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Élections en Europe
Corinne Deloy
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Petro Porochenko, candidat indépendant, soutenu par l'Alliance démocratique pour la réforme (UDAR) de Vitali Klitschko (qui a été élu maire de Kiev le 25 mai), a été élu dès le 1er tour de scrutin président de la République d'Ukraine le 25 mai. Il a recueilli 55,9% des suffrages et a devancé l'ancienne Premier ministre Ioulia Timochenko (Union panukrainienne-Patrie, Batkivshchyna), qui a obtenu 12,9% des voix. Cette dernière s'est déclarée prête à "aider les nouvelles autorités à faire avancer l'Ukraine sur la voie européenne".
Oleh Lyashko (Parti radical) est arrivé en 3e position avec 8% des suffrages devant l'indépendant Serhiï Tihipko, qui a recueilli moins de 5% des voix. L'élection présidentielle a par ailleurs signé la défaite des candidats nationalistes : Oleh Tyahnybok (Svoboda) a obtenu 1,3% et Dmytro Iaroch (Secteur droit, Pravy Sektor), 0,9%.
Environ 2 millions d'Ukrainiens ont été empêché de voter par les forces séparatistes dans l'Est du pays et notamment dans les régions de Donetsk et de Lougansk. Les autorités de Kiev avaient mis en place des bureaux de vote pour que les électeurs de Crimée qui le souhaitaient puissent se rendre aux urnes
L'élection présidentielle était consécutive à l'abandon de son poste de l'ancien chef de l'Etat Viktor Ianoukovitch (Parti des régions) et au vote le 22 février par la Verkhovna Rada, chambre unique du parlement, de la démission du président de la République par 328 voix. Le lendemain, Oleksandr Tourtchynov (Union panukrainienne-Patrie, Batkivshchyna), bras droit de Ioulia Timochenko ancien chef des services secrets et ancien vice-Premier ministre (2007-2010), a été nommé président par intérim et Arseni Iatseniouk, Premier ministre par intérim.
Trois mois après la fin des événements qui ont fait au total 82 morts et 2 000 blessés, les Ukrainiens (tout au moins les trois quarts d'entre eux, les habitants des régions de l'Est du pays ayant été empêchés de se rendre aux urnes) se sont donc largement prononcés pour une Ukraine européenne. En effet, Petro Porochenko, qui se présentait comme le candidat du rassemblement, est un ardent défenseur de l'arrimage de son pays à l'Union européenne. "Je veux mener le pays sur la voie de l'"intégration à l'Europe" a-t-il souligné. "Mon premier voyage sera dans le Donbass" a indiqué Petro Porochenko. Il a précisé que sa priorité était de "mettre fin à la guerre". "La première chose à faire, c'est d'apporter la paix à tous les citoyens ukrainiens. Les personnes armées doivent quitter les rues des villes et des villages" a-t-il déclaré. Le nouveau président souhaite suspendre les négociations avec les séparatistes jusqu'à ce qu'ils déposent leurs armes. "Il n'y aura pas de plus grande priorité que la sécurité" a répété Petro Porochenko. Il souhaite mettre en place une nouvelle armée moderne et efficace qui défendra la souveraineté et l'intégrité de l'Etat. Il a promis des hausses de salaires pour les soldats (jusqu'à 1 800 € mensuels) et des équipements militaires modernes.
Il a également affirmé qu'il ferait revenir la péninsule de Crimée dans le giron de l'Ukraine et mettrait fin à la situation d'insurrection qui sévit dans l'Est du pays.
L'élection présidentielle ne devrait cependant pas conduire les forces séparatistes à déposer les armes. Les combats se sont d'ailleurs poursuivis au cours des derniers jours. Le président russe Vladimir Poutine a officiellement demandé aux forces militaires de revenir dans leurs bases permanentes mais l'OTAN a affirmé n'avoir noté aucun signe de retrait des forces russes.
Petro Porochenko veut diriger le pays comme il dirige ses entreprises en alignant le salaire moyen sur celui pratiqué chez Roshen, soit 7 000 hryvnias (436 €). "Si on l'a fait pour 45 000 employés, on peut le faire pour 45 millions d'Ukrainiens" a-t-il affirmé. Il a beaucoup promis mais rarement, voire jamais, parlé des réformes structurelles nécessaires à l'Ukraine qui ont été engagées par le gouvernement intérimaire dirigé par Arseni Iatseniouk.
Cette élection contribue à restaurer l'autorité légitime des gouvernants de Kiev. Oleksandr Tourtchynov avait encouragé les Ukrainiens à se rendre aux urnes afin de "donner un pouvoir légitime au pays". "Nous ne nous laisserons pas être privés de notre liberté et de notre indépendance et nous ne laisserons pas l'Ukraine devenir un morceau de l'empire post-soviétique" avait-il déclaré. "Les efforts russes pour faire échouer cette élection sont voués à l'échec. Nous aurons un chef d'Etat légitime" avait souligné Arseni Iatseniouk.
L'élection présidentielle a uni un pays par ailleurs traversé par des tensions et des velléités séparatistes. Le ministre de l'Intérieur Iouri Loutsenko avait déclaré qu'une victoire au 1er tour de Petro Porochenko "serait une énorme carte blanche pour dialoguer avec Vladimir Poutine et signifierait la fin de la division du pays en deux".
Deux jours avant le scrutin, le président russe Vladimir Poutine a affirmé que Moscou "respecterait le choix du peuple ukrainien" et "travaillerait avec les nouvelles autorités ukrainiennes". Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev avait choisi le 25 mai pour se rendre en Crimée, région ukrainienne rattachée à la Russie depuis le référendum (contesté par les Occidentaux) du 16 mars dernier. Il a distribué des passeports russes aux habitants.
Fondateur du groupe Ukrprominvest et plus grand producteur de confiseries d'Ukraine, Petro Porochenko, 59 ans, est surnommé le roi du chocolat. Sa fortune s'établit à 1,5 milliard $ selon le magazine américain Forbes qui affirme qu'il est l'un des dix hommes les plus riches du pays. L'homme possède la chaîne de télévision Kanal 5 qu'il a mise au service des manifestants durant les événements qui ont embrasé l'Ukraine au cours de l'automne et de l'hiver derniers. Il est d'ailleurs le seul oligarque à avoir ouvertement soutenu les manifestants de la place de l'indépendance (Maïdan). Il s'est rendu en Crimée pour tenter de négocier avec les troupes pro-russes au moment de leur encerclement du parlement régional après la fuite de Viktor Ianoukovitch. Petro Porochenko a joué un rôle actif dans la révolution orange de 2004 et qui a porté Viktor Iouchtchenko à la tête de l'Etat mais est également l'un des fondateurs du Parti des régions de Viktor Ianoukovitch. Ancien ministre des Affaires étrangères (2009-2010), il a été nommé en 2012 ministre de l'Economie et élu au Parlement où il s'est présenté en candidat indépendant.
L'ampleur de la victoire est importante pour Petro Porochenko qui pourra s'appuyer sur sa légitimité et sur ce fort soutien populaire pour gouverner une Ukraine en proie à des tensions séparatistes mais également au bord de la faillite. Le président de la République, qui a indiqué qu'il garderait Arseni Iatseniouk à la tête du gouvernement, a affirmé sa volonté de convoquer des élections législatives anticipées avant la fin de l'année 2014.
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