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La Nouvelle alliance flamande (N-VA) de Bart de Wever a gagné les élections législatives organisées en Belgique le 13 juin. La N-VA recueille 18,65% des suffrages et remporte 28 sièges à la Chambre des représentants et obtient 20,64% des voix et 9 sièges au Sénat. Ce résultat est sans précédent. Le meilleur score obtenu à ce jour par un parti indépendantiste était celui recueilli en 1971 par la Volksunie (VU), 11,1% des suffrages.
Le bon résultat de la N-VA se fait au détriment du Parti démocrate-chrétien flamand (CD&V) du Premier ministre sortant Yves Leterme qui recueille 11,64% des voix (17 sièges) à la Chambre des représentants et 10,53% des suffrages (9 sièges) au Sénat, et des Libéraux et démocrates flamands (Open VLD), dirigés par Alexander de Croo, qui obtiennent 8,82% des suffrages (13 députés) et 8,18% des voix (3 sénateurs). Le Parti socialiste flamand (SP.A), dirigé par Caroline Gennez, recueille 9,80% des suffrages (13 députés) et 9,88% (4 sénateurs) tandis que les écologistes de Groen obtiennent 4,54% des suffrages (5 députés) et 3,87% des voix (1 sénateur) ; le parti d'extrême droite, Vlaams Belang (VB), 8,36% des suffrages et 11 députés et 8,08% des voix et 3 sénateurs. Enfin la Liste Jean-Marie Dedecker, 2,45% des voix et 1 député (2,10% des voix et aucun siège au Sénat). En additionnant les voix de la N-VA, du Vlaams Belang et de la Liste DeDecker, les partis prônant l'indépendance de la Flandre représentent 44,1% de l'électorat flamand.
Le Parti socialiste (PS) d'Elio di Rupo est le gagnant de ces élections législatives en Wallonie où il recueille 11,43 % des suffrages et 25 sièges à la Chambre des représentants et 12,24% des voix et 7 sièges au Sénat. Il redevient la 1ère force politique francophone. Le Mouvement réformateur (MR) de Didier Reynders est en recul avec 8,92% des suffrages (18 députés) et 8,81% des voix (5sénateurs), le Centre démocrate humaniste (CDH) de Joëlle Milquet recueille 5,31% des suffrages (11 députés) et 4,95% des voix (2 sénateurs)) devançant les Verts d'Ecolo qui obtiennent 4,55% des suffrages (8 députés) et 5,28% des voix (2 sénateurs).
La participation, obligatoire dans le royaume, a cependant été peu élevée. Elle atteint 89,22% pour les élections à la Chambre des représentants et 89,21% pour le Sénat.
"Ce sont des résultats extraordinaires. Les Flamands ont voté pour le changement, nous ne les décevrons pas. L'Etat doit être réformé" a déclaré le leader de la N-VA, Bart De Wever, à l'annonce des résultats. Il a appelé à une réforme des institutions visant à donner une autonomie accrue à la Flandre dans les domaines économique et social tout en cherchant à rassurer ceux que son programme inquiète. "Ce n'est pas la fin du pays, c'est une évolution, la Belgique se dédouble en deux démocraties à part entière. Nous devons l'adapter à cette réalité qui existe déjà" a-t-il indiqué en réaffirmant que l'indépendance de la Flandre ne constituait pas sa revendication immédiate.
Le leader socialiste, Elio di Rupo, a reconnu que les électeurs flamands avaient envoyé un "signal fort" en faveur d'une plus grande autonomie régionale. "Une grande partie de la population flamande souhaite manifestement que notre pays évolue sur le plan institutionnel. Ce message doit être entendu. Le Parti socialiste a toujours été prêt à une réforme de l'Etat" a-t-il souligné, appelant les francophones à "faire un pas vers les élus du Nord et à avoir le courage de conclure un accord" et concluant "Il appartient aux partis flamands d'indiquer quels sont les femmes et les hommes qu'ils souhaitent mettre autour de la table des négociations. Nous nous rendrons compte très vite s'il y a une volonté d'arriver à un compromis. Si ce n'est pas le cas, nous serons dans une autre situation".
"C'est un tsunami politique" a déclaré Steve Stevaert, membre du Parti socialiste flamand. Le triomphe des nationalistes flamands crée "une situation qui sera problématique pour le pays" a estimé le président du MR, Didier Reynders.
Au vu des résultats de ces élections parlementaires, deux personnalités se détachent et devraient dans un avenir proche jouer un rôle-clé : les leaders de la N-VA, victorieuse en Flandre, et du Parti socialiste côté francophone. Le résultat devrait conduire Bart de Wever à assumer des responsabilités au niveau fédéral et à briguer le poste de Premier ministre mais celui-ci a déclaré à plusieurs reprises ne pas être intéressé par la fonction. Il a également indiqué qu'il était prêt à laisser la place à Elio Di Rupo. Paradoxalement, celui-ci pourrait donc devenir le premier Chef de gouvernement wallon depuis Edmond Leburton (1973-1974). " C'est un signe de reconnaissance envoyé aux francophones, qui n'ont pas eu de Premier ministre depuis 1974. Et une façon de montrer qu'il (Bart de Wever) n'a d'yeux que pour la Flandre" analyse Marc Uyttendaele, professeur à l'université libre de Bruxelles, "De toute façon, il est évident que le climat n'est pas favorable pour obtenir l'éclatement du pays qu'il souhaite. En fait, il est terrorisé à l'idée d'avoir à assumer ses fonctions. C'est un tribun, un provocateur. L'antithèse du responsable politique. Il n'est pas un homme d'État. C'est très difficile de passer du music-hall politique à l'austérité des fonctions ministérielles..."
Agé de 39 ans, Bart de Wever est historien. Il est élu en 2004 député du Parlement flamand (réélu en 2007) et devient député fédéral le 10 juin 2007. Homme politique le plus populaire de Flandre, il prône le confédéralisme qu'il voit comme une étape vers une indépendance pleine et entière de la Flandre : "Nous voulons y aller étape par étape, pas avec une révolution, nous ne souhaitons pas de grand soir de la séparation. Mon objectif est que la Belgique disparaisse sans que personne ne s'en aperçoive, qu'elle s'évapore. Avec la Flandre et la Wallonie, nous avons déjà deux Etats qui fonctionnent avec chacun son Parlement et son gouvernement. A Bruxelles, le Premier ministre ne préside plus qu'une vaine conférence diplomatique. Il faut laisser le processus aller jusqu'à son terme".
Né en 1951, Elio di Rupo est titulaire d'un doctorat es sciences. Elu au niveau municipal en 1982, il devient député en 1987, puis sénateur en 1991. L'année suivante, il est nommé ministre de l'Education de la Communauté française, puis de l'Audiovisuel. En 1994, Elio Di Rupo devient vice-Premier ministre du gouvernement fédéral et ministre des Communications et des Entreprises publiques. Il sera ensuite en charge de l'Economie et des Télécommunications et du Commerce extérieur. En 1999, il devient ministre-président de Wallonie, un poste qu'il quitte rapidement après avoir été élu à la tête du PS. Bourgmestre de Mons, il redevient ministre-président de Wallonie en 2005, poste qu'il abandonne de nouveau en juin 2007 pour conserver la tête du PS.
Loin de dénouer la crise, le résultat du scrutin risque de polariser davantage la classe politique belge et d'aggraver la crise de confiance entre néerlandophones et francophones. La première tâche du futur gouvernement sera de dénouer la situation de l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde, à cheval sur la province du Brabant flamand (Hal-Vilvorde) et la région de Bruxelles-capitale, que les néerlandophones souhaitent scinder en deux entités : Bruxelles et Hal-Vilvorde. Par ailleurs, le pays se trouve de fait divisé au niveau politique entre une Flandre fortement ancrée à droite et une Wallonie où prédominent les socialistes. Enfin, si la Belgique, qui succèdera à l'Espagne à la Présidence du conseil de l'Union européenne le 1er juillet prochain, devrait assurer son rôle sans problème majeur, l'instabilité et la crise profonde qu'elle traverse depuis plusieurs années pourrait finir par nuire à l'image du pays.
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