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Recul de l'UDC et percée des "petits" partis du centre aux élections fédérales suisses

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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24 octobre 2011
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Grande favorite du scrutin, l'Union démocratique du centre (UDC/SVP) a enregistré pour la première fois depuis 20 ans un recul aux élections fédérales qui se sont déroulées en Suisse le 23 octobre. Le parti populiste dirigé par Toni Brunner a recueilli 25,9% des suffrages, soit au-dessous des 30% qu'il s'était fixé comme objectif, un résultat qu'aucun parti suisse n'a jamais atteint depuis 1919, année de l'entrée en vigueur du scrutin proportionnel. Avec 55 sièges au Conseil national (- 7 par rapport aux précédentes élections fédérales du 21 octobre 2007), l'UDC/SVP demeure toutefois le premier parti politique helvétique. "La progression de l'Union démocratique du centre de ces dernières années est stoppée" a déclaré le politologue de l'université de Fribourg, Gilbert Casasus, ajoutant "le premier enseignement de ces élections fédérales, c'est la stabilité du système politique suisse. Il n'y a pas eu de changement énorme". Le Parti socialiste (PSS/SPS) de Christian Levrat est arrivé en 2e position du scrutin. Il a obtenu 18,1% des voix et 44 sièges (+ 1). Le parti est ainsi le seul à ne pas souffrir de l'émergence des nouveaux partis du centre.

Les partis du centre poursuivent leur déclin. Le Parti radical-démocratique (PRD/FDP) a recueilli 15,3% des suffrages et 31 sièges (=). Son président, Fulvio Pelli, a été réélu de justesse dans le Tessin. "Les Suisses nous ont sanctionnés. Il y a un problème de perception. Notre parti fait un travail pragmatique, mais la population a des préjugés négatifs" a-t-il déclaré à l'annonce des résultats. Le Parti démocrate-chrétien (PDC/CVP) de Christophe Darbellay a obtenu 13,1% des voix et 28 sièges (- 3). Le changement de stratégie du parti qui a choisi de renoncer au nucléaire n'a donc pas payé dans les urnes. Le Parti radical-démocratique et le Parti démocrate-chrétien ne parviennent pas à stopper l'érosion dont ils sont victimes depuis plusieurs années. Les électeurs se détournent de partis de plus en plus éloignés de leur base et porteurs d'un discours insuffisamment clair et trop peu en phase avec l'évolution de la société.

Grands bénéficiaires de ces bouleversements : le Parti vert-libéral (GLP/VL), écologiste et favorable au libéralisme en matière économique créée en 2007 par Martin Bäumle, et le Parti bourgeois-démocratique (PBD/BDP), parti issu de la scission avec l'UDC/SVP, créé en 2008 et dirigé par Hans Grunder, qui ont recueilli respectivement 5,9% (12 sièges, + 9) et 5,2% des suffrages (9 sièges, + 9).

Les Verts libéraux, surtout présents en Suisse alémanique (une seule élue en Suisse romande), pourront former leur propre groupe parlementaire. "Ces partis bénéficient de l'attrait de la nouveauté et ils n'ont encore rien fait de mal" a souligné Georg Lutz, politologue du Centre de compétences en sciences sociales de l'université de Lausanne. "Ces partis partagent à 80-90% la même politique que le Parti démocrate-chrétien, mais ils sont nouveaux, donc très sexy" a renchéri le président du PDC/CVP, Christophe Darbellay. "J'espère que nous pourrons continuer à travailler de manière constructive avec ces nouveaux partis" a-t-il ajouté. Le Parti vert-libéral et le Parti bourgeois-démocratique se retrouvent en position de faiseurs de rois.

Autre surprise de ces élections fédérales : le revers essuyé, notamment dans les cantons alémaniques, par le Parti écologiste-Les Verts (PES/GPS) dirigé par Ueli Leuenberger. Il a obtenu 7,9% des voix, bien loin des 10% qu'il visait, et 13 sièges (- 7), un résultat qui sonne le glas de ses ambitions pour le Conseil fédéral. Avec le score des écologistes, la gauche sort donc affaiblie des élections fédérales du 23 octobre.

"Entre les socialistes à gauche et l'Union démocratique du centre à droite émerge une nouvelle force au centre. Un coup d'arrêt à la polarisation qui a marqué la politique suisse cette dernière décennie. Une première aussi dans les annales de la Confédération, qui a coûté très cher aux Verts et aux partis gouvernementaux" peut-on lire dans l'éditorial du quotidien suisse La Tribune de Genève. En ces temps de crise économique internationale, les Suisses ont donc marqués leur rejet des partis traditionnels. Le journal Le Temps explique ainsi le recul de l'UDC/SVP : "Le parti renvoie l'image d'une droite dure au moment où le pays devine qu'il faudra trouver des solutions au centre pour faire face à une situation économique qui s'annonce de plus en plus difficile et incertaine".

La participation s'est élevée à 49,76%, soit près d'un point de plus (0,96) que celle enregistrée lors des précédentes élections fédérales du 21 octobre 2007. Il s'agit en outre de la plus importante participation depuis 36 ans.

La stagnation de l'UDC/SVP est en partie une conséquence de la scission du parti en 2008. Sous l'impulsion d'Eveline Widmer-Schlumpf, l'aile modérée du parti a quitté l'UDC/SVP pour former le Parti bourgeois-démocratique. Le parti populiste semble avoir également subi la concurrence de deux partis nationalistes locaux : la Ligue des Tessinois (LEGA), mouvement protestataire de droite dirigé par Giuliano Bignasca, qui a remporté 2 sièges au Conseil national et le Mouvement citoyen genevois (MCG), hostile à la présence des travailleurs frontaliers français, qui a gagné 1 siège.

Au Conseil des Etats, les résultats du 1er tour de scrutin donnent 8 sièges au Parti socialiste, 7 au Parti radical-démocratique et 7 au Parti démocrate-chrétien. Le Parti écologiste-Les Verts remporte 4 sièges. L'UDC/SVP avait envoyé plusieurs de ses poids lourds – Christoph Blocher, Toni Brunner et Caspar Baader – aux élections du Conseil des Etats. Mais le mode de scrutin – majoritaire – à la chambre haute ne favorise pas les partis extrémistes. A Zurich, l'ancien conseiller fédéral et vice-président de l'UDC/SVP, a échoué à conquérir un siège. A Saint-Gall, le président de l'UDC/SVP, est en ballotage.

Un 2e tour aura lieu dans 13 des 26 cantons : dans le Valais, au Tessin, à Berne, à Zurich, à Lucerne, à Vaud, à Schaffhouse, à Argovie, à Uri, à Schwyz, à Soleure, à Thurgovie et Saint-Gall.

Le nouveau parlement sera chargé d'élire le 14 décembre les 7 membres du Conseil fédéral, organe du pouvoir exécutif en Suisse. Après les résultats de ces élections fédérales, le scrutin sera très ouvert. Rappelons que la chef du département fédéral (ministère) des Affaires étrangères et actuelle présidente de la Confédération helvétique Micheline Calmy-Rey (PSS/SPS) a annoncé son intention de ne pas se représenter. Les deux conseillers fédéraux libéraux-radicaux – Johann Schneider-Amman, actuel chef du département fédéral de l'Economie et Didier Burkhalter, chef du département fédéral de l'Intérieur – sont désormais menacés alors qu'Eveline Widmer-Schlumpf (chef du département fédéral des Finances) (PBD/BDP) pourrait finalement conserver son siège.

"Le parlement n'a jamais élu le gouvernement dans une telle configuration. Le moment est propice pour trouver une nouvelle formule magique" écrit La Tribune de Genève.

Source : Site internet de la chaîne de télévision SFR

(http://www.entscheidung11.sf.tv/Resultate )

Source : Site internet de la chaîne de télévision SFR

(http://www.entscheidung11.sf.tv/Resultate/Staenderat )

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