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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Comme en Grande Bretagne, la législature irlandaise ne peut excéder une durée de cinq années. Il revient donc au Premier ministre de décider durant son mandat du moment auquel il décide de convoquer les électeurs devant les urnes. Jeudi 25 avril, Bertie Ahern, actuel Premier ministre élu le 6 juin 1997, a ainsi annoncé à la presse la tenue des élections législatives pour le 17 mai prochain avant de rencontrer la présidente Mary MacAleese à laquelle il a demandé, conformément à la Constitution, de dissoudre le Parlement.
Le système politique irlandais
L'Oireachtas, le Parlement national irlandais, est composé de deux chambres. Le Dail Eireann, la Chambre des représentants, compte 166 membres élus pour cinq ans maximum au scrutin plurinominal à la représentation proportionnelle. Le jour de l'élection, selon un système appelé de vote unique transférable, l'électeur reçoit une liste alphabétique de candidats sur laquelle il désigne les candidats pour lesquels il souhaite voter par ordre de préférence. Il inscrit ainsi le chiffre 1 devant le candidat qui a sa première préférence puis 2, 3, 4, etc. devant les noms d'autres candidats de la liste. La première opération du dépouillement est le calcul du quotient électoral, c'est-à-dire du nombre de voix minimum que doit obtenir un candidat pour être élu. Ce quotient correspond à l'ensemble des voix exprimées divisé par le nombre de sièges à pourvoir (trois, quatre ou cinq selon les circonscriptions) augmenté d'une unité. Tout candidat atteignant ce nombre de voix est déclaré élu. Ses voix excédentaires sont alors réparties entre les candidats ayant été retenus en deuxième préférence. Il est rare que ce système, compliqué, permette l'émergence d'une majorité de gouvernement. Cependant, les Irlandais y sont attachés et par deux fois (lors des référendums de 1959 et 1969) ont refusé sa modification.
Le Seanad Eireann, le Sénat, comprend soixante membres dont quarante-trois sont élus par cinq grands corps, constitués de parlementaires et d'élus locaux, représentant divers secteurs de la société (la Culture et l'Education, l'Agriculture, le Travail, l'Industrie et le Commerce et enfin l'Administration publique), onze nommés par le Premier ministre et six par les licenciés de deux universités, la National University of Ireland et l'University of Dublin (Trinity College). Le Sénat est formé peu après chaque nouvelle législature.
Neuf formations politiques sont représentées à la Chambre des Représentants.
- Le Fianna Fail (FF), parti nationaliste situé au centre droit.
- Le Fine Gael (FG), parti de droite.
- Le Parti travailliste (Lab), situé au centre gauche.
- Le Parti démocrate progressiste (PD), formation centriste.
- Le Parti vert (GP), représentant les écologistes.
- La Gauche démocratique (DL), formation située à gauche.
- Le Sinn Fein (SF), parti républicain et nationaliste dirigé par Gerry Adams.
- Enfin le parti socialiste (SP), formation d'extrême gauche trotskiste et le Fianna Fail indépendant (IFF), branche dissidente du Fianna Fail.
Bertie Ahern est depuis les dernières élections du 6 juin 1997 à la tête d'un gouvernement de coalition minoritaire au Dail Eireann, la Chambre des représentants, qui comprend son propre parti, le Fianna Fail, et le Parti démocrate progressiste, formation centriste. Son gouvernement est composé de quatorze membres du Fianna Fail et d'un membre du Parti démocrate progressiste, Mme Mary Harney, qui occupe les fonctions de Vice Premier ministre et de ministre de l'Entreprise, de l'Emploi et du Commerce. Pour faire adopter ses textes de loi, le Fianna Fail a donc dû s'appuyer, au gré des situations, sur les quatre députés du Parti démocrate progressiste ainsi que sur quatre autres députés indépendants. Signalons enfin que le gouvernement formé par Bertie Ahern en juin 1997 est le premier depuis la deuxième guerre mondiale à réussir à parvenir à rester au pouvoir les cinq années de son mandat, le Taoiseach (Premier ministre en gaélique) battant ainsi le record de longévité absolue à la tête d'un gouvernement.
Les enjeux du scrutin législatif
Homme politique donné par les récents sondages comme le plus populaire du pays après cinq années de pouvoir, Bertie Ahern fait figure de favori à la veille des élections. Les Irlandais semblent apprécier son sens du compromis et ses talents de médiateur qui lui ont permis de diriger le pays en dépit d'une absence de majorité au Parlement. Le Premier ministre peut également se prévaloir de la bonne santé économique de l'Irlande même si l'exceptionnelle croissance des dix dernières années tend à se ralentir. En 2001, avec 6,6% du PIB (contre 9,2% l'année précédente), l'Irlande avait le plus fort taux de croissance de la zone euro, le taux de chômage atteignait 4,1% (contre 3,7% en 2000) et l'inflation 4%. Au bilan du gouvernement de Bertie Ahern figurent également une baisse des impôts, l'augmentation des retraites de 50%, exonérant complètement 380 000 salariés à faibles revenus, et enfin la création du salaire minimum le plus élevé d'Europe. Mais ce dont le Premier ministre reste le plus fier est certainement son rôle dans l'accord historique de paix de Vendredi Saint signé en 1998 entre les partis nationaliste catholique et unioniste protestant d'Irlande du Nord.
Son mandat a cependant été marqué par deux échecs personnels, le rejet de deux référendums convoqués à son initiative : le premier le 7 juin 2001 par lequel 53,87% des Irlandais ont rejeté la ratification du Traité de Nice (ce même jour, les Irlandais ont accepté l'abolition de la peine de mort et l'adhésion de l'Irlande à la Cour internationale de justice) et celui du 8 mars 2002 où 50,42% des votants ont dit non à un durcissement de la législation sur l'interruption volontaire de grossesse. Notons le chiffre, particulièrement bas, de la participation à ces deux référendums : 34,7% pour le premier et 42,89% pour le second. Plusieurs raisons ont incité Bertie Ahern à organiser un référendum sur la législation de l'IVG : la volonté de rassembler les membres de son parti dans la perspective des législatives à venir, la volonté de satisfaire l'électorat, très religieux, du Fianna Fail et son engagement envers les quatre députés indépendants dont le soutien lui est nécessaire pour conserver sa majorité parlementaire. D'une courte majorité, les électeurs ont finalement répondu non à la question qui leur était posée lors de ce référendum, le cinquième organisé sur l'avortement depuis 1983, et refusé l'amendement de la Constitution et le durcissement d'une législation déjà très sévère qui interdit l'interruption volontaire de grossesse sauf dans les cas où la vie de la mère est en danger. Cet échec du Premier ministre peut cependant difficilement être considéré comme un test pour le parti au pouvoir, le Fianna Fail. Il faudra donc attendre le prochain scrutin national du 17 mai pour connaître par qui les Irlandais souhaitent être gouvernés.
Rappel des résultats des élections législatives du 6 juin 1997 :
Participation : 65,9%

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