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Corinne Deloy,
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Le candidat de l'Union pour un mouvement populaire (UMP), Nicolas Sarkozy, a été élu le 6 mai Président de la République française, battant nettement sa rivale Ségolène Royal (Parti socialiste, PS) en recueillant 53,06% des suffrages, contre 46,94% pour son adversaire. Le nouveau Chef de l'Etat s'impose dans la France de l'Est et du Nord (hormis le Pas-de-Calais) ainsi que dans les territoires d'Outre-mer (TOM), tandis que Ségolène Royal réalise ses meilleurs résultats dans la France de l'Ouest, et notamment du Sud-Ouest, et dans les départements d'Outre-mer (DOM). Nicolas Sarkozy s'impose dans 67 départements de la France métropolitaine, Ségolène Royal dans 28.
La participation a été l'une des plus élevés de la Ve République, s'élevant à 83,97%. Cette forte participation au deuxième tour confirme le sursaut démocratique déjà observé lors du premier tour le 22 avril dernier.
« Ce soir ma pensée va aux millions de Français qui m'ont témoigné leur confiance. Je veux leur dire qu'ils m'ont fait le plus grand honneur qui soit à mes yeux en me jugeant digne de présider aux destinées de la France » a déclaré Nicolas Sarkozy après l'annonce des résultats. Nicolas Sarkozy s'est d'emblée adressé à l'ensemble des Français et peut-être d'abord à ceux qui n'ont pas voté pour lui. « Ma pensée va à tous les Français qui n'ont pas voté pour moi. Je veux leur dire que par-delà le combat politique, par-delà les divergences d'opinions, il n'y a pour moi qu'une seule France. Je veux leur dire que je serai le Président de tous les Français, que je parlerai pour chacun d'entre eux. Je veux leur dire que ce soir, ce n'est pas la victoire d'une France contre une autre. Il n'y a pour moi ce soir qu'une seule victoire, celle de la démocratie, celle des valeurs qui nous unissent, celle de l'idéal qui nous rassemble. Ma priorité sera de tout mettre en oeuvre pour que les Français aient toujours envie de se parler, de se comprendre, de travailler ensemble » a affirmé celui qu'on a souvent accusé de dresser les Français les uns contre les autres et qui s'est voulu rassembleur. Reprenant son programme de campagne, il a répété : « Le peuple français s'est exprimé. Il a choisi de rompre avec les idées, les habitudes et les comportements du passé. Je veux réhabiliter le travail, l'autorité, la morale, le respect, le mérite. Je veux remettre à l'honneur la nation et l'identité nationale. Je veux rendre aux Français la fierté d'être Français. Je veux en finir avec la repentance qui est une forme de haine de soi, et la concurrence des mémoires qui nourrit la haine des autres. Le peuple français a choisi le changement. Ce changement je le mettrai en oeuvre parce que c'est le mandat que j'ai reçu du peuple et parce que la France en a besoin. Mais je le ferai avec tous les Français. Je le ferai dans un esprit d'union et de fraternité. Je le ferai sans que personne n'ait le sentiment d'être exclu, d'être laissé pour compte ». Enfin, Nicolas Sarkozy s'est adressé aux partenaires européens de la France. « Je veux lancer un appel à nos partenaires européens, auxquels notre destin est lié, pour leur dire que toute ma vie j'ai été européen, que je crois en la construction européenne et que ce soir la France est de retour en Europe. Mais je les conjure d'entendre la voix des peuples qui veulent être protégés. Je les conjure de ne pas rester sourds à la colère des peuples qui perçoivent l'Union européenne non comme une protection mais comme le cheval de Troie de toutes les menaces que portent en elles les transformations du monde » a-t-il déclaré, réitérant les demandes de protection vis-à-vis de l'Union européenne qu'il avait exprimées durant les mois précédents. « Je ne vous trahirai pas, je ne vous mentirai pas, je ne vous décevrai pas » a-t-il encore lancé aux personnes rassemblées Place de la Concorde à Paris pour célébrer sa victoire.
Agé de 52 ans, Nicolas Sarkozy est avocat de profession. Engagé en politique en 1974 dans l'Union des démocrates pour la République (UDR), il devient délégué départemental des jeunes de sa formation pour le département des Hauts-de-Seine en 1975 avant d'adhérer, en 1976, au Rassemblement pour la République (RPR) fondé par Jacques Chirac. Il enlève la mairie de Neuilly-sur-Seine en 1983, entre à l'Assemblée nationale en 1988 puis devient ministre du Budget (1993-1995) du gouvernement d'Edouard Balladur (RPR). Soutien de ce dernier à l'élection présidentielle de 1995, il n'obtiendra aucun poste dans les gouvernements dirigés par Alain Juppé (1995-1997) après l'élection de Jacques Chirac à la tête de l'Etat. Président par intérim du Rassemblement pour la République d'avril à octobre 1999, il se retire alors quelque temps de la vie politique. En 2002, il est réélu député et nommé ministre de l'Intérieur, de la Sécurité intérieure et des Libertés locales (2002-2004), puis de l'Economie et des Finances (mars 2004-novembre 2004) sous les gouvernements de Jean-Pierre Raffarin (UMP) et enfin ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire (2005-2007) dans le gouvernement dirigé par Dominique de Villepin (UMP). Il est également, depuis novembre 2004, président de l'UMP.
Les deux candidats du deuxième tour de cette élection présidentielle avaient finalement dressé le même diagnostic de la France actuelle, pointant une grave crise de société et la nécessité de réformes en rupture avec les modèles traditionnels. Nicolas Sarkozy est sans doute apparu mieux préparé et plus cohérent durant toute la campagne électorale au point d'incarner pour une majorité de Français l'homme capable d'incarner le changement dont la France a besoin.
Le nouveau Président devra s'atteler rapidement à un grand nombre de dossiers urgents. En matière industrielle, il devra décider de la suite à donner à la fusion Suez-GDF, projet en suspens depuis plusieurs mois, ainsi qu'au plan de restructuration d'Airbus qui prévoit 10000 suppressions d'emplois. Si une Conférence sur la famille doit se tenir durant l'été, Nicolas Sarkozy a indiqué durant sa campagne qu'il souhaitait convoquer d'autres conférences avec les partenaires sociaux, notamment sur les questions socioéconomiques. Le 7 mai, Xavier Bertrand, l'un des porte-parole du candidat de l'UMP, a dressé la liste des premières mesures que le nouveau Président souhaite voir adoptées dès l'été. Il s'agit de l'exonération des heures supplémentaires, la déduction des intérêts des emprunts immobiliers, la suppression des droits de succession, la défiscalisation du travail des étudiants, les peines planchers pour les multirécidivistes et les négociations pour obtenir un service minimum dans les transports publics.
Dans le domaine international, le Président de la République devra très vite s'occuper de la situation de l'otage français membre de l'organisation non gouvernementale Terres d'enfance retenu en Afghanistan depuis plusieurs semaines et dont les ravisseurs ont accordé un nouveau sursis à la France. Nicolas Sarkozy est également très attendu les 21 et 22 juin prochain à Bruxelles où se déroulera le Conseil européen. Il devrait d'ailleurs se rendre très prochainement dans plusieurs capitales européennes, dont Bruxelles et Berlin.
La réaction de Ségolène Royal à sa défaite a également constitué l'un des événements de ce deuxième tour. En effet, la candidate socialiste, battue, ne s'est pas montrée abattue. « Le suffrage universel a parlé. Je souhaite au prochain Président de la République d'accomplir sa mission au service de tous les Français » a-t-elle déclaré quelques minutes seulement après l'annonce des premiers résultats. Après avoir reconnu sa défaite, elle a immédiatement ajouté « J'ai donné toutes mes forces dans cette campagne électorale. Quelque chose s'est levé qui ne s'arrêtera pas. Je continue avec vous et près de vous. Ce que nous avons commencé ensemble, nous allons le continuer ensemble. Ce que nous avons entrepris pour la France portera ses fruits, j'en suis sûre. Vous pouvez compter sur moi pour approfondir la rénovation de la gauche et la recherche de nouvelles convergences au-delà de ses frontières actuelles. C'est la condition de nos victoires futures. Je compte sur vous, restons debout et tous ensemble nous allons continuer ce combat. Je serai au rendez-vous de ce travail indispensable et j'assumerai la responsabilité qui m'incombe désormais », affirmant sa volonté de poursuivre le combat dans la perspective des élections législatives des 10 et 17 juin prochains, mais également bien au-delà, et son ambition de poursuivre la rénovation de la gauche en l'élargissant au-delà de ses frontières. Dans la soirée, Ségolène Royal s'est de nouveau adressé aux personnes rassemblées rue de Solférino à Paris (siège du Parti socialiste). « Nos valeurs finiront par triompher. Je compte sur vous, restons debout ! Tous ensemble, nous allons continuer ce mouvement, cette extraordinaire campagne ».
La candidate socialiste a montré son énergie et sa combativité et indiqué clairement qu'elle se sentait prête et légitime à assurer le leadership du Parti socialiste et à le mener à la campagne des élections législatives de juin prochain. Aussitôt, certains responsables du PS ont répliqué. Ainsi, déplorant « une très grave défaite », Dominique Strauss-Kahn, candidat malheureux lors de l'élection primaire interne qui a départagé les candidats socialistes à la candidature à l'élection présidentielle en novembre dernier, s'est dit « disponible » pour mettre en oeuvre le « renouveau de la social-démocratie » au sein du PS. François Hollande, premier secrétaire du parti, a appelé au rassemblement de la gauche. « Il y a sans doute des décisions à prendre mais là je ne tolérerai aucun règlement de comptes. Il y a un défi à relever» a-t-il déclaré, ajoutant « Ségolène Royal a pris une force qui sera utile à la gauche ». Le 4 mai dernier, il affirmait, dans un entretien avec le quotidien Les Echos, qu'il conduirait la campagne électorale de son parti pour les élections législatives et évoquait des « assises » ou une « refondation » avec « tous les progressistes ». « La rénovation du Parti socialiste est une nécessité. Dès le lendemain des élections législatives, il faudra rénover le PS, le mettre en phase avec la société et en faire un grand parti social-démocrate moderne » a conclu l'un des deux directeurs de campagne de Ségolène Royal, François Rebsamen, soulignant que « cela aurait dû être commencé plus tôt ». Le Bureau national du PS doit se réunir le 7 mai au soir.
La campagne menée par Ségolène Royal a eu le mérite de placer le Parti socialiste au pied du mur. Ces derniers mois, la candidate a brisé de nombreux tabous, notamment sur les questions du travail, des 35 heures, des régimes spéciaux de retraite, de la carte scolaire, de l'autorité ou encore de la sécurité. Les alliés traditionnels du PS, le Parti communiste (PCF) et les Verts, ayant été laminés dans les urnes le 22 avril, le PS se voit contraint de se tourner vers de nouveaux partenaires. En osant faire un pas vers François Bayrou, Ségolène Royal a marqué la fin d'un cycle historique, celui du Parti socialiste né au congrès d'Epinay en 1971 et de l'union de la gauche, et ouvert la voie à une mutation du parti vers une social-démocratie européenne. Le Parti socialiste pourra t-il longtemps encore éviter d'affronter la question de sa refondation et donc de son avenir qui se pose à lui depuis plusieurs années et que sa défaite à cette élection présidentielle a rendu inéluctable ?
Après quelques jours de recul et de repos, Nicolas Sarkozy devra s'atteler à la formation de son futur gouvernement. Ses plus proches collaborateurs ont assuré que le prochain gouvernement comprendrait des ministres issus du centre comme des forces de gauche. Ce gouvernement paritaire de 15 membres sera provisoire puisque les électeurs français sont de nouveau appelés aux urnes les 10 et 17 juin prochains pour renouveler les 577 membres de l'Assemblée nationale, Chambre basse du Parlement.
Le prochain Président de la République prendra officiellement ses fonctions le 16 mai prochain, dernier jour du mandat de l'actuel Chef de l'Etat, Jacques Chirac.
Résultats du deuxième tour de l'élection présidentielle du 6 mai 2007
Participation : 83,97%

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