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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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ENCorinne Deloy
Fondation Robert Schuman
La tradition a été respectée en Pologne où, comme à chaque fois depuis la chute du communisme, la formation au pouvoir a été battue lors des élections législatives et sénatoriales qui se sont déroulées le 21 octobre. La formation du Premier ministre sortant Jaroslaw Kaczynski, Droit et justice (PiS), a été largement devancée par la Plateforme civique (PO) conduite par Donald Tusk, qui a recueilli 41,64% des suffrages, et remporté 208 des 460 sièges de la Sejm (Diète), Chambre basse du Parlement. Le PiS obtient 32,04% des voix (et 164 sièges. Gauche et démocrates (LiD) arrive en troisième position et recueille 13.17% des suffrages (52 sièges). La formation social-démocrate est suivie du Parti populaire (PSL) de Waldemar Pawlak qui obtient 8.83% des voix et 35 sièges.
Par ailleurs, Autodéfense de la République–Samoobrona et la Ligue de l'aile droite de la République - qui rassemble la Ligue des familles (LPR), le Droit de la République de Pologne (PR) et l'Union de la vraie politique (UPR) - ne seront pas représentées au Parlement faute d'avoir franchi le seuil des 5% des suffrages exprimés. La formation dirigée par Andrzej Lepper aurait recueilli 1,54% des suffrages et la Ligue des familles de Roman Giertych, 1,28%.
La Plateforme civique n'obtient pas la majorité absolue (231 sièges) mais ne devrait pas avoir de difficulté à former le prochain gouvernement, le Parti populaire (PSL), auquel Donald Tusk avait déjà fait appel au cours de la campagne électorale, s'étant d'ores et déjà déclaré prêt à travailler avec la formation libérale.
La Plateforme civique s'impose également aux élections sénatoriales où la formation gagne 59 sièges, contre 38 pour le PiS. Le Parti populaire (PSL) remporte 1 siège, tout comme Gauche et démocrates (LiD), et 1 siège va à un candidat indépendant, l'ancien Premier ministre social-démocrate Wlodzimierz Cimoszewicz.
La participation a été la plus importante depuis la chute du communisme, s'élevant à 55,3%, (+14,73 points par rapport aux dernières élections législatives et sénatoriales du 25 septembre 2005). Cette mobilisation élevée a surpris la Commission électorale polonaise qui a dû accepter de prolonger de près de trois heures le scrutin dans certains quartiers de Varsovie, des bureaux de vote ayant manqué de bulletins. "Le taux de participation a été beaucoup plus élevé que ce que nous avions prévu" a souligné Lena Kolarska-Bobinska, responsable de l'Institut des affaires publiques qui explique ce fait par la mobilisation des plus jeunes (18-24 ans). "Nous vivons une révolution de génération" at-elle affirmé.
"C'était une lutte. Nous l'avons remportée. Mais à partir de demain, il faut se mettre au travail. La Pologne a besoin de nous" a souligné Donald Tusk. "Aux moments difficiles, les Polonais savent prendre la responsabilité de leur patrie" a-t-il affirmé. Le leader de la Plateforme civique qui avait choisi pour ce scrutin de conduire la liste de son parti dans la capitale Varsovie et non dans sa ville natale de Gdansk où il se présentait à chaque élection depuis 1991, a salué la forte mobilisation des Polonais et promis la réconciliation nationale. "Ce n'est pas la victoire d'un parti mais celle d'une politique sans conflit et sans agressivité" at-il déclaré.
Le Premier ministre sortant, Jaroslaw Kaczynski, a reconnu sa défaite dès l'annonce des premiers résultats. "Je souhaite le succès à Donald Tusk et je le félicite" a-t-il indiqué, ajoutant "notre chemin ne s'arrête toutefois pas là. Nous passons dans l'opposition et nous constituerons une opposition dure qui demandera des comptes pour toutes les promesses électorales".
"La Plateforme civique est parvenu à rassembler sur son nom l'ensemble des électeurs qui ne voulaient plus des frères Kaczynski" a souligné Lena Kolarska-Bobinska. "Le PiS a polarisé la scène politique polonaise et poussé les opposants dans les bras de la formation qui avait les plus grandes chances de s'imposer" a-t-elle ajouté. Il semble que le débat télévisé du 15 octobre dernier entre le Premier ministre sortant, Jaroslaw Kaczynski, et le leader de la Plateforme civique, Donald Tusk, ait constitué le tournant de la campagne. Selon les enquêtes d'opinion, ce dernier s'était largement imposé lors de cette rencontre et avait retourné l'opinion, la PO devançant de nouveau le PiS dans les sondages de la dernière semaine de campagne. "Depuis que vous gouvernez, près de deux millions de Polonais ont choisi le libéralisme économique. Malheureusement pas chez nous, mais en Irlande, en Angleterre, en Ecosse, aux Etats-Unis, en Hollande ou en Espagne" a t-il déclaré face au Premier ministre, dénonçant aussi la hausse des prix, notamment des produits alimentaires de base.
Formation positionnée au centre-droit sur l'échiquier politique, mais séduisant sur sa gauche, la Plateforme civique devrait rapidement mettre en place son programme de libéralisation de l'économie polonaise en privatisant certaines industries encore dominées par l'Etat. La formation est favorable à de nouvelles baisses d'impôts et souhaite poursuivre la baisse du chômage et des bas salaires qui ont incité de nombreux Polonais à émigrer au Royaume-Uni ou en Irlande. Enfin, la Plateforme civique veut faire de l'euro sa priorité économique et s'est fixé pour objectif d'introduire la monnaie unique en Pologne en 2012. Le député et économiste Zbigniew Chlebowski (PO) a affirmé que la Pologne pourrait adopter l'euro en 2012-2013 au plus tôt. "2012-2013 représente la date la plus proche possible. Ce n'est peut-être pas la question la plus importante, mais c'est l'une de nos priorités" a-t-il souligné, ajoutant que le budget 2008 devrait être révisé et "qu'un expert indépendant" devrait diriger le ministère des Finances.
Autre changement de ton, l'un des vice-présidents de la PO, Jacek Saryusz-Wolski, député européen, a indiqué que le prochain gouvernement adoptera la Charte des droits fondamentaux du nouveau traité européen refusée par les frères Kaczynski.
La victoire de la Plateforme civique semble résulter d'un rejet franc des jumeaux Kaczynski, à la tête du pays depuis septembre 2005, plutôt que d'un élan des Polonais pour le libéralisme. Beaucoup se réjouissaient d'un "retour à la normale" en Pologne, aussi bien au plan intérieur qu'au plan extérieur, dans les relations avec l'Allemagne, la Russie ou encore avec les partenaires de la Pologne dans l'Union européenne.
Prochain Premier ministre, Donald Tusk devra toutefois cohabiter avec le Président de la République, Lech Kaczynski, qui l'avait battu lors de l'élection présidentielle des 9 et 23 octobre 2005. Si la fonction présidentielle est, en Pologne, officiellement honorifique, le Chef de l'Etat exerce cependant une influence non négligeable, ne serait-ce que par le droit de veto dont il dispose et que la Diète, Chambre basse du Parlement, ne peut rejeter que si elle réunit la majorité des 3/5e des voix et la présence d'au moins la moitié des députés élus. Lech Kaczynski a d'ailleurs, au cours de la campagne électorale, plusieurs fois averti qu'il n'hésiterait pas à utiliser son droit de veto dans le cas où l'opposition parviendrait au pouvoir.
Résultats des élections législatives et sénatoriales du 21 octobre 2007 en Pologne
Diète (Sejm)
Participation : 55,3%
Sénat
Participation : 55,3%
Texte disponible au format PDF en version polonaise.
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