Le budget européen : quelle négociation pour le prochain cadre financier de l'Union européenne ? (2ème partie)

Budget et Fiscalité

Nicolas-Jean Brehon

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31 mai 2010

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Brehon Nicolas-Jean

Nicolas-Jean Brehon

Conseiller honoraire au Sénat
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II – Les enjeux de la prochaine négociation sur le budget européen

 

La prochaine négociation s'annonce exceptionnelle à plus d'un titre : ce sera la première à 27, dans un contexte marqué par un enchaînement des crises (économique, monétaire)  qui fait peser des peurs sur l'avenir de l'Union européenne et par une pression énorme pour revoir radicalement la structure des dépenses, en particulier la place faite à l'agriculture (PAC).

4 sujets seront déterminants.

 

A- Le montant du budget

 

1 - Les marges de progression du budget communautaire

 

En 2010, le budget communautaire a été arrêté à 141,5 milliards € en crédits d'engagement et 122,9 milliards € en crédits de paiement. [1] Il correspond au budget d'un pays moyen de l'Europe La question du montant du budget se pose non en termes nominaux (le budget augmente régulièrement chaque année avec des sauts après chaque élargissement), mais en termes relatifs, par rapport au revenu/produit national brut [2]. Depuis 10 ans, le budget européen est de l'ordre de 1% du PNB communautaire [3]. Ce montant est incontestablement faible et, comme le note Alain Lamassoure, "est inférieur au seul déficit du budget de l'État français[4]. Pourtant, traité après traité, les compétences de l'Union européenne n'ont cessé de se développer. Comment remplir tant de missions, répondre à tant d'enjeux avec un budget aussi limité ?

 

Cette faiblesse s'est manifestée notamment en 2009 lors de la crise économique et financière. Le plan de relance européen ne fut en réalité que le cumul de 27 plans nationaux laissant au budget communautaire une place plus que modeste. Sur 200 milliards € annoncés au titre du plan de relance, 170 viennent des budgets des États membres, 30 de l'Union européenne dont 25 sont des prêts de la Banque européenne d'investissement (BEI)  et 5 seulement du budget communautaire, répartis sur 2009 et 2010 [5]. Ni le montant du budget actuel, ni le principe rigoureux de programmation des dépenses n'ont permis à l'Union de jouer un rôle significatif dans ce plan de relance.

 

Il existe une incontestable pression publique en faveur d'une augmentation du budget européen. Il y a d'abord une pression politique des partisans d'une communautarisation plus poussée tels que le Parlement européen, la Commission européenne et de nombreux élus engagés dans la voie de l'européanisation des politiques. Il y a ensuite l'analyse d'économistes qui considèrent que le budget européen, à son niveau actuel, n'assure aucune des 3 fonctions budgétaires classiques (allocation, redistribution et, -encore moins- stabilisation) et proposent d'y remédier en portant le budget à 2 voire 3% du PNB communautaire. Il y a, enfin, une demande budgétaire de la part de nombreux acteurs de terrain, à commencer par les responsables régionaux, qui voient le budget communautaire comme un moyen de financement solide et plus sûr que les aides nationales. [6]

 

Mais il existe aussi un argument institutionnel et comptable non négligeable, lié à la mesure du plafond ou plutôt à ce que l'on peut appeler le double plafond. Selon la définition du traité de Lisbonne, le cadre financier pluriannuel " assure l'évolution ordonnée des dépenses, dans la limite du plafond des ressources propres ". Ainsi, il y a bien non pas un, mais deux plafonds distincts : " le plafond de dépenses ", qui est l'objet même du cadre financier pluriannuel, et qui se situe autour de 1% du PNB en crédits de paiement [7], mais aussi un " plafond de ressources ", fixé par les décisions du Conseil et qui est très supérieur, puisqu'il est de 1,23% en crédits de paiement et 1,29% en crédits d'engagement après introduction en 2010 des nouvelles règles de comptabilité internationales [8]. Ces taux plafonds avaient été acceptés en 1992 avec l'accord du Royaume-Uni, c'est dire si le niveau paraissait raisonnable ! Ainsi, sans changer les règles actuelles, il existe une marge de progression sensible du budget communautaire. En 2003, la proposition initiale de la Commission était d'ailleurs de 1,22% du RNB [9]. Il y a tout lieu de penser qu'il en ira de même cette fois et que la Commission proposera une augmentation conséquente du budget communautaire pour 2014 -2020.

 

2 - Les obstacles à la hausse du budget

 

Néanmoins, il faut admettre que cette demande se heurtera à plusieurs obstacles déterminants.

 

L'obstacle financier est le premier. En raison des difficultés à financer le budget par des ressources propres, le budget communautaire est, en réalité, financé presque intégralement par des contributions nationales des Etats membres, prélevées sur les recettes fiscales. En période de contrainte budgétaire, la place réservée au budget européen ne peut être que réduite. La crise économique de 2008-2009 s'est traduite par des situations budgétaires extrêmement tendues dans tous les États membres avec des niveaux de déficits record. " Avant la crise, les États ne voulaient pas payer plus pour le budget communautaire. La situation est désormais plus simple puisque personne ne peut payer " [10]. Car quels que soient les retours dont les États bénéficient, la contribution au budget communautaire commence par un prélèvement sur les recettes fiscales, qui creuse le déficit. Le prélèvement européen représente 7,5% des recettes fiscales de l'État en France et 10% en Allemagne. Les deux pays qui assurent 36% du financement du budget ont donc un intérêt commun à encadrer le budget.

 

Quel est l'enjeu financier réel d'une augmentation du budget ? Le débat sur le montant du budget communautaire, jugé très faible au regard de ce qui serait souhaitable, ne peut faire abstraction du fait qu'une augmentation de seulement 0,1% (en part dans le PNB communautaire), c'est-à-dire un passage de 1% à 1,1% du PNB communautaire, représente pour la France et l'Allemagne une dépense supplémentaire respectivement de 2 et 2,4 milliards €. Porter le budget à son plafond possible (1,23% du RNB soit +27 milliards) représenterait, pour chacun des pays, un prélèvement supplémentaire de plus de 5 milliards €. Les deux pays veilleront sans doute à éviter une telle augmentation.

 

Les conditions actuelles d'exécution du budget ne se prêtent pas non plus à une augmentation. " Le budget communautaire continue à se caractériser par une sous-exécution importante, qui affecte plus particulièrement les crédits de la politique de cohésion " [11]. La plupart des exercices budgétaires font apparaître des excédents. Pourquoi revendiquer une augmentation dès lors que les crédits actuels ne sont pas correctement consommés ? Cette caractéristique a priori défavorable à une hausse du budget, est cependant réversible et pourrait même constituer une petite réserve de croissance, à condition de modifier la règle budgétaire des reports de crédits, c'est-à-dire en affectant l'éventuel excédent budgétaire d'un exercice à des dépenses supplémentaires l'année suivante et non en diminution des prélèvements de l'année suivante(voir annexe).

 

L'obstacle politique et institutionnel reste déterminant. Augmenter le budget, mais pour quoi faire ? Toute augmentation du budget ne peut être fondée que sur des dépenses légitimes aux yeux de l'opinion européenne, ce qui supposerait une répartition sensiblement différente que l'Union pourrait assumer mieux et plus efficacement que les Etats nationaux. Augmentation et refondation du budget sont indissociables. Enfin, toute aspiration à l'augmentation du budget se heurtera à un verrou incontournable : l'accord doit être adopté à l'unanimité des Etats membres, donc avec l'accord des principaux financeurs. Selon toute probabilité, les marges de progression budgétaire sont très faibles.

 

3 - Lettre de cadrage ou pas ?

 

L'existence, ou non, d'une lettre de cadrage avant le début de la négociation budgétaire, comme ce fut le cas en 2003, en préambule de la préparation du cadre financier 2007-2013 [12], détermine la méthode de négociation, par addition ou par soustraction et donc le montant du budget décidé in fine.

 

Une lettre de cadrage signifierait que les contraintes financières et budgétaires des États membres ont prévalu. Les ambitions sur le budget européen se heurtent à ce que les États – à commencer par les principaux États contributeurs - veulent lui consacrer. L'argument avancé en 2003 reste applicable au mot près en 2010 et beaucoup d'États peuvent continuer à exprimer " leur inquiétude à l'égard de propositions qui reviendraient à ignorer la discipline budgétaire que s'impose chacun des États membres au niveau national ", et souhaiter que " leurs ambitions pour les politiques communautaires soient compatibles avec les exigences financières " [13].

 

Une lettre de cadrage signifierait aussi que les contributeurs nets ont décidé de faire front commun. Certes, il y a une alliance objective des deux principaux contributeurs, pour encadrer le budget. Mais ce tandem franco-allemand est-il suffisant pour rallier d'autres partenaires ? La probabilité d'un front commun des pays contributeurs est certainement moins forte qu'en 2003. La plupart des États signataires en 2003 ont eu satisfaction et ont vu leur contribution réduite, et le camp constitué alors comporte en réalité deux ennemis budgétaires irréductibles : la France et le Royaume-Uni. " PAC " contre " correction britannique ". Le débat/combat n'est pas nouveau. Il sera probablement sanglant.

  

L'absence de lettre de cadrage signifierait que la politique a pris le dessus sur la logique budgétaire. C'est la position de la Commission, y compris sur la PAC. " Le budget doit découler des objectifs et non pas le contraire. J'espère que le Conseil et le Parlement européen auront la sagesse de doter budgétairement la PAC de façon adaptée, cohérente avec les objectifs qui auront été fixés au préalable ". [14] C'est aussi la volonté affichée des États qui assumeront la présidence au cours de la longue négociation budgétaire [15] : déterminer d'abord les politiques à financer et s'entendre ensuite sur les budgets qui leurs seront alloués.

 

B- La répartition des dépenses. Présentation générale

 

Le cadre financier pluriannuel affiche les priorités budgétaires de l'Union européenne et constitue un élément de sa communication politique. Le prochain cadre financier pluriannuel ne pourra pas être une simple reconduction du cadre actuel et devra afficher les priorités du moment. Sans entrer dans le détail des rubriques, 3 sujets doivent être présentés : quelles sont les marges pour " refonder " le budget communautaire ? Quelles sont les dépenses "incontournables" ? Comment se traduisent, formellement, les priorités ?

 

1- Quelles sont les marges pour refonder le budget communautaire ?

 

Chaque négociation budgétaire constitue a priori une occasion de remodeler le budget pour l'adapter aux aspirations du moment. Cela avait été le cas la fois précédente, lorsqu'un rapport d'experts, sorti opportunément juste avant la négociation budgétaire, avait demandé de refonder radicalement le budget, alors qualifié de " relique historique " [16]. C'est aussi le cas cette fois-ci puisque tant les Etats que la Commission ont manifesté leur souhait de " dépenser mieux " [17] ou différemment. La Commission a eu l'habilité de préparer son initiative par une consultation publique qui a fourni des directions et même des critères d'appréciation nouveaux qui devraient modifier la structure actuelle du budget.

 

Cette pression en faveur du changement se manifestera de nouveau. Tant l'opinion que les États membres manifestent leur volonté d'orienter davantage le budget vers l'adaptation de l'économie européenne aux technologies de l'information et vers les investissements de croissance. L'augmentation des crédits de recherche est revendiquée avec force. Il paraît impossible que cet appel ne soit pas entendu, même s'il faut être conscient que les crédits européens n'interviennent qu'à titre d'appoint de programmes communs entre entreprises de plusieurs États membres, toujours très difficiles à construire. De même, il est vraisemblable que le prochain cadre financier fera apparaître une nouvelle rubrique consacrée au volet énergie/climat/environnement. Tout y concourt : la transnationalité de la thématique, plus judicieusement traitée dans un cadre européen que dans un cadre national, et même une certaine attente citoyenne. Le changement climatique est mentionné par les 2/3 des contributeurs à la consultation de la Commission. Même s'il faut se méfier des effets d'affichage sans lendemain, il existe de vraies marges de progression pour ces nouvelles politiques, qui devraient contribuer à combler les déséquilibres budgétaires avec les Etats membres. Enfin, il pourrait être utile de supprimer les dépenses manifestement inefficaces [18] et, à l'inverse, renforcer les dépenses qui développent les échanges entre États membres. Actuellement, à peine 10% du budget européen est consacré à des politiques qui développent les échanges ou les programmes communs entre États membres [19]. Cette part mériterait d'être développée.

 

Toutefois, cet appel à la nouveauté et au changement de cap doit être appréhendé avec lucidité. C'était toute la faiblesse du rapport Sapir de 2003, rédigé par des économistes, qui construisait une sorte de budget idéal, faisant table rase du passé et omettant les puissantes contraintes politiques qui sont liées à l'exercice. Comme tous les budgets institutionnels, le budget européen présente une grande inertie propre à l'histoire de l'institution, aux habitudes installées, aux partenariats qui se sont noués avec l'Union européenne et qui ne peuvent, d'un seul coup, être supprimés. Il est illusoire de penser modifier radicalement sa structure ou a fortiori de supprimer une catégorie de dépenses, sans de longues périodes de transitions pour lisser les évolutions. C'est le sens du phasing out appliqué aux fonds de cohésion, qui permet de maintenir des aides européennes aux régions qui cessent d'être éligibles aux objectifs communautaires. De même, il est illusoire de penser que les nouveaux Etats membres renonceront aux aides directes aux revenus après 2013 dont ils seront pleinement bénéficiaires, à l'issue d'une longue période où le régime d'aide n'était appliqué que de façon partielle et progressive. Le prochain cadre financier pluriannuel devra trouver le juste équilibre entre l'engagement dans les défis du moment et la préservation des " fondamentaux ".

 

Quelle que soit l'impulsion qui leur est donnée, les nouvelles priorités ne feront pas disparaître les deux politiques les plus anciennes de l'Union européenne : la politique agricole et la politique de cohésion. Le rapprochement de ces 2 politiques n'est pas fortuit et annonce même de grandes difficultés.

 

2 - Les dépenses de cohésion, nouvelles dépenses "sanctuarisées"

 

La négociation budgétaire est sélective. Certaines dépenses sont considérées comme inévitables, voire acquises, tandis que d'autres rubriques sont plus discutées. Le prochain rendez-vous budgétaire ne dérogera pas à la règle, même si la ligne de partage entre négociable et non négociable sera différente des années précédentes.

 

Lors de la négociation du cadre financier pluriannuel 2007-2013, la PAC avait été sanctuarisée par un accord antérieur, de telle sorte que la plus grande part du budget PAC ne fut pas négociée. Il est vraisemblable que cette place d'" intouchable " sera cette fois occupée par les dépenses de cohésion destinées aux 12 nouveaux États membres. Il est difficile d'envisager que les fonds structurels qui leur sont destinés soient réduits. Les États concernés forment une force politique incontournable et toute réduction de " leurs " crédits de cohésion serait un casus belli. Il y a une unanimité pour reconnaître que le budget communautaire doit être consacré en priorité aux dépenses de solidarité envers les États ou les régions les plus pauvres de l'Union européenne et par conséquent aux nouveaux États membres. En d'autres termes, les fonds structurels qui leur sont accordés (à l'exception de Malte et Chypre) sont sanctuarisés, préemptés et quasi acquis. Ces fonds programmés pour 2007-2013 représentent 178 milliards € 2004 (soit 200 milliards en € 2009)  [20].

 

En d'autres termes, la négociation budgétaire part avec 200 milliards € pré-affectés Mais tout le reste peut être considéré comme négociable. Tout, y compris les crédits de la PAC, souvent présentée par ses détracteurs comme un symbole des politiques archaïques, mais aussi les fonds structurels accordés aux autres États de l'Union européenne. Qu'il s'agisse des anciens pays bénéficiaires de la politique de cohésion avant l'élargissement [21] ou, a fortiori, des régions des États prospères [22].

 

Les fonds structurels sont le premier outil de la politique de cohésion et de la solidarité budgétaire entre Etats membres. Des sommes considérables ont été affectées à cette politique depuis 1988 [23]. Les fonds européens sont d'excellents accélérateurs de croissance et ont un effet de levier sur les investissements privés et publics qui ne seraient pas financés facilement sans l'aide européenne. Toutefois, la question de la pertinence du maintien des fonds structurels dans toutes les régions peut se poser. " Il faut faire un bilan et un travail de sélection des aides, région par région. Il ne faut pas exclure qu'il y ait eu parfois gaspillage et corruption. Le Mezzogiorno italien, par exemple, a reçu 10 milliards € du budget communautaire alors que l'écart de niveaux de vie avec la moyenne européenne a continué à croître. Comment expliquer un tel échec ? ".  [24]

 

Cette question du maintien de dotations importantes en direction des anciens Etats membres rebondit avec la crise de la zone euro du printemps 2010. Les aides structurelles en direction des pays de la cohésion [25], requalifiés de PIGS [26] depuis la crise monétaire de 2010, ont été massives. Depuis la création de l'euro, le montant des fonds structurels programmés en direction de la Grèce, de l'Espagne et du Portugal représentent 165 milliards €. Cette aide n'a jamais ni garanti la croissance, ni protégé les Etats contre les spéculations. L'aide communautaire, indissociable de la politique de solidarité, n'est évidemment pas en cause mais, à l'heure de la négociation budgétaire, la poursuite, sans condition, d'aides octroyées depuis plus de 20 ans sera certainement posée : les fonds structurels sont là pour impulser, pas pour assister indéfiniment. Il faut sans doute savoir arrêter les subventions européennes et, à l'avenir, mieux sélectionner les bénéficiaires. [27]

 

Un pas supplémentaire dans cette remise en cause a été franchi en mai 2010, lorsque la Chancelière allemande a émis l'idée que les pays laxistes de la zone euro puissent être privés de subventions européennes. Même si cela paraît peu probable – en raison de la discrimination entre Etats membres de la zone euro sous contraintes, et les autres qui continueraient à bénéficier des aides communautaires -, cette nouvelle forme de conditionnalité des aides, jusque-là réservée aux dépenses agricoles, sera certainement évoquée lors de la négociation des futurs fonds structurels.

Source : programmation des fonds structurels, calculs auteur

La question complémentaire est celle du maintien des aides aux États prospères. Les crédits des fonds structurels doivent-ils être réservés aux États et régions les plus pauvres ou une part doit-elle être conservée aux régions en difficultés, où qu'elles soient ? Il s'agit de deux lectures de la solidarité européenne, l'une réduisant cette dernière à une aide des riches aux pauvres, l'autre considérant la solidarité comme un tout, faisant vivre un " tous ensemble " et donnant du sens à l'Union européenne. C'est cette dernière lecture qui a prévalu en 2005 puisque tous les États membres ont conservé des fonds structurels. Rien ne dit que ce sera celle qui prévaudra dorénavant.

L'éventualité d'une diminution des fonds structurels attribués aux régions françaises est une hypothèse crédible : "Certes, l'importance des soutiens financiers est un élément à prendre en compte car ils sont, pour les préfets et les élus régionaux, une source de financement capital pour le déclenchement des projets d'aménagement. La question était taboue jusqu'à présent en raison de la grande sensibilité des élus locaux, mais il est au moins nécessaire de se poser la question de la pertinence de maintenir les soutiens européens dans certaines régions ". [28]

3 - Présentation formelle du cadre financier pluriannuel

 

Le cadre financier pluriannuel se conclut par un tableau de présentation qui affiche les plafonds par grandes rubriques. La sélection et le libellé des rubriques, les montants affichés, l'ordre de présentation ne sont évidemment pas neutres sur le plan politique. La négociation budgétaire est aussi une bataille de mots. Ce fut le cas lors de l'actuel cadre financier 2007-2013, qui a modifié radicalement la présentation des perspectives financières.

 

Les perspectives financières 2000-2006 sont articulées autour de rubriques techniques – agriculture, fonds structurels, politique interne, actions extérieures, etc. – tandis que les perspectives financières 2007-2013 se veulent plus politiques : croissance durable et compétitivité, cohésion, etc. L'ordre a changé : la première rubrique est dédiée à la croissance durable et non à l'agriculture comme dans les perspectives financières précédentes. Le mot même " agriculture " a disparu ! Les dépenses agricoles sont noyées au sein d'un ensemble " conservation et gestion des ressources naturelles ". La nouvelle présentation permet d'afficher les nouvelles priorités politiques et budgétaires [29]. Il en sera de même cette fois-ci. Il serait surprenant que le tableau final ne recèle pas quelques mots clefs ou symboles des attentes du moment, tels que climat, énergie, environnement, etc.

 

La présentation actuelle n'est guère satisfaisante [30]. Elle est même plutôt artificielle car elle avait surtout pour objectif de rétrograder les dépenses agricoles en les faisant apparaître comme une politique de second rang. Une fois cet objectif acquis, il est permis d'espérer que la prochaine présentation sera à la fois plus équilibrée et plus pédagogique.

Source : chiffres : cadres financiers 1999-2006 et 2007-2013 ; présentation et traitement auteur

 

C - La politique agricole commune

 

1 - La PAC, nœud de la négociation

 

La PAC sera au cœur de la prochaine négociation. Il faut voir dans cette situation le résultat d'une pression croissante et une opportunité longtemps attendue.

 

La PAC est, sans surprise, le principal objet de discorde, " the most controversial topic ". Le maintien d'un budget important [31]consacré à la PAC est souvent contesté. Car il y a deux façons de lire le budget. L'une, par division (diviser le montant de la PAC par habitant) : la PAC ne représente alors que " 100 € par Européen et par an ", selon la formule reprise par tous les ministres français de l'agriculture. L'autre, par addition (cumuler le montant des budgets PAC sur plusieurs années) : la PAC représente alors 1000 milliards € en 20 ans (en € constants 2009). 100 € pour la sécurité alimentaire, c'est peu ; 1000 milliards, c'est beaucoup. Les deux chiffres sont aussi exacts l'un que l'autre. Ils correspondent juste à deux perspectives politiques différentes.

 

L'utilisation des crédits est également discutée. À quoi ont servi les 1000 milliards versés à l'agriculture européenne depuis 20 ans? Pour restructurer, pour être compétitif, mais avec quel résultat ? Les " restructurés " sont encore trop nombreux et les " compétitifs " ne le sont jamais assez ! Il y a quelque chose d'incompréhensible. Pour tout le monde, y compris pour les principaux intéressés, toujours interloqués quand on annonce que la France reçoit 10 milliards €/ an. L'aide aux revenus, par le biais des droits de paiement unique (DPU), est discréditée. Elle est humiliante aux yeux des agriculteurs, qui, bien souvent, ne peuvent survivre sans cette aide européenne, et discutable pour le citoyen, (l'expression même de droit à paiement est très maladroite [32]), stupéfait devant cette sorte de rente européenne calculée de surcroît - au moins en France- sur des références historiques dépassées ! La sensibilité de l'opinion concernant la PAC est incontestablement très vive. Ni l'Union européenne, ni les États, ni le monde agricole n'ont su communiquer sur le budget communautaire. La crise agricole est avant tout une crise politique de légitimité [33]. La négociation qui s'ouvre paie 30 ans de négligences.

 

Même si cette année se présente de façon singulière. Jusqu'à présent, le budget de la PAC n'a jamais été vraiment discuté. Le budget agricole sur la période 1993-1999 fut imposé par la grande réforme de 1992. Le budget 2000-2006 fut marqué par l'émergence du 2e pilier. Et surtout, le budget 2007-2013 a été préparé par l'accord d'octobre 2002, qui dénouait l'élargissement mais qui sanctuarisait le budget agricole jusqu'en 2013. Ce ne sera pas le cas cette fois-ci. Pour de nombreux États membres, hostiles depuis des années à la PAC, la négociation qui s'ouvre offre une opportunité exceptionnelle - et en vérité, la première véritable " fenêtre de tir " depuis des années - d'en finir avec la PAC.

 

2 - La France en première ligne

 

La France et le budget de la PAC

 

En finir avec la PAC mais aussi en finir avec la France dans la PAC. Car la France a toujours fait figure de privilégié au sein de la PAC. A priori, il n'y a rien de surprenant à ce que la France, 1er pays agricole de l'UE, en soit aussi logiquement le 1er bénéficiaire, et à ce que la France, comme tout autre pays, ait choisi, depuis toujours, de privilégier le poste sur lequel elle avait le plus de retours : les dépenses agricoles.

 

Ce positionnement a eu cependant 3 défauts. Tout d'abord, sur les questions agricoles, la France a toujours privilégié une logique budgétaire au détriment d'une logique politique. La plupart des réformes de la PAC ont été, sur un plan strictement budgétaire, des succès pour la France : la réforme de 1992 s'est traduite par des retours supérieurs de plus de 1 milliard €/an et la réforme de 2003 a été préparée par l'accord d'octobre 2002 qui vaut à la France de recevoir 10 milliards €/an. Ce succès de 2002 a aussi son revers : en privilégiant une approche budgétaire de la PAC, la France a oublié la question fondamentale ; à quoi sert la PAC ? [34]

 

Mais cette priorité budgétaire pourrait se retourner contre elle. S'agissant des deux grandes réformes de la PAC des 10 dernières années, la France n'a pas fait les choix les plus judicieux. La France n'a pas su ou pas voulu prendre le tournant de la réforme de 1999 consacrée au développement rural et a toujours privilégié les aides de marché. Ainsi, la France reste puissante sur un segment en déclin et est pratiquement absente sur un segment en croissance [35]. La prochaine négociation montrera les limites de cette stratégie. Autre exemple : le choix de fonder les DPU sur des références historiques [36] avait le mérite de la simplicité mais il est aussi le plus critiquable : comment justifier 10 ans après que le montant des aides versées soit calculé sur le montant perçu il y a 10 ans ! C'est absurde et, de fait, intenable.

 

Enfin, la France s'est laissé enfermer dans le rôle du " profiteur " en choisissant de ne pas répondre aux critiques. Mais à force de se taire, les dépenses agricoles européennes sont passées aux yeux de tous comme des dépenses au profit des agriculteurs français et non comme des dépenses qui sont aussi au bénéfice des consommateurs européens, participant à l'indépendance et la sécurité alimentaire de l'Union européenne. La France doit retrouver une parole politique sur la PAC alors que cela fait des années qu'elle n'en a plus.

 

Comment se présente la négociation sur ce point ? La France sera, bien sûr, en première ligne pour défendre la PAC et son budget. L'enjeu est politique et budgétaire. La PAC est défendue et soutenue par la France depuis 50 ans, elle considère que l'indépendance et la sécurité alimentaire ne sont pas des objectifs " archaïques ". Le Président français a pris une position très ferme sur ce sujet [37]. L'enjeu budgétaire est également majeur. Les fonds communautaires représentent plus de 80 % des concours à l'agriculture française (hors dépenses sociales). Le cofinancement généralisé des dépenses agricoles - qui reviendrait en fait au transfert des dépenses européennes sur le budget des États membres - serait très coûteux pour la France [38]. Il y a en France, au niveau gouvernemental, une belle unanimité, sans doute unique en Europe, autour du monde agricole et de la PAC.

 

La fragilité de la position budgétaire

 

Derrière cette belle unanimité, plusieurs éléments peuvent fragiliser la position de la France. Il y a là encore des facteurs politiques et budgétaires qui jouent.

 

- Sur le plan politique, la défense de la PAC suppose une force de proposition crédible qui soit capable de rassembler les agriculteurs en interne et, plus encore, les États membres. Ces deux points sont loin d'être acquis d'avance.

 

Le discours professionnel reste souvent centré sur des arguments qui sont irrecevables à l'échelle européenne : la sortie de l'agriculture des négociations commerciales internationales, le retour à la préférence communautaire [39], voire " le refus de la logique de compétitivité ". L'issue de la négociation ne réside pas dans le repli mais dans la force de proposition. La division du monde agricole ne facilite pas la définition d'une position de la France. Les agriculteurs ne peuvent espérer la solidarité des citoyens s'ils ne parviennent pas à une solidarité interne.

 

Surtout, la France devra trouver des alliés pour défendre cette conception politique de la sécurité alimentaire et de l'alimentation. Il existe bien une sorte d' " oeillet vert " [40] rassemblant un noyau dur de pays agricoles favorables au maintien d'une PAC forte (Irlande, France, Espagne, Roumanie, Hongrie, Pologne entre autres). Mais rien n'est acquis. Beaucoup d'États, même parmi les pays agricoles, sont encore sur une position ambiguë. Le camp des " pro-PAC " devra affronter un  camp des " anti-PAC".

 

- Sans le positionnement radical du Président français, certains arguments budgétaires auraient pu inciter à penser que la PAC serait aussi moins défendue que par le passé.

 

Tout d'abord, la négociation budgétaire impose un arbitrage entre priorités et entre secteurs. S'il advenait que la France doive choisir entre la PAC et les fonds structurels, rien ne dit que l'arbitrage soit en faveur de la première. Sur le strict plan budgétaire, les 2 dotations sont peu comparables ; la PAC représente 10 milliards €/an et les fonds structurels en métropole 10 milliards en 7 ans. Cependant, la PAC est versée aux agriculteurs sans aucune marge de manœuvre et avec un bénéfice politique très faible, tandis que les fonds structurels sont entre les mains des régions pour soutenir leurs propres projets de développement. On peut comprendre que les élus locaux aient quelques hésitations à choisir.

 

Autre argument et non des moindres, la France a toujours soutenu la PAC parce qu'elle y trouvait aussi un intérêt budgétaire. Elle était très largement bénéficiaire dans la mesure où ses retours étaient supérieurs à sa contribution au budget. Cet intérêt s'émousse, voire disparaît. La France évolue dans un mouvement de ciseau budgétaire avec la lente montée de la part de la France dans le financement du budget, à la suite des aménagements décidés dans le partage des ressources propres, et la régression de la France dans les dépenses agricoles du fait de la montée en puissance des nouveaux Etats membres au sein de la PAC de 12 % en 2007 à 17,7 % en 2013. Ainsi, à partir de 2012, la part de la France dans les dépenses agricoles devrait tomber à moins de 16%, soit -1% que sa part dans le financement du budget. Ainsi, la France n'aura bientôt plus d'intérêt budgétaire à défendre la PAC Cela ne peut justifier à lui seul un changement de position nationale, comme l'a indiqué le Président français, mais cette inflexion ne doit pas être occultée.

 

3 - Quelques pistes de négociation

 

- Sur le strict plan budgétaire, le montant global du budget agricole sera le nœud de la négociation. Le futur budget de la PAC peut être abordé de deux façons : soit en valeur, soit en proportion dans l'ensemble du budget de l'Union européenne. Le rapport Sapir de 2003 avait proposé de ramener la part du budget agricole à 15 % du budget communautaire. Une solution de compromis serait de conserver un budget relativement conséquent, voire voisin du budget actuel (ce qui pourrait satisfaire le camp des " pro-PAC "), tout en réduisant sensiblement la part du budget PAC dans l'ensemble du budget de l'Union européenne (ce qui donnerait satisfaction aux " anti-PAC ").

 

Il y a deux solutions pour y parvenir : soit en maintenant le budget en volume dans un budget global en augmentation, ce qui aurait pour effet de baisser la part de la PAC, soit en distinguant au sein des dépenses agricoles actuelles, ce qui revient à l'agriculture proprement dite, de ce qui ressort du développement rural. Le " 2e pilier de la PAC " est une sorte de fourre-tout budgétaire qui mêle dépenses sociales (formation, retraites), dépenses d'aménagement rural (assainissement, équipements touristiques), dépenses environnementales (mesures agroenvironnementales, boisement,), qui, en réalité, sont très éloignées des dépenses agricoles stricto sensu. Les dépenses de développement rural étaient d'ailleurs rattachées autrefois aux dépenses structurelles destinées au développement des territoires et non aux dépenses agricoles. Le rattachement du développement rural aux dépenses agricoles résulte d'un choix politique pour équilibrer la PAC. [41] Un nouveau découplage entre dépenses agricoles et dépenses de développement rural permettrait d'identifier ce qui revient vraiment à l'agriculture, les autres dépenses étant alors renvoyées vers les dépenses de cohésion. La part des vraies dépenses agricoles pourrait alors être ramenée à un seuil plus acceptable pour tous de 30%, voire 25% du budget total.

 

- L'autre débat budgétaire porte sur la répartition des aides. Le budget agricole est articulé autour de 3 volets : les aides directes aux revenus (sous forme de DPU), les interventions, et les dépenses de développement rural. L'Union européenne n'évitera pas un débat sur la pérennité des aides directes aux revenus. 3 sujets seront examinés : la répartition des aides entre bénéficiaires, voire l'écrêtement des aides [42], l'abandon des références historiques pour calculer les DPU, et la modulation du niveau des aides en fonction des prix du marché [43]. Le volet développement rural qui véhicule une image " écologique et citoyenne " paraît relativement préservé. La question centrale est celle des interventions.

 

L'intervention communautaire affectée à la gestion des marchés (stockage, restitutions) est héritière de l'ancienne PAC et focalise les débats entre Etats membres. Le débat est de moins en moins budgétaire car la part des dépenses d'intervention au sein de la PAC ne cesse de diminuer et les soldes nets des Etats contributeurs les plus hostiles à la PAC ont été stabilisés, tandis que la France, qui voit à son tour son solde se creuser, ne peut plus faire figure d'Etat privilégié. Ainsi, le débat budgétaire s'émousse. L'opposition à la PAC est de plus en plus politique, voire idéologique.

 

L'argument de la sécurité sanitaire et alimentaire ne manque pas de force. Une prétendue spécialisation européenne sur le secteur de l'industrie et des services laissant l'alimentation des Européens à la merci de fournisseurs extérieurs est non seulement un leurre, mais aussi un danger pour les pays non européens : en cas de tension sur les prix, l'Europe pourra toujours payer son alimentation tandis que les Etats moins prospères n'auront plus les moyens de le faire.

Le défi politique suppose surtout de redonner une légitimité à une politique qui n'en a plus. La PAC ne sera sauvée que si l'opinion européenne considère que la PAC lui est utile. Pas seulement profitable aux agriculteurs - elle l'est de moins en moins - mais utile aux consommateurs. La France doit donc mener un combat politique.  Il y a bien longtemps que l'agriculture a cessé d'être une question agricole. Si l'agriculture va de crise en crise, c'est que ni les dogmes libéraux ni le mythe d'une PAC administrée ne fonctionnent. Ou que quelque chose manque [44]. Argent ? Evidemment non. Plutôt une erreur d'aiguillage. La PAC qui, de réforme en réforme, s'est concentrée sur les producteurs en tentant - sans succès - de garantir leurs revenus, s'est éloignée de la société qu'elle était censée servir. L'essentiel est maintenant de renouer avec l'opinion. La PAC, politique agricole commune, gagnerait à devenir une politique agricole et de l'alimentation (PAAC) qui s'attacherait à donner du sens, quitte à rééquilibrer les aides européennes en direction de secteurs plus accessibles au citoyen. L'élevage et le secteur des fruits et légumes, parents pauvres des soutiens communautaires, pourraient devenir les secteurs phares de l'intervention européenne [45]

Mais même corrigée et  réorientée, la PAC restera sous le feu des critiques de ses plus farouches opposants. Il s'agit bien entendu du Royaume-Uni dont les représentants n'hésitent pas à présenter la PAC comme " la politique européenne le plus détestée de toutes ".

D - Le financement et la correction britannique

 

1 - Les questions générales

 

Le traité de Lisbonne précise que le cadre financier pluriannuel porte non seulement sur les plafonds de dépenses, mais aussi sur " toute autre disposition utile au bon déroulement de la procédure budgétaire annuelle ". Le financement du budget communautaire entre dans cette catégorie. 3 sujets seront certainement débattus.

 

Le premier concerne l'articulation générale du financement du budget. Car l'inertie évoquée concernant les dépenses s'applique également aux recettes. Depuis la création en 1988 de la ressource PNB, qui fait porter la charge et l'équilibre du budget communautaire sur les États membres [46], le système de financement est resté pratiquement identique à l'exception de corrections accordées à quelques contributeurs nets. La négociation budgétaire pourrait être l'occasion de quelques révisions.

Le maintien d'une ressource TVA ne se justifie plus. La ressource TVA, créée en 1985, n'est en rien l'équivalent européen d'une TVA nationale avec application d'un taux sur une assiette (la valeur ajoutée), mais un système effroyablement complexe [47] qui conduit à définir un taux avec 15 chiffes après la virgule (!) alors que, au final, le produit sera collecté sur les recettes fiscales de l'État membre, exactement comme la ressource PNB. Ainsi, rien ne distingue la ressource TVA de la ressource PNB, hors ce mode de calcul délirant ! La sagesse serait de fusionner les deux ressources et de ne laisser subsister que la ressource PNB après, le cas échéant, des correctifs si cette fusion entraînait des transferts de charges trop importants.

 

Le mode d'équilibre du budget est aussi curieux. Dans le système actuel, l'autorité budgétaire décide de la dépense mais ne vote pas la recette ! En effet, le financement et l'équilibre du budget communautaire sont assurés par un prélèvement sur les recettes fiscales des États membres. Dans le système actuel, la subsidiarité appliquée au budget consiste à prévoir une dépense communautaire en en laissant la charge aux États membres ! Il serait concevable de renverser cette logique et de prévoir une contribution minimale des États membres en laissant à la charge de l'Union européenne le soin de trouver des recettes propres si elle juge que les contributions nationales sont insuffisantes pour répondre aux enjeux du moment. [48] Cela passerait par la création d'une nouvelle ressource propre, aux mains de l'autorité budgétaire et donc du Conseil et du Parlement européen. Seule la création d'une ressource propre authentique - un impôt européen - donnera une vraie responsabilité à l'autorité budgétaire. [49] Si celle-ci veut développer une nouvelle action, ce sera à elle d'en trouver le financement et d'en assumer la responsabilité. Ce qui n'est actuellement pas le cas.

 

Enfin, s'il ne saurait être question de renoncer au " financement intégral par des ressources propres " prévu par le traité, qui garantit l'équilibre automatique du budget sans recourir à l'emprunt, cette dernière faculté, encore exclue, sera certainement débattue. Une fois le financement du budget courant totalement assuré, l'emprunt pourrait sans doute constituer un mode de financement accessoire pour financer des opérations à caractère exceptionnel. Une fois encore, la crise monétaire du printemps 2010 devrait faire évoluer les pratiques budgétaires les plus installées.

 

Mais, bien entendu, la question centrale du financement sera celle de la correction britannique [50].

 

2 - La correction britannique

 

La correction britannique a longtemps soudé la plupart des États membres, notamment l'Allemagne et la France. L'argumentation a été maintes fois développée. Si la création de la correction pouvait se justifier en 1984, quand elle a été décidée au Conseil européen de Fontainebleau, les facteurs à l'origine de la correction ont perdu de leur pertinence. Le Royaume-Uni prend place parmi les États riches de l'Union européenne et la critique britannique sur le poids de la PAC, dont effectivement elle ne profitait pas en 1984, s'est estompée puisque compte tenu de l'évolution de la structure du budget, " seul un peu plus du tiers du solde net négatif britannique trouve son origine dans le secteur agricole ". [51] Ce n'est qu'après une dénonciation généralisée en 2005 que le Royaume-Uni a accepté un aménagement de sa correction, modeste puisque le pays a seulement accepté que le rabais n'augmente pas !

 

La négociation budgétaire ne peut pas faire l'impasse sur cette question. La nouvelle configuration budgétaire modifie pourtant un peu les termes du débat. Les décisions du Conseil relatives aux ressources propres successives ont aménagé le partage du financement de la correction britannique de plusieurs États. C'est par ce biais, en obtenant une diminution dans leur financement de la correction britannique, que leur contribution totale au budget de l'Union européenne a baissé. En d'autres termes, ils ont obtenu satisfaction et ont donc moins de raisons de s'opposer à la correction britannique puisqu'ils la financent beaucoup moins. Pour l'Allemagne, la correction britannique est de moins en moins un problème.

 

Tout le contraire de la France qui assure désormais à elle seule 27% du montant du rabais britannique (qui se monte au total à 5 milliards € en moyenne sur les 3 dernières années 2008/10 soit 1,37 milliard pour la France). Ainsi, non seulement, chaque Français contribue bien plus qu'un Britannique au budget de l'Union européenne (30% de plus en contribution nette, 50% de plus en contribution brute) mais il verse davantage au financement de la correction britannique que le Britannique ne contribue à la PAC [52]. La France trouvera moins d'alliés auprès des anciens grands contributeurs nets qu'auprès des nouveaux - le Danemark, l'Italie et même l'Espagne qui deviendra contributeur net à après 2013 - ainsi qu'auprès des nouveaux États membres, obligés de rembourser une partie de la contribution britannique. La correction britannique paraît plus injustifiable que jamais. Le Royaume-Uni est le seul pays de l'Union européenne qui ne finance pas le budget de l'Union européenne proportionnellement à sa richesse [53]. Pire, la première dépense européenne au Royaume-Uni ne vient pas des politiques communes (agriculture, cohésion, recherche, etc.) mais d'un chèque des autres États membres. Il y a là une incontestable anomalie budgétaire.

 

 

Conclusion :

 

Si le budget d'un Etat est avant tout la traduction d'une politique, le budget communautaire est aussi l'expression d'une identité et d'une solidarité. La construction  européenne a toujours progressé par crises successives. Tout indique que ce sera encore le cas cette fois-ci et que la prochaine négociation budgétaire sera encore plus rude et plus tendue que les précédentes. Il y a chez tous les Etats membres, autant d'attentes que de blocages prévisibles. La France, plus que jamais, sera en première ligne. Elle sera même probablement la première visée par les attaques de quelques Etats membres et les arbitrages internes, qui paraissent inévitables entre dépenses agricoles et dépenses structurelles par exemple, seront douloureux. Il faut s'attendre à des dramatisations, à des menaces, à des crispations, à des postures idéologiques et des calculs sordides, à des alliances et à leurs retournements. La négociation budgétaire sera captivante pour tous ceux qui la suivront en observateurs, et éreintante pour ceux qui la mèneront jusqu'à, comme toujours, un accord final.


[1] Les crédits d'engagement (CE) correspondent à des autorisations de dépenses. Les crédits de paiement (CP) correspondent à aux dépenses qui seront effectivement déboursées dans l'année. Les ressources, c'est-à-dire, in fine, les prélèvements sur les Etats membres, s'ajustent aux CP et non aux CE. Le débat sur le montant du budget porte donc avant tout sur les CP.
[2] La juxtaposition de références à des données macro économiques différentes qui résultent de conventions de comptabilité internationale (PIB, PNB, RNB...) est source de confusions. La différence entre produit national brut (PNB) et produit intérieur brut (PIB) tient à la prise en compte, dans le PNB, des revenus nets des échanges avec l'extérieur tirés de la propriété intellectuelle (brevets). En Europe, l'écart entre les deux est de l'ordre 0,5%. La différence entre revenu national brut (RNB) et produit national brut (PNB) vient d'une différence de logique : le PNB est calculé à partir de la production (valeur ajoutée) tandis que le RNB part d'une logique de revenus (salaires) mais le montant total est le même (voir détails dans Laffineur, Vinçon, op. cit. page.181)
[3] Le cadre financier actuel a déterminé un plafond des crédits de paiement à 0,995 % du RNB, en moyenne annuelle sur 7 ans, mais des variations annuelles sont possibles autour de cette moyenne. En 2010, les montants des CE et des CP représentent respectivement 1,20% et 1,04% du RNB communautaire.
[4] Alain Lamassoure, Sénat, actualités de la Commission des affaires européennes, 1er octobre 2009. En 2009, le déficit du budget français s'est établit à 139 milliards €.
[5] Cf. audition au Sénat d'Alain Lamassoure, président de la Commission des budgets du Parlement européen, http://www.senat.fr/europe/r01102009.html
[6] En occultant le fait que toute dépense communautaire est financée au préalable par un prélèvement sur les Etats.
[7] Le plafond de dépenses est dédoublé, en crédits d'engagements et en crédits de paiement. (CP). C'est sur les CP que porte le débat sur le montant du budget.
[8] Ce niveau, même largement théorique puisqu'il n'a jamais été ni atteint ni approché est périodiquement modifié pour tenir compte des règles de comptabilité internationale. Il était fixé à l'origine, en 1992, à 1,27 % du produit national brut. En 2002, il a été fixé à 1,24 % du revenu national brut après adaptation du cadre comptable communautaire aux nouvelles normes internationales de comptabilité (dit SEC 95). Il a été à nouveau abaissé en mars 2010 pour tenir compte de l'évaluation des services d'intermédiation financière. Chaque ajustement comptable a pour effet d'augmenter le PNB/RNB (le dénominateur) et par conséquent de réduire la part du budget communautaire (en numérateur).
[9] Et même 1,24% en incluant la budgétisation des crédits du fonds européen de développement (FED) qui sont hors budget communautaire, et qui sont financés par des contributions nationales classiques La budgétisation, qui communautariserait et modifierait le partage des financements a été, pour le moment, refusée.
[10] Alain Lamassoure, audition au Sénat, 1er octobre 2009.
[11] Commission des affaires européennes du Sénat. http://www.senat.fr/ue/pac/E4533.html
[12] En 2003, pour la préparation du cadre financier pluriannuel 2007-2013, les 6 principaux États contributeurs nets avaient commencé par fixer un plafond (1% du PIB communautaire) puis avaient procédé à un arbitrage entre dépenses pour tenir sous ce plafond
[13] Communiqué de la Présidence de la République sur les perspectives financières après 2006.
[14] Cf. audition de Dacian Ciolos, commissaire européen à l'agriculture, Sénat, 28 avril 2010.
[15] La négociation budgétaire devrait s'écouler entre le 2e semestre 2010 et le 2e semestre 2011 soit sous présidence successive de la Belgique, de la Hongrie et de la Pologne. Les difficultés de la Belgique renforcent le pouvoir de la Commission.
[16] Le rapport d'experts coordonnés par André Sapir publié en juillet 2003 sous le titre " agenda pour une Europe en expansion " demandait une réorientation complète des dépenses en ramenant notamment les dépenses agricoles et structurelles de 80 % à 30 % du budget.
[17] " " Mieux dépenser, cela doit être notre mot d'ordre pour le prochain budget communautaire ", François Fillon, Déclaration du 7 septembre 2009 en Italie.
[18] Cela renvoie à la problématique des mini-budgets, souvent évoquée mais jamais réellement traitée.
[19] Les grandes politiques communautaires, qu'il s'agisse de la PAC et de la politique de cohésion, sont autocentrées sur l'État membre. Les politiques réellement internationales sont très rares : la politique de recherche, Erasmus.
[20] 260 milliards en incluant les dépenses administratives.
[21] Espagne, Italie, Portugal et Grèce, à eux quatre, totalisent 106 milliards € sur la période 2007-2013.
[22] L'Allemagne et la France en particulier restent éligibles aux fonds structurels pour des montants qui sont loin d'être négligeables, respectivement 26,7 et 14,3 milliards € sur la durée de la programmation.
[23] Au cours des quatre programmations successives depuis 1988, les fonds structurels représentent 1000 milliards € (en euros actualisés).
[24] Alain Lamassoure, audition au Sénat, op. cit.
[25] Les pays de la cohésion sont les pays bénéficiaire du fonds de cohésion, réservé aux pays dont le revenu par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire.
[26] Une délicate attention d'origine anglo-saxonne qui désigne les 4 pays de la zone euro les plus vulnérables aux pressions des marchés financiers : le Portugal, l'Irlande, la Grèce et l'Espagne.
[27] N.-J. Brehon, " La Grèce, les PIGS et l'argent de l'Europe ", La Tribune, 17 février 2010.
[28] A. Lamassoure, audition au Sénat 1er octobre 2009.
[29] Même les montants affichés sont porteurs de sens. Tout se calcule au milliard près : la nouvelle rubrique 1 croissance durable est la plus dotée de toutes : 382 milliards contre 371 milliards pour la rubrique conservation et gestion des ressources naturelles; la sous-rubrique 1B cohésion est plus dotée que la sous-rubrique dépenses de marchés et paiements directs,: 308 milliards contre 293 milliards €.
[30] Les deux rubriques principales sont écrasantes, elles représentent à elles seules 88% du total de la programmation. La structure adoptée est cependant meilleure que celle de la version initiale de la Commission qui proposait d'articuler les dépenses en deux grandes sous-rubriques " croissance durable " et " développement durable ". Une subtilité à laquelle le Conseil européen a -heureusement- renoncé.
[31] 58,2 milliards €, toutes dépenses confondues, en 2010 soit 41,1 % du budget total en CE et 47,3 % du budget en CP.
[32] Les agriculteurs sont la seule catégorie professionnelle à être ainsi soutenue financièrement par le budget communautaire.
[33] cf. N.-J. Brehon, L'agriculture européenne à l'heure des choix : pourquoi croire à la PAC ?, Note de la Fondation Robert Schuman, n°44, octobre 2008.
[34] cf. N.-J. Brehon, " Le divorce paysan entre Sarkozy et les agriculteurs ", lemonde.fr, 23 mars 2010.
[35] La France bénéficie de 19,4 % des dépenses agricoles européennes du 1er pilier (le plus contesté) et 7,9 % des dépenses du 2e pilier (le plus soutenu sur le plan politique).
[36] Les Droits de paiement unique – DPU- sont des aides directes aux revenus attribuées aux agriculteurs, indépendamment des productions (conformément au principe du découplage). Le système a été décidé en 2003 et mis en œuvre en 2005. Par commodité, pour éviter d'ouvrir un débat sur la redistribution des aides, la France a choisi de calculer les DPU par références aux aides versées antérieurement – les références historiques-, soit, en fait les aides reçues entre 2000 et 2002.
[37] " Je suis prêt à aller à une crise en Europe plutôt que d'accepter le démantèlement de la politique agricole commune", Nicolas Sarkozy, 24 mars 2010.
[38] Le cofinancement représenterait une dépense supplémentaire de plusieurs milliards €. Une partie de l'aide européenne deviendrait une aide nationale sans que l'économie réalisée sur la PAC allège la contribution française au budget communautaire puisque cette économie sur la dépense agricole serait réorientée vers d'autres secteurs.
[39] L'argument est repris par le ministre de l'alimentation et de l'agriculture, notamment lors du débat au Sénat sur la loi de modernisation de l'agriculture le 18 mai 2010 :" il n'est pas question de céder sur la préférence communautaire (...) c'est le 1er point du traité de Rome sur la PAC ". L'argument est cependant erroné L'article 39 sur le fonctionnement de l'UE héritier du traité de Rome ne faisant, en aucun cas, référence à la préférence communautaire.
[40] L'oeillet de tapissier, de forme oblongue. L'expression est d'Hubert Haenel, alors président de la commission des Affaires européennes du Sénat.
[41] Outre la volonté de limiter les aides de marché (1er pilier), l'affirmation de ce 2e pilier permettait d'introduire le Parlement européen dans la définition des dépenses agricoles. En effet, jusqu'au traité de Lisbonne, les dépenses de marché ont été des dépenses obligatoires maîtrisées par le Conseil, tandis que les dépenses du 2e pilier étaient des dépenses non obligatoires, sur lesquelles le Parlement européen avait le dernier mot. Cette distinction a été supprimée par le traité de Lisbonne.
[42] La répartition des aides, désormais publique, montre une très grande inégalité entre bénéficiaires. Quelques uns recevant jusqu'à plusieurs centaines de millions € par an. Dans un souci égalitaire, il a été suggéré de fixer des maxima pour les plus gros bénéficiaires. Cette idée a cependant été rejetée par les pays des dits bénéficiaires, notamment au Royaume-Uni.
[43] Dans le système actuel, en application du principe de découplage, les DPU sont constants, indépendants des productions et des prix. Ainsi, même quand les prix sont élevés et rémunérateurs, les agriculteurs conservent leurs DPU. Ce système de rente n'est pas défendable. Le droit budgétaire actuel ne permettrait pas cette modulation mais l'argument n'est pas insurmontable si l'on veut bien s'attacher à modifier les règles de report de crédits.
[44] Cf. N.-J. Brehon, tribune sur le site d'information Slate.fr, 27 octobre 2009.
[45] Cf. N.-J. Brehon, " Le bilan de santé de la PAC ", in L'état de l'Union 2009. Rapport Schuman sur l'Europe, Éditions Lignes de Repères, Paris, 2009, pp. 63-70.
[46] La ressource PNB est calculée par différence entre les dépenses à financer et les autres recettes (Ressources propres traditionnelles et TVA) ce qui garantit par conséquent l'équilibre du budget. La ressource PNB est répartie entre les États membres en proportion de leur part dans le PNB communautaire. Elle est ensuite prélevée sur les recettes fiscales des États membres comme une contribution nationale classique.
[47] L'assiette est formée à partir du produit net de TVA perçu par un État membre divisé par le taux moyen de TVA appliqué dans l'État (exemple, pour la France : produit de TVA =130 milliards, divisé par un taux moyen autour de 18%, moyenne pondéré des trois taux de TVA appliqués en France soit 722 milliards). Un taux est appliqué à cette assiette. Le taux normal est de 0,5% mais l'assiette est écrêtée à 50% du PNB de l'État et doit prendre en compte toute une série d'ajustements techniques liés notamment aux mécanismes de calcul de la correction britannique, etc. Les services de la Commission calculent ainsi des taux intermédiaires dits taux uniformes et des taux gelés à 15 chiffres après la virgule. Ainsi, dans le budget 2008, le taux gelé est de 0,168875772152444%) ; le taux uniforme est de 5%-0,168875772152444% = 0,33112422784756%
[48] Une solution simple consisterait à prévoir que les Etats membres affectent 1% de leur PNB au budget communautaire – hors ressources propres traditionnelles- laissant à l'Union européenne la responsabilité d'ajuster le niveau des ressources par des ressources fiscales propres - ressources propres traditionnelles qui sont les seules ressources qui résultent de la construction européenne ou nouvelle ressource à créer.
[49] Cf. A. Lamassoure, " Vers un impôt européen ? L'Europe en quête d'un vrai budget ", in L'état de l'Union 2010. Rapport Schuman sur l'Europe, Paris, Editions Lignes de Repères, 2010, pp. 73-76.
[50] Le Conseil européen de Fontainebleau de 1984, a posé le principe selon lequel "tout État membre supportant une charge budgétaire excessive au regard de sa prospérité relative est susceptible de bénéficier, le moment venu, d'une correction ". En application de cet accord, le Royaume-Uni se voit rembourser chaque année les deux tiers de l'écart entre sa contribution au budget de l'UE et le montant des dépenses communautaires en sa faveur. Le montant moyen de la correction a été de 5,3 milliards € sur la période 2008-2010.
[51] Annexe au projet de loi de finances 2010 Relations financières avec l'UE, p.150.
[52] Voir annexe 7.
[53] En moyenne sur 3 ans (2008-2010), la part du Royaume-Uni dans le financement du budget de l'UE est de 10% alors que sa part dans le PNB communautaire (12 500 milliards d'€) est de 13,7%.

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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