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Comme prévu, Russie unie, le parti du Président, Vladimir Poutine, triomphe aux élections législatives russes

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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3 décembre 2007
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Comme prévu, Russie unie, le parti du Président, Vladimir Poutine, triomphe aux ...

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Russie Unie (ER), parti du Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, a remporté les élections législatives russes qui se sont déroulées le 2 décembre comme le prédisaient toutes les enquêtes d'opinion. Il recueille 64,1% des suffrages et, comme lors du scrutin législatif du 7 décembre 2003, remporte son meilleur résultat dans le Caucase.Grozny, capitale tchétchène, a ainsi voté à 99% en faveur de Russie Unie avec un taux de participation d'environ 90% !

Trois autres partis seront représentés à la Douma, Chambre basse du Parlement, soit un plus grand nombre que ce que prévoyaient les sondages. Il s'agit du Parti communiste (KPRF) qui obtient 11,6 % des voix, du Parti libéral-démocrate (LDPR), nationaliste et populiste dirigé par Vladimir Jirinovski, qui recueille 8,2% des suffrages et, enfin, de Russie juste (SR), parti de gauche né le 28 octobre 2006 de la fusion de Rodina avec le Parti de la vie (PJ) et le Parti des retraités (PP), dont le leader est l'actuel président du Conseil de la Fédération, Sergueï Mironov, qui obtient 7,8% des voix. Russie juste et le Parti libéral-démocrate sont deux partis favorables à Vladimir Poutine.

Un minimum de 7% des suffrages exprimés est obligatoire pour entrer à la Douma.

Le reste de l'opposition est marginalisée, voire laminée. Iabloko ("la pomme"), formation libérale dirigée par Grigori Iavlinski, recueille 1,6% des suffrages et l'Union des forces de droite (SPS) de Nikita Belykh, 1%.

La participation s'est élevée à 59,29%, soit un résultat supérieur à celui enregistré lors du scrutin législatif du 7 décembre 2003 (environ + 6 points).

Le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, remporte donc un succès total dans son opération visant à transformer ce scrutin en plébiscite sur sa personne et sa façon de gouverner. La participation, élevée, vient consacrer un scrutin largement remporté par Russie unie.

Des salariés, des étudiants ou certaines personnes hospitalisées ont cependant affirmé avoir subi de fortes pressions pour accomplir leur devoir civique, le pouvoir en place redoutant que de nombreux Russes ne s'abstiennent pour montrer l'absence de choix de ce scrutin législatif et, par là même, leur opposition à Vladimir Poutine. Certains salariés ont créé un blog sur lequel ils racontent les pressions subies (http://vibory-light.livejournal.com/). Environ 450 000 policiers et militaires avaient été chargés d'assurer la sécurité dans les bureaux de vote. Par ailleurs, le Président de la Fédération de Russie peut se réjouir que 4 partis au total soient présents dans la nouvelle Douma donnant une illusion de démocratie et de réelle compétition politique.

"Ces élections législatives étaient un référendum sur le Président de la Fédération Vladimir Poutine et je pense que nous pouvons dire qu'il a remporté la victoire" a déclaré le président de Russie unie, le président de la Douma et ancien ministre de l'Intérieur, Boris Grizlov, à l'annonce des résultats. "Ne pensez pas que tout est décidé d'avance" titrait, à l'avant-veille du scrutin, le journal Rossiiskaïa Gazeta, reproduisant, comme de nombreux autres quotidiens, l'intégralité de l'appel à se rendre aux urnes lancé aux Russes le 29 novembre dernier par Vladimir Poutine. Ce dernier avait enjoint les électeurs de garantir la continuité de la politique engagée, les exhortant à se souvenir de "quel fossé" il avait sorti le pays, rappelant "l'humiliation, la dépendance et la désintégration" des années 1990.

Alors que l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) avait décidé de boycotter la surveillance de ces élections invoquant les entraves posées par le pouvoir russe en place, Vladimir Poutine avait déclaré le 29 novembre dernier : "Nous avons des renseignements, une fois de plus, selon lesquels ce retrait a été décidé sur la recommandation du Département d'Etat américain". Après avoir comparé les représentants de l'opposition à des "chacals" recherchant des soutiens financiers "auprès des ambassades étrangères", le président russe avait également plaidé pour un renforcement de la Défense nationale "pour décourager ceux qui sont tentés de fourrer leur nez plein de morve dans nos affaires".

Son intervention télévisée est repassée, une nouvelle fois, le 30 novembre à la télévision. Selon un rapport publié le 13 novembre par le Centre de protection des journalistes, la première chaîne de télévision (publique) a consacré 96,5% de son temps d'antenne au président russe et à son parti, Russie unie, durant le premier mois de la campagne électorale.

A l'annonce des premiers résultats, le leader du Parti communiste, Guennadi Ziouganov, a déclaré que ces élections étaient "les plus irresponsables et les plus sales de l'ère post-soviétique (...) Si, sous l'ancien Président de la Fédération Boris Eltsine, il y avait deux méthodes pour truquer le scrutin, à savoir l'intimidation et la falsification des bulletins, ils ont aujourd'hui inventé au moins 15 méthodes pour attirer et tromper les électeurs".

De nombreuses irrégularités ont, en effet, été signalées. Dès dimanche soir, la Présidence des Etats-Unis a enjoint les autorités russes d'enquêter sur les accusations de fraude électorale lancées par les forces de l'opposition. "Les premières informations en provenance de Russie incluent des accusations de violations électorales. Nous exhortons les autorités russes à enquêter sur ces affirmations" a déclaré le porte-parole du Conseil national de sécurité américain, Gordon Johndroe.

Le 28 novembre dernier lors d'une conférence de presse, Guennadi Ziouganov avait tenté d'aviver les inquiétudes suscitées par le pouvoir de Poutine, affirmant que le président russe préparait un "coup d'Etat autoritariste" pour rester au pouvoir après l'expiration de son mandat en mars prochain. "Le Kremlin a besoin du Parti communiste car c'est une bonne façon de canaliser les votes des mécontents Cela convient très bien aux dirigeants communistes. Ils jouissent de privilèges, de l'appartenance à l'élite politique, sans être responsables des décisions politiques. C'est tout bénéfice pour eux: la jouissance du statut sans aucune responsabilité" affirme Maria Lipman, analyste au Centre Carnegie de Moscou.

Ces élections législatives avaient vocation à préparer l'élection présidentielle du 2 mars prochain et l'avenir de Vladimir Poutine. "Une victoire en décembre ouvre la voie à une victoire en mars" a répété le président russe durant la campagne électorale. "La Russie est en train de revenir au système du parti unique" affirme Grigori Iavlinski, leader de Iabloko. "Les formes du pouvoir peuvent changer, l'esprit reste le même : une pyramide dominée par le tsar, le Secrétaire général ou le Président de la Fédération, appelez-le comme vous voulez" souligne la sociologue Olga Krichtanovskaïa.

"Ce ne sont plus vraiment des élections législatives. Tout a été organisé pour que ce soit un plébiscite pour Vladimir Poutine et pour son régime" soulignait la spécialiste de la Russie, Marie Mendras, au quotidien français, Libération, le 27 novembre dernier. Sans pouvoir d'opposition ou simplement sans liberté de parole, la Douma est devenue une simple Chambre d'enregistrement.

Selon une enquête d'opinion réalisée par l'institut Levada, 65,5% des Russes considèrent que les élections législatives ne sont pas justes. "25 % seulement des électeurs pensent que la composition de la Douma dépendra du vote mais les gens sont prêts à aller voter malgré tout, par habitude, ou par crainte que tout s'écroule si Vladimir Poutine s'en va" indique Dmitri Volkov, sociologue de l'institut.

Pourtant, alors que Russie unie et Vladimir Poutine étaient assurés de triompher, le pouvoir, qui redoutait surtout une forte abstention, n'en a pas moins redoublé d'efforts durant les derniers jours de la campagne électorale pour convaincre les électeurs de se rendre dans les bureaux de vote le 2 décembre. Par ailleurs, les autorités du Kremlin ont réprimé violemment les forces d'opposition. Selon certains observateurs de la vie politique russe, cet acharnement témoigne de luttes intestines au sein même du pouvoir. "Cette fébrilité pourrait trahir des luttes de clans au sein des élites dirigeantes" indique Marie Mendras.

"Il n'y a plus de doute sur le fait que Vladimir Poutine a bien l'intention de rester au pouvoir d'une manière ou d'une autre. La question est : avec quelle fonction ?" interroge Marie Mendras.

De nombreux analystes politiques pensent que, la Constitution russe interdisant à l'actuel Chef de l'Etat de briguer un troisième mandat consécutif, le Premier ministre, Viktor Zoubkov, sera candidat et élu à la Présidence le 2 mars prochain, l'actuel Président devenant alors Premier ministre. Par la suite, Viktor Zoubkov pourrait quitter ses fonctions avant la fin de son mandat en 2012, par exemple pour des raisons de santé, ce qui permettrait un retour de Vladimir Poutine à la tête de l'Etat. Président par intérim durant un temps, celui-ci pourrait se présenter à l'élection présidentielle suivante et repartir en toute légalité pour deux nouveaux mandats. Ceux-ci pourraient également être plus longs que quatre années, le Président russe ayant plusieurs fois indiqué que la durée du mandat actuel lui semblait trop courte pour un régime présidentiel.

Une chose est sûre : la campagne électorale pour l'élection présidentielle est désormais ouverte en Russie. Russie unie a d'ailleurs indiqué qu'elle nommerait son candidat pour le scrutin du 2 mars lors de son prochain congrès qui se tiendra avant la fin de l'année 2007.

Résultats des élections législatives du 2 décembre 2007 en Russie

Participation (à 19h, heure locale) : 59,29%

Source : Site Internet de la Commission électorale de Russie :http://cikrf.ru/eng/elect_duma/results/index.jsp

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