Election présidentielle en Lituanie Le point à une semaine du scrutin

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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11 mai 2009
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Le 1er tour de l'élection présidentielle se déroulera le 17 mai prochain en Lituanie. Un peu plus de 2,5 millions d'électeurs devront désigner le successeur du Chef de l'Etat sortant, Valdas Adamkus, qui ne se représente pas. Si aucun candidat ne recueille la majorité des suffrages lors du 1er tour, les électeurs devront départager les deux personnalités arrivées en tête lors d'un 2e tour de scrutin qui sera organisé le 7 juin prochain, soit le même jour que les élections européennes.

7 personnes sont officiellement en lice pour cette élection présidentielle:

- Dalia Grybauskaite, 53 ans, ancienne ministre des Finances (2001-2004) du gouvernement dirigé par Algridas Brazauskas et actuelle Commissaire européenne au Budget et à la Programmation financière. Candidate indépendante, elle a reçu le soutien du Premier ministre Andrius Kubilius et des partis l'Union de la patrie-Conservateurs et l'Union libérale-Union du centre, membres de l'actuelle coalition gouvernementale ;

- Algirdas Butkevicius, 50 ans, candidat du Parti social-démocrate (LSP) dont il est le président et successeur en 2004 de Dalia Grybauskaite au ministère des Finances ;

- Valentinas Mazuronis, 55 ans, candidate de Pour l'ordre et la justice (TT) dirigé par l'ancien Président de la République Rolandas Paksas, destitué de sa fonction de Chef de l'Etat par le Seimas le 6 avril 2004;

- Kazimiera Danute Prunskiene, 61 ans, ancien Premier ministre (1990-1991), soutenue par l'Union paysanne populaire (LVLS) et candidate pour la 3e fois (2002 et 2004) à la magistrature suprême ;

- Loreta Grauziniene, candidate du Parti du travail (DP) dirigé par le milliardaire d'origine russe Viktor Ouspaskitch ;

- Ceslovas Jezerkas, général de l'armée qui se présente en candidat indépendant ;

- Waldemar Tomaszewki, président de l'Action électorale polonaise (LLRA) représentant la minorité polonaise de Lituanie.

Dalia Grybauskaite est la grande favorite de toutes les enquêtes d'opinion dans lesquelles elle domine largement ses adversaires. Selon les sondages, elle devrait être élue lors du 1er tour le 17 mai. Nommée à Bruxelles, la Commissaire européenne est soutenue par des personnalités issues des deux bords de l'échiquier politique. Elle se déclare apolitique, n'a jamais appartenu à un parti, tient sur certains sujets des discours conservateurs et sur d'autres des idées social-démocrates ou libérales. Son passé communiste (après avoir été formée en Russie de 1976 à 1983, année où elle a obtenu un diplôme d'économie à l'université Zdanov de Léningrad, Dalia Grybauskaite est devenue secrétaire de l'Académie des sciences de la République socialiste de Lituanie à partir de 1983 et a enseigné l'économie au Collège communiste de Vilnius de 1983 à 1990) est accepté par la grande majorité des Lituaniens.

Aucun clivage idéologique n'est donc véritablement perceptible dans cette campagne présidentielle, ce que certains analystes regrettent, allant jusqu'à faire un parallèle entre ce scrutin et l'élection présidentielle russe où l'on comptait également plusieurs candidats mais où tout le monde connaissait le vainqueur avant le jour du vote.

Le juriste Vitas Vasiliauskas, qui a travaillé avec Dalia Grybauskaite lorsqu'elle était ministre des Finances, dirige son équipe présidentielle.

Le 21 avril dernier, le Chef de l'Etat sortant Valdas Adamkus a présenté son traditionnel discours à la nation. Il a exprimé son regret de constater que son pays avait perdu l'unité, le sentiment de responsabilité, l'énergie et la foi qui étaient les siens au cours des premières années post-indépendance. "Notre plus grand échec depuis la reconquête de l'indépendance est d'avoir échoué à créer une société ouverte et responsable fondée sur un véritable consensus social" a-t-il déclaré. "Seul un renouveau moral peut aider la Lituanie à se sortir de la crise économique et morale qu'elle traverse et nous offrir un avenir de prospérité" a-t-il ajouté. Il a fait un discours sombre et profond, reprochant également aux politiques et à certains anciens ministres d'avoir été plus préoccupés par la survie du gouvernement auquel ils appartenaient que concentrés sur les réformes indispensables au pays.

Comme ses voisines baltes, la Lituanie est fortement touchée par la crise économique. Les économistes prévoient une contraction du PIB de 10,09% en 2009 et de 2,5% l'année suivante. L'inflation, qui était au plus bas il y a tout juste un an, devrait atteindre 10,9% en 2009 et encore 4,5% en 2010. De même, le taux de chômage qui était le plus faible de l'Union européenne en 2008, atteint 13,7%, soit le 3e plus élevé parmi les 27.

Selon les analystes politiques, la coalition gouvernementale dirigée par le Premier ministre Andrius Kubilius et qui rassemble 3 partis politiques (l'Union de la patrie-Conservateurs TS-LK, le Parti populaire de la résurrection nationale TPP, et l'Union libérale-Union du centre LLC-LCS) pourrait ne pas se maintenir au-delà du scrutin présidentiel. Les tensions sont nombreuses entre les 3 partis et le mécontentement populaire est croissant face aux mesures d'austérité du gouvernement.

Du côté de l'opposition, le candidat social-démocrate, Algirdas Butkevicius, a rappelé que la Commissaire européenne soutenait l'ensemble des décisions prises par le gouvernement d'Andrius Kubilius. Successeur de Dalia Grybauskaite au ministère des Finances en 2004, il a précisé que "le déficit de la Lituanie en 2008 s'élevait à 700 millions de litas" et non à 2 milliards comme le dit le Premier ministre Andrius Kubilius.

La candidate du Parti du travail, Loreta Grauziniene, fait campagne contre la politique menée par le gouvernement qui va dans la mauvaise direction. Valentinas Mazuronis, qui représente l'ancien Président Paksas, met l'accent sur l'emploi ; Kazimiera Danute Prunskiene affirme que la position de l'administration, qui soutient ouvertement Dalia Grybauskaite, contribue à fausser le scrutin présidentiel ; le représentant de la minorité polonaise, Waldemar Tomaszewki, souligne que la crise actuelle n'est pas seulement économique mais morale et, enfin, le général Ceslovas Jezerkas admet rencontrer des difficultés face à des politiciens chevronnés mais se déclare "prêt à combattre".

La dernière enquête d'opinion réalisée par l'institut RAIT crédite Dalia Grybauskaite de 65,5% des suffrages, Kazimiera Danute Prunskiene 4,2%, Algirdas Butkevicius 3,1%, Waldemar Tomaszewki et Ceslovas Jezerkas 3% chacun, Loreta Grauziniene 2,5% et Valentinas Mazuronis 1,8%.

8,7% des personnes interrogées déclarent qu'elles ne se rendront pas aux urnes et 11,1% disent ne pas avoir encore arrêté leur choix. Si l'on comptabilise les résultats des seuls répondants ayant fait un choix, Dalia Grybauskaite recueille alors 71,8% des suffrages.

A la lecture des sondages, un 2e tour constituerait un échec moral pour Dalia Grybauskaite. En outre, ce 2e tour ne serait pas sans danger puisque lors de deux précédents scrutins présidentiels (1997-1998 et 2002-2003), la victoire finale a échappé au candidat qui avait obtenu le plus grand nombre de suffrages au 1er tour. La différence entre les deux personnes arrivées en tête était certes beaucoup plus faible que celle annoncée cette année par les enquêtes d'opinion.

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