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Le 12 juin prochain, les Slovaques sont appelés à renouveler les 150 membres du Conseil national de la République, Chambre unique du Parlement.
La campagne électorale a longtemps été centrée sur les enjeux de l'emploi et des questions sociales, la sécurité et la lutte contre la corruption. Mais le vote, le 26 mai dernier, par le Parlement hongrois d'un amendement à la loi sur la nationalité accordant un passeport hongrois (appelé "passeport Trianon" du nom du traité dont on a fêté le 4 juin dernier le 90e anniversaire) aux Magyars d'origine (sous condition qu'ils parlent la langue hongroise) a placé la question nationale au cœur de la campagne électorale slovaque.
Le Chef du gouvernement Robert Fico (Direction-Démocratie sociale, SMER-SD) a réagi avec véhémence à cet amendement, rappelant son ambassadeur à Budapest et dénonçant l'arrogance et la surenchère nationalistes du gouvernement hongrois. Il a affirmé que cette loi représentait un "risque pour la sécurité de la Slovaquie" et a convoqué le Conseil de sécurité de l'Etat, réunion restreinte du cabinet prévue par la Constitution en cas de menace terroriste militaire ou catastrophe naturelle. Le Parlement slovaque a immédiatement réagi à la mesure mise en place par son voisin hongrois en votant à une majorité de 90 voix (sur 115 membres présents) un amendement à la loi sur la citoyenneté qui stipule que tout Slovaque qui prend volontairement la nationalité d'un autre pays perd automatiquement sa précédente nationalité (des négociations pourraient avoir lieu en ce qui concerne les Tchèques). Une amende de 3 000 € sera infligée aux personnes ne déclarant pas leur double nationalité. Le ministre des Affaires étrangères, Miroslav Lajcak, a affirmé que la révision votée par le Conseil national de la République était déjà la norme dans plusieurs pays européens comme l'Autriche, la République tchèque ou l'Estonie. Le Parti de la coalition hongroise (SMK) s'est élevé contre cet amendement qu'il juge antidémocratique et anticonstitutionnel. L'ancien leader de l'Union démocratique et chrétienne-Parti démocratique (SDKU-DS), Mikulas Dzurinda, a indiqué que la révision de la loi sur la citoyenneté allait à l'encontre des intérêts slovaques car elle pouvait conduire à l'émergence d'une nouvelle minorité, celle des citoyens hongrois résidant (de façon permanente) en Slovaquie. "Ce nouvel épisode des tensions slovaco-hongroises intervient au plus mauvais moment pour l'opposition démocratique qui avait le vent en poupe et favorise les partis populistes et nationalistes en alimentant le discours anti hongrois. Les partis nationalistes au pouvoir ont maintenant des arguments supplémentaires. Quoi de mieux que la carte hongroise pour faire oublier les affaires de corruption et les difficultés économiques !" a souligné le président de l'Institut des affaires publiques, Grigorij Meseznikov. Le Parti national slovaque (SNS) et SMER-SD avaient déjà utilisé la "carte hongroise" lors de l'élection présidentielle des 21 mars et 4 avril 2009. Environ 500 000 Hongrois d'origine vivent en Slovaquie, représentant 10% de la population.
Direction-Démocratie sociale (SMER-SD) fait campagne sur son bilan après 4 ans à la tête du pays. Le parti s'enorgueillit d'avoir permis à la Slovaquie de devenir le premier pays d'Europe centrale et occidentale à avoir adopté la monnaie unique. Il met également en avant l'entrée du pays dans l'espace Schengen. L'action du Premier ministre s'est toutefois inscrite dans la continuité de celle de son prédécesseur, Mikulas Dzurinda, au pouvoir entre 1998 et 2006 même si le gouvernement de Robert Fico a supprimé quelques mesures prises par son prédécesseur comme les franchises médicales. Le Premier ministre sortant n'a pas touché à l'impôt à taux unique qui porte à la fois sur le revenu, sur les sociétés et sur la TVA, fixé à 19% (qu'il a cependant baissé sur certains produits) ni interdit les versements d'argent à des fonds privé d'assurance retraite. Les principales critiques adressés à Robert Fico concernent le renforcement du rôle de l'Etat, notamment en matière économique, la faiblesse des efforts entrepris pour réduire les dépenses publiques, la détérioration des relations du pays avec la Hongrie voisine et la multiplication des scandales financiers et des affaires de corruption. La loi sur la presse, qui fait obligation aux journaux de publier les réactions des personnes évoquées, est considérée par beaucoup comme une menace sur la liberté expression. Enfin, la loi sur l'établissement du slovaque comme langue d'Etat fait l'objet de critiques de la part de nombreuses personnalités qui voient dans ce texte l'introduction d'une discrimination contre la population hongroise ou plus généralement contre les minorités. "En fin politique, Robert Fico suit les enquêtes d'opinion et a décidé de remettre sa décision sur l'aide de la Slovaquie à la Grèce, arguant du fait que le prêt de Bratislava à Athènes doit être entériné par le nouveau Parlement" analyse Petr Horvath, politologue de l'université de Trnava. "Les appels de Robert Fico invitant la Grèce à réduire son budget ne s'accordent pas avec ses propres promesses de continuer à construire un Etat social" souligne Grigorij Meseznikov. De même, les promesses de politique sociale du Premier ministre seront difficiles à honorer sans accroître encore la dette publique du pays déjà élevée.
Si le Président de la République, Ivan Gasparovic, ne soutient officiellement aucun parti pour les élections législatives du 12 juin prochain, il reste proche de SMER-SD. "Il a presque le même programme que moi" a-t-il déclaré de Robert Fico. Le Chef de l'Etat a mis en garde contre le nombre de partis que comprendra la future coalition gouvernementale. Selon lui, un grand nombre de partis fragiliserait le gouvernement. "Plus il y a de partis, plus il est probable que des élections anticipées soient organisées" a-t-il souligné. "Plus longue sera la formation de la coalition gouvernementale, plus le pays sera confronté à des problèmes économiques et internationaux" a affirmé Ivan Gasparovic.
"Ces élections législatives constituent un référendum sur la voie sur laquelle la Slovaquie doit s'engager" affirme Iveta Radicova (SDKU-DS). Selon la leader chrétienne-démocrate, Robert Fico propose un programme "fondé sur des prêts et la couverture des pertes des banques dans laquelle les pauvres payent pour les riches et les responsables pour les irresponsables" tandis que l'opposition, et notamment le SDKU-DS, offre aux électeurs une politique responsable de réformes dans laquelle la décision appartient au peuple souverain. "SMER-SD n'est focalisé que sur une chose : les 4 années qu'il a passées au gouvernement sortant, ce qui prouve que le parti est incapable d'offrir quelque chose de nouveau à la population" a déclaré Iveta Radicova. Le SDKU-DS a appelé à des élections fondées sur une véritable mise en concurrence des programmes et non sur des promesses ou, pire, sur des insultes ou des passions nationales.
Le SDKU-DS s'est réjoui du succès des forces de droite qui ont remporté les élections législatives en République tchèque le 29 mai dernier. "La responsabilité a été plus forte que le populisme, la force de proposition plus forte que les attaques. Les résultats du scrutin tchèque prouvent qu'une campagne électorale négative et les attaques contre les adversaires ne conduisent pas au succès" a déclaré Iveta Radicova. Cette dernière s'est également élevée contre les évêques qui ont demandé de voter en faveur du Mouvement chrétien-démocrate (KDH) le 12 juin affirmant que ce parti était "profondément inspirée par la chrétienté et les valeurs chrétiennes".
"Assez, nous voulons le changement", tel est le slogan du Parti de la coalition hongroise. Son leader, Pal Csaky, que le Premier ministre sortant Robert Fico a qualifié "d'extension de Viktor Orban", se bat pour que le Parti national slovaque n'entre pas au gouvernement. Le Parti de la coalition hongroise a déclaré qu'il ne souhaitait pas gouverner avec SMER-SD. "Nous pensons d'abord à nos résultats, puis à une coopération avec l'Union démocratique et chrétienne-Parti démocratique et avec le Mouvement chrétien-démocrate (KDH)" a indiqué Pal Csaky. Most-Hid, l'autre parti représentant les minorités ethniques dirigé par Bela Burgar, partage cette opinion et a affirmé sa volonté de coopérer avec l'opposition, y compris avec le Parti de la coalition hongroise. Sur ce dernier point, Pal Csaky a répondu que le leader de Most-Hid aurait du penser à cette éventualité avant de quitter le Parti de la coalition hongroise pour former son parti. Le Parti civique conservateur (OKS) dirigé par Peter Zajac a décidé de s'allier au Most-Hid pour le scrutin du 12 juin.
Le Mouvement chrétien-démocrate (KDH) a rejeté le 24 mai dernier toute coopération avec SMER-SD. Le parti dirigé par Jan Figel, ancien Commissaire européen, fait de la lutte contre la corruption l'une des conditions indispensables pour un retour de la Slovaquie à une économie saine et à un développement social. Selon le KDH, la coalition gouvernementale sortante, qui a dû faire face à de nombreux scandales financiers, a aggravé la situation socioéconomique du pays. Cependant, Jan Figel, qui déclare faire tout son possible pour une victoire de la droite, a affirmé qu'une coalition de son parti avec SMER-SD ne pouvait être complètement exclue, même s'il ne l'envisagerait qu'en dernier recours.
Le nationaliste Martin Piry (SNS) a fait scandale en présentant un court métrage de dix minutes montrant des enfants roms faisant des gestes obscènes dans un camp gitan de Kosice. Interpellé sur le fait que le Parti national slovaque gouverne depuis 4 ans et qu'il n'a rien fait pour améliorer la situation de cette population, Martin Piry a répondu que le "problème" relevait des ministères de l'Intérieur et du travail et que ces deux postes n'étaient pas détenus par son parti dans le gouvernement sortant. Le porte-parole du Parti national slovaque, Dusan Strauss, a tenu à souligner que l'objectif de son parti était d'attirer l'attention sur les problèmes dus "aux abus de certaines personnes qui percevaient indûment des prestations sociales". "Pour ne pas nourrir ceux qui ne veulent pas travailler" peut-on lire sur les affiches du parti. La Slovaquie compte 250 000 Roms vivant surtout à l'est et au sud du pays.
Enfin, le Mouvement pour une Slovaquie démocratique (LS-HZDS) s'est élevé contre l'évaluation des programmes des partis politiques pour les élections législatives réalisée par deux think tanks indépendants l'INESS et l'INEKO. Ces deux instituts ont accordé au parti de l'ancien Premier ministre (1993-1998) Vladimir Meciar la moins bonne note. "Aucun des partis ne présente un programme comprenant des mesures concrètes qui permettraient d'économiser au mois 1,5 ou 2 milliard(s) €, soit la somme nécessaire pour que le pays retrouve un budget équilibré" a déclaré Radovan Durana de l'INESS. Le président de l'Institut des affaires publiques, Grigorij Meseznikov, a affirmé que le programme social de SMER-SD (qui prévoit par exemple la poursuite de l'augmentation des pensions de retraite) conduira inévitablement à augmenter la dette publique, les autres partis fondant leurs promesses sur une amélioration de la conjoncture et sur une meilleure utilisation des fonds européens. Le programme du LS-HZDS a été jugé par l'organisation non gouvernementale consacrée à la lutte contre la corruption, Transparency International, comme le moins performant en matière de lutte conter la criminalité financière. Selon l'organisation, le SDKU-DS et le parti créé par l'auteur de la réforme fiscale slovaque, Richard Sulik, Liberté et solidarité (SaS), sont les 2 partis qui présentent les meilleurs programmes de lutte contre la corruption.
Selon la dernière enquête d'opinion réalisée par l'institut Polis, SMER-SD arriverait largement en tête des élections législatives du 12 juin prochain avec 34,3% des suffrages. Il devancerait le SKDU-DS 16%, le KDH 11,9%, Liberté et solidarité 9,9% (il entrerait ainsi au Parlement), Most-Hid 5,3% et le Parti de la coalition hongroise 5,1%. La participation devrait s'élever à environ 60%.
Les deux partenaires gouvernementaux de SMER-SD, à savoir le Parti national slovaque et le Mouvement pour une Slovaquie démocratique ont beaucoup chuté dans les enquêtes d'opinion et pourraient être exclus du Parlement. Robert Fico connaîtrait alors d'importantes difficultés pour former un gouvernement à l'issue du scrutin.
Une autre enquête d'opinion réalisée à mi mai révèle que 41,5% des Slovaques déclarent faire confiance au Premier ministre sortant Robert Fico, 17,4% à Iveta Radicova et 17% à Jan Figel. Enfin, un sondage réalisé par l'institut MVK entre le 16 et le 23 avril dernier montre que les électeurs du KDH sont les plus fidèles, ceux du Parti national slovaque étant les plus volatiles. Ainsi, 42% des personnes ayant voté en faveur du Parti national slovaque et 49% de celles qui se sont prononcées en faveur du Mouvement pour une Slovaquie démocratique lors des dernières élections législatives du 17 juin 2006 s'apprêtent à donner leur voix à SMER-SD tandis que plus des 3/4 des anciens électeurs du KDH (78%) déclarent qu'ils voteront de nouveau pour ce parti. 15,5% d'entre eux devraient voter pour le parti du Premier ministre sortant.
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