Election présidentielle en Allemagne, 23 mai 2009

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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27 avril 2009
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Le 23 mai prochain, jour de l'élection présidentielle depuis 1979, l'Assemblée fédérale allemande (Bundesversammlung) se réunira pour élire le prochain Président de la République fédérale d'Allemagne (Präsident der Bundesrepublik Deutschland). Cette Assemblée comprend 1 224 membres ; elle est constituée des 612 membres du Bundestag, Chambre basse du Parlement, et d'un nombre égal d'élus des 16 Länder qui ne sont pas forcément des députés des Parlements régionaux. L'élection se fait à bulletins secrets à la majorité absolue lors des 1er et 2e tours. Si aucun candidat n'atteint cette majorité (soit 613 voix minimum), sera élu au 3e tour celui qui réunit le plus grand nombre de suffrages sur son nom.

Si la fonction présidentielle est, en Allemagne, essentiellement honorifique, le Chef de l'Etat constitue toutefois une autorité morale, son rôle dépasse les prérogatives que lui assigne la Loi fondamentale. Elu pour 5 ans, le Président allemand représente le pays sur la scène internationale. Il conclut les traités avec les Etats étrangers, accrédite et reçoit les représentants diplomatiques. Il est le gardien du droit et de la Loi fondamentale. Il nomme et révoque les juges et les fonctionnaires fédéraux, les officiers et les sous-officiers. Enfin, il peut également dissoudre le Bundestag dans 2 cas précis : lorsque le Bundestag ne réussit pas à élire un Chancelier (c'est-à-dire si aucun candidat ne parvient à réunir la majorité des voix au bout de 3 jours, article 63 de la Loi fondamentale) ou lorsqu'une motion de confiance proposée par le Chancelier n'obtient pas l'approbation de la majorité des membres du Bundestag (article 68). Des élections législatives doivent alors être convoquées dans les 60 jours suivant la dissolution (article 39 de la Loi fondamentale). 3 dissolutions ont eu lieu dans le passé : le 23 septembre 1972, le 6 janvier 1983 et le 21 juillet 2005, par l'actuel Chef de l'Etat Horst Köhler. Le 1er juillet 2005, 296 des 595 députés présents votaient contre la motion de confiance déposée par le Chancelier Gerhard Schröder, 148 s'étaient abstenus et 151 avaient exprimé leur confiance. Des élections législatives avaient suivies le 18 septembre.

Tout candidat à la fonction présidentielle doit être âgé d'au moins 40 ans et ne peut être réélu qu'une seule fois. Selon la Loi fondamentale, le Président ne peut appartenir ni au gouvernement ni à un organe législatif de la Fédération (Bund) ou de l'un des 16 Länder. Il ne peut exercer aucune autre fonction publique rémunérée, aucune profession industrielle ou commerciale et aucun métier et ne peut faire partie de la direction ou du conseil d'administration d'une entreprise poursuivant des buts lucratifs. En cas d'empêchement du Président de la République ou de vacance anticipée de ses fonctions, ses pouvoirs sont exercés par le président du Bundesrat, Chambre haute du Parlement.

4 candidats sont en lice :

- Horst Köhler, 66 ans, Chef de l'Etat sortant, ancien président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), ancien directeur du Fonds monétaire international (FMI), candidat de l'Union chrétienne-démocrate (CDU/CSU) et du Parti libéral-démocrate (FDP) ;

- Gesine Schwan, 66 ans, présidente de l'université de l'Europe Viadrina de Francfort/Oder, ancienne professeur de sciences politiques à l'université libre de Berlin. Soutenue par le Parti social-démocrate (SPD) et les Verts, elle était déjà la candidate de ces mêmes partis lors de la précédente élection présidentielle du 23 mai 2004 ;

- Peter Sodann, 73 ans, acteur, candidat du Parti de gauche (Die Linke) ;

- Frank Rennicke, 45 ans, chanteur, candidat des formations d'extrême droite, l'Union du peuple (DVU) et le Parti national (NPD).

Le 23 mai 2004, Horst Köhler avait été élu au 1er tour de scrutin en recueillant une voix de plus que la majorité absolue. La CDU/CSU et le FDP, qui le soutenaient, disposaient théoriquement d'une avance de 19 voix. 9 personnes s'étant abstenues et 2 bulletins ayant été déclarés nuls, ce sont donc au moins 7 des électeurs de ces partis qui avaient accordé leur suffrage à la candidate soutenue par le Parti social-démocrate, Gesine Schwan.

5 ans plus tard, Horst Köhler est de nouveau soutenu par la CDU/CSU et le FDP qui totalisent 606 membres au sein de l'Assemblée fédérale allemande. Il l'est également par les Electeurs libres (FW), un choix qui n'a pas fait l'unanimité au sein de cette formation de création récente qui regroupe les déçus de la CSU et a réussi une percée lors des élections régionales en Bavière le 28 septembre 2008 en recueillant 10,2% des suffrages et en remportant 21 sièges au Parlement de Munich.

Gabriele Pauli, par ailleurs tête de liste du parti aux élections européennes du 7 juin prochain, a plusieurs fois exprimé sa sympathie pour Gesine Schwan "Je crois que Gesine Schwan serait une bonne Présidente de la République. Elle a davantage d'idées que Horst Köhler concernant le renouveau de la démocratie" et avait demandé que les 10 membres des Electeurs libres de l'Assemblée fédérale puissent choisir librement le candidat pour lequel ils souhaitaient voter. Cette demande a été rejetée par le parti. Son président, Hubert Aiwanger, a indiqué que les députés présents représentant le parti devient se plier à la décision de ce dernier et donc soutenir Horst Köhler. Avec les suffrages des Electeurs libres, le Président sortant peut compter sur 616 élus si tant est que tous respectent les consignes de leur parti respectif (le vote se déroule à bulletins secrets).

Le 24 mars dernier, Horst Köhler a présenté son discours à Berlin, une tradition allemande datant de 1997. Il a mis en garde la CDU/CSU et le FDP contre les combats stériles en cette "super année" électorale qu'est 2009 pour l'Allemagne (le pays votera pour des élections régionales, municipales, législatives et européennes). Il a également indiqué que la voie dans laquelle le gouvernement s'est engagé était "la bonne", rappelé le besoin d'un "Etat fort qui fixe des règles et vérifie qu'elles sont suivies". Le Président sortant, qui avec son passé d'ancien directeur du FMI fait autorité en matière économique, s'est prononcé pour un "Bretton Woods II" qui réformerait le système économique et financier sous les auspices des Nations unies.

Gesine Schwan estime ses chances d'être élue à 50% et considère que le scrutin, loin d'être joué d'avance, reste ouvert. Selon elle, la crise économique découle de la "fracture sociale" et du système économique. "Dans 2 à 3 mois, la colère de la population pourrait croître rapidement. Sans une lueur d'espoir et sans amélioration de la situation, l'ambiance deviendra explosive" a-t-elle déclaré.

Si l'élection présidentielle se déroulait au suffrage universel, Horst Köhler recueillerait les suffrages de 70% des Allemands selon une enquête d'opinion conduite mi-avril par l'institut Infratest. Gesine Schwan serait choisie par 14% de ses compatriotes et Peter Sodann par 4% d'entre eux. La logique mathématique devrait permettre à Horst Köhler d'être réélu à la Présidence de la République d'Allemagne le 23 mai prochain. Reste la logique politique.

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