Analyse
Élections en Europe
Corinne Deloy
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8 millions de Belges sont appelés aux urnes le 25 mai prochain pour ce qui est appelé la "mère de toutes les élections". En effet, ils renouvelleront leurs députés, leurs sénateurs, leurs représentants régionaux et leurs députés européens. Les députés nationaux seront désignés pour 5 ans (au lieu de 4 précédemment). La réforme électorale qui a modifié la procédure du scrutin fédéral est censée apporter davantage de stabilité.
129 139 Belges résidant à l'étranger se sont inscrits sur les listes électorales ; Ils n'étaient que 42 489 à voter lors des dernières élections du 13 juin 2010. En outre, les bureaux de vote resteront ouverts une heure de plus qu'habituellement, une mesure autorisée en cas de scrutins multiples.
Les élections du 13 juin 2010 avaient été un véritable tremblement de terre électoral. La Nouvelle alliance flamande (N-VA) de Bart de Wever avait recueilli 18,65% des suffrages et remporté 28 sièges à la Chambre des représentants (20,64% des voix et 9 sièges au Sénat), un résultat sans précédent et le meilleur score obtenu par un parti indépendantiste. Les partis prônant l'indépendance de la Flandre (N-VA, Vlaams Belang (VB) et Liste DeDecker (LDD)) avaient rassemblé 44,1% de l'électorat flamand. Après le vote, les responsables politiques avaient mis pas moins de 541 jours (un record mondial) avant de pouvoir former un gouvernement. Le 6 décembre 2011, Elio di Rupo (Parti socialiste, PS) était devenu Premier ministre, le 1er francophone depuis Edmond Leburton (1973-1974) et avait formé un gouvernement rassemblant les 6 principaux partis politiques belges que soutiennent les 2 partis écologistes.
La N-VA est au cœur de la campagne électorale. Les médias parlent des résultats dont elle est créditée dans les enquêtes d'opinion en Flandre ou des réactions des autres partis aux propos de son dirigeant Bart de Wever. La N-VA, qui, il y a 4 ans, était arrivée en tête des élections parlementaires en Flandre, avait donc été écartée du pouvoir au niveau fédéral. Le parti nationaliste, dont le programme vide l'Etat fédéral belge de toute substance, aimerait faire des élections du 25 mai une sorte de référendum sur l'indépendance de la Flandre. Il présente le gouvernement actuel comme "socialiste, francophone et qui aime à taxer la population" et affirme que dans le scrutin à venir, les électeurs doivent faire un "choix fondamental entre le modèle socialiste (synonyme pour la formation nationaliste de hausse constante des impôts et des dépenses publiques) et celui offert par la N-VA" selon les mots de Bart de Wever. "Mettre le PS et la N-VA dos-à-dos, c'est mettre dans le même sac des pyromanes et des pompiers. Seul le PS peut stabiliser le pays" lui a répondu le Premier ministre Elio di Rupo.
Un gouvernement belge sans participation des socialistes paraît hautement improbable. S'il est en recul dans les enquêtes d'opinion, le parti du Premier ministre Elio di Rupo reste n°1 en Wallonie et les francophones du pays voient en lui le rempart à l'éclatement de leur pays et le meilleur défenseur de l'unité nationale et de l'Etat social en dépit des mesures d'austérité du gouvernement dirigé par Elio di Rupo.
"Je pense que ce scénario n'aura pas lieu. Gouverner sans le PS signifie qu'outre le Mouvement réformateur (MR), un ou deux partis francophones soient prêts à gouverner avec une majorité flamande de centre droit au niveau fédéral" indique Carl Devos, politologue de l'université de Gand. Si une alliance entre la N-VA, le Parti démocrate-chrétien (CD&V) et les Libéraux et démocrates (Open VLD) est possible coté flamand, une telle union dont la gauche serait absente semble quasiment impossible au niveau fédéral. "Quel que soit son résultat, la N-VA ne pourra gouverner seule. Il lui faudra convaincre des partenaires et donc faire des compromis" ajoute Carl Devos.
En raison du système belge, la N-VA et le PS ne s'affrontent que dans la capitale Bruxelles.
Outre l'avenir institutionnel de la Belgique, plusieurs autres sujets - la politique budgétaire et les réformes structurelles nécessaires à la modernisation d'un pays très touché par la crise économique - devraient figurer au cœur de la campagne électorale.
Le système politique belge
En 1830, le royaume de Belgique est fondé à partir de la fusion des anciens Pays-Bas autrichiens et de la principauté de Liège. A l'époque, si la majorité des habitants parlent le néerlandais, la noblesse et la bourgeoisie s'expriment en français. Les néerlandophones sont majoritairement protestants (calvinistes) ; les francophones, catholiques. La prépondérance francophone sur l'ensemble du pays durera plus d'un siècle avant que, dans les années 1960, la Wallonie ne commence à décliner au moment même où l'économie de la Flandre commence à décoller. Les Wallons demandent alors une plus grande autonomie pour lutter contre le déclin industriel de leur région. Les tensions qui se font jour entre les 2 communautés débouchent sur plusieurs réformes constitutionnelles (1970, 1980, 1988-1989, 1993 et 2001) qui, au cours des années, ont transformé la Belgique en un Etat fédéral.
Le royaume compte 3 régions (Flandre, Wallonie et Bruxelles-capitale), 3 communautés linguistiques (francophone, néerlandophone et germanophone) et 2 commissions communautaires. En 1993, l'article 1er de la Constitution du pays stipule que la Belgique cesse d'être un Etat unitaire. De nouvelles compétences fédérales sont transférées aux régions qui avaient déjà en charge l'éducation, la culture, la politique sociale, le logement, l'environnement, l'aménagement du territoire et, avec quelques exceptions, l'emploi et l'économie (commerce extérieur, agriculture). Les parlements régionaux deviennent des institutions élues au suffrage universel direct. La réforme de 2001 confère une autonomie fiscale aux régions. 70% du budget de l'Etat fédéral leur est redistribué. Conséquence de ces évolutions, la Belgique ne possède plus de partis politiques nationaux, une rupture qui a renforcé les différences linguistiques et institutionnelles. La scène politique est composée de partis francophones en Wallonie, de partis néerlandophones en Flandre. Ils se côtoient seulement dans la région de Bruxelles-capitale. Flamands et Wallons possèdent chacun leurs médias et n'ont plus que la famille royale, le drapeau, la justice et l'armée en commun.
La 6e réforme de l'Etat, adoptée en 2014, transfère des pans entiers de compétences et de moyens financiers aux régions (emploi) et aux communautés (allocations familiales), des entités auxquelles elle offre un degré d'autonomie inédit. Lorsque cette réforme sera appliquée (1er juillet 2014), le gouvernement flamand gèrera ainsi un budget plus important que celui de l'Etat fédéral (dette publique exclue).
Le système politique belge a été fondé sur la pilarisation. Les partis politiques se sont développés à partir de clivages internes à la société : un clivage religieux (Eglise/Etat) en premier lieu, puis un clivage régional (Wallons/Flamands) et, enfin, un clivage social (travail/capital). Les partis politiques, nés de ces clivages, ont longtemps constitué de véritables entités au sein du royaume, chacun gérant une multitude d'organisations (écoles, compagnies d'assurance, etc.), prenant en charge les membres du parti et leurs familles quasiment de la naissance à la mort. En échange de leur loyauté politique, les membres de ces différentes organisations obtenaient des emplois, des logements ou autres avantages sociaux. De leur côté, les dirigeants des différents partis politiques se répartissaient, de façon équitable, les postes à pourvoir au sein des administrations publiques.
Ce système a parfaitement fonctionné durant des décennies avant de se gripper à la fin des années 1970. Dans les années 1980, plusieurs nouvelles forces politiques sont apparues sur l'échiquier politique : les écologistes, puis les nationalistes d'extrême droite (Volksunie, Vlaams Blok devenu Vlaams Belang, le Front démocratique des francophones bruxellois, le Rassemblement wallon et le Front national). Ces nouveaux partis ont connu un succès grandissant. Socialistes et démocrates-chrétiens qui, durant des décennies, ont rassemblé la majorité du corps électoral belge, ne représentent plus désormais qu'un tiers des électeurs.
Le parlement belge est bicaméral. La Chambre des représentants compte 150 députés et le Sénat comprend 71 membres, dont 40 élus au suffrage universel direct au sein de trois circonscriptions : Flandre, Wallonie et Bruxelles-Hal-Vilvorde (25 par le collège néerlandophone et 15 par le collège francophone), 21 élus par les parlements des deux communautés (Conseil flamand et Conseil de la communauté française) et 10 nommés par cooptation. Le Sénat compte également des sénateurs de droit : les enfants du roi âgés d'au moins 18 ans et ayant prêté serment en qualité de sénateur.
Les deux Chambres du parlement sont renouvelées le même jour.
Le scrutin a lieu à la proportionnelle intégrale à la plus forte moyenne (méthode d'Hondt) au sein de 11 arrondissements électoraux.
Les Belges peuvent voter en faveur de l'ensemble des membres d'une liste, pour un ou plusieurs candidats effectifs d'une liste, pour un ou plusieurs candidats suppléants d'une liste ou encore en faveur de candidats effectifs et de suppléants. Pour pouvoir se présenter aux suffrages des électeurs, les "petits" partis doivent recueillir entre 200 et 500 signatures (chiffre dépendant de la taille de la circonscription électorale) par arrondissement pour la Chambre des représentants et 5 000 pour le Sénat tandis que la signature de 3 parlementaires est suffisante pour les "grands" partis. Chaque parti doit obtenir un minimum de 5% des suffrages dans un arrondissement électoral pour être représenté au parlement. Les candidats doivent être âgés d'au moins 21 ans et les listes de candidats sont paritaires. Le vote est obligatoire en Belgique, les abstentionnistes encourant une réprimande (lorsqu'ils s'abstiennent pour la première fois) ou une amende de 27,5 à 55 € infligée par le juge de police. Celle-ci peut atteindre jusqu'à 137,50 € en cas de récidive.
12 partis politiques sont représentés à la Chambre des représentants :
– la Nouvelle alliance flamande (N-VA), parti nationaliste flamand issu de la dissolution le 19 septembre 2001 du parti régionaliste flamand de la Volksunie et présidé par Bart De Wever, compte 27 députés ;
– le Parti socialiste (PS), du Premier ministre Elio di Rupo dirigé par Paul Magnette, possède 13 sièges ;
– le Mouvement réformateur (MR), parti libéral de Charles Michel, compte 18 députés ;
– le Parti démocrate-chrétien flamand (CD&V), dirigé par Wouter Beke, possède 17 sièges ;
– le Parti socialiste flamand (SP.A), dirigé par Bruno Tobback, compte 13 députés ;
– les Libéraux et démocrates flamands (Open VLD), parti libéral de Gwendolyn Rutten, possèdent 13 sièges;
– le Vlaams Belang (VB), parti d'extrême droite présidé par Gerolf Annemans, compte 12 députés ;
– le Centre démocrate humaniste (cDH), dirigé par Benoît Lutgen, possède 9 sièges ;
– Ecolo, parti vert francophone codirigé par Olivier Deleuze et Emily Hoyos, compte 8 députés ;
– Groen !, parti écologiste de Flandre présidé par Wouter Van Besien, possède 5 sièges ;
– la Liste Jean-Marie Dedecker, parti nationaliste, compte 1 député ;
– le Parti populaire (PP), parti populiste de Mischaël Modrikamen, possède 1 siège.
Pour une Belgique confédérale, nouveau credo de la Nouvelle alliance flamande
La N-VA présente un programme dans lequel l'indépendance de la Flandre (à laquelle seuls 15% des Flamands se déclarent favorables, un chiffre qui n'a pas évolué depuis 15 ans) n'apparaît plus comme son objectif premier. Le parti préfère parler de transformer la Belgique en un Etat confédéral associant la Flandre et la Wallonie et dans lequel les régions détiendraient toutes les compétences (fiscalité, emploi, sécurité sociale, éducation, santé, famille, justice, énergie, famille) à l'exception de la défense, la politique d'immigration et la gestion de la dette.
Le programme de la N-VA propose que le gouvernement fédéral passe de 15 à 6 membres (3 ministres pour chaque communauté), la suppression du poste de Premier ministre, la transformation de la monarchie belge en monarchie protocolaire (à l'image de celle des Pays-Bas), la suppression du Sénat, la réduction du nombre des membres de la Chambre des représentants à 50 députés (25 pour la Flandre et 25 pour la Wallonie). Dans ce programme, Bruxelles perdrait son statut de région et deviendrait une entité administrative dotée de faibles compétences (emploi, travaux publics, mobilité) et les Bruxellois devraient choisir de se rattacher à la Flandre ou à la Wallonie pour les élections et la sécurité sociale. "Nous voulons le confédéralisme pour bâtir la Flandre dont nous rêvons. Nous devons nous débarrasser de la hausse des impôts, de l'augmentation de la dette et d'une administration gouvernementale sans cesse en croissance. La solution s'appelle le confédéralisme" affirme Bart de Wever. Celui-ci a toutefois déclaré qu'il ne faisait pas du confédéralisme la condition de sa participation à une future coalition gouvernementale.
En 2010, le CD&V et l'Open VLD étaient également favorables à cette vision confédérale de l'avenir de la Belgique. Le CD&V défend toutefois un "confédéralisme positif", c'est-à-dire permettant de prévenir tout éclatement de la Belgique, tandis que l'Open VLD se concentre davantage sur les enjeux socioéconomiques.
La N-VA exige également que le prochain gouvernement fédéral dispose d'une majorité en Flandre. La coalition actuelle peut compter sur le soutien de 96 députés (sur 150) mais les 3 partis flamands (Sp.a, Open VLD et CD&V) comptent, au sein du collège néerlandophone, seulement 43 députés (sur 88).
Le programme de la N-VA s'intitule Welvaart en welzijn (Prospérité et bien-être) ; le parti a choisi pour slogan Verandering voor vooruitgang (Changer pour le progrès). Le texte adopté propose que la fiscalité soit désormais du ressort des régions, la TVA restant la seule taxe à être collectée par l'Etat fédéral. "La Flandre sera responsable de perception de l'impôt sur les sociétés (de 33,39% à 27,13%) et sur le revenu et nous baisserons ainsi la taxe sur les bas salaires de 40%. La tranche de 40% sera supprimée et celle de 50% réservée aux hauts revenus" a indiqué Jan Jambon, chef du groupe parlementaire de la N-VA à la Chambre des représentants.
Libéral, le parti propose un gel des dépenses publiques fédérales (pour un montant de 12,1 milliards € en 2019 fin de législature) jusqu'en 2016, une réforme du marché du travail et un contrôle accru des chômeurs. La N-VA veut limiter la durée de l'allocation chômage à 2 ans tout en en augmentant le montant, supprimer l'indexation automatique des salaires qu'elle souhaite remplacer par un accord sur les salaires qui serait négocié par secteur tous les 2 ans et relever le revenu d'intégration au niveau du seuil de pauvreté (celui-ci serait distribué contre un service communautaire).
Le parti se propose de dégager 17 milliards € (55 milliards sur l'ensemble de la législature) au profit des travailleurs, des retraités (augmentation de 8,5 milliards € par an des pensions, soit 2%) et des entreprises.
"Nous proposons une autre politique axée sur ceux qui travaillent, épargnent et entreprennent. Une politique qui récompense ceux qui prennent leurs responsabilités et qui prend également soin de ceux qui sont dans le besoin, une politique qui baisse les impôts, met fin aux dettes et dégraisse les pouvoirs publics" a déclaré Bart de Wever.
Enfin, la N-VA veut repousser la sortie du nucléaire à 2065 (au lieu de 2015) et propose de construire une nouvelle centrale.
Exclue du gouvernement sortant, la N-VA veut accéder au pouvoir au niveau fédéral - de préférence sans le PS. Mais les autres partis ne semblent pas prêts à s'associer avec elle, même si le parti se présente comme un parti modéré de centre droit, a réduit ses attentes et se montre plus enclin au compromis.
Bart de Wever s'est fixé pour objectif de recueillir 30% des suffrages aux élections parlementaires du 25 mai prochain. "Si nous n'obtenons pas 30% des voix, la tentation sera grande pour les autres partis de continuer à diriger sans la N-VA" a-t-il affirmé. Par ailleurs, le bourgmestre d'Anvers a plusieurs fois parlé de l'avenir en évoquant son départ probable. "J'ai toujours dit que je ne serai pas président de la N-VA un jour de trop. Comme président, je veux encore une fois gagner les élections de sorte que je puisse passer le témoin la conscience tranquille" a-t-il déclaré.
Les forces de gauche
Le dirigeant du parti socialiste Paul Magnette aime à répéter que durant son mandat, Elio di Rupo a stabilisé un pays au bord de l'implosion, renoué avec la croissance, fait baisser la dette publique sous la barre de 100% du PIB et redoré l'image internationale de la Belgique. Si le PS est toujours prédominant en Wallonie, même s'il est en recul dans les enquêtes d'opinion, Elio di Rupo est cependant beaucoup plus populaire que le PS.
Le programme socialiste promet d'augmenter les salaires de 120 € mensuels, d'offrir également une "Garantie jeune" afin de procurer un travail (ou un stage) aux jeunes après 4 mois de recherche d'emploi et de récupérer 3 milliards € pour les caisses de l'Etat à l'aide de deux mesures principales : la taxation du capital qui permettra de récupérer 1,5 milliard € et le renforcement de la lutte contre la fraude qui apportera 1,5 milliard € supplémentaire. L'impôt sur la fortune, qui concerne les ménages au patrimoine supérieur à 1,25 million € (en dehors de leur domicile et des biens affectés à la vie professionnelle), soit environ 80 000 personnes (1% de la population), pourrait rapporter 400 millions €.
La Belgique a connu récemment une montée des extrêmes : Debout les Belges de Laurent Louis, Parti populaire (PP) de Mischaël Modrikamen, la Droite d'Aldo Mungo (exclu du Parti populaire), Démocratie nationale (DN), anciennement Front national, Wallonie d'abord ou encore le Parti des travailleurs de Belgique (PTB), dirigé par Peter Mertens.
Ce dernier parti, qui se déclare marxiste-léniniste, se présente comme celui de "la gauche décomplexée" ; il se veut une force alternative et anticapitaliste à gauche du PS comme des verts d'Ecolo. Il lutte contre la pauvreté et pour l'emploi et veut revaloriser à hauteur de 3 milliards € le pouvoir d'achat des allocataires d'aides sociales et de 70% des travailleurs. Le Parti des travailleurs de Belgique est opposé au pacte budgétaire européen (traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, signé le 2 mars 2012) et demande le retrait des troupes belges d'Afghanistan. "Tous les grands partis, à l'exception des écologistes néerlandophones et de l'extrême droite flamande du Vlaams Belang, sont représentés dans les exécutifs fédéraux ou régionaux. Du coup, lorsque les citoyens cherchent un vote sanction, ils se tournent à la "périphérie" indique Pascal Delwit, professeur de science politique de l'Université libre de Bruxelles.
L'extrême gauche, qui dénonce le gouvernement d'Elio di Rupo de ne pas avoir mené une politique de gauche, espère obtenir les premiers députés de son histoire le 25 mai prochain.
Le Premier ministre répète que voter en faveur des extrêmes est un cadeau fait à la droite. Elio di Rupo critique l'inexpérience du Parti des travailleurs de Belgique, son absence de bilan social et met en cause la volonté de ses membres de gouverner.
Les Libéraux
Le Mouvement réformateur (MR) se dit a priori hostile à toute alliance avec la N-VA. Son ancien dirigeant (2004-2011) -actuel vice-Premier ministre et ministre fédéral des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes-, Didier Reynders, affirme que le MR pourrait gouverner avec le parti nationaliste si celui-ci abandonnait toute revendication constitutionnelle. Le MR est fondamentalement opposé à toute nouvelle réforme de l'Etat. Il préconise une réduction des dépenses publiques et des baisses de charges pour les entreprises (diminution de l'impôt sur les sociétés) et un renforcement du pouvoir d'achat des citoyens (baisse de charges pour les travailleurs qui disposent de faibles revenus et réduction du nombre de tranches d'impôt avec taux zéro d'imposition pour les 13 000 premiers € de revenus). Selon le MR, cette réforme fiscale coûterait 5,8 milliards €.
La réduction de 15 milliards € des dépenses publiques d'ici 2019 constitue l'un des points principaux du programme de l'Open VLD qui veut ainsi diminuer de 3,5 milliards € les contributions sociales. La réduction des dépenses serait bénéfique à tous et permettrait la création de 240 000 emplois, une baisse de charges de 5 milliards € pour les entreprises, les salariés et les retraités et donnerait "de l'oxygène à l'économie belge". L'Open VLD souhaite également une réduction du nombre de tranches d'impôts à deux (25% et 45%) d'ici 2021, obliger les demandeurs d'emploi à suivre une formation et à effectuer deux demi journées de travail hebdomadaires au profit de la communauté. Il affirme se retrouver dans plusieurs des mesures économiques défendues par la N-VA mais rejette le programme communautaire des nationalistes.
Les démocrates-chrétiens
Le CD&V est officiellement favorable au confédéralisme mais défend ce qu'il appelle le "fédéralisme positif", soit un fédéralisme poussé comme dans les systèmes suisse ou canadien.
Le CD&V, qui a choisi pour slogan "Vivre mieux c'est possible", veut relever le minium imposable (de 6 800 à 9 800 €) et le revenu d'intégration des personnes isolées. Selon lui, la Belgique peut atteindre un taux d'emploi de 76% en 2020. Il n'exclut pas la formation d'un gouvernement asymétrique entre niveau fédéral et régions. "Pour ce qui me concerne, il n'existe aucun lien entre les deux élections, fédérales et régionales" a déclaré son dirigeant Wouter Beke.
Le Centre démocrate humaniste (CDH) veut créer 140 000 emplois. Le parti se présente comme "3e voie" et rejette dans un même mouvement la gauche et la droite.
Les écologistes
Les verts francophones d'Ecolo font campagne sur les "enjeux socioéconomiques de l'intérieur" avec quatre thèmes prioritaires : l'énergie, la relocalisation de l'économie, la jeunesse et la gestion des ressources. Ecolo dit tirer un bilan négatif de l'action du gouvernement d'Elio di Rupo qui a mené une politique inéquitable et auquel il reproche ses reculs sur la lutte contre le chômage, la dégressivité des allocations d'insertion et le blocage des salaires. Selon Ecolo, le gouvernement sortant a davantage favorisé les multinationales que les PME et créé une "Belgique à deux vitesses".
Glissement de la fiscalité du travail vers le capital et la lutte contre la pollution, imposition plus juste des entreprises (qui favoriserait les PME face aux multinationales) et établissement d'une facturation de l'énergie qui récompenserait la baisse de consommation, telles sont les 3 priorités du parti vert flamand Groen !
Les 2 partis écologistes souhaitent le relèvement progressif des allocations sociales au niveau du seuil de pauvreté et l'arrêt de la dégressivité des allocations chômage, la généralisation du plan tandem (conçu pour partager le travail entre les générations) et enfin la mise en œuvre d'un pacte énergétique entre l'Etat fédéral et les régions.
Un Vlaams Belang en perte de vitesse
Le Vlaams Belang (VB) propose de réduire les cotisations sociales payées par les travailleurs et les employeurs de 25%, une mesure que le parti affirme pouvoir financer par l'arrêt de l'immigration et de l'aide fournie aux demandeurs d'asile et par la baisse du nombre de détenus dans les prisons. Ce plan permettrait, selon le parti, de créer 140 000 emplois et d'affecter 3,6 milliards € à la hausse des pensions de retraite les plus faibles. "Nous nous profilons de plus en plus comme un partis social" a déclaré son dirigeant, Gerolf Annemans.
Le 14 octobre 2012, les Belges ont élu leurs conseillers provinciaux et municipaux. La N-VA est devenue le premier parti dans 3 des 5 provinces flamandes (Flandre orientale, Brabant flamand et Anvers), où elle a devancé le CD&V. Ce dernier s'est imposé dans les deux autres provinces, le Limbourg et la Flandre occidentale. Le PS s'est renforcé en Wallonie. Il est arrivé en tête dans 2 des 5 provinces: le Hainaut et Liège. A Bruxelles, il demeure le premier parti. L'événement le plus marquant de ces élections locales a été la victoire de la N-VA à Anvers, où elle a recueilli 35,9% des suffrages et remporté 27 sièges, mettant fin à 80 ans de socialisme dans la ville. Le parti a bénéficié du déclin du Vlaams Belang, miné par les querelles internes et le départ de plusieurs de ses membres.
Autre phénomène notable à ce scrutin local : la progression du Parti des travailleurs belges, qui a obtenu 52 élus et 7% des suffrages.
Les élections locales, qui ont renforcé les nationalistes, ont fragilisé le gouvernement du Premier ministre Elio di Rupo et accentué le divorce entre les parties francophone et néerlandophone du pays. "Si je ne m'abuse, les Belges ont participé à un scrutin local. Il n'y a aucun lien avec le niveau fédéral. Ce n'est pas le travail d'Elio di Rupo qu'on peut juger dans telle ou telle commune, c'est le travail des élus locaux. Je reconnais le succès de la N-VA mais il n'y a pas de lien entre les élections locales et fédérales" s'est défendu le Premier ministre. "Le scrutin est communal mais en Flandre, on vote de façon nationale" a affirmé le politologue Pascal Delwit.
"Le gouvernement sera jugé à l'aune du recul de la N-VA" aurait un jour déclaré le Premier ministre. Bart de Wever a fixé à 30% le seuil auquel son parti sera incontournable, ce qui semble possible au vu des dernières enquêtes d'opinion qui donnent le CD&V et l'Open VLD à la peine dans le dernier Baromètre réalisé par la RTBF et la Libre Belgique.
Le PSest toujours en tête en Wallonie : il est crédité de 29,3% des suffrages aux prochaines élections du 25 mai. Il devance le MR (22,6% des voix) et Ecolo, qui est au-dessus de la barre de 10% des suffrages (11%). Le CDH recueillerait 9,4% des voix. Enfin, le Parti des travailleurs de Belgique est particulièrement haut dans les sondages : 8,1% des suffrages.
En Flandre, la N-VA domine largement la scène politique. Elle obtiendrait 32,9% des suffrages devant le Cd&V qui recueillerait 16,9% des voix ; le Sp.a est crédité de 13,6% des suffrages et l'Open VLD de 13,5%. Le Vlaams Belang suivrait avec 9,9% des suffrages et Groen ! recueillerait 7,6% des voix.
47% des Wallons et des Bruxellois réunis souhaitent voir le Premier ministre sortant Elio di Rupo jouer un rôle important dans les prochains mois. En Flandre, 37% expriment un souhait similaire concernant Bart de Wever.
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