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Corinne Deloy
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Les Croates sont appelés aux urnes pour élire 12 députés européens le 14 avril prochain. Le pays est actuellement représenté au Parlement européen par 12 observateurs, qui ont été élus par les membres du Hrvatski Sabor, chambre unique du Parlement croate, en mars 2011.
Les députés qui seront élus le 14 avril prochain siègeront pour seulement une année puisque les prochaines élections européennes - auxquelles participera la Croatie qui deviendra le 28e Etat membre de l'Union européenne le 1er juillet prochain - auront lieu les 22-25 mai 2014. Les partis politiques croates doivent déposer leurs listes de candidats avant le 18 mars prochain. L'élection se fera au scrutin proportionnel sur des listes ouvertes sur lesquelles les électeurs pourront notifier quel candidat a leur 1ère préférence, leur 2e, etc. Le président croate a rappelé que les listes électorales devaient respecter l'égalité des sexes. La loi électorale croate oblige les partis politiques à présenter, aux élections européennes comme aux élections locales, au moins 40% de femmes sur chaque liste.
Le Parlement européen compte actuellement 754 députés. Avec les 12 députés croates qui seront élus le 14 avril prochain, il en comprendra 766. Le traité de Lisbonne stipulant que l'Assemblée de Strasbourg ne comptera pas plus de 751 membres, les institutions européennes travaillent d'ores et déjà à la façon de réduire le nombre de parlementaires. Plusieurs pays vont perdre des sièges dans un futur proche. Selon les textes, aucun Etat membre ne peut compter moins de 6 députés ou plus de 96. Les sièges impartis à chaque pays sont distribués selon le principe de la proportionnalité dégressive. Le 14 mars dernier, le Parlement européen a adopté une nouvelle redistribution des sièges pour les élections européennes de mai 2014. Celle-ci établit que l'Allemagne verra son nombre de sièges réduit de 3 pour atteindre le maximum de 96 et que 12 autres pays (Roumanie, Grèce, Belgique, Portugal, République tchèque, Hongrie, Autriche, Bulgarie, Irlande, Croatie, Lituanie, Lettonie et Autriche) en perdront 1.
Le 22 janvier 2011, les Croates avaient dit "oui" à l'adhésion à l'Union européenne par 66,67% lors d'un référendum. Le président de la République Ivo Josipovic avait qualifié de "grande opportunité" le fait pour Zagreb de rejoindre l'Union. "La Croatie investit intelligemment une partie de sa souveraineté dans la communauté politique et économique la plus prospère au monde", avait déclaré le Premier ministre Zoran Milanovic (Parti social-démocrate, SDP).
La grande majorité des partis politiques croates étaient favorable à l'adhésion tout comme les 132 000 Serbes (4,5% de la population) vivant dans le pays, qui voient dans les institutions européennes la garantie du respect de leurs droits. L'enthousiasme des Croates à l'égard de Bruxelles, qui a culminé en 2003 avec 80% d'opinions positives, a toutefois chuté notamment en raison de la crise économique de la zone euro et de la dette.
Les forces de l'opposition, et notamment l'Union démocratique (HDZ), ont reproché au président Josipovic d'avoir choisi de ne pas organiser le scrutin européen le même jour que les élections locales prévues le 19 mai prochain. Le chef de l'Etat a indiqué qu'il souhaitait que le premier scrutin européen du pays conserve son caractère unique pour que les électeurs reconnaissent son importance. La ministre des Affaires étrangères et européennes, Vesna Pusic (SDP), a souligné que les deux élections – européennes et municipales – ne se déroulaient pas selon le même mode de scrutin.
Selon le dirigeant du HDZ, Tomislav Kararmarko, un tel choix de dates révèle "le manque de sérieux du pouvoir en place". Il a affirmé que le gouvernement "avait peur du résultat des élections européennes" et mis en avant le fait que l'organisation des scrutins local et européen le même jour aurait permis de réaliser des économies d'échelle et d'assurer une participation plus importante. Le président Josipovic lui a répondu qu'il revenait aux partis politiques de mobiliser les électeurs.
Le HDZ mène une campagne nationale contre le gouvernement en place. Selon Tomislav Kararmarko, le Parti social-démocrate s'est montré incapable de faire fonctionner l'Etat. Il souligne que 70 000 personnes ont perdu leur emploi depuis la nomination du gouvernement de Zoran Milanovic et que la TVA et les tarifs du gaz et de l'électricité ont augmenté. Il affirme que son parti est mieux à même d'améliorer les institutions, de soutenir les citoyens et l'économie et de faire baisser les impôts. Tomislav Kararmarko a demandé que des élections législatives soient organisées en Croatie après le 1er juillet, date de l'entrée de la Croatie dans l'Union européenne.
Le dirigeant du HDZ a affirmé "regretter les actions de certains individus issus de nos rangs dont les activités de corruption ont bouleversé la société, qui ont trahi ceux qui ont donné leurs vies à l'Union démocratique et les citoyens qui méritent d'avoir un gouvernement honnête". Le principal parti d'opposition a en effet largement pâti des diverses affaires de corruption dans lesquelles plusieurs de ses membres ont été impliqués. En novembre 2012, l'ancien dirigeant du parti et ex-Premier ministre (2003-2009) Ivo Sanader a été condamné à 10 années d'emprisonnement pour abus de pouvoir et corruption. Il a été reconnu coupable d'avoir perçu des fonds illégaux (à hauteur de 480 000 €) d'une banque autrichienne (Hypo Alpe Adria) alors qu'il était vice-ministre des Affaires étrangères (1991-1995) et d'avoir perçu un pot-de-vin de 10 millions € du pétrolier hongrois MOL qui cherchait à s'assurer le contrôle de la compagnie pétrolière croate, INA. Au mois de février dernier, l'ancienne responsable du parti et ancienne Première ministre (2009-2011) Jadranka Kosor a été exclue du HDZ en raison des nombreux dommages qu'elle a causés au parti. Tomislav Kararmarko a toutefois indiqué que ces actions relevaient du passé et qu'il ne permettrait pas que l'on criminalise le HDZ et qu'il n'existait aucune "responsabilité collective".
Le Parti social-démocrate du Premier ministre Zoran Milanovic aborde ce scrutin dans une situation inconfortable. Avant son arrivée au pouvoir le 4 décembre 2011, le chef du gouvernement avait annoncé la mise en place d'un plan de relance rapide, un "tsunami d'investissements", une hausse de l'emploi et du taux de croissance et, enfin, une réduction des taxes sur les entreprises. Ces promesses n'ont cependant pas été suivies de véritables résultats concrets.
Les Paysans indépendants (NSH) dirigés par Mato Milinaric seront également en lice. Ils mèneront campagne avec le slogan "Vous pouvez nous faire confiance". "Nous sommes le premier parti paysan à concourir pour le Parlement européen, nous sommes présents dans toute la Croatie et nous sommes le deuxième plus grand parti du pays" a déclaré Mato Milinaric.
Les Travaillistes croates-Parti du travail (HL-SR) de Dragutin Lesar et l'Assemblée démocrate d'Istrie (IDS) présenteront également chacun une liste. Ce dernier parti appartient, avec le Parti populaire (HNS) de Radimir Cacic et le Parti social-démocrate du Premier ministre, au gouvernement de Zoran Milanovic. Son dirigeant Ivan Jakovcic sera tête de liste. Il a annoncé qu'il se retirerait de la vie politique s'il n'obtenait pas la confiance des électeurs et affirmé que siéger au Parlement européen lui permettrait de "réaliser le rêve de sa vie".
A ce jour, 23 Etats membres ont ratifié le traité d'appartenance de la Croatie à l'Union européenne. Le Danemark, l'Allemagne et la Slovénie devraient le faire prochainement. Le 11 mars dernier, Zagreb a signé avec Ljubljana un accord qui met un terme à un très vieux contentieux financier entre les deux pays. En 1991, en effet, 430 000 Croates avaient placé de l'argent dans la banque slovène Ljubljanska Banka, établissement qui avait ensuite fait faillite. La Croatie a dédommagé les 2/3 de ces épargnants à hauteur de 270 millions € mais exige que la Nova Ljubljanska Banka, qui a succédé à l'ancien établissement, lui restitue cette somme.
Alors que le commissaire européen à l'Elargissement Stefan Füle avait insisté pour que les conflits bilatéraux entre Zagreb et d'autres capitales soient tous soldés avant l'entrée de la Croatie dans l'Union, la Croatie et la Slovénie ont décidé d'un commun accord de régler plus tard le différend qui les oppose. La crise politique slovène (démission du gouvernement de Janez Jansa et nomination d'un nouveau Premier ministre, Alenka Bratusek (Slovénie positive, PS) le 27 février dernier, a en effet rendu difficile les négociations.
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