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Alar Karis, seul candidat au poste de président de la République en Estonie

Élections en Europe

Corinne Deloy

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30 août 2021
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Alar Karis, seul candidat au poste de président de la République en Estonie

PDF | 117 koEn français

Le 30 août, à 13h, les 101 députés du Riigikogu, chambre unique du Parlement, sont appelés à voter pour élire le prochain président de la République. S'ils n'y parviennent pas, cette responsabilité reviendra au Collège électoral, qui rassemble les 101 députés et les 107 membres des assemblées représentatives des municipalités estoniennes. Leur vote devra intervenir avant le 25 septembre prochain.

Habituellement, les candidats à la fonction suprême sont connus au printemps, vers le mois d'avril, mais la précédente élection de 2016, longue et difficile, a laissé des traces et a rendu les partis politiques très prudents.

En effet, le 3 octobre 2016, Kersti Kaljulaid était devenue la première femme à accéder à la fonction de président de la République en Estonie. Elle avait été élue par les 101 membres du Riigikogu. Seule candidate en lice, elle avait recueilli 81 suffrages. Sa désignation à la magistrature suprême avait été la conclusion d'un feuilleton électoral qui avait quasiment conduit le pays au bord de la crise constitutionnelle.

Le 25 septembre 2016, l'Estonie s'était en effet retrouvée dans une situation inédite depuis le retour du pays à l'indépendance en 1991 puisque le Collège électoral (Valimiskogu) n'était pas parvenu à élire le président de la République, une première, où tous les chefs d'Etat ont été désignés par cette assemblée depuis 1996, année de la mise en place du système actuel de désignation du chef de l'Etat, à l'exception du scrutin de 2011 où Toomas Hendrik Ilves avait été le premier président estonien désigné par le Parlement. Le 27 septembre, la conférence des présidents du Riigikogu, composée des présidents des 6 groupes politiques et des 3 membres du bureau de l'assemblée, avait décidé de soutenir la candidature de Kersti Kaljulaid qui avait été officiellement élue 6 jours plus tard.

Une candidature unique

2 des 5 partis représentés au Riigikogu possèdent un nombre suffisant de sièges pour présenter un candidat : le Parti du centre (K), dirigé par Jüti Ratas, et le Parti de la réforme (ER) de la Première ministre Kaja Kallas. Néanmoins, les voix de députés issus d'au moins 3, voire 4 partis, seront nécessaires à tout candidat pour être élu. A l'exception du Parti conservateur populaire (EKRE), les partis aimeraient voir le prochain président de la République élu par le Parlement et ainsi échapper au vote du Collège électoral.

Le Parti de la réforme et le Parti du centre ont proposé à Alar Karis d'être candidat à la présidence de la République. Celui-ci a accepté le 18 août.

Agé de 63 ans, Alar Karis, généticien moléculaire et biologiste du développement, dirige le musée national à Tartu depuis octobre 2017. Il a exercé les fonctions d'auditeur général (c'est-à-dire la personne en charge du contrôle des comptes publics) entre 2013 et 2017 après avoir été recteur de l'université de Tartu de 2007 à 2012.

On notera que chacun des 2 partis a renoncé à son propre candidat - la cheffe de l'Etat sortante, Kersti Kaljulaid, pour le Parti de la réforme et Tarmo Soomere, président de l'Académie des sciences, pour le Parti du centre - et chacun a accepté un candidat de compromis pour parvenir à une élection rapide du prochain président.

Cependant, les 2 partis ne possèdent, ensemble, que 59 voix, soit 9 de moins que le nombre nécessaire pour élire le candidat. Du côté des autres partis, les responsables de Pro Patria (Isamaa, I) ne sont pas parvenus à se mettre d'accord sur leur soutien à Alar Karis et ils ont décidé de laisser leurs députés libres de voter selon leur conscience. Conclusion identique au Parti social-démocrate (SDE) qui n'a pas donné de consigne de vote.

Le Parti du centre et le Parti de la réforme se montrent néanmoins confiants dans le fait d'obtenir, le 30 août, les 9 voix manquantes pour faire élire Alar Karis.

Le Parti conservateur populaire souhaitait présenter son propre candidat en la personne de Henn Polluaas, président du Riigikogu. Cependant, il ne dispose que de 19 députés, soit 2 de moins que le nombre minimum requis pour proposer un candidat. Le Parti n'a pas encore décidé de ce qu'il demanderait à ses députés le 30 août : voter blanc ou s'abstenir.

Si le Riigikogu échoue à désigner le futur président de la République le 30 août, un nouveau vote sera organisé le 31 août. Un éventuel 3e tour pourrait avoir lieu ce même jour.

La fonction présidentielle et les modalités du scrutin

La fonction de chef de l'Etat est, en Estonie, essentiellement honorifique. Chef des forces armées, le président de la République représente le pays sur la scène internationale, il conclut les traités avec les Etats étrangers, il accrédite et reçoit les représentants diplomatiques. Le président de la République possède également le droit de rédiger des amendements à la Constitution.

Il est élu au suffrage indirect. Toute personne âgée d'au moins 40 ans peut se porter candidate à la fonction suprême. Pour participer au scrutin, elle doit être investie par au moins un cinquième, soit 21, des 101 députés du Riigikogu. Elu pour 5 ans, le chef de l'Etat ne peut rester en poste plus de deux mandats consécutifs

L'élection présidentielle se déroule en premier lieu au sein du Parlement. Lors du 1er tour de scrutin, le candidat qui recueille au moins les 2/3 des suffrages des 101 députés (soit 68 voix) est déclaré élu. Dans le cas où aucun candidat ne parvient à obtenir ce nombre de voix, un 2e tour est organisé le lendemain, suivi d'un 3e tour (avec les deux candidats ayant recueilli le plus grand nombre de suffrages) le cas échéant. A l'issue, si aucun candidat n'obtient suffisamment de voix pour pouvoir accéder à la fonction suprême, le président du Riigikogu convoque alors dans les 30 jours suivants le Collège électoral (Valimiskogu).

Lors du vote du Collège électoral, de nouvelles personnes peuvent se porter candidates à l'élection présidentielle (tout groupe rassemblant au moins 21 membres du Collège peut présenter un candidat). Lors de ce scrutin, toute personne qui recueille la majorité absolue des voix est déclarée élue. Si cette majorité n'est pas atteinte, un 2e tour est organisé le même jour et le candidat qui obtient la majorité des suffrages est alors déclaré élu. Depuis 1996, le Collège électoral a été convoqué à quatre reprises : en 1996, 2001, 2006 et 2016 (en vain).

Si les grands électeurs ne parviennent pas à désigner le prochain président de la République, cette fonction revient alors, de nouveau, aux 101 députés du Riigikogu. Un nouveau scrutin doit être organisé dans les 14 jours suivants.

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