Le Centre de l'harmonie (parti d'opposition de gauche) en tête des sondages pour les élections législatives en Lettonie le 17 septembre

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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12 septembre 2011
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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13 partis politiques[1] (dont 12 présentent des candidats dans les 5 régions du pays : Riga (30 sièges), Vidzeme (27), Latgale (15), Zemgale (15), Kurzeme (13)) sont en lice pour les élections législatives le 17 septembre prochain en Lettonie, soit un nombre identique à celui enregistré l'an dernier pour le précédent scrutin du 2 octobre 2010. 1 092 personnes seront candidates à un poste de député de la Saeima, chambre unique du parlement. 77 bureaux de vote seront ouverts pour les Lettons de l'étranger.

Le président de la Commission électorale centrale (CVK) Arnis Cimdars a proposé de donner aux Lettons la possibilité de remplir leur devoir civique au cours des trois jours précédant le scrutin, de façon à augmenter la participation. Il s'est également déclaré opposé au vote par internet, en vigueur dans l'Estonie voisine, jugeant le réseau mondial insuffisamment sécurisé pour une telle opération.

Selon Arnis Cimdars, les deux tiers des inscrits (67%) devraient participer au scrutin. Ce chiffre découle de la participation enregistrée lors du référendum du 23 juillet dernier sur la dissolution du parlement (44,73%), un chiffre élevé comparativement aux précédentes consultations populaires. " Nous avons de nouveaux partis ainsi que des partis plus forts et qui ont renouvelé leurs listes de candidats, ce qui devrait jouer sur la participation " a-t-il déclaré.

 

Après le référendum du 23 juillet dernier (94,30% des votants se sont prononcés en faveur de la dissolution de la Saeima), le scrutin législatif devrait témoigner du déclin de l'influence des oligarques dont les trois principaux représentants sont Aivars Lembergs (Union des Verts et des paysans, ZZS), maire de Ventspils depuis 1988 et poursuivi par la justice pour corruption et blanchiment d'argent, Andris Skele, leader du Parti populaire (TP), membre de la coalition électorale Pour une bonne Lettonie, ancien Premier ministre (1995-1997 et 1999-2000), ou Ainars Slesers, leader de Premier parti de Lettonie-Voie lettone (LPP-LC), ancien vice-maire de Riga, soupçonné de versement et d'acquisition de pots-de-vin, de blanchiment d'argent, de fausses déclarations et d'abus de pouvoir.

Par ailleurs, les électeurs ne choisissent pas leur candidat en fonction du programme économique de son parti, mais plutôt en fonction de sa personnalité.

Enfin, le scrutin du 17 septembre pourrait consacrer la première victoire d'un parti de l'opposition de gauche dans le pays. En effet, le Centre de l'harmonie (SC) dirigé par le maire de Riga, Nils Usakovs, pourrait arriver en tête des votes et participer au prochain gouvernement.

 

Pour de nombreux analystes politiques ou économiques, une victoire du Centre de l'harmonie menacerait la stabilité financière de la Lettonie et sa relance économique. Le parti de Nils Usakov a en effet déclaré que s'il participait au gouvernement, il demanderait la renégociation les termes du remboursement du prêt de 7,5 milliards € (dû pour 2014) accordé par le Fonds monétaire international (FMI) et stopperait une partie des coupes prévues pour réduire le déficit budgétaire. Le Centre de l'harmonie s'est fixé un objectif de déficit de l'ordre de 5% ou 6% au lieu des 3% (qui correspondent aux obligations fixés par le Pacte de stabilité et de croissance de l'Union européenne) exigés par le gouvernement sortant de Valdis Dombrovskis (Vienotiba, Unité, V). La Lettonie a adopté de sévères mesures d'austérité pour reprendre le contrôle de ses finances, sortir de la crise économique qui l'avait durement affectée et être en capacité d'adopter la monnaie unique en 2014 (une perspective soutenue par la grande majorité des partis politiques). Une politique de rigueur que le Centre de l'harmonie pourrait remettre en cause s'il parvient au gouvernement.

Les perspectives de voir le Centre de l'harmonie au pouvoir sont plutôt élevées " a indiqué Nils Muiznieks, directeur de l'Institut de recherche sociale et politique avancée de l'université de Lettonie, ajoutant " Ils souhaitent vraiment gouverner. Le parti signera sans condition pour son entrée au gouvernement, quoi que ses membres peuvent dire aujourd'hui ". Selon Edgars Rinkevics, ancien chef de cabinet du président de la République, Valdis Zatlers, le prochain gouvernement sera constitué d'Unité (V) et du Parti de la réforme de Zatlers (ZRP) qui s'allieront avec le Centre de l'harmonie ou avec Alliance nationale, nouveau parti issu de la fusion de l'Union pour la patrie et la liberté (TB/LNNK) et du parti d'extrême droite, Tous pour la Lettonie (VL). Janis Ikstens, politologue, considère qu'Unité et le Centre de l'harmonie auront des difficultés pour trouver un accord en raison de leurs divergences sur l'économie et la politique étrangère. Le ministre des Affaires étrangères Girts Valdis Kristovskis (V) a indiqué qu'il lui semblait indispensable que le poste qu'il occupe reste entre les mains d'une personnalité de droite. Selon lui, le Centre de l'harmonie ne s'est pas montré une force politique suffisamment mature pour exercer de telles responsabilités et ne serait pas capable " de défendre les intérêts de la nation lettone ". Selon un rapport de Wikileaks, les Etats-Unis auraient exprimé leur inquiétude quant à l'accroissement de l'influence du Centre de l'harmonie et son éventuelle participation au prochain gouvernement letton.

 

Le soutien aux réformes économiques n'est qu'une des conditions fixées par Unité au Centre de l'harmonie (au cas où il arriverait en tête du scrutin) pour que celui-ci puisse rejoindre le gouvernement. La reconnaissance de l'occupation de la Lettonie par l'Union soviétique entre 1945 et 1991 constitue également un élément essentiel pour le parti du Premier ministre. " Admettre l'occupation aurait des conséquences pour nos électeurs. Toutes les personnes qui sont arrivées en Lettonie après 1940 devraient alors être considérées comme des occupants et voir leurs droits réduits " a déclaré Boriss Cilevics, député (SC).

Les Lettons formaient en effet les trois quarts (77%) des habitants de la Lettonie en 1935 et seulement la moitié (52%) en 1989. Ils en représentent dorénavant 60%. La communauté russophone compte 600 000 personnes, soit un tiers des habitants du pays. Selon les chiffres du Bureau de la citoyenneté et des affaires migratoires, près de 335 000 d'entre eux sont apatrides (ils étaient 715 000 au moment de l'indépendance en 1991). La plupart d'entre eux possèdent un passeport de 'non-citoyens lettons'. Ce statut leur donne le droit de résider dans le pays et l'accès aux services sociaux. Ils ne sont cependant pas autorisés à voter aux élections nationales et locales ou à travailler dans la police ou l'armée et doivent obtenir un visa pour se rendre dans certains pays.

Les apatrides ont lancé, sous l'initiative de Pour les droits de l'Homme dans une Lettonie unie (PCTVL), qui défend la minorité russophone, une campagne de collecte de signatures pour demander l'organisation d'un référendum sur leur accès à la citoyenneté lettone. " Nous appelons tous ceux qui nous soutiennent et tous les citoyens de Lettonie à participer à la collecte de signatures pour organiser un référendum, faire cesser la discrimination ethnique et restaurer la justice dans les relations entre tous les Lettons. Nous demandons l'universalité du droit de vote et l'unité des habitants de Lettonie " peut-on lire dans l'appel à signature.

 

Notre but est d'empêcher les oligarques et les intérêts économiques d'influencer la politique lettone et le gouvernement. Notre parti est complètement indépendant des hommes d'affaires et de tout intérêt économique " a déclaré Valdis Zatlers, ancien président de la République (2007-2011) et leader du Parti de la réforme de Zatlers, dont Edmunds Sprudzs est le candidat pour le poste de Premier ministre.

Le second gouvernement de Valdis Dombrovskis (réélu il y a moins d'un an !) n'a pas su répondre aux attentes des électeurs et le résultat du référendum du 23 juillet n'est pas flatteur pour lui " a indiqué Valdis Zatlers. La présidente de la Saeima, Solvita Aboltina (V), lui a répondu que le résultat de la consultation populaire avait surtout été l'expression de l'opinion qu'ont les Lettons des politiques qui ont gouverné le pays durant ces 20 dernières années et leur souhait de voir les choses changer rapidement. Elle a cité le retour à l'équilibre du budget comme la plus grande réussite du gouvernement conduit par Valdis Dombrovskis.

Solvita Aboltina a comparé les promesses électorales de l'Union des Verts et des paysans sur les pensions de retraites à celles faites aux soldats et aux paysans durant la période bolchévique. " Il est facile de promettre aux gens qu'on leur donnera tout ce qu'ils désirent mais les responsables politiques doivent tenir compte de la réalité " a-t-elle déclaré. Elle a cité le Parti de la réforme de Zatlers comme celui dont le programme était le plus proche d'Unité. La présidente du parlement a cependant critiqué les personnes choisies par le parti de Zatlers pour occuper des fonctions ministérielles, les qualifiant d'" incompétents dans leurs domaines ". " Les responsables politiques doivent être capables de gouverner ensemble. Nous avons besoin de développer notre pays, ce que nous ne pourrons faire qu'en parvenant à former un gouvernement stable " a-t-elle indiqué.

Ceux qui ont soutenu Valdis Zatlers lors du référendum espèrent que celui-ci va changer leurs vies. Il ne le fera pas et c'est ce qui m'effraie " a déclaré Ivars Ijabs, politologue à l'université de Lettonie.

 

Roberts Zile (TB/LNNK) a indiqué qu'il déciderait à l'issue du scrutin du 17 septembre de rester ou non au sein de l'Alliance nationale. Il a mis en suspens la coprésidence du parti (qu'il exerçait avec Ratvis Dzintars) dont il a déclaré déplorer la radicalité et le nationalisme. Guidis Berzins est le candidat d'Alliance nationale au poste de Premier ministre.

Enfin, selon Ainars Slesers, 3 partis (Premier de Lettonie-Voie lettone, l'Union des Verts et des paysans et le Centre de l'harmonie) peuvent recueillir la majorité des sièges au parlement le 17 septembre prochain. Il a donc indiqué que le Centre de l'Harmonie avait fortement besoin de Premier de Lettonie-Voie lettone.

 

Selon les dernières enquêtes d'opinion, seuls 5 partis politiques franchiraient le seuil des 5% de suffrages indispensable pour être représenté au parlement.

Le Centre de l'harmonie arriverait en tête des élections législatives du 17 septembre prochain, suivi d'Unité, du Parti de la réforme de Zatlers, de l'Alliance nationale et de l'Union des Verts et des paysans.

Le président de la République, Andris Berzins, a déclaré le 7 septembre dernier qu'il n'entamerait pas les négociations pour la formation du prochain gouvernement avant le 28 septembre prochain, jour où le chef de l'Etat rentrera de l'Assemblée générale des Nations unies à New York. " Ces dix jours seront mis à profit par les partis pour trouver des arrangements. Je n'y vois pas de problème. Les négociations démarreront le 28 septembre, tout sera fait en temps et en heure et les partis seront prêts " a-t-il déclaré.

Conformément à ce que stipule la Constitution lettone, la Saeima élue le 17 septembre prochain devra tenir sa première séance dans le mois suivant, soit avant le 17 octobre.

[1]http://www.cvk.lv/cgi-bin/wdbcgiw/base/komisijas2010.cvkand11.sak

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