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Le Rassemblement démocratique du président de la République Nicos Anastasiades arrive en tête des élections législatives à Chypre dans un scrutin marqué par le mécontentement des électeurs

Élections en Europe

Corinne Deloy

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31 mai 2021
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Le Rassemblement démocratique du président de la République Nicos Anastasiades a...

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7 partis politiques seront représentés au sein de la prochaine Vouli antiprosopon (Chambre des représentants), chambre unique du Parlement, soit -1 par rapport à la précédente assemblée.

Le Rassemblement démocratique (DISY), parti du président de la République Nicos Anastasiades, situé à droite sur l'échiquier politique et dirigé par Averof Neophytou, est arrivé en tête du scrutin le 30 mai avec 27,77% des suffrages et 17 sièges, soit -1 par rapport aux précédentes élections du 22 mai 2016. Le DISY, qui obtient le résultat le plus faible de son histoire, échoue à obtenir la majorité absolue, ce qui va obliger le chef de l'Etat à former de nouveau un gouvernement minoritaire.

Le Parti progressiste des travailleurs (AKEL), emmené par Andros Kyprianou, reste le premier parti d'opposition, avec 22,34% des voix et 15 élus (- 1). Ce résultat est également le plus faible jamais obtenu par le parti. Son dirigeant a admis que AKEL n'avait pas réussi à convaincre les électeurs. "Nous continuerons de soutenir les droits des travailleurs, de lutter contre la corruption et de servir l'objectif de la réunification de l'île " a-t-il déclaré, affirmant qu'il assumait sa part de responsabilité dans la défaite électorale.

Le Parti démocratique (DIKO), parti de centre gauche dirigé par Nikolas Papadopoulos, a pris la 3e place avec 11,29% des suffrages et 9 sièges (=), réussissant à maintenir son nombre de députés en dépit de la présence du Front démocratique (DIPA), fraction dissidente du parti centriste.

Chacun des deux " grands " partis politiques chypriotes est en recul par rapport au scrutin du 22 mai 2016, ce qui est l'expression du mécontentement des électeurs à l'égard des partis traditionnels. Le Front populaire national (ELAM), parti de droite radicale et nationaliste dirigé par Christos Christou, est arrivé en 4e position avec 6,78% et 4 sièges (+ 2). " le Front populaire national est le vainqueur incontestable des élections, et c'est un problème pour les gens qui croient dans une solution fédérale au problème de la division de Chypre. Ce résultat sera utilisé par les cercles nationalistes du nord de l'île " a déclaré Andromachi Sophocleou, analyste politique, ajoutant "Même s'il fait partie du système, le Front populaire national a réussi à faire croire qu'il ne l'est pas et il est parvenu à profiter du mécontentement existant à l'égard des partis traditionnels ".

Il y a une volonté de changement, de nombreux électeurs sont insatisfaits et sont fatigués de la classe politique et du Parlement, de la corruption mais le vote de protestation est fragmenté, le taux d'abstention élevé et aucune personnalité n'est là pour incarner le mécontentement " a indiqué Hubert Faustmann, professeur de relations internationales à l'université de Nicosie.

Pour Christoforos Christoforou, chercheur au Centre chypriote des affaires européennes et internationales de l'université de Nicosie, le Front populaire national mais aussi le Front démocratique (DIPA) sont les vrais vainqueurs du scrutin qui constitue un échec pour les deux partis principaux de l'île. Le Front démocratique, créé en 2018 par des membres du Parti démocratique opposés à Nikolas Papadopoulos et dirigé par Marios Garoyian, a en effet recueilli 6,10% et 3 élus. Un résultat honorable pour une première participation et dont son dirigeant s'est réjoui, parlant de " début du rajeunissement du centre de l'échiquier politique dont Chypre avait grand besoin ". Il a mentionné le fait qu'avec un seuil électoral établi à 3,6%, 15 000 électeurs qui ont voté pour de " petits " partis qui n'ont remporté aucun siège ne seront pas représentés au Parlement.

Sur le plan politique, Chypre est devenu une île très polarisée, les jeunes ne veulent manifestement plus des pratiques corrompues du passé" a souligné Nicos Trimikliniotis, professeur de sociologie à l'université de Nicosie, ajoutant "Le Front populaire national a joué un rôle destructeur en déplaçant la rhétorique vers la droite et en permettant au discours public de devenir plus raciste et anti-immigrant à un moment où de plus en plus de demandeurs d'asile arrivent à Chypre".

Dans les urnes, le parti nationaliste est suivi par le Mouvement pour la social-démocratie (EDEK), présidé par Marinos Sizopoulos, qui partage avec lui une position dure dans les négociations sur l'avenir de Chypre. EDEK a recueilli 6,72% et 3 sièges (- 2).

Le Mouvement des écologistes-Coopération citoyenne (KOSP) n'a pas obtenu le résultat qu'il escomptait en dépit du positionnement de son nouveau dirigeant Charalambos Theopemptou, davantage centré sur les questions d'environnement que l'était son prédécesseur : 4,41% et 2 élus (+ 1).

Enfin, Eleni Theocharous et son Mouvement solidaire (KA) ont échoué à conserver leurs sièges à la Vouli antiprosopon. La députée sortante a exprimé sa déception tout en déclarant qu'elle continuerait à travailler pour le bien du pays : " Le peuple a choisi de se rendre sans se battre ".

La participation s'est élevée à 65,72%, soit -1,02 point par rapport à celle enregistrée le 22 mai 2016. En dépit du contexte sanitaire, elle est plus élevée que ce qu'avaient prévu les enquêtes d'opinion.

Les élections ont eu lieu dans un contexte marqué par le scandale des " passeports dorés ". Durant plusieurs années, Chypre a en effet délivré des passeports à des milliers investisseurs étrangers en échange d'un investissement de 2,5 millions € sur l'île (qui pouvait consister en l'achat d'une résidence). Lancé en 2007, le Cyprus Investment Programme (CIP) s'est surtout développé après la crise économique de 2013 alors que le pays était au bord de la faillite. Selon le ministère de l'Intérieur, environ 4 000 étrangers ont bénéficié de ce programme qui a généré quelque 8 milliards € de recettes. Les autorités chypriotes réexaminent les dossiers des quelque 4 000 personnes qui ont bénéficié du dispositif.

Pour un tiers des Chypriotes (34%), la corruption représente le principal problème du pays selon une enquête réalisée par l'institut d'opinion IMR et l'université de Nicosie pour CyBC. Dans ce même sondage, un quart des personnes interrogées (25%) citent la gestion de la crise sanitaire consécutive à la pandémie de coronavirus comme l'enjeu électoral principal de l'île ; 18% les questions socioéconomiques et enfin 15% la division de l'île.

Résultats des élections législatives du 30 mai 2021 à Chypre

Participation : 65,72%

Source : Site internet des élections

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