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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Fondation Robert Schuman
« Acceptez-vous que la Hongrie devienne membre de l'Union européenne ? », telle sera la question à laquelle devront répondre les Hongrois le 12 avril prochain. Si le référendum est constitutionnellement non contraignant, le résultat de la consultation est néanmoins décisif. Le Premier ministre Peter Medgyessy (Parti socialiste, MSZP) a en effet souligné à plusieurs reprises qu'un soutien populaire lui était indispensable pour signer le traité d'adhésion. Le gouvernement avait initialement choisi d'organiser la consultation électorale le 15 mars, date anniversaire de la révolution d'indépendance de 1848 contre l'Empire des Habsbourg. Cette date a été rejetée par l'opposition qui souhaitait que le référendum ait lieu après la signature du traité d'adhésion à l'Union européenne prévue le 16 avril à Athènes. Peter Medgyessy ayant refusé de céder sur ce point, essentiel à ses yeux, le scrutin se déroulera donc le 12 avril.
La candidature de la Hongrie
La Hongrie a été le premier pays d'Europe centrale à déposer une demande d'adhésion à l'Union européenne en 1994. Les négociations d'adhésion avec Bruxelles ont débuté au printemps 1998. Un an plus tard, la Commission européenne déclarait que la Hongrie correspondait aux critères définis lors du Conseil européen de Copenhague de juin 1993. Ces critères stipulaient que tout nouveau membre doit posséder un régime démocratique stable garantissant la primauté du droit, les droits de l'Homme, le respect des minorités et leur protection ; posséder une économie de marché dotée de la capacité à affronter la concurrence économique et les forces du marché à l'œuvre dans l'Union économique et monétaire et enfin être préparé à reprendre l'acquis communautaire au moment de son entrée dans l'Union, c'est-à-dire adhérer à l'ensemble des traités de l'Union et être doté d'un système légal et administratif permettant de les appliquer.
La Hongrie possède l'une des économies les plus ouvertes d'Europe centrale. L'Union européenne représente actuellement près de 75% des exportations du pays contre 30% en 1990. En outre, la Hongrie a reçu depuis 1990 environ 40% de la totalité des investissements étrangers en Europe centrale et orientale, permettant au pays de connaître un taux de croissance du PIB élevé (+ 3,8% en 2001). Le chômage s'élevait à 6,5% pour cette même année et l'inflation (9,2% en 2001) est en constante baisse. La dette extérieure et le déficit du budget se rapprochent des critères de Maastricht.
L'actuel gouvernement a décidé de modifier la loi sur le statut des Hongrois d'outre frontière (adoptée en 2001) afin de mettre un terme aux controverses avec ses voisins, notamment la Slovaquie et la Roumanie, pays où vivent d'importantes minorités magyares. Cette loi octroie des droits spéciaux (accès à la santé, formation universitaire gratuite, droit de travailler légalement trois mois par an en Hongrie) aux minorités magyares vivant dans les pays voisins, soit environ trois millions et demi de personnes dont plus de la moitié en Roumanie. Les pays limitrophes avaient vu dans cette loi, adoptée pour éviter un afflux massif de Hongrois de l'étranger dans la perspective de l'entrée de la Hongrie dans l'Union européenne en 2004, comme une atteinte à leur souveraineté.
La campagne électorale
« Le choix est simple : ou bien nous restons isolés et dans une sorte de no man's land ou bien nous rejoignons le camp des vainqueurs » a déclaré le Premier ministre Peter Medgyessy en novembre dernier lors d'une allocution devant le Parlement, ajoutant « notre tâche aujourd'hui est de franchir le pont qui mène de notre histoire nationale vers un avenir européen ». Pour ce référendum, le gouvernement a mis en place une campagne d'information sans précédent, envoyant aux quatre millions de foyers hongrois une lettre émanant de la Fondation publique pour la communication sur l'Union européenne et traitant des bénéfices et des changements attendus de l'intégration dans l'Europe. Ce courrier invitait la population à s'exprimer, par courrier ou par téléphone, sur cette question. « Notre objectif est que la question de l'intégration européenne devienne pour chacun une affaire personnelle » déclare Tibor Palankai, président de la Fondation. Preuve de l'intérêt de la population, la Fondation a reçu un demi-million de lettres et près de trente mille appels téléphoniques. Les questions posées portaient sur le niveau de vie, l'emploi, l'avenir du système de sécurité sociale, de la monnaie nationale et du système fiscal. Le site Internet créé pour l'occasion (www.euint.hu/cgi-bin/cikk.cgi) met à la disposition de chacun l'ensemble des documents officiels des relations entre la Hongrie et l'Union européenne (traité d'adhésion, discours de l'ensemble des hommes politiques sur l'intégration, actions de l'Union dans le pays durant les dix dernières années) et de nombreuses informations sur les Quinze et sur les autres pays candidats.
Contrairement aux dirigeants slovènes, le gouvernement hongrois a fait le choix de couvrir les murs d'affiches appelant à voter « oui » à l'intégration européenne. Des spots publicitaires sont diffusés sur les médias et près de deux cents débats seront organisés dans les entreprises jusqu'à la fin du mois de mars. A l'attention des jeunes électeurs, des jeux auxquels il est possible de participer sur Internet ou en envoyant des SMS à partir d'un téléphone portable ont également été imaginés. Les mineurs eux-mêmes n'ont pas été oubliés : collèges et lycées ont organisé un jeu inter-établissements sur l'Union européenne à l'échelle du pays. Enfin, des débats publics se dérouleront dans tout le pays entre le 6 mars et le 12 avril sous le slogan « Donnons à chacun une chance de s'exprimer ». L'ex-Président Arpad Göncz a présidé le premier débat, la série sera clôturée par l'actuel Président Ferenc Madl. Le coût de cette campagne s'élève à plus de six millions d'euros.
L'ensemble des grandes formations politiques hongroises sont favorables à l'adhésion de leur pays dans l'Union européenne. Seules les formations d'extrême droite ont appelé les électeurs à voter « non » au référendum du 12 avril prochain (MOEP, Parti de la justice et la Vie Hongroises).
Les dernières enquêtes d'opinion donnent le « oui » largement victorieux avec 59% des suffrages selon l'institut Gallup et 56% selon l'institut Szonda Ipsos dans deux sondages réalisé à la mi-février. Le « non » regrouperait 20% des votants, 21% étant encore indécis. Depuis toujours, la Hongrie est le pays candidat le plus favorable à l'adhésion à l'Union européenne. En 2002, le pays était ainsi, parmi les dix pays candidats, le plus confiant dans l'Union (76% d'opinions favorables) et dans ses institutions (53% d'opinions favorables pour le Parlement européen, 42% pour la Commission). La Hongrie était également le pays ayant l'image la plus positive de l'Union européenne (59%) selon l'enquête Eurobaromètre du printemps 2002. En décembre 2002, 71% des Hongrois se déclaraient favorables à l'adhésion de leur pays à l'Europe ; ils étaient 67% en janvier dernier. Si les chiffres ont quelque peu baissé, un mois avant le référendum, le soutien des Hongrois à l'intégration européenne reste le plus élevé des dix pays candidats.
Dès le 17 décembre dernier, la Hongrie a modifié sa Constitution pour permettre le transfert d'une partie de sa souveraineté à l'Union européenne après l'adhésion qui aura lieu le 1er mai 2004. Si celle-ci paraît quasiment acquise, le Président de la Commission européenne Romano Prodi a tenu, lors de sa visite à Budapest le 27 février dernier, à rappeler aux Hongrois qu'aucun vote ne devait être considéré comme acquis d'avance. Devant les élus locaux rassemblés dans la capitale, il a affirmé que l'économie hongroise possédant de solides infrastructures et une main-d'œuvre qualifiée était armée pour faire face à la concurrence des pays occidentaux : « Dites à la population de ne pas seulement se demander ce que l'Union leur apportera mais ce qu'eux peuvent apporter à l'Europe ». « Nous n'oublierons jamais que les Hongrois sont les premiers à avoir ouvert le rideau de fer en juillet 1989 », a assuré le Président de la Commission européenne en conclusion de son discours.
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