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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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ENCorinne Deloy
Fondation Robert Schuman
« etes-vous pour le traité établissant une constitution pour l'europe, signé à rome le 29 octobre 2004 ? », telle est la question à laquelle les luxembourgeois sont appelé à répondre par référendum le 10 juillet prochain. la consultation populaire aura lieu seulement dix jours après la fin de la présidence de l'union européenne exercée par le grand duché depuis le 1er janvier dernier.
le premier ministre jean-claude juncker (parti chrétien social, pcs/cvs) a très tôt décidé de faire appel aux luxembourgeois pour ratifier le traité établissant une constitution pour l'europe. « le luxembourg attache une telle importance à la future constitution européenne que son gouvernement a décidé de soumettre sa ratification à un référendum national » déclarait-il le 27 juin 2003. « le référendum n'est pas un jouet pour les démagogues et les populistes. c'est un instrument qui, dans des moments importants, donne une dimension souveraine aux rendez-vous avec le peuple » affirmait-il également dans son discours sur l'etat de la nation de 2003. comme pour les autres scrutins, le vote sera obligatoire pour ce référendum. le scrutin est consultatif mais le gouvernement a déclaré qu'il se soumettrait au verdict populaire.
la chambre des députés luxembourgeoise se prononcera une première fois avant le vote du peuple sur la constitution qu'elle devrait très majoritairement approuver. un deuxième vote des députés aura lieu à la suite du référendum, l'article 59 de la constitution luxembourgeoise stipulant un délai obligatoire de trois mois entre les deux votes de la chambre.
quatre des cinq formations politiques représentées à la chambre des députés, unique chambre du parlement, sont favorables à la constitution européenne. il s'agit du parti chrétien social (pcs/cvs), du parti socialiste ouvrier (posl/lsap), du parti démocratique (pd/dp) et de dei greng-les verts (g). en revanche, l'action pour la démocratie et la justice en matière de rentes (adr), au départ favorable au texte, a applaudi le 29 mai dernier le « non » français. l'adr a été créée en 1987 sous la forme d'un comité d'action pour les pensions luttant pour la fin des différences en matière de régime de retraite dans les secteurs privé et public et se veut le « porte-parole des citoyens luxembourgeois contre les dysfonctionnements de l'etat et l'injustice sociale ».
le parti communiste (pcl/kpl), présidé par aly rickert, et dei lenk-la gauche (dl), formations qui ne comptent aucun représentant à la chambre des députés, sont également opposés à la constitution européenne.
la population luxembourgeoise est depuis toujours acquise à la cause européenne. « les intérêts du luxembourg ont toujours été liés aux intérêts européens » souligne le premier ministre qui répète que, sans l'europe, le luxembourg serait « un poisson hors de l'eau ». « si nous n'avons pas la constitution au 1er janvier 2007, le risque est énorme de voir cette réalité complexe que constitue le continent européen être gérée par un système de libre échange trop simpliste pour ce continent compliqué » déclarait jean-claude juncker le 6 avril dernier. « je mets en garde ceux qui par des argumentaires simplistes, très souvent falsificateurs sinon mensongers, donnent l'impression que la nouvelle constitution signifierait en fait un recul de l'europe » ajoutait-il, demandant aux partisans du « non » de « bien réfléchir aux conséquences internationales du chemin qu'ils empruntent ».
ultra minoritaire il y a encore quelques mois (moins de 25%), le « non » a en effet progressé dans le grand duché (plus onze points en un mois), s'établissant à 32%, contre 46% pour le « oui » selon le sondage réalisé par l'institut d'opinion ilres. deux luxembourgeois sur dix (22%) n'ont toujours pas fait leur choix. les deux tiers des luxembourgeois (65%) s'estiment « peu » ou « pas du tout informés » sur la constitution européenne. les habitants du grand duché figurent pourtant parmi les européens les plus avertis sur le traité. ainsi, plus de la moitié d'entre eux (57%) savent que la constitution dote l'union européenne d'un ministre des affaires étrangères, 40% savent également qu'un million de citoyens peuvent demander à la commission de soumettre une proposition législative sur un sujet donné ou encore que le président du conseil européen n'est pas élu par les citoyens. le directeur général de l'ilres, charles margue, note cependant que plus les électeurs se disent informés, plus ils s'opposent au traité.
le premier ministre jean-claude juncker s'est dit « très attentif aux craintes exprimées par les électeurs et à la progression du « non » ». le refus d'une adhésion de la turquie et la crainte d'une dérive ultralibérale de l'europe constituent les deux principales motivations des luxembourgeois s'apprêtant à voter « non ». l'opposition au gouvernement de jean-claude juncker, doyen des dirigeants européens en exercice (le premier ministre est à la tête de l'etat depuis 1995 et membre de l'équipe gouvernementale depuis 1982) figure également parmi les causes données par les opposants au traité. « les récents sondages ne me surprennent pas. les gens ne votent pas sur le texte de la constitution mais sur l'état actuel de l'union où beaucoup de choses comme le chômage, l'élargissement, le niveau de l'euro déplaisent » a commenté jean-claude juncker, ajoutant qu'il avait toujours « prédit que le « oui » était loin d'être acquis ».
« je mettrais toute mon énergie et toute ma détermination pour faire passer le « oui » au luxembourg. je vais m'engager passionnément pour le « oui » et démasquer les populistes » déclare le premier ministre qui a d'ailleurs mis le 3 juin dernier son avenir politique en jeu pour ce référendum en déclarant qu'il démissionnerait en cas de victoire du « non ». « c'est une affaire de décence élémentaire vis-à-vis des électeurs luxembourgeois. en cas de « non », ce n'est pas au peuple de partir, c'est à moi de m'en aller » a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse. alex bodry, président du parti socialiste ouvrier, a également annoncé que sa formation quitterait la coalition gouvernementale en cas de rejet de la constitution européenne par les électeurs.
chaque foyer luxembourgeois a reçu mi-mai une documentation dans les trois langues du pays (français, allemand et luxembourgeois) expliquant les quatre cent quarante-huit articles du traité européen. en outre, la chambre des députés a, à quatre reprises, ouvert ses portes aux citoyens, offrant à tous ceux qui le souhaitaient de s'exprimer publiquement depuis la tribune sur la constitution européenne. enfin, événement exceptionnel, le 24 décembre dernier, lors de la cérémonie des vœux de noël, le grand duc henri de luxembourg a annoncé sa décision de participer au référendum sur la constitution européenne. une première dans l'histoire du grand duché où les membres de la famille grand-ducale se tiennent habituellement en retrait de la vie politique du pays. en espagne, le roi juan carlos avait également montré l'exemple en se rendant aux urnes le 20 février dernier lors du référendum sur la constitution européenne dans la péninsule ibérique. comme le grand duc du luxembourg, le roi d'espagne, par souci de neutralité, ne vote jamais mais il a en revanche participé aux quatre référendums organisés en espagne.
avant l'échéance du 10 juillet, le premier ministre luxembourgeois devra également mener à bien une autre tâche tout aussi difficile : présider le prochain conseil européen qui se tiendra les 16 et 17 juin à bruxelles. les vingt-cinq y feront le point sur l'état et l'avenir des ratifications de la constitution européenne dans les différents etats membres (dix pays ont déjà ratifié le texte, deux l'ont rejeté par référendum) et devront trouver un accord sur le futur budget européen pour les années 2007-2013. « un accord sur le budget prouverait que l'europe reste en marche » a déclaré le 6 juin dernier jean-claude juncker. « c'est à ceux qui dirigent l'europe de montrer qu'ils sont capables de décider » a-t-il ajouté. l'activité du premier ministre luxembourgeois sera donc particulièrement soutenue dans les jours à venir, jours capitaux pour l'avenir du grand duché comme pour celui de l'union européenne.
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