Election présidentielle en Lituanie, 17 mai-7 juin 2009

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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16 avril 2009
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Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Les Lituaniens sont appelés aux urnes le 17 mai prochain pour le 1er tour de l'élection présidentielle. Ils doivent désigner le successeur du Chef de l'Etat sortant, Valdas Adamkus, qui ne se représente pas. Si aucun candidat ne recueille la majorité des suffrages lors du 1er tour, les électeurs seront conviés à un 2e tour dans lequel s'affronteront les deux personnalités arrivées en tête le 17 mai. Ce 2e tour de scrutin sera organisé le 7 juin prochain, soit le même jour que les élections européennes dans le pays.

Le Président de la République sortant, Valdas Adamkus, a refusé d'appeler à voter en faveur d'un candidat particulier : "Je ne recommanderai personne au peuple lituanien. Il choisira par lui-même".

7 candidats sont officiellement en lice :

- Dalia Grybauskaite, 53 ans, ancienne ministre des Finances (2001-2004) du gouvernement dirigé par Algridas Brazauskas et actuelle Commissaire européenne au Budget et à la Programmation financière. Candidate indépendante, elle a reçu le soutien du Premier ministre Andrius Kubilius ;

- Algirdas Butkevicius, 50 ans, candidat du Parti social-démocrate (LSP) dirigé par Gediminas Kirkilas et successeur en 2004 de Dalia Grybauskaite au ministère des Finances ;

- Valentinas Mazuronis, 55 ans, candidate de Pour l'ordre et la justice (TT) dirigé par l'ancien Président de la République Rolandas Paksas (qui a été destitué de sa fonction de Chef de l'Etat par le Seimas le 6 avril 2004) ;

- Kazimiera Danute Prunskiene, 61 ans, ancien Premier ministre (1990-1991), candidate de l'Union paysanne populaire (LVLS) ;

- Loreta Grauziniene, candidate du Parti du travail (DP) dirigé par le milliardaire d'origine russe Viktor Ouspaskitch ;

- Ceslovas Jezerkas, général de l'armée lituanienne qui se présente en candidat indépendant ;

- Waldemar Tomaszewki, président de l'Action électorale polonaise (LLRA) représentant la minorité polonaise de Lituanie.

La fonction présidentielle

Le Président de la République est élu en Lituanie tous les 5 ans au suffrage universel. Une même personne ne peut être réélue plus de 2 fois consécutives. Les pouvoirs du Chef de l'Etat sont limités. Il est le chef suprême des armées et de la sûreté de l'Etat et il nomme les représentants diplomatiques de la Lituanie à l'étranger comme auprès des organisations internationales. Il propose également les candidatures du président et des magistrats de la Cour suprême de justice, de la Cour d'appel et des cours de justice des autres divisions administratives du pays, les nominations étant in fine du ressort du Seimas, Parlement lituanien.

La fonction présidentielle n'est accessible qu'aux personnes âgées d'au moins 40 ans. Tout candidat doit présenter au moins 20 000 signatures d'électeurs favorables à sa candidature et laisser une caution équivalent à 5 mois de salaire moyen (soit environ 58 000 litas – 3 360 €).

L'homme d'affaires Vladimir Romanov souhaitait se présenter à l'élection présidentielle mais a vu sa candidature refusée, étant né russe. Fondateur de Ukio Bankas, la première banque commerciale de Lituanie et à la tête d'un empire industriel dans les secteurs du textile et de l'aluminium, Vladimir Romanov, par ailleurs propriétaire du club de football "FKB Kaunas" et de celui des Hearts de Edimbourg, est venu vivre en Lituanie à l'âge de 9 ans. La Constitution du pays oblige tout candidat à être né de parents lituaniens et à vivre dans le pays depuis au moins 3 ans. La mère de Vladimir Romanov a pris la nationalité lituanienne en 1993.

Selon une enquête d'opinion réalisée par l'institut Spinter Tyrimai, les Lituaniens souhaitent voir leur Président s'engager davantage dans les affaires intérieures du pays et notamment dans le secteur économique (56,2% expriment cette opinion). L'historien Vygantas Vareikis, professeur à l'université de Klapeida, souligne que le temps où le Chef de l'Etat n'intervenait pas dans la politique intérieure est révolu. Selon lui, Valdas Adamkus avait volontairement limité ses activités au secteur international mais "le Président de la République doit être une figure d'unité surtout dans la crise actuelle" déclare t-il, ajoutant "Dalia Grybauskaite est sûrement la seule à remplir les critères permettant de le faire efficacement".

La campagne électorale

Dalia Grybauskaite a pris la décision de se présenter à l'élection présidentielle après les manifestations qui ont eu lieu en Lituanie le 16 janvier dernier. Après moult hésitations, elle a annoncé sa candidature le 26 février indiquant qu'elle avait été influencée par la situation économique mondiale et les perspectives de la Lituanie dans la crise économique. "Je suis prête à revenir en Lituanie si les gens décident qu'ils ont besoin de moi" a-t-elle déclaré.

Dalia Grybauskaite est, à un mois du 1er tour, largement en tête dans toutes les enquêtes d'opinion Si l'on en croit les sondages, elle pourrait même être élue au 1er tour de scrutin, ce qui est inédit en Lituanie. Sa popularité a fortement cru depuis 2007, où elle s'est élevée contre l'action du gouvernement social-démocrate de Gediminas Kirkilas, puis de nouveau à la fin de l'année 2008 à l'occasion de la crise économique. Sa compétence reconnue au niveau européen et son indépendance sont apparues comme des gages d'efficacité et de probité.

Dalia Grybauskaite a indiqué que le Chef de l'Etat pouvait et devait être plus actif dans les affaires intérieures du pays. " Le cliché veut que le Premier ministre s'occupe des affaires intérieures et que le Président de la République traite seulement de la politique étrangère. La Constitution donne suffisamment de pouvoirs au Chef de l'Etat et celui-ci doit en user. Quel que soit le nouveau Président élu en mai-juin, il devra accorder davantage d'attention aux enjeux intérieurs" a-t-elle souligné.

La Commissaire européenne au Budget et à la Programmation financière a quitté ses fonctions à Bruxelles le 17 avril. Elle est remplacée par Siim Kallas, vice-président de la Commission européenne et Commissaire européen chargé des Affaires administratives, d'Audit et de la Lutte antifraude.

Le 3 avril dernier, Arunas Valinskas, président du Seimas (Parlement) et leader du Parti populaire de la résurrection nationale (TPP) qui avait créé la surprise en remportant 13 sièges lors des dernières élections législatives des 12 et 26 octobre 2008, a retiré sa candidature au scrutin présidentiel et annoncé qu'à titre personnel, il soutenait Dalia Grybauskaite. Le parti soutient 3 candidats différents à cette élection : outre Dalia Grybauskaite, il s'agit d'Algirdas Butkevicius et de Loreta Grauziniene.

"Dalia Grybauskaite représente la droite et elle a été nommée par les partis de droite. Avant les élections législatives, elle voulait augmenter les impôts et réduire les dépenses budgétaires et la consommation" a déclaré le candidat social-démocrate Algirdas Butkevicius. Ce dernier indique que la crise économique, qui est un événement international, n'est en aucun cas une conséquence de la politique menée par le gouvernement social-démocrate. "La crise est globale, elle a touché la Lituanie plus tard que les autres pays, ce qui veut dire que l'économie nationale avait certaines réserves qui nous ont permis de résister à la crise pendant un temps. Les sociaux-démocrates peuvent en être remerciés" a-t-il affirmé.

De son côté, la candidate de l'Union paysanne populaire, Kazimiera Danute Prunskiene, est de nouveau aux prises avec la justice. La Commission de la lustration a en effet demandé à la cour régionale de Vilnius de réexaminer le cas de la coopération de l'ancienne Premier ministre avec le KGB. Kazimiera Danute Prunskiene est accusée d'avoir travaillé pour les services secrets soviétiques sous le nom de Straija. "Il y a beaucoup de faits. Je peux définitivement dire que oui, elle a coopéré avec le KGB" a déclaré le président de la Commission de la lustration qui affirme que la coopération entre la candidate, économiste spécialiste de l'agriculture, et le KGB a débuté avec le voyage de cette dernière au Brésil en 1979 puis s'est poursuivi lors de ses séjours en Hongrie, en RDA et en RFA. Kazimiera Danute Prunskiene a demandé que l'ensemble de son dossier soit rendu public.

La dernière enquête d'opinion donne une très large avance à Dalia Grybauskaite, créditée de 73,6% des suffrages. Elle devance Algirdas Butkevicius (4,6%), Valentinas Mazuronis (2,6%) et Kazimira Danute Prunskiene (1,2%).

Source : Commission électorale centrale de Lituanie

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