Election présidentielle en Slovaquie 21 mars et 4 avril 2009

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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21 mars 2009
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Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Les Slovaques sont appelés aux urnes le 21 mars prochain pour le 1er tour de l'élection présidentielle. Le 23 janvier dernier, l'actuel Président de la République Ivan Gasparovic annonçait sa décision de postuler à un second mandat à la tête de l'Etat.

Dans le cas où aucun candidat ne recueillerait la majorité absolue ou que l'un d'entre eux s'impose sans avoir recueilli les suffrages d'au moins la moitié des électeurs inscrits, un 2e tour aura lieu le 4 avril suivant. L'Etat dépensera 9,5 millions € pour l'organisation de ce scrutin présidentiel et les candidats ne sont pas autorisés à dépenser plus de 132 755 € chacun pour leur campagne. Par ailleurs, plusieurs d'entre eux ont critiqué la loi électorale au motif que la durée de la campagne présidentielle (2 semaines) leur semble beaucoup trop courte.

La fonction présidentielle

Le Président de la République slovaque possède peu de pouvoirs. Elu pour 5 ans, il est le commandant en chef des forces armées, il négocie et ratifie les accords internationaux, promulgue les lois et peut accorder des amnisties.

Tout candidat à la magistrature suprême doit obligatoirement présenter 15 000 signatures de citoyens ou celle de 15 parlementaires soutenant sa candidature.

7 personnes sont candidates à la fonction présidentielle :

- Ivan Gasparovic, Président de la République sortant, soutenu par Direction-Démocratie sociale (SMER-SD) et le Parti national (SNS), membres de l'actuel gouvernement ;

- Iveta Radicova, sociologue, ancienne ministre du Travail, des Affaires sociales et de la Famille (2005-2006) et candidate de l'opposition de droite, l'Union démocratique et chrétienne (SDKU) ;

- Milan Melnik, professeur d'université et soutenu par le Mouvement pour une Slovaquie démocratique (LU-HZDS), parti membre de l'actuel gouvernement ;

- Frantisek Miklosko, ancien député soutenu par la formation extra-parlementaire les Démocrates conservateurs de Slovaquie (KDS) ;

- Dagmar Bollova, ancienne députée du Parti communiste (KSS) ;

- Zuzana Martinakova, leader de la formation extra-parlementaire Forum libre (SF) ;

- Milan Sidor, candidat du Parti communiste (KSS).

La campagne électorale

Le Président sortant Ivan Gasparovic a choisi de mettre en avant son rôle à la tête de l'Etat durant son mandat. Il rappelle qu'il a su adopter une position non partisane et travailler avec des gouvernements situés sur des bords opposés de l'échiquier politique (le gouvernement de droite de Mikulas Dzurinda, Union démocratique et chrétienne, SDKU, et le gouvernement actuel, situé à gauche, dirigé par Robert Fico, Direction-Démocratie sociale, SMER-SD) et travailler à l'adoption de consensus sur des enjeux majeurs. "Je suis convaincu que je dispose encore de la force et de nombreuses idées qui peuvent aider la Slovaquie, à l'intérieur comme à l'extérieur. La Slovaquie est considérée comme un pays ouvert et, jusqu'à un certain point, décisif au niveau politique" a-t-il déclaré affirmant qu'il ne ferait pas une "grande campagne".

Mi-février, le Chef de l'Etat a, de façon inopinée, délivré un discours à la nation devant le Parlement (il a annoncé son intervention seulement quelques heures avant de monter à la tribune) dans lequel il a affirmé son soutien aux réformes sociales mises en place par le gouvernement de Robert Fico qu'il a félicité pour sa gestion de la crise économique. Ivan Gasparovic a également critiqué les vues libérales de certains économistes et l'impact de la réforme du système de santé réalisée par le précédent gouvernement de Mikulas Dzurinda. De nombreux membres de l'opposition ont critiqué le fait que le Président ait utilisé le Parlement comme une tribune électorale. A l'issue de ce discours, l'ancien Premier ministre Vladimir Meciar, adversaire malheureux de Ivan Gasparovic à la précédente élection présidentielle des 3 et 17 avril 2004, a mis en doute la bonne santé physique et mentale du Chef de l'Etat.

La candidate de l'opposition (SKDU) Iveta Radicova, apparaît comme la rivale la plus sérieuse d'Ivan Gasparovic à cette élection présidentielle.

Une controverse l'a opposée au Premier ministre, Robert Fico, qui n'a pas hésité à affirmer qu'elle était "responsable des pratiques politiques les plus sales", tout d'abord lors de sa collaboration avec le précédent ministre du Travail, des Affaires sociales et de la Famille (2002-2005), Ludovit Kanik, puis lorsqu'elle lui a succédé. Le Chef du gouvernement a déclaré que Iveta Radicova était devenue ministre en achetant, avec la coalition à l'époque au pouvoir (rassemblant l'Union démocratique et chrétienne, SKDU, le Mouvement chrétien-démocrate, KDH, et le Parti de la coalition hongroise, SMK, et dirigée par Mikulas Dzurinda), les voix de plusieurs députés de l'opposition, des propos confirmés par l'ancien ministre de la Justice Daniel Lipsic (KDH). Iveta Radicova a répondu qu'elle assumait ses actes et a affirmé n'avoir rien à cacher. Elle a précisé que la campagne présidentielle devrait davantage se centrer sur le présent et l'avenir plutôt que remuer le passé. "Iveta Radicova ne peut pas dire qu'elle n'a rien sur la conscience. Je le répèterai autant de fois que nécessaire : elle a participé à et profité de la corruption de certains députés" a insisté Robert Fico.

La candidate de l'opposition n'est pas épargnée puisqu'elle a été critiquée par un groupe de 7 prêtres catholiques au sujet de son opinion en faveur de l'avortement. "Si des représentants de l'Eglise ne comprennent pas mon action, je respecte leur opinion mais ils doivent être conscients qu'ils s'immiscent dans la campagne présidentielle" a déclaré Iveta Radicova qui a souligné que "les valeurs d'une personne ne se reflètent pas dans ses discours mais dans ses actes". La Conférence des évêques a pris ses distances par rapport à la lettre des prêtres et indiqué qu'elle ne souhaitait pas intervenir dans la campagne électorale. Enfin, l'ancien Premier ministre Mikulas Dzurinda a déclaré qu'Iveta Radicova était "non seulement une bonne candidate mais également une femme politique possédant des valeurs respectables".

Au pouvoir depuis juin 2006, Direction-Démocratie sociale reste le parti politique le plus populaire de Slovaquie. Deux faits expliquent ce phénomène : la Slovaquie est le pays d'Europe centrale qui connaît la plus forte croissance économique et le Premier ministre dirige une large coalition gouvernementale puisque celle-ci réunit, outre son parti situé sur la gauche de l'échiquier politique, le Parti national d'extrême droite et le Mouvement pour une Slovaquie démocratique de l'ancien Premier ministre Vladimir Meciar. L'adoption de l'euro symbolise parfaitement la réussite de Robert Fico qui a su allier pragmatisme et populisme pour s'imposer.

La croissance du PIB, qui a atteint 6% l'an passé, devrait cependant s'essouffler dans un pays spécialisé dans l'industrie automobile et électronique, secteurs en berne (la production industrielle a chuté de 16,8% en un an) et où le chômage reste élevé. Le Premier ministre Robert Fico, qui a mis en place un Conseil pour la crise économique, a affirmé que l'emploi et le pouvoir d'achat constituent les priorités de son gouvernement et souligné que celui-ci allait consacrer 365,1 millions € à des programmes sociaux. Cet argent proviendra, a-t-il précisé, de l'excédent budgétaire ainsi que de fonds privés et européens.

Selon une enquête d'opinion réalisée par l'institut MVK, Ivan Gasparovic pourrait être réélu à la Présidence de la République dès le 1er tour (sous réserve de recueillir les voix de la majorité absolue des électeurs inscrits) avec 55% des suffrages. Il devancerait Iveta Radicova qui obtiendrait 32,6% des suffrages. Frantisek Miklosko recueillerait 4,6% des voix, Zuzana Martinakova, 4,5% et Milan Melnik, 1,7%. Les deux autres candidats obtiendraient moins de 1% des suffrages.

La campagne électorale débutera officiellement le 6 mars prochain.

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