Réferendum sur l'Union Européenne en Slovaquie 16-17 mai 2003

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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17 mai 2003
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

« Souhaitez-vous que la Slovaquie devienne membre de l"Union européenne ? », telle sera la question à laquelle les Slovaques devront répondre les 16 et 17 mai prochains lors du référendum sur l'adhésion de leur pays à l'Union européenne. Cette consultation électorale sera contraignante et, pour être déclarée valide, devra impérativement enregistrer un taux de participation supérieur à la moitié des inscrits. En revanche, une majorité d'électeurs favorables à l'adhésion suffira pour entériner l'adhésion de la Slovaquie à l'Union européenne.

La candidature de la Slovaquie

Gouvernée de 1993 à 1998 par Vladimir Meciar, (Mouvement pour une Slovaquie démocratique, HZDS), leader populiste peu apprécié des pays occidentaux, la Slovaquie a longtemps fait figure de mauvais élève du groupe des anciens Etats d'Europe de l'Est en voie de démocratisation. Le pays, dirigé depuis cinq ans par un gouvernement de coalition emmené par le Premier ministre Mikulas Dzurinda (Union démocratique et chrétienne slovaque, SDKU), a beaucoup souffert de son isolement international et a fait de son entrée dans l'Union européenne (ainsi que de son intégration dans l'OTAN) son objectif premier. La Slovaquie a débuté ses négociations avec Bruxelles le 15 février 2000 et, grâce à ses efforts remarquables et à sa forte volonté, a rapidement été en mesure de rejoindre le premier groupe de pays candidats. Günther Verheugen, commissaire européen à l'élargissement, déclarait il y a quelques mois : « La Slovaquie, non seulement a rattrapé les autres candidats qui avaient commencé plus tôt les négociations, mais se trouve maintenant parmi les premiers pays sur le chemin menant à l'intégration ».

Politiquement, les progrès réalisés par la Slovaquie sont importants. Lors des dernières élections législatives des 20 et 21 septembre 2002, les électeurs slovaques ont clairement fait le choix de l'Europe. Une grande majorité de la population a exprimé, sinon son soutien aux partis gouvernementaux, du moins son désir d'un avenir européen et sa volonté de ne pas retourner à la période d'isolement qu'ils avaient connue durant les quatre années où leur pays fut dirigé par Vladimir Meciar. L'Union démocratique et chrétienne slovaque (SDKU) du Premier ministre Mikulas Dzurinda est sortie renforcée de ce scrutin législatif. « Ces élections ont démontré clairement le caractère durable du développement de la démocratie en Slovaquie » déclarait Michael Wygant, responsable de la mission d'observation de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour les élections législatives slovaques, à l'annonce des résultats du scrutin.

Au niveau économique, la Slovaquie a poursuivi son rattrapage. Le taux de croissance du PIB n'a cessé ces dernières années de s'accélérer, s'alignant sur celui des pays voisins et devenant même supérieur à la moyenne des pays d'Europe centrale et orientale : il a atteint 3,3% en 2001 contre 2,2% en 2000. Les privatisations ont rapporté plus de trois cents milliards de couronnes slovaques. 2002 a vu l'achèvement de l'assainissement et la restructuration du système bancaire national entrepris en 1998. La Slovaquie possède dorénavant le troisième meilleur système bancaire de l'Europe centrale et orientale. Par ailleurs, le pays est de plus en plus tourné vers l'Union européenne qui représente 62% de ses exportations et 49% de ses importations.

L'inachèvement de nombreuses réformes économiques a néanmoins dégradé l'état des finances publiques et entraîné l'accroissement de la dette publique qui est passée de 177 à 366 milliards de couronnes ces quatre dernières années. Le déficit budgétaire s'est également creusé atteignant 4,6% du PIB en 2001. Si les entreprises ont vu leur résultats s'améliorer, le taux de chômage reste élevé ; il touchait, en 2001, 18,9% de la population active (contre 12,6% en 2000), atteignant jusqu'à 30% dans certaines régions orientales du pays.

L'Union européenne a accordé vingt millions d'euros supplémentaires à la Slovaquie pour développer les capacités administratives du pays, jugées encore insuffisantes. Bratislava doit également travailler à une meilleure coordination des fonds structurels européens dans l'ensemble des régions du pays. Le gouvernement a fait part de son intention d'utiliser environ 30% de l'aide reçue du Fonds social européen à la formation professionnelle des personnes peu qualifiées et des membres des minorités.

Les premiers programmes d'amélioration des conditions de vie des Tziganes ont été inaugurés en 2001. L'année suivante, le gouvernement a accordé cinquante millions de couronnes slovaques de subventions, auxquels sont venus s'ajouter des aides de l'Union européenne. La construction de logements sociaux a débuté à travers l'ensemble du pays et trois millions de couronnes ont été consacrés à l'équipement en gaz et en électricité. Cependant, peu de mesures ont vraiment été mises en œuvre pour lutter contre le chômage qui touche de façon très importante la communauté tzigane. Enfin, l'action du gouvernement envers les minorités se heurte à l'opposition d'une partie de la population ainsi que de certaines formations politiques nationalistes situées aux extrêmes de l'échiquier politique.

L'opinion slovaque et l'intégration européenne

Une grande majorité des Slovaques se déclarent en faveur de l'adhésion de leur pays à l'Union européenne. Selon une enquête d'opinion réalisée par l'agence MVK en mars dernier, ils étaient 74,9% à déclarer avoir l'intention de voter « oui » les 16 et 17 mai prochains, contre 11,2% de la population s'apprêtant à voter « non », 13,9% des personnes interrogées restant indécises. 73% des Slovaques affirment qu'ils se rendront aux urnes pour ce référendum. Le dernier sondage, réalisé entre le 27 mars et le 2 avril par l'Institut sur la culture et l'opinion publique du Centre culturel national, témoigne de la permanence du soutien européen : 74,5% des personnes interrogées déclarent leur intention de voter « oui » à l'intégration européenne de leur pays contre 23% qui voteront « non » ; un pourcentage en hausse de dix points par rapport au mois dernier. 2,5% déclarent être encore indécis.

La principale inquiétude concerne non le résultat du vote mais le niveau d'abstention des Slovaques. Pour être valide, la consultation électorale doit impérativement enregistrer un taux de participation supérieur à la moitié des électeurs. Or, les quatre précédents référendums organisés par le gouvernement slovaque depuis l'indépendance du pays (1993) ont tous échoué faute de participation suffisante (en 1997, les Slovaques se sont prononcés sur l'OTAN et les privatisations et, en 1999, sur l'élection du Président de la République au suffrage universel direct et sur la tenue d'élections législatives anticipées). Officiellement, même en cas d'invalidation du référendum, la Slovaquie pourrait devenir membre de l'Union européenne si 60% de ses parlementaires se prononçaient en faveur de l'intégration européenne. Néanmoins, l'échec du référendum, pour ne pas fermer complètement la porte de l'Europe aux Slovaques, n'en serait pas moins lourd de conséquences.

La faible participation observée en Hongrie, lors du vote du 12 avril dernier pour l'adhésion du pays à l'Union européenne (45,6%), inquiète la plupart des analystes politiques. Pal Csaky, vice-Premier ministre en charge de l'intégration européenne, a déclaré que la faible participation des Hongrois était « un très, très sérieux avertissement » pour la Slovaquie. Vladimir Meciar, leader de la principale formation d'opposition : le Mouvement pour une Slovaquie démocratique (HZDS), a récemment appelé à modifier la loi sur le référendum afin de ne pas subordonner la validation de ce dernier au taux de participation. Le Premier ministre Mikulas Dzurinda a refusé cette proposition arguant du fait qu'une plus grande mobilisation de l'ensemble des partis politiques devait permettre de convaincre les électeurs slovaques de se rendre aux urnes. Signalons également que le chef du gouvernement a refusé de figurer sur une affiche électorale en faveur de l'intégration européenne du pays en compagnie des leaders des six autres formations politiques représentées au Conseil national de la République slovaque (Chambre unique du Parlement), principalement à cause de la présence de l'ancien Premier ministre populiste.

La campagne électorale

Alors que le gouvernement avait annoncé, dès janvier dernier, sa stratégie visant à mobiliser très tôt la population autour du référendum, les débuts de la campagne électorale ont été chaotiques. Le mois dernier, le Président de la République Rudolf Schuster s'est publiquement inquiété du retard pris par le gouvernement. Quant à la délégation slovaque de la Commission européenne, se déclarant insatisfaite du retard et de l'insuffisance des moyens engagés, elle a initié, dès janvier, sa propre campagne pour le référendum. La délégation, qui a demandé en vain vingt-cinq mille euros supplémentaires à Bruxelles, va prochainement distribuer brochures, tee-shirts et sillonner le pays durant vingt jours en organisant plusieurs débats télévisés avec l'aide d'organisations non gouvernementales, dont la Fédération slovaque de football.

Pal Csaky, vice-Premier ministre officiellement en charge de la campagne, estime que les deux semaines de campagne prévues (la campagne officielle se déroulera du 4 au 14 mai) sont largement suffisantes pour mobiliser les Slovaques. Les agences publicitaires, Creo/Young Rubicon et Monarch, ont été choisies pour réaliser une première campagne médiatique (qui a débuté mi-avril) : réaliser les spots radiophoniques et télévisuels, composer les slogans de la campagne (« Le choix repose entre nos mains », « On est mieux dedans que dehors »), publier des suppléments sur l'Union européenne dans les principaux quotidiens et magazines du pays et concevoir différentes affiches et brochures d'information. Ces deux agences disposent respectivement d'un budget de quatre cent soixante-dix-huit mille euros (Creo/Young Rubicon) et de deux cent vingt-sept mille euros (Monarch). Une « hot line », fonctionnant dix heures par jour, a été mise en place pour répondre à toutes les questions que peuvent se poser les Slovaques. Des concerts sont organisés en direction des jeunes dans des « eurodiscothèques » à travers le pays. Le point culminant de la campagne sera les deux concerts géants qui seront organisés le 13 mai prochain dans la capitale Bratislava et à Kosice, deuxième ville du pays, sous le slogan « A trois jours de l'Europe ».

L'ensemble des formations politiques du pays, celles appartenant à la coalition gouvernementale comme celles de l'opposition, appellent à voter en faveur de l'entrée de la Slovaquie dans l'Union européenne, y compris le Mouvement pour une Slovaquie démocratique (HZDS) dirigé par Vladimir Meciar. En effet, après avoir été durant des années anti-européen et anti-OTAN, le leader populiste a effectué, l'année passée, un virage à 360 degrés et ne manque pas une occasion d'affirmer avec force son engagement pro-atlantiste et communautaire.

« Nous allons effacer les frontières qui depuis Yalta ont fait de l'Europe un continent divisé » a déclaré le Premier ministre Mikulas Dzurinda à la veille de son départ pour Athènes où il a signé, le 16 avril dernier, le traité d'adhésion de la Slovaquie à l'Union européenne. La majorité des Slovaques voient comme lui dans l'intégration européenne de leur pays la récompense de leurs efforts et la reconnaissance du caractère européen de la Slovaquie. Aux politiques maintenant de faire du référendum populaire un succès et de trouver les mots pour faire comprendre aux électeurs l'importance de leur participation les 16 et 17 mai prochains.

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