en Biélorussie et dont l'Union européenne et les Etats-Unis avaient fait un test sur la volonté d'ouverture du Président Alexandre Loukachenko n'ont pas tenu leurs promesses. Le scrutin a été entaché par des fraudes massives : pressions sur les électeurs, refus d'informer les observateurs, manque de sécurisation des urnes. Un quart des électeurs (26%) avaient choisi de voter par anticipation, ce qui semble avoir ouvert la voie à de multiples manipulations. La participation à ce scrutin s'est élevée à 75,3%, mais seulement 62% à Minsk. 70,82% des Biélorusses de l'étranger ont rempli leur devoir citoyen dans 40 bureaux de vote disséminés à travers 31 pays.

Les partis d'opposition n'ont remporté aucun siège. Selon les chiffres officiels, leurs candidats auraient recueilli moins de 1% des suffrages ! Les forces de l'opposition soutiennent cependant qu'elles ont remporté environ 30 sièges à la Chambre des représentants (Palata pretsaviteley), Chambre basse du Parlement.

"Malgré quelques améliorations mineures (accès légèrement accru de l'opposition aux commissions électorales, plus grandes facilités pour tenir des réunions publiques et octroi de 5 minutes d'antenne ( !) à la télévision à une heure de grande écoute pour les candidats), ces élections législatives ne remplissent pas les critères de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour des élections démocratiques. Le scrutin a eu lieu dans un environnement strictement contrôlé, avec une campagne à peine visible. Si le vote s'est généralement bien déroulé, le processus s'est considérablement détérioré pendant le comptage des suffrages. Les promesses d'assurer la transparence du comptage n'ont pas été remplies" indique le rapport de l'OSCE qui avait envoyé 477 observateurs pour le scrutin.

Selon les autorités, environ 500 personnes (2000 selon le site Internet d'un parti d'opposition) se sont rassemblées juste après la fermeture des bureaux de vote sur la Place d'Octobre à Minsk pour dénoncer la "farce électorale" qu'ont été ces élections législatives "Alexandre Loukachenko, dernier dictateur d'Europe", "Les dictateurs à la poubelle de l'histoire", "Nous voulons vivre dans une Europe libre" pouvait-on lire sur les banderoles brandies par les manifestants qui portaient également des drapeaux de l'Union européenne. Ceux-ci se sont ensuite rendus près des bâtiments du KGB sur la Place Lénine en criant le slogan "Honte".

"Nous ne pouvons pas dire que l'opposition a perdu les élections puisqu'il n'y a pas eu d'élections" a déclaré Valentina Svyatskaya, membre du plus vieux parti d'opposition, le Front populaire, à l'issue de l'annonce des résultats. "Le scrutin a été inéquitable et illégitime" a déclaré le leader du Parti civique uni, Anatoli Liabedzka. "Alexandre Loukachenko ne veut pas améliorer le système électoral. Il veut améliorer son image aux yeux des Occidentaux. Il essaie de survivre entre le KGB de la Russie de Vladimir Poutine et l'Ouest. Il veut avoir de meilleures relations avec l'Ouest de façon à négocier avec Vladimir Poutine" a affirmé Vintsuk Vechorko, vice-président du parti d'opposition, les Forces démocratiques unies.

"Nous n'avons toujours pas d'élections démocratiques. On peut parler de changements cosmétiques mais ces élections ne peuvent être décrites comme respectant les principes de l'Organisation de la sécurité et de la coopération en Europe. Celle-ci se retrouve dans une position très difficile. Elle doit produire un rapport positif mais cela va être difficile pour elle après ce qui s'est passé" a déclaré l'un des principaux opposants, Alexandre Milinkevitch. Alexandre Kozouline, autre opposant, avait toutefois indiqué avant le scrutin que les pays occidentaux ne devaient pas briser le dialogue avec Alexandre Loukachenko. "On ne peut pas fermer la porte au régime politique biélorusse. Il faut parler à Alexandre Loukachenko". Après le scrutin, il indiquait qu'Alexandre Loukachenko avait fermé lui-même la porte que l'Occident essayait d'ouvrir pour lui.

"La peur des manifestations et la désapprobation des changements radicaux qui auraient pu survenir si l'opposition avait été élu a conduit à ce résultat. Les électeurs ont eu peur de perdre ce qu'ils ont" a affirmé la présidente de la Commission électorale centrale, Lidia Yermoshina, qui a ajouté "l'opposition est passée de mode". Les Biélorusses, et notamment les plus âgés d'entre eux, apprécient le fait qu'Alexandre Loukachenko soit parvenu à maintenir la stabilité et leur ait épargné le chaos économique qu'ont connu leurs voisins ukrainiens après le démantèlement de l'URSS.

La présidence française de l'Union européenne s'est dite "préoccupée" après que l'OSCE a jugé les élections législatives non démocratiques, et a appelé Minsk à poursuivre ses efforts pour se rapprocher des normes internationales. Les conclusions de l'OSCE "préoccupent la président du Conseil de l'Union européenne, qui appelle les autorités biélorusses à poursuivre leurs efforts afin de se conformer aux standards démocratiques internationaux", souligne-t-elle dans un communiqué. Elle exhorte aussi le pays "à coopérer pleinement" avec le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'Homme (BIDDH) de l'OSCE.

Alexandre Loukachenko avait récemment multiplié les gestes d'ouverture vers l'Ouest, tout d'abord en libérant, les 16 et 20 août derniers, les prisonniers politiques Alexandre Kozouline, Sergueï Parsioukevitch et Andreï Kim, puis en refusant de reconnaître l'indépendance des deux provinces géorgiennes de l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie. Il avait également affirmé que ces élections seraient plus transparentes que les précédentes et qu'elles ouvriraient une nouvelle ère dans les relations entre son pays et l'Occident. Il a toutefois précisé que, s'il attendait de l'Union européenne la levée des sanctions frappant son pays, Minsk ne consentirait pas à améliorer ses relations avec l'Union européenne au détriment de Moscou. La Russie s'est d'ailleurs déclarée "déçue" par les conclusions des observateurs de l'OSCE. Le ministère russe des Affaires étrangères "estime que les élections ont témoigné non seulement du civisme de la population mais aussi de l'intérêt du peuple biélorusse à la continuité et la stabilité".

Après ces élections législatives jugées "peu démocratiques", l'Union européenne aura du mal à justifier une levée des sanctions, même si, poussée par Vilnius et Varsovie, voisines de la Biélorussie, elle voudrait quand même faire preuve de plus d'ouverture. "Les résultats des élections ne prêtent pas à un très grand optimisme sur le changement profond de la nature de ce pays sur le plan démocratique", a souligné le directeur général des relations extérieures de la Commission européenne, Eneko Landaburu

"Les observateurs européens sont confrontés à un dilemme politique et éthique. Ils peuvent mener un projet politique destiné à faire d'Alexandre Loukachenko un dirigeant européen de pensée nationaliste ou rester fidèles à leurs principes et qualifier d'élections frauduleuses des élections frauduleuses" a déclaré Vintsuk Vechorko.

L'OSCE rendra son rapport complet dans un mois.

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