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Corinne Deloy
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Comme prévu, le Premier ministre Robert Fico (Direction-Démocratie sociale, SMER-SD) est arrivé en tête du 1er tour de l'élection présidentielle slovaque le 15 mars avec 28,01% des suffrages, soit le résultat le plus faible pour un candidat au 1er tour de la présidentielle, et a devancé de 4 points, Andrej Kiska, qui a obtenu 24,01% des voix. Les deux hommes s'affronteront donc lors du 2e tour de scrutin le 29 mars prochain.
Radoslav Prochazka est arrivé en 3e position avec 21,25% des suffrages suivi par l'un des leaders de la révolution douce de 1989, Milan Knazko, qui a recueilli 12,87% des voix. Gyula Bardos, première personnalité issue de la minorité hongroise (10% de la population slovaque) à être candidate à la présidence de la République, a obtenu 5,11%. Pavol Hrusovsky, soutenu par le Mouvement chrétien-démocrate (KDH) - parti qu'il a dirigé de 2000 à 2009 –, l'Union démocratique et chrétienne-Parti démocratique (SDKU-DS) et Most-Hid (qui signifie pont), a recueilli 3,33% et Helena Mezenska (Parti des gens ordinaires et des personnalités indépendantes, OL'aNO), 2,38%. Les 7 autres candidats ont obtenu moins de 1% des voix.
La participation, équivalente à celle enregistrée lors du 1er tour du scrutin présidentiel du 21 mars 2009, s'est établie à 43,4% (- 0,22 point).
Premier ministre sortant, Robert Fico est arrivé en tête du 1er tour de l'élection présidentielle mais le favori des enquêtes d'opinion paraît menacé pour le 2e tour.
L'homme, qui se positionne en défenseur des plus défavorisés et de la classe moyenne, se veut le garant de la stabilité de la Slovaquie. Il dit vouloir renforcer la coopération entre le chef de l'Etat, le gouvernement et le parlement. "Le président de la République doit unir le pays quand le Premier ministre a tendance à le diviser" a-t-il déclaré. Durant la campagne électorale, il a souvent cité le chef de l'Etat autrichien Heinz Fischer comme son modèle.
De nombreux analystes - et beaucoup de Slovaques - craignent cependant qu'une victoire du Premier ministre sortant le 29 mars prochain entraîne une présidentialisation du système politique du pays dans lequel le chef de l'Etat dispose de peu de pouvoirs et ne possède pas le contrôle de l'agenda politique.
Beaucoup craignent que Robert Fico s'inspire de Milos Zeman (Parti des droits des citoyens, SPO), premier président de la République tchèque élu au suffrage universel direct le 26 janvier 2013, qui a montré à plusieurs reprises son désir d'influer sur la vie politique, ou encore du Premier ministre hongrois Viktor Orban (Alliance des jeunes démocrates-Union civique, FIDESZ-MPP). L'accession de Robert Fico à la tête de l'Etat accroîtrait encore la domination de Direction-Démocratie sociale sur la vie politique. Le parti possède la majorité absolue au Conseil national de la République (Narodna rada Slovenskej republiky), chambre unique du parlement (83 députés sur 150), et dirige 7 régions sur 9, une domination qui rappelle à certains l'expérience communiste.
Le Premier ministre sortant a d'ores et déjà annoncé qu'il souhaitait élargir les pouvoirs du président de la République. Ce qui fait craindre à Marian Lesko, analyste politique de l'hebdomadaire Trend Business, qu'il ne transforme le système politique actuel en régime présidentiel. "C'est un homme politique jeune et ambitieux qui voudra bâtir un système semi-présidentiel, sinon présidentiel" estime Samuel Abraham, directeur de l'Ecole supérieure des arts libéraux (BISLA) de Bratislava. "L'élection présidentielle est devenue un référendum sur Robert Fico et la concentration des pouvoirs" affirme Grigorij Meseznikov de l'Institut des Affaires publiques (IVO).
Pour espérer l'emporter le 29 mars, Robert. Fico doit absolument parvenir à mobiliser les électeurs de son parti qui, probablement trop assurés de la victoire de leur favori, ont quelque peu déserté les urnes lors du 1er tour de scrutin.
Le ministre de l'Intérieur, Robert Kalinak, devrait succéder à Robert Fico à la tête du gouvernement en cas de victoire de ce dernier au 2e tour. Celui-ci a par ailleurs indiqué qu'il conserverait son poste de Premier ministre s'il était battu le 29 mars.
"La Slovaquie a besoin d'un président de la République indépendant et expérimenté et non pas d'avoir à sa tête un homme rassemblant tous les pouvoirs. Le chef de l'Etat ne doit pas être partisan, il doit être indépendant, pour que le gouvernement dispose d'un contre-pouvoir sain" affirme Andrej Kiska. "Nous avons l'occasion de changer notre Slovaquie" a-t-il déclaré après avoir voté le 15 mars dans sa ville natale de Poprad, située au cœur du pays.
L'homme, novice en politique et fondateur de L'Ange de la charité (Dobry Anjel), organisation caritative pour les familles d'enfants malades, se bat contre la corruption et la concentration des pouvoirs. "Les politiciens traditionnels ne s'occupent pas des problèmes réels des gens ordinaires. C'est pour essayer de changer cela que j'ai décidé de briguer la présidence de la République" a indiqué Andrej Kiska. Il a ajouté que Robert Fico avait dirigé le pays durant 6 années et que les Slovaques n'étaient toujours pas satisfaits. "La question est : doit-on accorder un nouveau mandat de 5 ans à une telle personne ?" s'est interrogé le candidat qui a promis, s'il est élu à la tête de l'Etat, de renoncer à sa rémunération de président pendant la totalité de son mandat pour en faire don à des œuvres de bienfaisance.
Andrej Kiska devrait bénéficier au 2e tour de scrutin du soutien de nombreux candidats du 1er tour. Ainsi, Pavol Hrusovsky, Milan Knazko et Radoslav Prochazka lui ont accordé leur appui dès l'annonce des résultats. "Je ferai tout pour empêcher Robert Fico de devenir président de la République" a déclaré Radoslav Prochazka. "Les 3 hommes ont peu de choses en commun mais ils sont unis dans la conviction que l'accession de Robert Fico à la tête de l'Etat lui donnerait tous les pouvoirs sur le pays" a indiqué Martin Simecka, éditorialiste à l'hebdomadaire Respekt.
"Sur le papier, Robert Fico a gagné, mais Andrej Kiska est le véritable vainqueur. Le 2e tour sera un référendum sur Robert Fico. Tous ces électeurs qui ont vu leur candidat échouer au 1er tour auront une raison de soutenir Andrej Kiska au 2e tour" a souligné Marian Lesko. "Je m'attends à ce qu'Andrej Kiska ramasse au 2e tour les voix de ceux qui ne veulent pas de Robert Fico pour président de la République et de ceux dont le candidat aura échoué au 1er tour" a affirmé Grigorij Meseznikov.
"Le président de la République doit être un responsable politique expérimenté qui connaît le monde et qui a des contacts à l'étranger. Le duel final opposera un candidat qui offre son expérience à un autre qui ne connaît rien" a affirmé Robert Fico lors d'un débat télévisé avant le 1er tour. Pourtant, pour Grigorij Meseznikov, "Robert Fico est un populiste avec des tendances autoritaires. Andrej Kiska est vu comme un homme qui a réussi. Son manque d'expérience politique est aujourd'hui un avantage car les électeurs sont des déçus de la politique".
Le jeu reste donc ouvert pour le 2e tour de scrutin le 29 mars. Les électeurs devront choisir entre Andrej Kiska, qui se positionne en dehors des partis, et le Premier ministre sortant Robert Fico, qui peut s'appuyer sur son expérience de chef du gouvernement.
Une enquête d'opinion, réalisée par l'institut Focus avant le 1er tour de scrutin, accordait 53,7% des suffrages à Andrej Kiska et 46,3% à Robert Fico dans un 2e tour les opposant.
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