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Analyse

Elections législatives slovènes du 24 avril : Janez Jansa pourrait arriver en tête sans pouvoir former une majorité pour gouverner

Élections en Europe

Corinne Deloy

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4 avril 2022
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Elections législatives slovènes du 24 avril : Janez Jansa pourrait arriver en tê...

PDF | 166 koEn français

Le 24 avril prochain, les Slovènes sont appelés à renouveler les 90 membres du Drzavni Zbor (Assemblée), chambre basse du Parlement bicaméral. Cette date a été choisie par le président de la République, Borut Pahor car il souhaite que le gouvernement soit formé avant l'été.

Les Slovènes seront invités en octobre, à élire un nouveau chef de l'Etat : Borut Pahor qui termine son deuxième mandat n'est pas autorisé à se représenter. Enfin, les électeurs renouvelleront leurs élus locaux en novembre,

On notera que les élections législatives du 24 avril sont les premières à ne pas être anticipées dans le pays depuis le scrutin du 21 septembre 2008.

20 partis politiques sont en lice pour ces élections. Selon l'enquête d'opinion réalisée par l'institut Mediana entre les 21 et 24 mars, le Parti démocrate (SDS) du Premier ministre sortant Janez Jansa est au coude-à-coude avec le Mouvement pour la liberté (GS) de Robert Golob. Le premier parti recueillerait 16,8% des suffrages et le second 16,7%. Les Sociaux-démocrates (SD) obtiendraient 9,4% tout comme la Gauche (L), Nouvelle Slovénie (NSi) remporterait 5%.

Janez Jansa, un Premier ministre sortant à la peine

A l'issue des élections législatives du 3 juin 2018, Marjan Sarec (Liste Marjan Sarec, LMS) a formé un gouvernement comprenant, outre le sien, 4 autres partis : les Sociaux-démocrates (SD), le Parti moderne du centre (SMC), l'Alliance Alenka Bratusek (ZaAB) et le Parti démocratique des retraités (DeSUS). Cette coalition était soutenue par La Gauche (L). Elle s'est divisée fin 2019 sur la réforme de la santé voulue par Marjan Sarec lorsque le ministre des Finances Andrej Bertoncelj s'est opposé publiquement au projet avant de présenter sa démission. La Gauche cessa alors de soutenir le gouvernement.

Le Premier ministre Marjan Sarec a démissionné le 27 janvier 2020 mais alors que tout le monde s'attendait à des élections anticipées qui, selon les enquêtes d'opinion auraient été favorables à la Liste Marjan Sarec, Janez Jansa (Parti démocrate, SDS), est parvenu à rassembler autour le Parti du centre moderne, le Parti démocrate des retraités et Nouvelle Slovénie (NSi). Il a obtenu la confiance de la chambre basse le 3 mars 2020. Le Parti démocrate des retraités a quitté le gouvernement en décembre 2020 à la suite de désaccords avec le Premier ministre.

Le gouvernement de Janez Jansa a dû faire face à de nombreux mouvements de protestations au cours de ses deux années au pouvoir. Les Slovènes sont souvent descendus dans la rue pour exprimer leur mécontentement, les parlementaires de l'opposition ont déposé de nombreuses motions de défiance, en vain toutefois. Janez Jansa a également été rappelé à l'ordre par l'Union européenne, notamment pour sa politique à l'égard des médias, le Premier ministre étant accusé de ne pas respecter la pluralité des médias. Ainsi, à la fin de l'année 2020, il a cessé de verser à l'Agence slovène d'information (STA) les fonds publics qui lui sont alloués habituellement et qui lui sont nécessaires pour fonctionner. L'agence a finalement pu bénéficier de sa subvention près d'un an plus tard, en novembre 2021.

Janez Jansa fait campagne en mettant en avant la hausse des salaires et des pensions de retraite ainsi que la baisse importante du taux de chômage (4,1% en février 2022). Il promet que si les électeurs lui permettent de conserver son poste, la Slovénie figurera parmi les quinze pays les plus développés au monde dans quelques années. Il se bat aussi pour un renforcement du budget de la défense et pour de plus importants investissements dans le domaine de la santé.

Même s'il arrive en tête le 24 avril, le Parti démocrate (SDS) aura des difficultés à constituer une majorité pour gouverner. Son allié au gouvernement, le Parti moderne du centre qui a pris le nom de Concrètement, conduit par Zdravko Pocivalsek, s'est uni au sein de l'alliance Connectons la Slovénie avec le Parti du peuple (SLS) de Marjan Podobnik, les Verts emmenés par Andrej Cus, le Nouveau Parti du peuple (NLS) de Zejko Vogrin et la Nouvelle Social-démocratie (NSD) de Andrej Magajna. Néanmoins, ces partis luttent actuellement pour leur survie et ils ne semblent pas en mesure d'apporter au Parti démocrate les sièges dont il pourrait voir besoin pour atteindre une majorité au parlement.

Robert Golob et son Mouvement pour la liberté, l'outsider

Comme souvent en Slovénie à l'approche d'un scrutin législatif (Zoran Jankovic (Slovénie positive, PS) en 2011, Miro Cerar (Parti de Miro Cerar, SMC), en 2014 et Marjan Sarec (Liste Marjan Sarec, LMS), en 2018), un nouvel acteur a émergé sur la scène politique. Robert Golob, qui a dirigé pendant plus de dix ans la compagnie de distribution d'électricité nationale en Slovénie, GHen-I, a repris Dej, parti écologiste créé en mai 2021 par l'ancien ministre de l'Environnement Jure Leben, qu'il a rebaptisé Mouvement pour la liberté (GS). Evincé de la direction de GHen-I fin 2021, Robert Golob a décidé, le 24 janvier, de se lancer dans la campagne législative. L'homme n'est pas un novice en politique. Il a travaillé comme secrétaire d'Etat au ministère des Affaires économiques. En 2011, il a été désigné vice-président de Slovénie positive (PS), parti fondé par le maire de Ljubljana Zoran Jankovic, puis il a été vice-président de l'Alliance Alenka Bratusek.

Robert Golob offre son entreprise en modèle de gouvernance et il décrit son programme politique comme "un peu de gauche et un peu de droite". Ce programme est centré sur la transition verte, la modernisation de l'Etat providence et la promotion d'une société libre et ouverte gouvernée par l'Etat de droit. "Le parti offre un nouveau pacte social qui ne laissera personne de côté et qui sera durable" promet le dirigeant du Mouvement pour la liberté.

La politique à mener face aux changements climatiques, la santé et la crise sanitaire et les challenges intergénérationnels sont les trois priorités de son parti qui prône l'abandon par la Slovénie des énergies fossiles et le développement d'une nouvelle génération de technologies nucléaires mais aussi le maintien des prix de l'énergie à un niveau peu élevé. Il souhaite également attirer les entreprises vertes et investir dans les nouvelles technologies, numériser les services de santé et aider les entreprises à réduire leur empreinte carbone.

Sur le plan institutionnel, le Mouvement pour la liberté (GS) aimerait voir le président de la République, dont la fonction est essentiellement honorifique en Slovénie, jouer un plus grand rôle. Il veut réformer l'impôt sur les entreprises, accroître le budget de la défense et démanteler la barrière construite à la frontière avec la Croatie afin d'éviter des franchissements illégaux par des migrants qu'elle juge inefficace.

Robert Golob aime à préciser qu'il a sciemment choisi le terme "mouvement" plutôt que "parti" "parce que je veux montrer que nous ne sommes pas un parti ordinaire, nous sommes différents" ajoutant "Nous n'offrons pas un programme mais une vision du pays, une vision de ce que sera la Slovénie en 2030".

Le GS devrait attirer les anciens électeurs de La Démocratie libérale (LDS), y compris ceux d'entre eux qui ont rejoint d'autres partis. Robert Golob a indiqué qu'il ne ferait aucune alliance avant le scrutin. Pour de nombreux analystes politiques, le Mouvement pour la liberté et les partis d'opposition de gauche ne devraient perdre le scrutin du 24 avril.

Une opposition rassemblée dans une coalition "Tous contre Jansa"

A l'image de ce qui s'est passé en République tchèque, l'opposition slovène s'est unie en une coalition appelée Coalition de l'arc constitutionnel (KUL). Celle-ci rassemble les Sociaux-démocrates (SD) emmenés par Tanja Fajon, la Liste Marjan Sarec (LMS), le Parti d'Alenka Bratusek (SAB) et La Gauche (L) conduite par Luka Mesec.

L'objectif premier de ces 4 partis est de faire chuter Janez Jansa. Ils ont signé le 28 septembre 2021 un accord de coopération en vue de former un gouvernement en cas de victoire aux élections. Il a été décidé que le poste de Premier ministre reviendrait au dirigeant du parti qui recueillerait le plus grand nombre de suffrages. L'opposition slovène accuse le Premier ministre sortant de dégrader la démocratie, de ne pas respecter l'Etat de droit et de vouloir contrôler les médias.

"La guerre en Ukraine constitue le dernier avertissement, la preuve de ce qu'il se passe quand la démocratie, l'Etat de droit et les droits humains ne sont pas respectés (...) Nous observons l'émergence d'un leadership autocrate en Hongrie, en Pologne dont le Premier ministre Janez Jansa est un émule" a déclaré la dirigeante des Sociaux-démocrates Tanja Fajon, ajoutant "L'atteinte à la liberté des médias, la production de fausses informations, le retour vers le passé et les modèles d'une société conservatrice peuvent conduire à la division de la nation et à la haine". Les Sociaux-démocrates souhaitent une diminution du temps de travail à 32 heures hebdomadaires et une hausse du salaire minimum (passant de 750 € à 800 €) et de la pension de retraite, (de 654 € à 700 €). Ils promettent d'investir 700 millions € pour stimuler l'économie et de faire que les dépenses de R&D et celles en faveur de l'innovation et du soutien aux jeunes chercheurs atteignent 1,5% du PIB.

La Gauche possède un programme proche. Elle veut renforcer le contrôle de l'Etat sur le secteur bancaire, accroître les investissements dans la science, la recherche et l'éducation jusqu'à ce que les dépenses de ces trois secteurs représentent 2% du PIB. Elle souhaite réduire le temps de travail et augmenter le salaire minimum jusqu'à 1 000 € dans les quatre années à venir. Enfin, le parti est favorable à une démilitarisation et au retrait de la Slovénie de l'OTAN. Interrogé sur les raisons pour lesquelles la Coalition de l'arc constitutionnel devrait fonctionner alors que ces partis ne s'entendaient pas précédemment, Luka Mesec, leader de La Gauche, met en avant le fait que ces partis ont appris à coopérer en étant dans l'opposition.

La Coalition de l'arc constitutionnel craint néanmoins que le Mouvement pour la liberté de Robert Golob lui prenne des voix. Les deux parties sont d'accord sur un point : pas d'alliance avec Janez Jansa.

Le système politique slovène

La Slovénie possède un Parlement bicaméral. La chambre basse, Drzavni Zbor (Assemblée), compte 90 membres, élus tous les 4 ans au scrutin proportionnel. La Constitution garantit un siège aux 2 minorités (italienne et hongroise) reconnues dans le pays. Leurs députés sont élus dans deux circonscriptions (Koper et Lendeva).

Le Drzavni Svet (Conseil national), chambre haute, est désigné tous les 5 ans au suffrage indirect et comprend 40 membres : 18 représentants des secteurs professionnels et socio-économiques (4 pour les employeurs, 4 pour les salariés, 4 pour les agriculteurs, les petits entrepreneurs et les travailleurs indépendants et 6 pour les organisations à but non-lucratif) et 22 personnes représentant les intérêts locaux. Le rôle du Conseil national est uniquement consultatif.

Pour les élections législatives, la Slovénie est divisée en 88 circonscriptions. Les listes de candidats soumises par des partis doivent obtenir le soutien de 3 membres de l'Assemblée et de 100 électeurs ; celles soumises par un groupe d'électeurs doivent recueillir les signatures de 1000 électeurs de la circonscription dans lesquelles elles sont candidates pour être autorisées à se présenter aux suffrages des Slovènes. Enfin, les partis politiques doivent impérativement présenter au moins 35% de candidates. Les listes qui ne comptent que 3 personnes doivent compter au moins un homme et une femme. Le scrutin a lieu au système proportionnel et le vote est préférentiel (l'électeur peut indiquer ses préférences en classant les candidats de la liste). Une première répartition des sièges se fait au niveau des circonscriptions en utilisant le quota de Droop (le nombre de suffrages exprimés dans une circonscription, toutes listes confondues, est divisé par le nombre de députés élus dans cette circonscription + 1). Les sièges restants sont répartis à l'échelon national selon la méthode d'Hondt, les députés sont alors choisis sur les listes bénéficiant des plus forts restes.

Les partis politiques doivent recueillir au moins 4% des suffrages pour être représentés au Drzavni Zbor. Il arrive qu'une circonscription élise plus d'un député mais que certaines circonscriptions n'en élisent aucun, ce qui, lors des élections du 13 juillet 2014, a été le cas dans 21 des 88 circonscriptions du pays.

Les députés représentant les minorités sont élus selon le système du First past the post. Les candidats à cette fonction doivent être soutenus par au moins 30 électeurs.

9 partis politiques ont obtenu des sièges lors des précédentes élections du 3 juin 2018 :

– le Parti démocrate (SDS), parti libéral créé en 1989 et dirigé par le chef du gouvernement sortant, Janez Jansa, possède 25 sièges ;

– la Liste Marjan Sarec (LMS), parti populiste créé en 2014 et dirigé par Marjan Sarec, compte 13 élus ;

– les Sociaux-démocrates (SD), fondé en 1993 et issu de l'ancien Parti communiste (PCS). Emmené par Tanja Fajon, le parti possède 10 sièges ;

– le Parti moderne du centre (SMC), créé en 2014 et devenu Concrètement (K), est conduit par Zdravko Pocivalsek et compte 10 députés ;

– La Gauche (L), parti créé en 2017, dirigé par Luka Mesec, possède 9 sièges ;

– Nouvelle Slovénie (NSi), parti fondé en 2000 et conduit depuis janvier 2018 par Matej Tonin, compte 7 députés

– l'Alliance Alenka Bratusek (ZaAB), parti centriste créé en 2014 à partir d'une scission de Slovénie positive (PS) et dirigé par l'ancien Premier ministre (2013-2014) Alenka Bratusek. Devenu le Parti d'Alenka Bratusek (SAB), il possède 5 sièges ;

– le Parti démocratique des retraités (DeSUS), fondé en 1991 à partir d'une association de la ville de Maribor et présidé par Ljubo Jasnic, compte 5 élus ;

– le Parti national (SNS), parti nationaliste dirigé par Zmago Jelincic, possède 4 sièges.

En Slovénie, le président de la République est désigné au suffrage universel direct. Son mandat est de 5 ans. Le 12 novembre 2017, le chef de l'Etat sortant Borut Pahor (SD) a été réélu à son poste avec 52,98% des suffrages. Il a battu Marjan Sarec, qui a obtenu 47,02% des voix. La participation a été la plus faible jamais enregistrée depuis l'indépendance du pays en 1991 : 41,84%.

Rappel des résultats des élections législatives du 3 juin 2018 en Slovénie

Participation : 52,63%

Source : http://volitve.gov.si/dz2018/#/rezultati

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