La gouvernance économique de l'Union européenne : controverses et pistes de réformes

Union économique et monétaire

Jean-François Jamet

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9 juillet 2007

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Jamet Jean-François

Jean-François Jamet

Enseigne l'économie européenne et internationale à Sciences Po.

L'Union européenne est la première puissance économique mondiale, devant les Etats-Unis, mais peu connaissent dans le détail la répartition et les modalités d'utilisation des instruments de politique économique en Europe. La gouvernance économique de l'Union reste complexe, ce qui suscite des incompréhensions de la part des citoyens et des controverses sur son efficacité dans les milieux économiques. L'objet de cette étude est d'en présenter et évaluer le fonctionnement, et de proposer des pistes de réformes pour remédier à court et moyen termes, aux difficultés mises en évidence.

Les deux principaux piliers de la gouvernance économique de l'Union sont la définition du policy mix européen, c'est-à-dire la définition et l'articulation des politiques monétaires et budgétaires dans l'Union européenne ; et la mise en œuvre du marché intérieur et de la stratégie de Lisbonne, dont l'objectif est de renforcer la compétitivité de l'Union et de développer l'emploi.

1. L'élaboration des politiques macroéconomiques en Europe : un cadre trop rigide ?

Le policy mix européen est élaboré dans le cadre de l'Union économique et monétaire (UEM), initiée par le Traité de Maastricht en décembre 1991. Partant du constat de leur interdépendance et des effets croisés de leurs politiques en matière économique, les Etats membres ont choisi de se doter de règles communes en matière monétaire et budgétaire.

Sur le plan monétaire, la mise en place de l'UEM a conduit à la création de la zone euro en 1999 : comprenant 13 Etats membres à l'heure actuelle, la zone euro s'élargira à 15 en janvier 2008 (Chypre et Malte) et doit, à terme, réunir l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne. Seuls trois pays bénéficient d'une exemption : le Royaume-Uni, le Danemark et la Suède. Dans ce cadre, la politique monétaire des Etats membres de la zone euro est confiée à la Banque centrale européenne (BCE).

En matière budgétaire, l'UEM impose aux Etats membres de la zone euro des règles de limitation du déficit et de la dette publique, formalisées dans le Pacte de Stabilité et de Croissance. La coordination des politiques budgétaires est discutée au sein de l'Eurogroupe, réunion des ministres des Finances des Etats membres ayant adopté l'euro, actuellement présidé par Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Grand-duché de Luxembourg, pour son second mandat de deux ans. Les Etats destinés à rejoindre la zone euro sont soumis aux critères de convergence définis à Maastricht. Par ailleurs, l'Union européenne dispose d'un budget qu'elle utilise pour favoriser la convergence des niveaux de vie (fonds structurels). Ce budget reste limité à 1% du revenu de l'Union. Certains éléments du policy mix, comme la politique fiscale, restent très peu encadrés au niveau européen.

1.1. Le gouvernement monétaire de l'Europe : une règle claire, un fonctionnement efficace

1.1.1. Une politique monétaire commune solidement justifiée

L'adoption d'une politique monétaire commune a fait l'objet d'une vive controverse lors du débat sur le Traité de Maastricht. Sur le plan économique et après 8 ans de pratique dans la zone euro, elle semble néanmoins solidement assise. L'existence d'une monnaie unique facilite les échanges, les comparaisons de prix et supprime les coûts liés aux opérations et au risque de change. L'introduction de l'euro a, par exemple, permis une augmentation des échanges d'environ 30% entre les Etats membres de la zone euro [1]. L'adoption d'une monnaie commune a favorisé l'intégration du marché des capitaux et contribué à attirer des investissements extérieurs. L'euro limite l'exposition des économies européennes à l'inflation importée : les échanges de biens et de service avec l'extérieur représentent désormais une partie plus faible du PIB.

La principale critique qui avait été formulée à l'encontre d'une politique monétaire commune était son inadaptation face à l'hétérogénéité des situations économiques des Etats membres, notamment dans l'éventualité de chocs asymétriques. Or cette hétérogénéité a nettement reculé dans la zone euro.

Les économies des Etats membres suivent des cycles économiques de plus en plus similaires : la réduction de l'écart-type de croissance entre pays de la zone euro tend à montrer que les phases de ralentissement ou d'accélération de l'activité économique sont de plus en plus concomitantes. Le graphique 1 montre ainsi que les écarts-types de croissance entre Etats américains et pays de la zone euro sont très proches et ont eu tendance à décroître au cours des dix dernières années.

Avant d'entrer dans la zone euro, une économie doit satisfaire aux critères de convergence avec les autres économies de la zone. Ces critères, définis à Maastricht, restent valables pour les futurs accédants à l'euro. Ils portent sur la limitation du déficit, de la dette publique, du niveau de l'inflation, des taux d'intérêt de long terme et des fluctuations du taux de change par rapport à l'euro. Cette convergence rend la mise en commun de la politique monétaire réaliste dans la mesure où elle s'applique à des pays présentant des caractéristiques économiques similaires.

1.1.2. Mission, objectifs et instruments de la BCE : les bénéfices d'une gouvernance bien définie

La Banque centrale européenne, en charge de la politique monétaire de la zone euro, s'est vue confiée des missions et des objectifs clairs. Ses missions sont la mise en œuvre de la politique monétaire, la conduite des opérations de change, la gestion des réserves officielles des pays membres de la zone euro et la promotion du bon fonctionnement des systèmes de paiement (fonction de surveillance financière)

Dans le cadre de ces missions, 3 objectifs lui ont été assignés, par ordre de priorité : garantir la stabilité des prix, c'est-à-dire une inflation inférieure à 2% et proche de ce seuil (article 105 du traité sur l'Union européenne), " promouvoir le progrès économique et social ainsi qu'un niveau d'emploi élevé, et parvenir à un développement équilibré et durable " (article 2) [2], appliquer les orientations pour la politique de change que peuvent définir les Etats membres de la zone euro dans le cadre du conseil, après consultation de la BCE pour avis (article 4)

Le principal objectif de la BCE est de limiter l'inflation, ce qui n'exclut pas de poursuivre un objectif d'activité, d'emploi et de change. De fait, la BCE applique une règle de Taylor, c'est-à-dire que sa politique vise à la fois à contenir l'inflation et à stabiliser l'activité. En revanche, elle ne s'est jamais vue fixer d'objectifs dans ce domaine par le conseil.

Le principal instrument de la BCE est le pilotage des taux d'intérêt à court terme au travers desquels elle peut influer sur le niveau de l'inflation, du crédit et de l'activité. Si elle souhaitait modifier la parité de l'euro, la BCE pourrait aussi être amenée à utiliser ses réserves de change.

Un des " instruments " de la banque est son indépendance. Celle-ci a fait l'objet de controverses, en particulier à l'occasion des échéances électorales en France. Cependant, force est de remarquer que l'indépendance de la BCE dispose de solides fondements et que ce serait une erreur de la remettre en cause. Elle permet à la politique monétaire de ne pas répondre à une logique électorale, en suivant une règle stable plutôt que des inflexions conjoncturelles en fonction du calendrier politique. Elle évite ainsi le biais inflationniste des politiques gouvernementales et favorise la cohérence de la politique monétaire dans le temps. Elle crédibilise les engagements de la BCE et sa communication, ce qui permet de stabiliser plus facilement les anticipations d'inflation et, ainsi, l'inflation elle-même.

L'indépendance de la BCE ne signifie pas l'absence de concertation avec les autres institutions de l'UE (Conseil, Parlement et Commission). Le président du Conseil et un membre de la Commission peuvent participer, certes sans droit de vote, aux réunions du Système européen des Banques centrales (SEBC). La BCE présente des rapports sur son activité au Conseil, au Parlement et à la Commission. Enfin, le Parlement peut demander à entendre le président de la BCE. De fait, ces consultations ont lieu régulièrement et le dialogue est permanent entre les institutions.

1.1.3. Un bilan positif

La gouvernance monétaire de la zone euro a fait la preuve de son efficacité au regard de son objectif principal, la stabilisation de l'inflation à un niveau proche de 2 %, ainsi qu'en témoigne le graphique 2.

Concernant l'objectif de croissance, la politique monétaire a joué un rôle contra-cyclique depuis sa création en 2000. Elle a légèrement tardé à baisser ses taux lors du retournement conjoncturel de 2001, mais elle a réagi ensuite clairement, le taux d'intérêt réel à court terme devenant même négatif à partir de fin 2003. Elle a ainsi contribué à limiter le ralentissement économique qu'a connu la zone euro en 2002-2003 [3].

Enfin, la Banque centrale européenne a réussi à imposer l'euro comme une monnaie de réserve crédible aux yeux des investisseurs. Dans un contexte où elle a souvent fait l'objet de critiques voilées ou explicites de la part de certains gouvernements de la zone euro, souvent en désaccord entre eux, qui lui ont reproché tour à tour d'utiliser des taux d'intérêts trop faibles (lorsque l'euro s'est affaibli face au dollar en 1999-2000), puis trop forts (lors du ralentissement de l'activité et de l'appréciation de l'euro entre 2002 et 2004), son indépendance lui a évité d'être déstabilisée. Elle a ainsi pu travailler avec plus de calme et de continuité à la stabilisation de l'inflation et de l'activité.

Le bilan des dix premières années d'existence de la BCE est donc positif : tout en contenant l'inflation, elle a maintenu ses taux d'intérêt suffisamment bas pour ne pas compromettre son objectif de croissance et d'emploi. Depuis la création de la BCE, le nombre d'emplois dans la zone euro s'est accru de 14 millions (soit une augmentation de 11,6%) et le taux d'emploi est passé de 59,7 à 64,5%.

1.1.4. Ce que l'Europe peut améliorer : définir une politique de change et donner plus d'importance à la présidence de l'Euro-groupe

Le bilan positif de la gestion de la politique monétaire dans la zone euro n'exclut pas qu'il soit possible de la parfaire. En effet, l'objectif de change n'a jamais été mis en œuvre dans la mesure où les gouvernements des Etats membres de la zone euro n'ont pas su se mettre d'accord pour lui donner un contenu dans le cadre du Conseil. Il ne sert à rien d'imputer à la BCE le niveau de l'euro, dans la mesure où c'est au Conseil de fixer des objectifs sur ce sujet, ce qu'il n'a pas fait. Ceci suggère une piste d'amélioration : le Conseil devrait adopter un texte précisant les conditions dans lesquelles il définit chaque semestre un objectif de change pour la zone euro en accord avec la BCE. Le président de l'Euro-groupe pourrait être chargé de formuler une proposition au Conseil après avoir recueilli l'avis de la BCE. Ceci ouvrirait la voie à une politique de change de la zone euro, qui permettrait à l'euro de ne pas être une variable d'ajustement des déséquilibres mondiaux et des politiques de change menées par les autres banques centrales. Il serait intéressant dans ce cadre que le président de l'Euro-groupe puisse représenter les intérêts économiques de la zone euro lors de la réunion du G8. La fonction prendrait alors une dimension beaucoup plus importante et son titulaire deviendrait de fait la voix politique de la zone euro en matière économique, aux côtés du président de la BCE.

La politique monétaire de l'Europe est perfectible, mais elle souligne aussi les éléments qui conditionnent la réussite d'un système de gouvernance économique : une répartition pertinente des compétences entre les Etats membres et le niveau communautaire, des objectifs clairs, des structures de décision (institutions et mode de décision) efficaces.

1.2. L'encadrement des politiques budgétaires des Etats membres : une gouvernance imparfaite

1.2.1. Les fondements du Pacte de stabilité et de croissance

Lors du Traité d'Amsterdam en 1997, les Etats membres se sont accordés pour adopter des règles de gouvernance budgétaire commune. La politique budgétaire reste certes du ressort des Etats membres, ce qui leur donne une marge de manœuvre en cas de choc asymétrique, mais elle est encadrée par un certain nombre de règles reprises des critères de convergence définis à Maastricht. Ce besoin d'encadrer les politiques budgétaires dans le cadre de l'UEM vient de l'adoption d'une monnaie commune. Le creusement de la dette publique d'un pays a pour conséquence de stimuler l'inflation et de provoquer une pression à la hausse des taux d'intérêt (car la demande de crédit, alimentée par l'Etat, augmente), qui a en retour un effet récessif sur l'activité. Dans le cadre de l'UEM, cet effet est partagé par l'ensemble des Etats membres et non par le seul pays considéré : l'augmentation des taux qui en résulte au niveau de la zone est inférieure à ce qu'elle aurait été dans un cadre national. En l'absence de règle, il existerait donc une incitation à augmenter le déficit en espérant en faire partager le coût à ses partenaires dans la zone euro.

Pour éviter cet effet pervers et ne pas contraindre ainsi la politique monétaire, le Pacte de stabilité et de croissance fixe trois règles principales : le déficit public doit rester inférieur à 3%, la dette publique doit être contenue en dessous de 60%, les Etats doivent viser l'équilibre budgétaire à moyen terme.

Les seuils peuvent paraître relativement arbitraires. Ils ont en fait un fondement théorique. Le critère comptable de stabilisation de la dette publique est : déficit public ≤ (taux d'inflation + taux de croissance) x (ratio dette/PIB de l'année précédente). Pour une inflation de 2% (objectif de la BCE) et une croissance de 3% (croissance visée au moment du traité d'Amsterdam), le niveau de déficit permettant de stabiliser la part de la dette dans le PIB à 60% est 3%. Le fait de formuler la règle de stabilisation de la dette par des seuils présente donc des inconvénients (ces seuils reposent sur des hypothèses fortes, comme une croissance de 3%), mais il a le mérite de la clarté, ce qui favorise le respect de la règle.

Pour favoriser l'application du Pacte de stabilité, plusieurs procédures de contrôle ont été créées :

une surveillance multilatérale préventive : les Etats de la zone euro présentent leurs objectifs budgétaires à moyen terme dans un programme de stabilité actualisé chaque année. Sur cette base, le Conseil adopte des conclusions et des recommandations; une procédure pour déficit excessif : en cas de non respect des règles du Pacte de stabilité, le Conseil émet des recommandations et prend éventuellement des sanctions sous forme d'amende pouvant aller de 0,2 à 0,5 % du PIB

Le Pacte de stabilité répond à un problème réel et a, au départ, le mérite de la clarté dans ses objectifs et dans les moyens utilisés pour les atteindre. Cependant, sa mise en œuvre est un relatif échec ; sa réforme en 2005 a porté atteinte à sa lisibilité.

1.2.2. Un pacte mal appliqué et mal réformé

Il n'est pas difficile d'évaluer l'efficacité du Pacte de stabilité : il suffit de regarder dans quelle mesure ses objectifs sont respectés par les Etats membres de la zone euro. Le graphique 3 met en évidence que plusieurs pays européens ne satisfont pas les critères portant sur le déficit et/ou sur la dette publique.

Liste des abréviations

Les résultats décevants de certains Etats membres montrent que les procédures de contrôle n'ont pas été assez efficaces : le dispositif de prévention n'a pas l'impact escompté. Par ailleurs, la procédure pour déficit excessif a déjà été engagée, notamment contre la France, l'Allemagne, l'Italie et le Portugal, mais elle n'a jamais été menée à son terme. Au lieu de cela, des aménagements ont été apportés au Pacte de stabilité en 2005 : les Etats sont autorisés à avoir un déficit public supérieur à 3% en cas de récession ; les délais de réduction du déficit en cas de déficit excessif sont allongés (deux ans au lieu d'un) ; dans l'évaluation du caractère " excessif " d'un déficit, des " facteurs pertinents " peuvent désormais être pris en compte, c'est-à-dire exclus du calcul. Il s'agit, par exemple, des dépenses de R&D et du coût des réformes structurelles.

Cette application partielle du Pacte de stabilité et la relative illisibilité à laquelle a conduit sa réforme ont fait perdre une partie de sa crédibilité à la gouvernance budgétaire de l'Union.

A cela vient s'ajouter le fait que la forte hétérogénéité des politiques fiscales ne fait pas l'objet d'un processus de convergence bien défini à quelques exceptions près : l'harmonisation est bien avancée en matière de fiscalité indirecte (niveau et assiette de la TVA) et une directive assurant un niveau minimum d'imposition des revenus de l'épargne a été adoptée en 2003. Mais il n'existe aucun consensus politique sur des sujets comme l'impôt sur les sociétés ou l'imposition des revenus du travail.

Dans ce contexte, il est souhaitable que la gouvernance budgétaire fasse l'objet d'une réforme.

1.2.3. Réformer la gouvernance budgétaire de l'Union : pour une directive instaurant un " Code de responsabilité budgétaire "

Les objectifs généraux du Pacte de stabilité, c'est-à-dire la limitation de la dette et du déficit publics, restent pertinents. Mais leur mise en œuvre mérite une refonte afin de restaurer leur crédibilité. C'est l'occasion de remédier à un défaut constaté dans la politique de plusieurs Etats membres. Ceux-ci ne réduisent pas suffisamment leur déficit en période d'expansion économique et, par conséquent, ne disposent d'aucune marge de manœuvre lorsqu'un ralentissement de l'activité intervient : dans cette situation, les Etats ont le choix entre une politique budgétaire passive ou ne pas respecter les critères du Pacte de Stabilité et détériorer ainsi le niveau de leur dette publique.

Pour remédier aux insuffisances de la gouvernance budgétaire qu'ils se sont données, les Etats membres de l'Union européenne pourraient s'entendre pour adopter un " Code de responsabilité budgétaire " sur le modèle britannique.

Cette initiative pourrait prendre la forme d'une directive communautaire dont les principaux éléments seraient les suivants : respecter les " best practices " dans l'élaboration du budget. En particulier, les prévisions économiques servant de base à l'élaboration des budgets nationaux doivent être réalisés par des organismes indépendants ; L'objectif assigné serait la stabilité du ratio dette/PIB sur l'ensemble du cycle économique, ce niveau devant rester inférieur à 60% (et tendre vers ce niveau pour les pays dépassant ce seuil actuellement) ; Le déficit public ne devrait pas financer autre chose que des investissements destinés à renforcer la croissance à moyen terme. Tout déficit public devrait être justifié sur cette base.

Comme pour toute directive, la non-transposition dans le droit national serait soumise à des astreintes d'un montant croissant avec le retard pris par le pays considéré.

1.3. Le budget communautaire : un faible effet de levier sur le plan macroéconomique mais un instrument de convergence relativement efficace

L'Union européenne dispose d'un budget et d'une politique budgétaire propre. Cependant, son niveau et la nature de son utilisation rendent quasi nul son rôle de stabilisation du cycle économique [4]. Le budget communautaire assure en fait la mission de redistribution dans la gouvernance économique de l'Union : il permet en effet de favoriser la convergence des niveaux de vie

1.3.1. Le budget communautaire : un rôle de stabilisation négligeable

Le budget communautaire représente 1,1% du revenu national brut (RNB) de l'Union. Cette dernière est donc loin de bénéficier du levier dont disposent des Etats fédéraux comme les Etats-Unis ou le Canada. Cet état de fait provient du refus des Etats de confier à l'Union la gestion des ressources budgétaires associées à des compétences qu'ils ne souhaitent pas partager, comme les politiques sociales. En outre, les Etats font face à des contraintes budgétaires importantes et sont très réticents à contribuer davantage au budget de l'Union ou à l'autoriser à prélever un impôt qui lui soit propre. Lors des discussions budgétaires, on assiste donc souvent aux plaintes des contributeurs nets qui souhaiteraient financer moins l'Union, tandis que la Commission doit batailler pour obtenir le financement des politiques communautaires. Ainsi, la négociation du budget pluriannuel de l'Union pour la période 2007-2013 a conduit à un accord sur la réduction du budget total. Celui-ci sera ramené de 1,1% à 1% du RNB entre 2007 et 2013.

La querelle sur la répartition des fonds communautaires a pour effet de rendre très difficile la réallocation des fonds dont dispose l'Union. Ainsi, lors de la négociation du cadre financier 2007-2013, l'objectif annoncé était d'accroître la part des dépenses consacrées aux politiques de compétitivité pour la croissance et l'emploi (R&D, énergie et transport, éducation, entreprises, emploi). L'allocation des ressources a été de fait très peu modifiée. Près de 80% du budget restent consacrés aux dépenses agricoles (43%) et aux politiques de cohésion (35,6%). La part des politiques de compétitivité reste cantonnée à 8,6% du budget communautaire (+ 1 point par rapport à 2006).

Source :Rapport Schuman sur l'Europe – L'Etat de l'Union 2007, (c)FRS

Dans ce contexte, la contribution du budget de l'Union à la politique de stabilisation conjoncturelle est quasi nulle. Sa capacité d'investissement est trop restreinte pour avoir un effet à court terme et elle est trop peu modulable dans le temps (en raison des rigidités du processus de négociation du budget) pour être réactive face à un choc économique.

Une augmentation du budget communautaire paraît difficile dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses publiques, mais elle est pourtant nécessaire si les Etats membres décident d'étendre les compétences de l'Union dans certains domaines (la R&D, l'enseignement supérieur, la défense ou la politique industrielle). Ceci passera par la constitution d'un nouveau système de ressources propres pour l'Union selon un rapport du Parlement européen [5]. Il pourrait aussi être intéressant de discuter de l'alimentation d'un fonds destiné à financer des dépenses exceptionnelles d'investissement, permettant à l'Union de disposer de marges de manœuvre en matière de stabilisation ou de réformes structurelles. Mais indépendamment de cette question du niveau des recettes, il convient de remédier à la rigidité du budget communautaire et aux marchandages entre Etats sur son utilisation. Pour cela, il faut trouver un moyen de dissocier la discussion sur les recettes du budget de celle sur les dépenses. Une piste envisageable, proposée par la Convention sur l'avenir de l'Europe [6] et formalisée dans le projet de Constitution (article III-310), serait de confier la décision de dernier ressort concernant l'utilisation des recettes du budget au Parlement européen, en supprimant la distinction entre dépenses non obligatoires (pour lesquelles le Parlement a déjà le dernier mot) et dépenses obligatoires (pour lesquelles la décision revient en dernier recours au Conseil, par exemple les dépenses agricoles).

1.3.2. Un instrument au service de la convergence des niveaux de vie dans l'Union

Si le budget communautaire n'a pas de fonction de stabilisation, il joue un rôle décisif dans la gouvernance économique de l'Union. Il est le principal moyen de redistribution et de convergence économique. En ce sens, il est l'instrument qui permet à l'Union de remplir son objectif de cohésion. La politique agricole et les fonds structurels s'inscrivent dans ce cadre. La PAC permet d'assurer un revenu décent aux agriculteurs et des prix raisonnables aux consommateurs. Réformés pour simplifier les procédures d'attribution et concentrer les moyens là où ils sont nécessaires, les fonds structurels permettent d'opérer une redistribution des régions européennes les plus riches vers les plus pauvres, en finançant des projets montés et choisis en partenariat par la Commission, les régions et les Etats membres, autour de trois objectifs :

Convergence : il s'agit de favoriser la croissance et le développement de l'emploi dans les régions en retard de développement, c'est-à-dire disposant d'un PIB moyen par habitant inférieur à 75% de la moyenne de l'Union. C'est le principal objectif de la politique de cohésion : il bénéficie de 81% des fonds. Compétitivité régionale et emploi : cela concerne les régions qui ne bénéficient pas d'aides au titre de la convergence. Recueillant 16% des fonds structurels, il vise à améliorer leur attractivité dans l'économie mondialisée, mais aussi à encourager l'innovation, l'emploi et l'investissement dans l'éducation et la formation. Coopération territoriale : cet objectif recouvre les politiques de coopération interrégionale, en particulier transfrontalière. Il bénéficie de 3% du budget des politiques de cohésion.

La gouvernance de l'Union en matière de convergence a été utilement réformée : le cadre pour 2007-2013 permet de clarifier et de simplifier son fonctionnement, ce qui contribuera à en améliorer l'efficacité et la lisibilité pour le grand public. Elle prend également en compte le bouleversement entraîné par l'élargissement, qui a accentué les écarts de niveaux de vie dans l'Union, et répond ainsi à l'un des défis principaux qu'il lance à l'Europe. Si la politique de cohésion a connu quelques échecs, son bilan est jusqu'à présent positif puisqu'elle a contribué au rattrapage de pays comme l'Irlande, l'Espagne ou le Portugal. Il sera important d'évaluer régulièrement ses résultats pour s'assurer qu'elle a le même succès avec les nouveaux Etats membres.

2. Les difficultés de la Stratégie de Lisbonne : vers une gouvernance plus efficace

Le Conseil européen de Lisbonne de mars 2000 s'était fixé pour objectif de faire de l'Union européenne "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde" à l'horizon de 2010. L'idée d'une stratégie commune venait du constat suivant : les dépenses visant à favoriser l'innovation (R&D, éducation et formation, projets industriels, financement des PME) génèrent des externalités dont bénéficient tous les Etats membres ; la mise en œuvre du marché intérieur et la réforme du marché du travail sont complémentaires ; les expérimentations menées par chaque Etat membre permettent de dégager les bonnes pratiques en matière de politique de l'emploi ; la finalisation du marché intérieur nécessite un engagement de tous les Etats membres.

Si personne ne conteste la pertinence de ce constat, la faiblesse des progrès réalisés à mi-parcours a permis de prendre conscience des limites des instruments de gouvernance destinés à assurer leur mise en œuvre dans le cadre de la " méthode ouverte de coordination ". Après le rapport Kok de novembre 2004 [7], une réforme a été entreprise. L'évaluation de son impact montre néanmoins qu'elle est insuffisante et que d'autres changements seront nécessaires pour " sauver " la stratégie de Lisbonne.

2.1. La " méthode ouverte de coordination " en échec

2.1.1. Objectifs et gouvernance

Pour traduire l'engagement pris au Conseil européen de 2000, des objectifs ont été assignés aux Etats membres : porter les dépenses de R&D à 3% du PIB ; atteindre un taux d'emploi supérieur à 70% pour l'ensemble de la population en âge de travailler et supérieur à 50% pour les 15-64 ans ; renforcer l'éducation et la formation ; promouvoir les nouvelles technologies ; moderniser les modèles sociaux en rendant les marchés du travail plus flexibles et les parcours professionnels plus sûrs (protéger les personnes plutôt que les emplois)

Pour atteindre ces objectifs, les Etats membres ont choisi une méthode intergouvernementale et non communautaire : la " méthode ouverte de coordination ". Des objectifs communs sont fixés, mais leur mise en œuvre est décentralisée. Les Etats membres ont ainsi la responsabilité de la mise en application de la stratégie de Lisbonne dans les domaines relevant de leur compétence : emploi, éducation/formation, politiques sociales. La compétence des Etats membres sur ces sujets est légitime, dans la mesure où l'hétérogénéité des problèmes rencontrés, de même que celle des cultures et des structures sociales, reste importante. Les Etats membres ont ainsi le choix des moyens pour atteindre les objectifs de Lisbonne et ne sont pas susceptibles de sanction.

Cette gouvernance est néanmoins apparue comme trop lâche et insuffisamment incitative lors de la revue à mi-parcours de la Stratégie de Lisbonne. Ce constat a conduit à la mise en place de nouveaux instruments de coordination en 2005. La Commission propose des Lignes directrices intégrées en matière d'économie et d'emploi, qui doivent être adoptées par les Etats. Elles constituent en quelque sorte le programme économique de la Commission. Les gouvernements présentent des Programmes nationaux de réformes qui font l'objet d'une évaluation par la Commission. Certaines initiatives peuvent désormais être prises par la Commission dans le cadre du Programme communautaire de Lisbonne.

Cependant, les résultats restent décevants, même après la réforme de 2005.

2.1.2. Des résultats décevants à mi-parcours, une gouvernance encore très perfectible

Si l'on se réfère aux objectifs chiffrés, la Stratégie de Lisbonne semble connaître un échec en matière de dépenses de R&D et une progression inférieure aux attentes en matière d'emploi. Les dépenses de R&D dans l'Union ont stagné entre 2000 et 2005 à 1,9% du PIB. Seules la Finlande (3,4%) et la Suède (3,8%) dépassent l'objectif final de 3%. Le taux d'emploi dans l'Union est passé de 62,2% en 2000 à 64,8% en 2006, alors que l'objectif intermédiaire pour 2005 était de 67%. Cinq Etats membres dépassent d'ores et déjà l'objectif final de 70% (Danemark, Pays-Bas, Autriche, Royaume-Uni, Suède). L'augmentation du taux d'emploi des personnes âgées est en bonne voie : il atteint 43,6% en 2006 contre 36,9% en 2000.

En matière éducative, les 27 Etats membres conservent en outre un retard important : près d'un étudiant sur 6 sort du système éducatif sans avoir achevé ses études secondaires. Le taux de scolarisation dans l'enseignement supérieur est très inférieur dans l'Union (58%) par rapport aux Etats-Unis (83%). La dépense annuelle d'éducation par étudiant dans l'Union (un peu plus de 8000 euro) est très inférieure à celle du Japon (environ 10000 euro) et à celle des Etats-Unis (près de 21000 euro).

Sur le plan des règles de gouvernance, l'application est décevante [8]. La réforme de la stratégie de Lisbonne en 2005 n'a pas permis d'accroître le degré de coordination des Etats membres en refusant d'accroître significativement le budget de l'Union dans ce domaine, d'adopter des règles de benchmarking favorisant la comparaison entre Etats et de critiquer ceux qui n'améliorent pas leur performance. La réforme consistait à développer l'appropriation de la Stratégie de Lisbonne par les Etats membres. Pourtant, seuls 11 Etats membres ont nommés un responsable "Stratégie de Lisbonne " au niveau gouvernemental comme ils s'étaient engagés à le faire [9]. Les Programmes nationaux de réformes sont peu discutés et évalués par les Parlements nationaux, mais aussi peu médiatisés et donc inconnus de l'opinion publique.

Dès lors, il est possible de suggérer plusieurs pistes de réforme : les Etats membres doivent accepter d'augmenter le budget consacré aux politiques communautaires de compétitivité. Cette question devra être placée au centre de la renégociation du budget prévu pour 2008-2009. Les Etats membres doivent s'engager à annoncer et diffuser à l'opinion publique leurs objectifs propres dans le cadre de la stratégie de Lisbonne. Les progrès à accomplir dépendent en effet de l'Etat membre considéré. Un système d'évaluation annuelle des progrès des Etats membres doit être développé sur la base d'indicateurs clairs et publiés relatifs aux engagements qu'ils ont pris, à la fois au niveau communautaire (Commission et Parlement européen) et au niveau national (parlement nationaux).

Il est frappant de constater que, devant la lenteur des progrès des Etats membres, la Commission a pris de nombreuses initiatives qui ont pour conséquence de donner une dimension communautaire plus forte à la Stratégie de Lisbonne, même si cela ne s'accompagne pas, pour l'instant, d'une augmentation significative du budget dont la Commission dispose dans ce domaine.

2.2. Le programme de Lisbonne : vers une communautarisation des politiques de compétitivité ?

Devant la faiblesse des résultats de la Méthode ouverte de coordination, la Commission européenne a défendu l'idée d'une approche plus centralisée, formalisée dans le " Programme communautaire de Lisbonne " [10] qui définit les objectifs servant de base à une participation directe de la Commission, sous la forme de nouveaux règlements et de l'utilisation des fonds communautaires disponibles pour les politiques de compétitivité.

2.2.1. Favoriser la connaissance et l'innovation : de nombreuses initiatives, un soutien budgétaire insuffisant et une gouvernance incertaine

Dans le cadre du nouveau rôle qui lui a été confié, la Commission européenne a développé un véritable programme d'action pour la période 2007-2013 en vue de promouvoir l'innovation et l'économie de la connaissance. Il s'articule autour de la réforme de la politique des aides d'État qui facilitera les aides d'Etat destinées à financer la R&D, favoriser l'innovation dans les PME, aider les jeunes entreprises à se développer, et soutenir la formation, la mobilité et l'essaimage. Le 7e Programme-cadre pour la recherche et le développement technologique (PCRDT) repose sur les partenariats public-privé (PPP), le financement de projets, l'association des PME aux programmes de recherche et l'augmentation des prêts consentis par la Banque européenne d'investissement aux projets privés de R&D.

Programme pour l'innovation et la compétitivité (PIC) fondé sur le renforcement du rôle du Fonds européen d'investissement (nouveau mécanisme de garantie, développement du capital-risque) et le développement de structures de transfert de technologie au PME. Fonds dédiés aux réseaux trans-européens utilisés dans le cadre de Galileo, SEGTF (chemins de fer) et SESAME (contrôle du trafic aérien) Initiatives technologiques conjointes : il s'agit de partenariats privés associant l'Union, les gouvernements nationaux et l'industrie. Le programme d'observation terrestre GMES en est un exemple. Recherche d'un accord sur le brevet communautaire. Le but est de réduire les coûts de brevetage et de simplifier la protection des inventions (procédure unique, système centralisé d'examen des litiges). Création du Conseil européen de la recherche, agence de financement conçue sur le modèle de la National Science Foundation américaine, dotée de 7,5 milliards d'euro pour la période 2007-2013. Création d'un Institut européen de technologie rassemblant les meilleures équipes de recherche et les meilleures universités au niveau post-graduate. Il disposera d'un diplôme propre. Son objectif est d'améliorer la compétitivité de l'enseignement supérieur européen en favorisant la collaboration entre laboratoires et le recueil de fonds privés. La part communautaire de son financement s'élèvera à 2,4 milliards d'euro entre 2008 et 2013.

Ces initiatives sont très ambitieuses, mais elles seront fortement contraintes par le budget trop limité mis à disposition par les Etats membres. Les budgets respectifs du 7e PCRDT et du PIC sont respectivement de 50 et 3,6 milliards d'euro, soit 0,08% du RNB communautaire ou encore 11% des dépenses publiques de R&D dans l'Union. Ils restent donc sous-dimensionnés face à l'importance des enjeux et à l'ambition de la stratégie de Lisbonne.

Sur le plan de la gouvernance, le programme élaboré par la Commission présente des imperfections :

les projets et programmes sont multiples. Ceci nuit à leur lisibilité pour les acteurs concernés et plus encore pour le grand public. Il existe aussi un risque de dispersion des moyens, qui sont déjà limités. Pour remédier à ce problème, il serait utile de regrouper certains dispositifs, les actions en faveur des PME pourraient être formalisées au sein d'un " Small Business Act " européen. la Commission reste encore tributaire de l'accord des Etats membres sur de nombreux sujets, tels que le budget (les montants proposés par la Commission ont été largement réduits lors de la discussion du budget) ou le brevet communautaire (pour lequel aucun accord n'a encore été atteint). La Commission manque d'expérience dans la gouvernance des projets industriels, comme l'a souligné le projet Galileo. La phase de déploiement a été confiée à un consortium de huit industriels (Eurely/iNavSat) car la Commission n'a pas voulu choisir entre eux à la suite de son appel d'offres. Or, ce consortium n'a pas réussi à se mettre d'accord et la société concessionnaire n'a pas été créée, tandis que les retards dans le lancement des satellites s'accumulent. La Commission a donc été contrainte de reprendre le leadership et le financement complet de la phase de déploiement.

2.2.2. Faire de l'Europe un lieu attrayant pour investir et travailler : la finalisation du marché intérieur

Pour améliorer l'attractivité de l'Union européenne et stimuler l'investissement, le Programme communautaire de Lisbonne a fixé deux priorités : améliorer l'environnement réglementaire et progresser dans la réalisation du marché intérieur.

Le premier objectif se traduit par trois engagements pris par la Commission : simplifier la législation communautaire, 220 directives ou règlements seront ainsi réexaminés ; prendre en compte la compétitivité des entreprises dans l'élaboration des règlements, en évaluant notamment les charges administratives pour les entreprises ; identifier les obstacles réglementaires à la recherche et l'innovation.

La tâche la plus importante reste la finalisation du marché intérieur pour que la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services deviennent une réalité. Après le succès de l'ouverture des marchés des télécoms (1998), de l'énergie (entreprise en 2004, particuliers en 2007), du transport (aérien en 1997, fret ferroviaire en 2006), les priorités de la Commission sont :

la création d'un marché unique des services : c'est une priorité dans la mesure où les emplois créés le sont dans ce secteur. La première étape a été la libéralisation du marché des services financiers en 2006. La deuxième a été l'adoption de la Directive Services en novembre 2006. Enfin, les services postaux doivent être libéralisés en 2009. l'intégration complète des marchés financiers. L'enjeu est la mise en œuvre de la réglementation qui a d'ores et déjà été adoptée, de façon à améliorer l'accès au financement et l'entrée de nouvelles entreprises sur les marchés. favoriser la mobilité professionnelle et géographique.

La Commission a fait preuve de constance dans la réalisation du marché intérieur. Si les dernières étapes ont été plus difficiles en raison de craintes exprimées par l'opinion publique, la Commission a su la faire avancer relativement vite et mettre en place une gouvernance efficace, notamment en évaluant la mise en œuvre des règles du marché intérieur par les Etats membres et en encadrant les libéralisations par des autorités réglementaires nationales et des garanties de service public dans le cadre du " service universel ".

La gouvernance d'un ensemble économique aussi important que l'Union européenne est nécessairement longue à mettre en place. L'une des difficultés majeures réside dans la répartition des compétences entre les différents niveaux de juridictions, notamment entre les Etats membres et l'Union. Les inefficacités les plus grandes concernent, de fait, les politiques pour lesquelles les responsabilités de chaque acteur ne sont pas claires et/ou insuffisamment évaluées. Tandis que la politique monétaire s'est révélée efficace dès sa première décennie, le Pacte de Stabilité et de croissance a perdu de sa crédibilité, de même que la Stratégie de Lisbonne.

Dans ce contexte, il importe de retrouver une gouvernance efficace dans les domaines les plus sensibles en clarifiant les compétences et les objectifs de chacun, en les soumettant à l'évaluation et en acceptant de mettre les moyens en accord avec les ambitions affichées. Les Etats membres et les citoyens de l'Union seront les premiers à bénéficier de cet effort collectif.

Cette note a été préparée et rédigée par Jean-François Jamet, économiste, ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure (Ulm) et de l'Université Harvard.


[1] Pour une étude détaillée des effets de l'euro sur le commerce intracommunautaire, voir Harry Flam et Hakan Nordström : "Euro Effects on the Intensive and Extensive Margins of Trade," 2006, IIES Seminar Paper N. 750.
[2] Le Conseil européen a décidé de remplacer dans le futur traité cette formule par la suivante : " [l'Union] œuvre pour le développement durable de l'Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d'amélioration de la qualité de l'environnement ".
[3] Pour une analyse plus détaillée de la politique monétaire conduite par la BCE, voir Questions d'Europe n° 51 : " La politique monétaire de la zone euro et la banque centrale européenne ", Jean-François Jamet, février 2007.
[4] La fonction de stabilisation de la politique économique désigne son utilisation pour éviter la surchauffe de l'économie (en cas de risque inflationniste, la Banque centrale peut relever ses taux par exemple, les Etats peuvent réduire leur déficit budgétaire) ou au contraire soutenir l'activité dans les phases de ralentissement (baisse des taux directeurs de la Banque centrale, augmentation de la dépense publique ou réduction de la pression fiscale par les Etats).
[5] Résolution du Parlement européen du 29 mars 2007 sur l'avenir des ressources propres de l'Union européenne.
[6] Convention européenne, Rapport final du Cercle de discussion sur la procédure budgétaire, CONV 679/0, 14 avril 2003
[7] " Relever le défi. La stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi " : Rapport du groupe de haut niveau présidé par Wim Kok, novembre 2004.
[8] Jean Pisani-Ferry et André Sapir, " Last exit to Lisbon ", Bruegel Policy Brief, Mars 2006
[9] Ces pays sont l'Espagne, la Slovénie, la Slovaquie, le Portugal, la Pologne, Malte, le Luxembourg, la Lituanie, la Lettonie, l'Italie et l'Allemagne.
[10] Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen – Actions communes pour la croissance et l'emploi : le programme communautaire de Lisbonne, COM(2005) 330, 20 juillet 2005.

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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