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Les forces liberales conservatrices au pouvoir remportent les élections législatives danoises

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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8 février 2005
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Le 18 janvier dernier, le chef du gouvernement danois, Anders Fogh Rasmussen (Parti libéral, V), a convoqué des élections législatives anticipées pour le 8 février prochain, demandant aux quatre millions d'électeurs du royaume de « renouveler et de prolonger » le mandat de son gouvernement. Pour expliquer l'organisation anticipée de ce scrutin, le Premier ministre a mis en avant les risques de télescopage du scrutin législatif, initialement prévu en novembre prochain, avec les élections municipales qui doivent se tenir dans le royaume le 15 novembre. Néanmoins, il semble que l'avance dont dispose sa formation dans les enquêtes d'opinion ait convaincu Anders Fogh Rasmussen de ne pas attendre plus longtemps pour remettre son mandat en jeu.

Le système politique danois

Le Folketing, Chambre unique du Parlement, comprend cent soixante dix-neuf membres élus pour quatre ans au scrutin proportionnel selon la méthode de Sainte-Lagüe. Les électeurs sont autorisés à indiquer leurs préférences sur la liste présentée par la formation politique pour laquelle ils désirent voter.

La province du Groenland et celle des îles Féroé disposent chacune de deux représentants.

Les cent soixante-quinze autres sièges sont répartis entre trois régions : la région de Copenhague, celle du Jutland et celle des îles. Ces trois régions sont subdivisées en trois circonscriptions urbaines et sept circonscriptions rurales. Le nombre de sièges alloués à chacune de ces circonscriptions, proportionnel au nombre de ses habitants, est revu tous les cinq ans. Le calcul effectué (addition de la population, du nombre d'électeurs au dernier scrutin et de la surface de la circonscription en kilomètres carrés multipliée par vingt, le résultat étant ensuite divisé par cent soixante-quinze) favorise les régions faiblement peuplées.

Cent trente-cinq des cent soixante quinze sièges sont des sièges de circonscription, quarante des sièges compensatoires. Les sièges compensatoires permettent d'assurer une représentation nationale aux formations ayant dépassé un certain seuil. Cependant, pour accéder à la répartition des sièges compensatoires, une formation doit avoir obtenu soit un minimum de sièges dans une circonscription, soit un nombre de suffrages supérieur ou égal au nombre de voix nécessaires à l'obtention d'un siège dans au moins deux des trois régions du royaume ou encore au moins 2% des suffrages exprimés au niveau national. La répartition des sièges se fait en deux temps, tout d'abord par parti, puis par candidat.

Ces principes de l'élection des députés sont inscrits dans la Constitution du Danemark de 1953.

Actuellement, sept formations politiques sont représentées au Parlement.

- Le Parti libéral (V) du Premier ministre Anders Fogh Rasmussen compte cinquante-six sièges ;

- Le Parti social-démocrate (SD), dirigé par Mogens Lyketoft, principale formation d'opposition, possède cinquante-deux sièges ;

- Le Parti radical libéral (RV), soutien de la coalition gouvernementale, compte neuf sièges ;

- Le Parti conservateur (KF), membre du gouvernement, compte seize députés ;

- Le Parti du peuple (DF), formation d'extrême droite, soutien de la coalition gouvernementale au Parlement, compte vingt-deux sièges ;

- Le Parti socialiste populaire (SF), formation d'opposition, possède douze sièges ;

- La Liste de l'unité (E), rassemblant les Rouges verts, compte quatre sièges.

Les deux représentants des formations de l'opposition de gauche du Groenland (Esprit de la communauté, IA, et En avant, S) et le représentant du Parti de l'égalité des îles Féroé (Parti de l'égalité, TF) ont formé en décembre 2001 un groupe nord-atlantique, politiquement non apparenté. Le deuxième député des îles Féroé (Parti du peuple, FF) est apparenté au Parti libéral.

Le bilan du gouvernement

« Le gouvernement a tenu les promesses faites aux électeurs. Nous avons serré la vis dans la politique de l'immigration comme nous l'avions promis aux dernières élections et nous ne la relâcherons pas. Le nombre de titres de séjour accordés aux réfugiés et aux immigrés a été réduit de plus de moitié, même à un tiers depuis 2001 » a récemment déclaré le Premier ministre Anders Fogh Rasmussen. « La politique de l'immigration, que nous voulons maintenir, bénéficie d'un large et solide soutien de la population. Elle a permis d'économiser quatre milliards de couronnes (cinq cent trente-sept millions d'euro) par an à la société danoise par rapport à la politique menée par les sociaux-démocrates et les radicaux » a t-il ajouté.

Le Chef du gouvernement a également promis, en cas de victoire, d'investir de façon prioritaire durant les quatre années à venir dans les secteurs de la recherche, de la famille et de la santé ainsi que du maintien du gel des augmentations d'impôts, mesure en vigueur depuis trois ans dans le royaume. « Nous devons aider les familles avec enfants car elles contribuent à assurer l'avenir du royaume. Nous devons maintenir une politique de l'immigration stricte, poursuivre le gel des impôts, montrer plus de respect et de sollicitude envers les personnes âgées et avoir de meilleurs hôpitaux » a affirmé Anders Fogh Rasmussen. Enfin, si le Premier ministre a déclaré souhaiter maintenir son alliance avec le Parti conservateur, il a de nouveau fermement rejeté toute idée d'alliance avec le Parti du peuple. De son côté, la leader de la formation d'extrême droite, Pia Kjaersgaard, a affirmé sa volonté de « d'accentuer l'empreinte » de son parti sur le programme des deux formations de la coalition gouvernementale.

La guerre en Irak

Le Parti social-démocrate, traditionnel défenseur de l'Etat providence, un thème sur lequel ses adversaires conservateurs se sont positionnés, tente de mobiliser les électeurs autour de l'engagement des soldats danois en Irak, engagement auquel est hostile la majorité des électeurs du royaume. Les sociaux-démocrates se déclarent favorables au retrait des troupes danoises d'Irak au début du mois de juin, c'est-à-dire à la fin de leur mandat. Cinq cent vingt-cinq soldats danois sont actuellement stationnés en Irak, dont cinq cents à Bassorah sous commandement britannique. « Je suis pour le retrait de notre contingent à l'expiration de son mandat début juin, car nous ne voulons pas continuer à faire partie de ce que beaucoup d'Irakiens considèrent comme une armée d'occupation » a déclaré Mogens Lyketoft, président de la formation sociale-démocrate, lors d'un duel électoral avec le Premier ministre Anders Fogh Rasmussen. Le PSD souhaite remplacer les soldats par une aide civile et humanitaire afin de soutenir l'Irak sur la voie de la démocratie. Le leader de l'opposition a également tenu à affirmer que s'il était élu, « le Danemark ne viendra jamais à participer à une guerre contre l'Irak que le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies a qualifiée d'illégale ». « Nous ne ferons jamais la même erreur qu'Anders Fogh Rasmussen d'entrer en guerre sans un mandat des Nations unies et en brisant la cohésion européenne. Nous ne suivrons pas aveuglément les Etats-Unis comme l'a fait le gouvernement actuel. Nous serons un allié, mais un allié critique » a déclaré Mogens Lyketoft.

De son côté, le Premier ministre a indiqué que « le Danemark prendra une décision indépendante sur la présence de ses forces en Irak mais en concertation avec nos alliés américains et britanniques de la coalition ». « Les terroristes ne doivent pas décider de notre retrait. Personne ne doit mettre en doute que notre objectif est que les Irakiens soient les maîtres chez eux et que les troupes étrangères quittent le pays, y compris les soldats danois » a t-il ajouté. Le 27 janvier, Anders Fogh Rasmussen a été empêché de tenir une réunion électorale par des opposants à l'intervention militaire en Irak aux cris « d'assassin» et de « menteur ». Le 28 janvier dernier, trois cents artistes, metteurs en scène, musiciens et écrivains ont signé une pétition demandant le retrait des forces danoises d'Irak et accusant les formations politiques d'ignorer la guerre en Irak dans la campagne électorale.

Les enquêtes d'opinion révèlent qu'une majorité de Danois sont favorables au retrait de leurs troupes d'Irak. Selon un sondage réalisé par l'institut Gallup entre le 18 et le 20 janvier et publié le 27 du même mois, les deux tiers des personnes interrogées se prononcent en faveur de ce retrait (63%). Quatre Danois sur dix (41%) estiment nécessaires de fixer une date de fin de mission du contingent, 22% estiment que les troupes doivent quitter l'Irak immédiatement, un tiers considérant qu'elles doivent rester jusqu'à ce qu'on n'ait plus besoin d'elles (34%). Le ministre des Affaires étrangères, Per Stig Möller, a cependant rejeté tout retrait immédiat du contingent danois comme toute idée de fixer dès aujourd'hui une date de fin de mission. « Nous ne pensons pas non plus que les soldats danois doivent rester éternellement. Mais fixer une date de fin de notre engagement ou nous retirer maintenant donnera tout simplement aux rebelles et aux terroristes de bonnes raisons de poursuivre leurs attaques contre la construction d'un Irak démocratique » a t-il souligné.

L'intervention des imams

La campagne électorale a été troublée fin janvier par l'intervention des chefs religieux musulmans qui ont publiquement recommandé à leurs fidèles de « voter juste », c'est-à-dire en faveur de formations qui « respectent les immigrés » et « souhaitent le retrait des troupes danoises d'Irak ». Le Premier ministre a immédiatement mis les imams en garde. « Au Danemark, la religion et la politique sont séparées et il serait très déraisonnable que les leaders religieux recommandent à leurs ouailles de voter pour des partis politiques déterminés. Les pasteurs n'utilisent pas la chaire de l'église pour faire de l'agitation politique. Les imams ne devraient pas le faire non plus » a déclaré Anders Fogh Rasmussen. Le Parti social-démocrate a rejeté le soutien implicite des imams, déplorant leur intervention dans le débat politique. « Ceci montre qu'ils n'ont rien compris à ce que veut dire vivre dans une société démocratique » a estimé le porte-parole de la formation, Anne-Marie Meldgaard. Rappelons que l'islam est la deuxième religion du royaume après le protestantisme luthérien, religion inscrite dans la Constitution. Le Danemark compte cent soixante dix mille personnes de confession musulmane, soit 3% de sa population.

Selon les dernières enquêtes d'opinion, le Parti libéral, le Parti conservateur et le Parti du peuple devraient arriver en tête des prochaines élections législatives remportant environ cent des cent soixante dix-neuf sièges du Folketing, contre soixante-dix pour le Parti social démocrate et le Parti socialiste populaire. Le sondage réalisé par l'institut Gallup et publié le 26 janvier dernier crédite la majorité gouvernementale actuelle (V-KF-DF) de cent deux sièges au Parlement (contre quatre-vingt quatorze actuellement) et l'opposition (SD-SF) de soixante-treize députés (contre soixante-quatre dans le Folketing actuel). Cependant, près d'un quart des électeurs se déclarent encore indécis (22,4%), dont une grande majorité de femmes, celles-ci votant traditionnellement de façon plus importante que les hommes en faveur des sociaux-démocrates. Enfin, et ce résultat est peut-être le plus parlant, selon une enquête réalisée par l'institut Megafon, les trois quarts des Danois (75%) estiment « invraisemblable » ou « très invraisemblable » une victoire de l'opposition à ces élections législatives anticipées, contre 19% qui sont d'un avis contraire.

Résultats des élections législatives du 8 février 2005

participation : 84,4%

source : agence france-presse

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