Elections législatives en Hongrie 11 et 25 avril 2010

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Fondation Robert Schuman

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15 mars 2010
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Le Président de la République hongroise, Lazlo Solyom, a annoncé le 22 janvier que les prochaines élections législatives auront lieu les 11 et 25 avril. Il a ainsi décidé de réduire la durée de la campagne électorale, qui sera la plus courte que le pays a connu depuis la chute du communisme en 1989.

Durant les 4 années de la législature, l'éventualité d'un scrutin législatif anticipé s'était fait jour à plusieurs reprises mais c'est finalement au terme normal de leur mandat que les parlementaires hongrois remettront leur siège en jeu.

Selon toutes les enquêtes d'opinion, le Parti socialiste (MSZP), au pouvoir depuis 2002, devrait essuyer une sévère défaite et l'Alliance des jeunes démocrates (FIDESZ), principal parti d'opposition dirigé par l'ancien Premier ministre (1998-2002) Viktor Orban, devrait remporter le scrutin. Le parti d'extrême droite, le Mouvement pour une meilleure Hongrie (Jobbik), qui a recueilli 14,77% des suffrages aux dernières élections européennes des 4-7 juin 2009, pourrait venir perturber les résultats. Si les jeux paraissent faits, reste à savoir de quelle majorité exacte disposera la FIDESZ.

Le système politique hongrois

L'Orszaggyules, Chambre unique du Parlement, compte 386 membres élus pour 4 ans. Le système électoral hongrois est l'un des plus complexes au monde. Sur les 386 députés, 176 sont élus au scrutin majoritaire à 2 tours au sein de circonscriptions uninominales, 152 sont désignés au scrutin proportionnel à un tour au sein de 20 départements (Budapest élit 28 députés de cette façon) et, enfin, 58 députés sont élus sur des listes nationales à partir des suffrages restants cumulés des votes ayant eu lieu au sein des circonscriptions uninominales et des départements, soit l'ensemble des suffrages n'ayant pas servi à élire un candidat. Chaque citoyen effectue un double vote : il se prononce en faveur d'un des candidats de sa circonscription et pour la liste départementale d'un parti politique. Ce système complexe a pour but de garantir une représentation correcte du 1er parti de l'opposition. Pour être représenté au Parlement, un parti doit obtenir au minimum 5% des suffrages exprimés.

Chaque parti politique souhaitant présenter une liste aux élections législatives doit impérativement recueillir la signature de 750 électeurs. Au sein des circonscriptions uninominales, les candidats peuvent être présentés soit par des partis politiques, soit par des citoyens. Dans les départements, seuls les partis présentant des candidats dans au moins 1/4 des circonscriptions uninominales du département peuvent présenter des listes. Si un parti recueille des signatures dans au moins 2 districts d'un comté (8 à Budapest, 5 à Pesc et 3 à Borsod-Abauj Zemplen), il peut présenter des candidats au niveau de la région. S'il obtient des signatures dans au moins 7 régions, il est autorisé à présenter une liste nationale.

4 partis politiques sont actuellement représentés au Parlement:

- Le Parti socialiste (MSZP), issu de l'ancien parti unique de la République populaire de Hongrie – le Parti socialiste ouvrier hongrois (MSZMP) –, créé en 1989 Au pouvoir depuis 2002, il est présidé par Ildiko Lendvai ;

- L'Alliance des jeunes démocrates-Union civique (FIDESZ-MPP), principal parti de l'opposition créé le 30 mars 1988 et dirigé par l'ancien Premier ministre (1998-2002), Viktor Orban ;

- L'Alliance des démocrates libres (SZDSZ), ancien membre de la coalition gouvernementale. Fondé en 1988 et dirigé par Attila Retkes, il est considéré comme l'allié naturel du MSZP ;

- Le Forum démocrate (MDF), créé en 1987, positionné à droite mais jugé plus modéré que la FIDESZ, est dirigé par Ibolya David.

Une grave crise économique

La Hongrie a été l'un des 27 Etats membres de l'Union européenne les plus touchés par la crise économique internationale. Elle a été le 3e pays du continent, après l'Islande et l'Ukraine, et le premier des Vingt-sept à avoir bénéficié de l'aide du Fonds monétaire international (FMI) qui, avec d'autres institutions financières, lui a versé 20 milliards €. Cette aide du FMI a permis de stopper la chute de la devise hongroise, le forint. Celle-ci s'est avérée d'autant plus catastrophique que la propension à emprunter en devises constitue une véritable spécificité hongroise. En effet, 65% des crédits accordés aux ménages et 56% de ceux des entreprises étaient (en novembre 2008), en Hongrie, libellés en devises étrangères.

L'économie hongroise s'est contractée de 6,7% en 2009, une récession qui devrait se poursuivre. Le taux de croissance du PIB devrait s'élever à 0,6% en 2010 avant de remonter à 3,7% en 2011. L'inflation est élevée (prévue à 4,1% en 2010) et le chômage est supérieur à 10% de la population active (le taux d'emploi était inférieur à 50% au 4e trimestre 2009) et devrait se maintenir à ce niveau jusqu'en 2012. Le déficit budgétaire s'élevait en 2009 à 7% du PIB (il devrait, selon le gouvernement sortant, atteindre 3,8% cette année et 2,8% en 2011). Enfin, la dette publique hongroise s'élève à 65% du PIB, un chiffre moins élevé que celui de la Grèce mais néanmoins le plus important d'Europe centrale et orientale. Il pourrait atteindre près de 80% en 2010.

Au-delà de la crise économique, les fondamentaux de l'économie hongroise sont particulièrement vulnérables. Le secteur public est atrophié : 740 000 personnes sont employées par l'Etat. En outre, la Hongrie, qui compte 10 millions d'habitants, est un pays vieillissant et compte 3 millions de retraités, une situation intenable à moyen terme, soit au-delà de 30 ans. Le pays a impérativement besoin de réformer son système de santé et d'éducation comme de lutter contre l'évasion fiscale et la corruption qui de véritables fléaux.

"Les Hongrois, qui se voient comme pionniers de la démocratisation en Europe centrale, sentent qu'ils ont perdu leur avance et même pris du retard. Des voisins qui accusaient un plus grand retard comme la Slovaquie ont adopté l'euro. Tous les gouvernements hongrois ont bricolé sans engager de véritables réformes et le pays, qui avait attiré de nombreux investissements étrangers, est durement frappé par la crise" analyse René Roudaut, ambassadeur de France à Budapest depuis septembre 2007.

Fin février, la Hongrie a cependant estimé qu'elle n'aurait pas besoin de la dernière tranche du prêt international et a renoncé à une nouvelle aide de l'Union européenne. "Le financement est assuré par les marchés" a déclaré le ministre des Finances Peter Oszko. En effet, le forint s'est stabilisé et Budapest a regagné la confiance des marchés. Si elles devraient être prochainement sanctionnées par les électeurs, la politique de rigueur et la limitation des dépenses publiques entreprises par le gouvernement de Gordon Bajnai ont néanmoins porté leurs fruits.

Une crise politique latente

En avril 2006, les socialistes réussissaient une première en Hongrie depuis la chute du communisme : être reconduits à la tête de l'Etat après 4 années de pouvoir. Le Premier ministre Ferenc Gyurcsany (MSZP), qui avait succédé à Péter Medgyessy à la tête du gouvernement en septembre 2004, a conservé son poste à l'issue du scrutin des 9 et 23 avril 2006. En juin 2006, il a décidé de mesures d'austérité (augmentation des impôts et baisse des dépenses publiques) pour combler le – considérable – déficit budgétaire.

Le 17 septembre 2006, une cassette contenant un discours prononcé par Ferenc Gyurcsany à huis clos devant les députés du MSZP est diffusée par la radio hongroise. Le Chef du gouvernement avoue avoir menti aux électeurs pour remporter le scrutin législatif. "Personne en Europe n'a fait de telles conneries (laisser filer les déficits publics et promettre monts et merveilles aux électeurs). Il est évident que nous avons menti tout au long des derniers 18 mois. Il est clair que ce que nous disions n'était pas vrai. Nous n'avons rien fait depuis 4 ans. Rien. Vous ne pouvez pas me citer une seule mesure gouvernementale dont nous pourrions être fiers" déclarait Ferenc Gyurcsany.

La réaction à ce discours a été vive. L'opposition a affirmé que le gouvernement était illégitime et que le Premier ministre avait menti sur l'ampleur du déficit (qui s'est avéré être le double de celui annoncé durant la campagne électorale) ainsi qu'en cachant le plan d'austérité qu'il pensait mettre en place. Les forces d'opposition ont alors demandé la démission de Ferenc Gyurcsany. Des manifestations ont été organisées et ont débouché sur de violents incidents. Alors que des personnes étaient parvenues à s'introduire au sein de siège de la télévision nationale pour y lire une pétition, un incendie a éclaté au sein des locaux et les forces de police se sont montrées dépassées. Toutes ces violences ont été retransmises en direct sur la chaîne de télévision Hir TV proche de l'opposition. Des hooligans et des manifestants d'extrême droite, notamment issus du groupuscule des 64 régions, nostalgique de la grande Hongrie, ont pris la tête des événements. Mais aucun syndicat n'a finalement rejoint les manifestants, pas même ceux représentant les catégories socioprofessionnelles les plus touchées par le plan d'austérité comme les médecins ou les étudiants. Au fil des jours, les proches des partis de droite ont finalement désapprouvé la violence des manifestants et les rues de Budapest sont redevenues calmes.

Près de 4 ans plus tard, la scène politique hongroise reste l'une des plus polarisées d'Europe centrale et orientale. "Le gouvernement et l'opposition n'entretiennent plus de relations normales. Leurs rapports conflictuels sont le reflet d'une société fortement divisée, de la haine qui envahit la sphère privée et les émotions qui s'affichent dans la rue" analyse le journaliste Ervin Tamas. Une droite de tradition libérale, autrefois centrée sur les entreprises mais désormais étatiste, demandant une augmentation des allocations chômage et des pensions de retraite affronte une gauche social-démocrate aux accents libéraux.

Bilan socialiste mitigé et défaite annoncée

Réélu en avril 2006 pour un 2e mandat, le MSZP a formé un gouvernement avec l'Alliance des démocrates libres (SZDSZ) et engagé une politique de réformes qui, si elles ont été douloureuses pour la population, ont fini par porter leurs fruits puisque le déficit budgétaire, qui s'élevait à 9% en 2006, atteindra 3% en 2008.

En 2007, le gouvernement de Ferenc Gyurcsany crée un forfait supplémentaire de 300 forints (1,75 €) sur toute consultation médicale (selon les statistiques, les Hongrois se rendent en moyenne 13 fois par an chez le médecin pour seulement 5 fois pour les Britanniques) et décidé d'une augmentation des droits d'inscription à l'université (qui s'élèvent à 400 €). Ces deux mesures constituent les symboles de la politique de réformes du gouvernement socialiste. Le 9 mars 2008, 83% des Hongrois se prononcent lors d'un référendum pour la suppression du forfait de 300 forints imposé sur chaque consultation médicale et contre l'augmentation de droits d'inscription à l'université. Cette défaite politique réduit alors considérablement la marge de manœuvre du gouvernement en place. L'échec du référendum conduit à la démission de la ministre de la Santé, Agnès Horvath (SZDSZ), avant de provoquer l'éclatement de la coalition gouvernementale le 30 avril 2008. Les deux partis au pouvoir s'opposent notamment sur le rythme auquel doit être réalisé l'assainissement des comptes publics.

Quelques mois plus tard, Ferenc Gyurcsany fait l'objet d'une motion de censure consécutive aux mesures de relance élaborées par son gouvernement à la suite de la crise économique qui a fortement touché la Hongrie. Le Premier ministre est contraint à la démission le 21 mars 2009. Quelques jours plus tard, il abandonne la présidence du MSZP à laquelle il venait d'être réélu avec 85% des voix. Ferenc Gyurcsany a déclaré vouloir rester en politique et indiqué que son rôle dépendrait à l'avenir de ses collègues socialistes.

"Nous avons commis quatre erreurs fondamentales" déclarait en novembre 2008 le Premier ministre. "La première est de ne pas avoir su encourager l'épargne – très faible – et donc avoir incité les gens à dépenser ; la deuxième est d'avoir, entre 2000 et 2006, dépensé à l'excès et creusé le déficit budgétaire (de ce déficit, j'assume 18 mois). L'insuffisance des réformes (due en grande partie à l'opposition) constitue la troisième erreur et l'endettement en devises des particuliers et des entreprises, qui est commun à l'ensemble des pays de la région, la quatrième" soulignait Ferenc Gyurcsany qui concluait toutefois "nous avons opéré un virage radical après 2006".

Le 14 avril 2009, Gordon Bajnai, ministre de l'Economie sortant (et ancien ministre des Gouvernements locaux et du Développement régional), sans étiquette politique, succède à Ferenc Gyurcsany à la tête du gouvernement. Peter Oszko, directeur de la filiale hongroise du cabinet américain d'analyses financières Deloitte, est nommé ministre des Finances et Tamas Vahl, expert en technologies de l'information, ministre de l'Economie. Elu à son poste avec une confortable majorité, Gordon Bajnai est soutenu par le MSZP comme par la SZDSZ et le Forum démocrate (MDF), deux partis qui ne souhaitent pas voir organiser d'élections législatives anticipées. La démission de Ferenc Gyurcsany et son remplacement par Gordon Bajnai ont effectivement évité ce scrutin réclamé par la FIDESZ. Le Président Lazlo Solyom a d'ailleurs déclaré que la Hongrie se serait plus vite et mieux sortie de ses difficultés si le MSZP avait accepté d'organiser des élections en 2008.

Gordon Bajnai indique, dès sa prise de fonction, qu'il ne se présentera pas au prochain scrutin législatif prévu en 2010. "Mon seul objectif est que dans un an, la Hongrie soit dans une bien meilleure position et qu'elle regagne la confiance des investisseurs. Je ne veux pas faire de la politique, je veux travailler" déclare t-il, ajoutant. "Le programme que ce nouveau gouvernement va mettre en place être douloureux : il demande des sacrifices à beaucoup de gens et va avoir un impact sur toutes les familles hongroises et sur chaque Hongrois". Le Premier ministre fait voter un gel des salaires et la suppression du 13e mois dans la fonction publique ainsi que le gel des pensions de retraite et la suppression de certaines aides versées aux familles. Il réduit le traitement des ministres de 15% par rapport à celui versé par le gouvernement sortant et fixe sa propre rémunération à 1 forint (0,003 €) : "Une année, un programme, un forint" affiche-t-il comme slogan.

"Nous avons fait 3 réformes essentielles : les retraites, les impôts et l'aide sociale. Les sacrifices faits par les Hongrois en 2009 et 2010 ont permis au gouvernement de préserver les emplois, les services sociaux et la solidarité. Nous espérons voir en 2010 le déficit budgétaire atteindre 3,8% du PIB, soit l'un des niveaux les plus faibles d'Europe, et les taux d'intérêt sont très au-dessous de leur niveau d'avant la crise" analyse Gordon Bajnai un an après son accession à la tête du gouvernement. Selon le Premier ministre, la Hongrie, si elle conserve sa politique fiscale rigoureuse, pourrait adopter l'euro dans les 4 prochaines années. "Si nous restons sur ce chemin, si nous maintenons un faible déficit, alors nous pourrions être les premiers parmi les pays de la région qui n'ont pas encore l'euro (Pologne, République tchèque et Hongrie) à adopter la monnaie unique" a-t-il déclaré.

Si le Premier ministre Gordon Bajnai peut se montrer satisfait de son bilan, il a cependant, aux yeux de beaucoup d'analystes, insuffisamment communiqué sur son intention de rompre avec l'ère Gyurcsany.

Le 12 décembre 2009, Attila Mesterhazy, 35 ans, actuel vice-président du MSZP et leader du groupe parlementaire du parti, a été élu candidat au poste de Premier ministre pour les élections législatives. "Je serai un opposant impitoyable pour la droite modérée et sans compromis avec la droite radicale" a-t-il déclaré. Le choix d'Attila Mesterhazy, préféré à Laszlo Kovacs, ancien commissaire européen, et à Katalin Szili, ancienne présidente du Parlement, témoigne de la volonté de renouvellement du MSZP.

Après 8 années de pouvoir, la base électorale du MSZP s'est érodée à cause de la crise économique mais surtout en raison des hausses d'impôts, de la baisse des aides gouvernementales, des coupes effectuées dans les pensions ou de la suppression du 13e mois. Par ailleurs, leurs alliés de la SZDSZ traversent une crise et peuvent donc difficilement apparaître comme des soutiens. "Les socialistes ont perdu trop d'électeurs pour espérer gagner de façon réaliste. Ils peuvent seulement empêcher la FIDESZ de gagner la majorité des 2/3 au Parlement" affirme Attila Juhas, directeur du think-tank Capital politique, ajoutant "Un grave échec pourrait même les amener au bord du gouffre comme la gauche polonaise en 2004".

"Nous devons relever la tête, redresser le dos et montrer que nous voulons gagner" répète Attila Mesterhazy qui pense pouvoir regagner la confiance des Hongrois grâce aux mesures prises par le gouvernement de Gordon Bajnai et en recentrant le MSZP. Il a débuté le 27 février un tour de Hongrie durant lequel il devrait visiter 100 municipalités. "Nous n'allons pas desserrer les cordons de la bourse mais faire des investissements, nous devons rendre les bénéfices de la croissance à ceux qui ont été le plus durement touchés par la crise économique mais sans mettre en danger le développement du pays" a déclaré Attila Mesterhazy. Le MSZP veut réduire les charges sociales sur le travail de 4% en 4 ans, ce qui augmentera le taux d'emploi de 1% par an et les salaires de 12% en 4 ans. Le MSZP a annoncé sa volonté de lancer un nouveau programme des retraites en 2011. Il tente de montrer que la FIDESZ est un parti antidémocratique, irresponsable et dangereux pour les plus pauvres. Gordon Bajnai a mis en garde les électeurs en indiquant qu'un gouvernement populiste ferait régresser le pays et détruirait la confiance durement regagnée des investisseurs étrangers et des institutions internationales. Il affirme qu'un gouvernement dirigé par Viktor Orban compromettrait la stabilité et la croissance retrouvées de la Hongrie.

Pour les élections législatives, le MSZP s'est uni à Tiszetelet Tarsasag, groupe de pression de retraités dirigé par Andor Schmuck (ancien membre du parti et candidat du MDF aux élections d'avril 2006) représentant 820 clubs de retraités et comptant 142 000 membres. Ce mouvement se bat pour l'établissement de mesures en faveur des retraités et pour des peines plus sévères dans les cas de crimes contre des personnes âgées. Le MSZP a indiqué qu'il souhaitait reprendre certaines de ces propositions dans son programme électoral comme par exemple celle d'une refonte des pensions de réversion pour les veuves.

Enfin, un nouveau parti positionné à gauche – Un peuple libre pour la Hongrie (Szema) – a été créé le 19 novembre dernier par d'anciens membres de la SZDSZ. Le parti veut mobiliser 280 000 libéraux et un million de personnes de gauche qui, selon ses dirigeants, se sentent "politiquement orphelins".

Quelle victoire pour la FIDESZ ?

"Nous demanderons des comptes aux responsables qui ont conduit la Hongrie à la situation dans laquelle elle se trouve" répète Peter Szijjarto, porte-parole de la FIDESZ. Le parti a annoncé son intention de poursuivre en justice l'ancien Premier ministre, Ferenc Gyurcsany, et l'ancien ministre des Finances, Janos Veres, pour avoir caché certaines informations en leur possession sur le budget 2006. Le leader de la FIDESZ, Viktor Orban, a accusé la Banque centrale hongroise et les autorités des marchés financiers de porter, avec le gouvernement de Gordon Bajnai, la responsabilité de l'effondrement de l'économie hongroise. "La Banque centrale aurait dû baisser ses taux d'intérêt plus rapidement, ce qui aurait permis aux salariés de conserver leur travail" a-t-il affirmé. "La nomination d'Attila Mesterhazy est une survivance de l'ère Ferenc Gyurcsany et Gordon Bajnai" a souligné Peter Szijjarto, ajoutant "Attila Mesterhazy représente un passé que les Hongrois veulent laisser derrière eux, il est le symbole des mesures d'austérité qui ont rendu la vie des Hongrois si difficile et freiné la croissance du pays".

Plus jeune Premier ministre de l'Union européenne en 1998, Viktor Orban estime que son heure est de nouveau venue. La crise économique et les mesures d'austérité votées par le gouvernement sont pain bénit pour celui qui s'élève contre la rigueur imposée par le MSZP. "La première priorité est de remettre la Hongrie sur la voie de la relance" affirme t-il. "La Hongrie a besoin d'un leadership fort. Les Hongrois en ont assez des gouvernements faibles. Les élites politiques doivent revenir vers des valeurs communes fondamentales que sont le travail, la famille, la santé et l'ordre" a déclaré le leader de l'opposition, ajoutant. "L'Etat est incapable d'assurer l'ordre public, la police ne contrôle plus la situation". Il entend "mettre un terme au vol et aux menaces".

Pour la FIDESZ, la majorité absolue est une condition sine qua non pour que le parti puisse gouverner. Elle vise la majorité des 2/3 au Parlement, un résultat qui lui permettrait de pouvoir modifier la Constitution. "Si nous pouvons former un gouvernement qui ne soit pas de coalition, le premier en 20 ans, l'économie hongroise aura une vraie chance d'être relancée" a-t-il déclaré. Il affirme que son gouvernement permettra de se débarrasser des "désaccords stériles" pour les 20 prochaines années. "Le clash des valeurs qui engendre des désaccords sera bientôt remplacé par une force politique centrale qui sera capable de travailler dans l'intérêt national en évitant le débat permanent" a-t-il souligné dans l'hebdomadaire Nagyitas (Agrandissement) lancé par la FIDESZ en décembre dernier.

Le 8 février 2010, Viktor Orban a, lors d'une émission télévisée sur la chaîne MTV, exclu toute coalition gouvernementale avec le parti d'extrême droite, Jobbik. Pour séduire les électeurs susceptibles de voter en faveur du Jobbik, la FIDESZ n'hésite pas à jouer la carte du nationalisme en utilisant le thème de la grande Hongrie et en promettant d'accorder la double nationalité aux Hongrois de l'étranger. "L'essence culturelle est quelque chose qui nous différencie des autres groupes nationaux et ce que le gouvernement doit chercher à préserver" a déclaré Viktor Orban. Le 4 juin 1920, la Hongrie a perdu, par le traité de Trianon, plus des 2/3 de son territoire et 3,3 millions de ses habitants relégués hors des frontières du pays en Autriche, Tchécoslovaquie, Roumanie et Yougoslavie. 1,4 million de Hongrois vivent actuellement en Roumanie (soit 6,6% de la population totale), 520 000 en Slovaquie (9,7%), 293 000 en Serbie (3,9%), 156 000 en Ukraine (0,3%), 26 000 en Autriche (0,3%), 16 000 en Croatie (0,3%) et 6 000 en Slovénie (0,3%). "Il peut être parfois tentant de parler haut et fort et d'offrir des solutions radicales mais ceux qui lancent haut et fort des idées radicales n'auront aucune chance de les traduire dans la réalité demain" a affirmé Peter Szijjarto, accusant le gouvernement d'être responsable de la percée électorale du Jobbik.

Si, comme le prédisent toutes les enquêtes d'opinion, la FIDESZ remporte les élections législatives, elle héritera d'une situation de récession économique. Le parti a envoyé des signaux contradictoires sur ce que pourrait être son action en matière économique. "Nous poursuivrons une politique gouvernementale et une politique économique profondément différentes" a indiqué Peter Szijjarto. Au cœur du programme économique du parti se trouvent la réforme de l'Etat, la baisse des taux d'intérêt et l'augmentation de l'emploi.

La FIDESZ veut financer ses propositions en dopant la consommation intérieure, en allégeant la fiscalité et en réduisant la bureaucratie. Elle affirme vouloir créer un million d'emplois durant les 10 prochaines années et qu'elle défendra les produits hongrois. Le 5 février dernier, Viktor Orban a demandé la prolongation du moratoire empêchant de vendre les terres hongroises à des ressortissants étrangers et proposé d'étendre cette protection aux ressources naturelles du pays, notamment l'eau. La FIDESZ souhaite baisser les taxes, notamment l'impôt sur l'immobilier qui taxe le patrimoine des Hongrois les plus aisés.

La FIDESZ a plusieurs fois indiqué que ses choix économiques pourraient conduire le déficit budgétaire à dépasser les 7% du PIB, ce que le FMI récuse absolument. "Il y a un risque que le déficit budgétaire hongrois dévie de la voie fiscale agréée par le FMI une fois que la FIDESZ sera au pouvoir. Mais nous pensons également que le parti est averti du besoin de contenir le déficit fiscal pour soutenir la confiance des marchés et la stabilité financière et que la rhétorique qui est la sienne peut changer après les élections" a déclaré un responsable de la banque HSBC.

Le Forum démocrate (MDF) est emmené par Lajos Bokros qui se présente comme le seul véritable challenger de Viktor Orban. "Les élections européennes ont prouvé qu'il y avait en Hongrie une place pour un parti conservateur responsable" a déclaré Ibolya David, leader du parti. Le MDF a décidé de coopérer avec la SZDSZ à Budapest. La SZDSZ présentera 17 candidats et le MDF 14. LE MDF a intérêt à cette alliance, car la SZDSZ a un électorat plus urbain et plus diplômé.

Sous le slogan "Travail et dignité bâtissent une Hongrie moderne", le MDF se bat pour l'élargissement de la base d'imposition et la baisse des taux. Selon Lajos Bokros, le fait que "seul un petit groupe de personnes paient de lourdes taxes" incite à l'évasion fiscale. Le parti, qui a fait du redressement des finances publiques sa priorité, veut supprimer l'exemption d'impôt sur le revenu pour les personnes percevant le salaire minimum. Il souhaite introduire les frais médicaux et les frais d'inscription à l'université. Enfin, le MDF met l'accent sur la nécessité d'augmenter le taux d'emploi de 10 points et de réformer le système de retraite. "un nombre restreint de personnes contribuent au fonds vieillesse et s'acquittent de sommes considérables" souligne Lajos Bokros. Le sujet des retraites constitue un enjeu important dans un pays où le taux d'emploi est faible, le nombre de retraités élevé et la population en constante diminution. Beaucoup s'inquiètent de voir la Hongrie passer très rapidement sous la barre des 10 millions d'habitants.

L'extrême droite va-t-elle confirmer sa percée?

Le Mouvement pour une meilleure Hongrie (Jobbik) a réussi une percée lors des dernières élections européennes. Recueillant 14,77% des suffrages (soit 2,6 points de moins que le MSZP), le parti national-radical comme il se définit a remporté 3 des 22 sièges dont dispose le pays au Parlement européen. Fondé en 2003 et particulièrement populaire parmi les plus jeunes électeurs, il se pose en rival de la FIDESZ. Gabor Vona est candidat au poste de Premier ministre.

Jobbik poursuit, avec pour slogan "Nouvelle force, nouveau radicalisme", 3 objectifs principaux : la création d'emploi, le maintien de l'ordre public et le renforcement de la communauté. Le parti affirme ainsi que ses frontières ne sont pas celles de l'Etat mais celles de la nation hongroise. "Les Hongrois n'ont pas connu l'autonomie depuis plus de 20 ans. Les efforts pour restaurer le droit à l'autonomie nationale ont été contrariés" souligne Krisztina Morvai. Formation chrétienne et nationaliste opposée à l'adhésion de la Hongrie dans l'Union européenne, Jobbik affirme vouloir "chasser du Parlement les postcommunistes et les libéraux extrémistes". Il lutte contre la chute de la natalité, s'oppose à l'avortement et dénonce régulièrement la "criminalité tzigane". Le parti souhaite introduire la morale et la religion à l'école et créer une force de gendarmerie dédiée à la lutte contre les crimes commis par des tziganes. Gabor Vona se dit confiant dans le fait que son parti devancera le MSZP lors du scrutin législatif.

Le Premier ministre Gordon Bajnai accuse Jobbik d'être anti-démocratique. "il devrait être mis en quarantaine par toutes les forces démocratiques" a-t-il indiqué. "Je suis très inquiet parce qu'il est possible qu'en Hongrie, Jobbik, parti leader de l'extrême droite, atteigne 10%. Il pourrait devenir le 2e parti du Parlement ou le 3e si la crise économique se poursuit et que le chômage continue d'augmenter. Jobbik pourrait obtenir 20% ou 30% des suffrages et cela doit est inquiétant pour la Hongrie mais également pour l'ensemble du projet européen" indique Andras Toth de l'Institut des sciences politiques de l'académie hongroise des sciences. Un succès du parti d'extrême droite modifierait le paysage politique et aurait un impact dans les Etats voisins dont plusieurs renouvelleront prochainement leur Parlement (les Tchèques les 28 et 29 mai et les Slovaques le 12 juin prochains).

***

A un mois du scrutin, les jeux semblent faits et le MSZP, au pouvoir depuis 8 ans, devrait essuyer un véritable revers. Reste qu'il est difficile d'anticiper l'ampleur de la victoire de la FIDESZ de Viktor Orban. Si les "petits" partis semblent en perte de vitesse, ils pourraient attirer les déçus du socialisme ou les électeurs hésitants à voter en faveur de la FIDESZ. Dans un climat de défiance envers les élites, Jobbik, qui se positionne comme un parti neuf, pourrait créer la surprise et réaliser une nouvelle percée.

Selon les dernières enquêtes d'opinion, la FIDESZ devrait recueillir 40% des suffrages lors du 1er tour le 11 avril, suivie du MSZP 15% et de Jobbik 7%. 1/3 des électeurs déclarent ne pas encore avoir choisi à quel parti ils accorderont leur vote.

Source : Commission électorale hongroise

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