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Le Parti populaire arrive en tête des élections parlementaires en Espagne mais ne devrait pas être en mesure de former un gouvernement

Élections en Europe

Corinne Deloy

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24 juillet 2023
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Le Parti populaire arrive en tête des élections parlementaires en Espagne mais n...

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Le Président du gouvernement (Premier ministre) sortant, Pedro Sanchez (Parti socialiste ouvrier, PSOE) a en partie réussi son pari : s'il n'a pas remporté les élections parlementaires le 23 juillet en Espagne, il est néanmoins parvenu à ce que le PSOE se maintienne suffisamment pour empêcher le Parti populaire (PP), principal parti d'opposition de droite, arrivé en tête du scrutin, d'obtenir une majorité, y compris en s'alliant avec le parti de droite populiste, Vox. Dirigé par Alberto Nunez Feijoo, le PP a recueilli 33,05% des suffrages et remporté 136 sièges (+ 47 par rapport aux précédentes élections parlementaires du 10 novembre 2019). Il a devancé le PSOE, qui a obtenu 31,7% des voix et 122 députés (+ 2). Vox, emmenée par Santiago Abascal, est en recul avec 12,39% des suffrages et 33 sièges (- 19). En revanche, Yolanda Diaz, avocate et ministre de l'Emploi du gouvernement sortant, a réussi son pari : son mouvement Sumar (Additionner), qui rassemble 16 partis à gauche du PSOE, a obtenu 12,31% des voix et 31 députés. Le PP s'est également imposé au Sénat où il a conquis 120 sièges (+37). Le PSOE en a obtenu 72 (-21). Contrairement à ce qui était attendu, l'organisation des élections parlementaires au cœur de l'été n'a pas démobilisé les Espagnols : la participation s'est élevée pour le Congrès des députés à 69,95%, (soit +3,72 points par rapport à celle enregistrée lors du scrutin du 10 novembre 2019) et 70,13% pour le Sénat. Plus de 2,47 millions d'Espagnols ont voté par correspondance, soit le double d'il y a 4 ans. Le scrutin anticipé du 23 juillet était consécutif à la décision de Pedro Sanchez de dissoudre les Cortes generales, nom du parlement espagnol qui comprend le Congrès des députés et le Sénat, après la victoire de l'opposition aux élections régionales, provinciales et municipales qui se sont tenues le 28 mai dans une grande partie de l'Espagne.

Résultats des élections parlementaires du 23 juillet 2023 en Espagne

Congrès des députés

Participation : 69,95%

Source : https://resultados.generales23j.es/es/resultados/0/0/20

Sénat

Participation : 70,13%

Source : https://resultados.generales23j.es/es/resultados/1/0/20Notre obligation est de faire en sorte que ne s'ouvre pas en Espagne une période d'incertitude. En tant que candidat du parti ayant recueilli le plus de vote, je me chargerai d'essayer de former un gouvernement et je demande que personne n'ait de nouveau la tentation de bloquer l'Espagne " a déclaré Alberto Nunez Feijoo à l'annonce des résultats. Le dirigeant du PP n'a pu que constater que sa proposition d'" abroger le sanchisme " n'avait pas séduit ses compatriotes. " Il y a un choix à faire entre Pedro Sanchez et l'Espagne et je n'ai aucun doute que la majorité des Espagnols choisiront l'Espagne " a-t-il répété durant sa campagne, demandant aux électeurs de lui accorder la majorité nécessaire pour gouverner sans avoir recours à la droite populiste. La position modérée que voulait incarner Alberto Nunez Feijoo n'aura toutefois pas été suffisante pour rassurer et attirer une majorité d'Espagnols. Les accords conclus entre le PP et Vox dans une demi-douzaine de régions et 140 municipalités, dont 4 capitales de province, à l'issue des élections régionales, provinciales et municipales du 28 mai dernier ont sans doute, comme l'espérait Pedro Sanchez, détourné un nombre conséquent d'électeurs centristes du principal parti d'opposition. Quant à Vox, il a pâti en partie du vote utile vers le PP, voire de certaines des premières mesures adoptées par ses élus localement et qui ont effrayé certains électeurs. Le roi Felipe VI devrait appeler le dirigeant du PP, Alberto Nunez Feijoo à rassembler un nombre suffisant de suffrages de parlementaires (soit 176, majorité absolue au Congrès des députés) pour pouvoir être investi au poste de Premier ministre. Cependant, la droite possède un faible nombre d'alliés parmi les parlementaires et la participation de la droite populiste Vox à un prochain gouvernement pourrait détourner certains élus du soutien au PP. " Le bloc de la réaction, du recul, qui voulait supprimer les avancées obtenues au cours des 4 dernières années, a échoué. Le bloc rétrograde du PP et de Vox a été battu " s'est réjoui Pedro Sanchez à l'annonce des résultats, ajoutant " Nous qui voulons que l'Espagne continue à avancer sommes beaucoup plus nombreux ". Pedro Sanchez a réussi à mobiliser les sympathisants socialistes qui étaient restés chez eux ou qui avaient préféré la droite (selon les enquêtes d'opinion, environ 10% des électeurs socialistes auraient voté pour le PP) le 28 mai dernier lors des scrutins régionaux et locaux. Il a également su mettre en avant dans sa campagne électorale son bilan économique et social : croissance du PIB de 5,4% l'an passé et 5,5% prévu pour cette année, marché de l'emploi dynamique - plus faible taux de chômage depuis 2008 - 12,8% -, faible inflation - 1,9% en juin -, augmentation du salaire minimum de 736 € en 2019 à 1 080 € à ce jour (sur 14 mois, soit 1 260 € sur 12 mois), réalignement des pensions de retraite sur l'inflation, élargissement des droits des travailleurs précaires, mise en place d'un revenu minimum vital, etc. Tous ces éléments ne lui ont pas permis de remporter les élections mais ils ont en revanche suffi pour priver son adversaire du PP d'une réelle victoire. Enfin, à gauche de la gauche, le mouvement Sumar peut se féliciter de sa performance du 23 juillet, quasiment équivalente à celle obtenue par Unidos Podemos en novembre 2019 (- 4). Si l'on ne regarde que l'état des forces en présence, Pedro Sanchez peut espérer se maintenir au pouvoir. En effet, si on ajoute aux 153 sièges de la gauche (PSOE et Sumar) ceux des partis qui ont soutenu le gouvernement au cours de la précédente législature - la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), Euskal Herria Bildu (EH Bildu), le Parti nationaliste basque (EAJ/PNV) et le Bloc nationaliste galicien (BNG) -, Pedro Sanchez peut espérer rassembler 172 parlementaires, soit plus que le PP et Vox, et un nombre suffisant pour un deuxième vote d'investiture au Parlement où seule la majorité simple est requise. Cependant, les partis régionaux ne sont pas sans exprimer des exigences pour soutenir de nouveau un gouvernement conduit par le PSOE. En outre, Pedro Sanchez aurait très probablement besoin du soutien de Junts per Catalunya (Ensemble pour la Catalogne, JxCat), parti de l'indépendantiste catalan Carles Puigdemont, recherché par les autorités espagnoles pour avoir organisé un référendum interdit par la justice sur l'indépendance de la Catalogne et pour avoir cherché à proclamer la sécession du territoire sur la base des résultats du scrutin en 2017. L'homme est actuellement en exil en Belgique. Miriam Nogueras, députée, a déclaré que le soutien de Junts per Catalunya serait subordonné à l'organisation d'un nouveau référendum sur l'indépendance de la Catalogne. Une condition impossible à accepter pour le PSOE. En dépit de sa première place, le PP ne devrait donc pas pouvoir former de gouvernement même en s'alliant à Vox. De nouveau en Espagne (comme en Europe où les élections permettent de moins en moins de dégager des majorités de gouvernement), aucune majorité ne semble devoir se dégager clairement. S'il s'avère que la situation est ingouvernable, le pays pourrait s'acheminer vers de nouvelles élections parlementaires... comme en 2015 et en 2019. Les Cortes generales élus le 23 juillet se réuniront le 17 août prochain.

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