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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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ENCorinne Deloy
Fondation Robert Schuman
Le Parti populaire (PP), principal parti d'opposition, dirigé par Mariano Rajoy, s'est largement imposé aux élections parlementaires le 20 novembre en Espagne en recueillant 44,62% des suffrages et 186 sièges (soit +32 par rapport au scrutin du 8 mars 2008). Le Parti populaire a remporté la majorité absolue la plus large de son histoire et pourra donc gouverner seul, sans être obligé de faire alliance avec des partis nationalistes ou régionaux comme c'était le cas jusqu'à présent
Le Parti socialiste ouvrier (PSOE) du Premier ministre sortant José Luis Rodriguez Zapatero, emmené par Alfredo Perez Rubalcaba, a essuyé un revers considérable obtenant 28,73% des voix et 110 sièges, soit -59 députés. La Gauche unie (IU) de Cayo Lara Moya est arrivée en 3e position avec 6,92% et 11 députés (+9) ; suivie de Union, progrès et démocratie (UPyD) 4,69% et 5 sièges (+4) ; Convergence et union de Catalogne (CiU), dirigé par Artur Mas, 4,17% et 16 députés (+6) ; la coalition indépendantiste basque Amaiur 1,37% et 7 députés ; le Parti nationaliste basque (PNV-EAJ) de Inigo Urkullu 1,33% et 5 sièges (-1), la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), emmenée par Oriol Junqueras i Vies, 1,05% et 2 députés (=), le Bloc nationaliste galicien (BNG) de Guillerme Vázquez 0,75% et 2 sièges (=) et la Coalition des Canaries (CC), parti conduit par Claudina Morales, 0,59% et 2 députés (=).
Le Parti populaire s'est imposé dans 43 des 50 provinces que compte l'Espagne, le Parti socialiste ouvrier est majoritaire dans deux (Barcelone et Séville), Convergence et union de Catalogne dans trois (Lleida, Gérone et Tarragone), Amaiur dans une (Guipuscoa) et le Parti nationaliste basque dans une également (Biscaye).
Le Parti populaire a également remporté 136 sièges au Sénat (+ 48) tandis que le Parti socialiste ouvrier a perdu plus de la moitié de ses sénateurs (48, soit -53). Convergence et union de Catalogne (CiU) a obtenu 9 sièges (+ 5) ; le Parti socialiste de Catalogne allié à l'Initiative des Verts catalans (PSC-ICV), 7 ; le Parti nationaliste basque, 4 (+ 2) ; Amaiur, 3 et la Coalition des Canaries, 1 (=).
La participation aux élections législatives s'est élevée à 71,69%, soit légèrement au-dessus de celle enregistrée lors du scrutin du 8 mars 2008 (- 2,16 points). La participation au scrutin sénatorial s'est élevée à 71,17% (- 3,32 points).
Le Parti populaire (PP) a donc remporté la large victoire électorale que lui prédisaient toutes les enquêtes d'opinion. Ou faut-il plutôt dire que le PSOE a perdu le scrutin? L'échec des socialistes au pouvoir depuis 8 ans à juguler la grave crise économique et les nombreuses souffrances sociales que connaît l'Espagne a conduit à l'alternance. Le succès du PP doit certainement plus au rejet du gouvernement de José Luis Rodriguez Zapatero qu'à l'adhésion des Espagnols au programme du PP ou à la personne de Mariano Rajoy. "La crise a donné le pouvoir absolu à Rajoy" peut-on lire le 21 novembre à la une du journal El Pais.
"Aujourd'hui plus que jamais, notre destin est en jeu ici et au sein de l'Europe. Nous allons cesser d'être un problème pour redevenir la solution" a déclaré Mariano Rajoy.
Le troisième essai aura donc été le bon pour le leader du PP qui a survécu à deux défaites électorales (en 2004 et en 2008). "Il a repris en main, d'une main qui semblait molle, un parti miné par les affaires de corruption, les clans et les rivalités. Il a la chance d'avoir été beaucoup critiqué par la presse de droite et haï par la droite dure : cela lui donne une image de centriste. Il rassure. Et s'il gagne, il n'aura aucune dette envers eux. Il ne devra sa victoire à personne. Pas même à lui-même... Mais surtout aux circonstances" déclarait le politologue José Juan Toharia. "Mariano Rajoy ne suscite pas l'enthousiasme mais la situation critique actuelle, qui exige fiabilité et prévisibilité, est propice à son genre de leadership. Il cultive une image de monsieur-tout-le-monde plein de bon sens, vénérant l'exigence, l'effort et le mérite" affirme Javier Redondo, professeur de science politique de l'université Carlos III de Madrid. "Mariano Rajoy n'a aucun charisme. Mais c'est précisément ce qui fait sa force. Il est un homme ennuyeux mais vous pouvez compter sur lui" souligne Narciso Michavila, directeur de l'institut d'opinion GAD3.
Mariano Rajoy est resté assez flou sur la politique qu'il mettra en œuvre après le 20 novembre. "Je suis prêt à faire ce que les Espagnols souhaitent et je suis à leur service" a-t-il indiqué. "Ma première priorité sera de maintenir le pouvoir d'achat des retraites. A partir de là, il faudra faire des coupes partout" déclarait-il dans un entretien au quotidien El Pais le 17 novembre, soulignant "Le plan de stabilité à Bruxelles prévoit un engagement de déficit de 4,4%. Ma volonté est de l'appliquer. Tout le monde doit savoir que pour mon gouvernement, la priorité sera de tenir les engagements de l'Espagne à Bruxelles".
Avec le slogan Sùmate al cambio (Rejoins le changement), le PP a présenté un programme de gouvernement intitulé "Plus de société, un meilleur gouvernement" qui propose une réforme du marché du travail, une réforme fiscale et l'assainissement du système financier ainsi que des baisses d'impôts pour les chefs d'entreprise. "Demain commence une nouvelle étape au cours de laquelle notre seul objectif sera de vaincre la crise et le chômage" a déclaré Ana Mato, chef de campagne du PP. "Nous éprouvons une énorme satisfaction mêlée à un sentiment d'énorme responsabilité dans ces moments difficiles" a affirmé Maria Dolores Cospedal, présidente de la région de Castille-La Manche.
Pelea por lo que quieres (Bats-toi pour ce que tu aimes), tel était le slogan du PSOE mais peu d'Espagnols semblaient prêts à se battre pour une politique d'austérité qui a peiné à porter ses fruits. Alfredo Perez Rubalcaba avait d'ailleurs reconnu que le gouvernement sortant de José Luis Rodriguez Zapatero n'avait pas su trouver les bonnes réponses à la crise économique.
Agé de 56 ans et originaire de Saint-Jacques-de-Compostelle, Mariano Rajoy est juriste. Il a commencé sa carrière en exerçant le métier de conservateur des hypothèques. En 1980, il adhère à l'Alliance populaire (AP), fondée en 1976 par l'ancien ministre franquiste (1962-1969 et 1975-1976) Manuel Fraga. Elu député du Parlement de Galice lors des premières élections régionales du 20 octobre 1981, il remporte un siège au Congrès des députés quelques jours plus tard. Il en démissionne pour devenir vice-président du gouvernement galicien. En 1989, lorsque José Maria Aznar prend la tête de l'Alliance populaire qu'il renomme Parti populaire, Mariano Rajoy est nommé secrétaire général. En 1996, il devient ministre des Administrations publiques, puis trois ans plus tard, de l'Education et de la Culture. En 2000, il est nommé 1er vice-président du gouvernement (poste auquel il reste jusqu'en 2003) conduit par José Maria Aznar et l'année suivante, ministre de l'Intérieur. En 2003, il est préféré à Rodrigo Rato et Jaime Mayor Oreja pour succéder à José Maria Aznar à la tête du PP. Il perd le scrutin de 2004, qui s'est déroulé dans des circonstances particulières (quatre jours avant le vote, l'Espagne a connu l'attaque terroriste la plus meurtrière de son histoire lorsque dix bombes ont explosé à Madrid à quelques minutes d'intervalle dans quatre trains de banlieue faisant 191 morts et 1500 blessés). Quatre ans plus tard, Mariano Rajoy échoue de nouveau à conduire le PP à la victoire.
Cette fois-ci est la bonne et il s'installera au palais de la Moncloa, siège du gouvernement.
Le nouveau gouvernement espagnol devra réduire les déséquilibres de l'Espagne (notamment son déficit public), d'assainir son secteur bancaire, de faire progresser la croissance. "Il veut faire la guerre à la crise" et n'aura pas d'état de grâce. Le 19 novembre, environ 200 personnes issues du mouvement des Indignés se sont rassemblées à la Puerta del Sol de Madrid pour appeler au boycott des deux principaux partis politiques. Les Indignés se sont prêts à manifester de nouveau une fois que le nouveau gouvernement aura présenté son plan d'austérité. Conscientes de la gravité de la crise et des incertitudes qui pèsent sur Madrid, les autorités du pays ont étudié la possibilité d'accélérer la passation de pouvoir, le processus post-électoral ne permettant pas au prochain gouvernement de prendre ses fonctions avant le 20 décembre prochain, soit une semaine après la première réunion des Cortes generales, nom du Parlement espagnol, le 13 décembre.
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