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Entretien d'EuropeLa politique turque à l'égard de l'Asie centrale et du Caucase du sud
La politique turque à l'égard de l'Asie centrale et du Caucase du sud

Élargissements et frontières

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26 avril 2004

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Introduction

Les pays d'Asie centrale et du Caucase du sud, indépendants à la suite à la dissolution de l'Union soviétique, ont donné un nouvel élan à la politique étrangère turque. A partir de cette date, la Turquie a souhaité se donner un nouveau rôle face à ces pays avec lesquels elle a d'importants liens historiques et culturels. Les pays turcophones, le Kazakhstan, le Turkménistan l'Ouzbékistan, le Kirghizistan, l'Azerbaïdjan ainsi que la Géorgie ont été les principaux enjeux de cette nouvelle politique*.

I - Historique

La Turquie, membre de l'Otan, a été, durant la Guerre froide, la sentinelle de l'Occident sur le flanc sud du bloc socialiste. Depuis une dizaine d'années, elle s'est orientée vers une coopération renouvelée avec les pays d'Asie centrale et du Caucase du sud, à la recherche d'un rôle de pilier dans cette région en pleine transformation. En 1991, le président Turgut Ozal, personnage clé d'une politique extérieure dynamique de la Turquie, déclarait devant la Grande Assemblée nationale, qu'il ne fallait pas manquer cette chance unique qui se présentait pour la première fois depuis 400 ans devant la Turquie. Ankara a donc été la première capitale à reconnaître l'indépendance des pays d'Asie Centrale et du Caucase du Sud et à y envoyer des représentants diplomatiques.

a) Les Etats-Unis et l'Union européenne, instigateurs de la présence turque ?

Le rapprochement de la Turquie avec les pays d'Asie Centrale et du Caucase du Sud a été encouragé par les Etats-Unis et l'Union européenne. Car, à l'époque, les deux puissances avaient les mêmes préoccupations quant à cette région stratégique, préférant une présence turque à celle de la Russie ou de l'Iran.

La prépondérance de la Russie représentait alors un danger sur l'indépendance économique et politique de ces nouvelles républiques. Les Etats-Unis et l'Union européenne se méfiaient aussi de l'influence de l'Iran, puissance islamiste de la région. Disposant d'un régime démocratique, d'un système économique libéral, la Turquie était considérée alors comme une alliée plus qu'une rivale.

b) Les trois axes d'une même politique

La politique d'Ankara, se développait sur trois axes : culturel, économique, énergétique. La politique culturelle était une politique à part entière, comme le souhaitaient les nationalistes, mais aussi une méthode. Pour les gouvernements de l'époque, une telle méthode devait servir à unifier ces pays, dont cinq parlent un dialecte turc, autour de liens historiques, ethniques et culturels.

Ainsi, une telle unification devait permettre à la Turquie de disposer d'une place privilégiée sur ce marché global de 70 millions d'habitants et aussi d'avoir accès à des sources énergétiques (gaz et pétrole). Cette politique s'est traduite par près de 500 accords bilatéraux ou multilatéraux et une aide financière totale de 1,7 milliard d'euro entre 1992 et 1996 [1].

La gestion au quotidien de cette politique a été confiée, en 1992, à "l'Agence de coopération turcophone" (Turk Isbirligi ve Kalkinma Ajansi –TIKA [2]) rattachée au Premier ministre et seule institution travaillant à l'époque spécifiquement sur une question de politique extérieure. La TIKA est organisée en deux sections : l'une économique, commerciale et technique (Ekonomik Ticari ve Teknik Isbirligi Dairesi), l'autre sociale et culturelle (Egitim Kultur ve Sosyal Isbirligi Dairesi).

c) Les réactions des pays turcophones

Les pays turcophones, à la recherche d'une identité nationale après la proclamation de leur indépendance, ont été séduits par la politique d'unification proposée par la Turquie. Car, tournée vers l'Occident, musulmane mais séculaire, démocratique mais centralisée, la Turquie était le meilleur modèle pour des pays musulmans et turcophones qui portaient encore les traces d'un régime soviétique. Ces pays étaient déterminés à suivre la voie de l'Occident et pour eux, la Turquie était un premier pas dans cette direction.

En effet, cette politique tendait à diffuser les normes occidentales. La Turquie les a ainsi soutenu d'un point de vue financier et technique pour rendre leurs normes commerciales et le fonctionnement de leurs administrations conformes aux schémas occidentaux et au système démocratique. Tenant compte de l'importance de la stabilité de la région, la Turquie les a encouragé à se rapprocher de l'OTAN, de l'ONU, de l'OSCE et du Conseil de l'Europe.

d) Une ambition pour les nationalistes et les conservateurs turcs ?

Dans la formation ultra-nationaliste, la politique d'unification, conduite par la Turquie, n'était qu'une partie d'un plus grand projet qui devait réunir l'ensemble du monde turcophone. Pour les conservateurs musulmans, il ne s'agissait que d'une étape d'unification du monde musulman de la région [3].

Ces deux tendances, les plus eurosceptiques du pays, considéraient cette politique comme pouvant constituer une alternative à l'intégration de la Turquie à l'Union européenne. Dans leurs esprits, la réalisation du rêve du monde turcophone ferait ainsi de la Turquie l'une des grandes puissances du XXIème siècle. Avec environ 200 millions de turcophones dans le monde, cette langue deviendrait une des langues officielles des organisations internationales.

Dans cette perspective, les partisans de ces formations apportaient une contribution technique et financière supplémentaire à celles déjà accordées par l'Etat pour renforcer la politique culturelle de la Turquie dans cette zone.

II - La politique extérieure de la Turquie dans la région

La politique extérieure de la Turquie dans la Région se décline selon trois axes : culturel, économique et commercial, et énergétique.

1) La politique turque dans le domaine culturel passe par plusieurs institutions :

La TIKA, par sa section de coopération culturelle, coordonne toutes les actions culturelles avec les pays de la zone, prépare des projets et des programmes dans les domaines de la culture et de l'éducation, applique ces projets par l'intermédiaire des centres culturels installés dans les pays concernés. Elle publie également une revue mensuelle : Eurasie (Avrasya) et une étude trimestrielle : les études d'Eurasie (Avrasya Etudleri).

L'administration commune des cultures et des arts turcs, (Türk Kültür ve Sanatlari Ortak Yönetimi Genel Müdürlügü), le TURKSOY [4], équivalent de l'UNESCO du monde turc, est une deuxième institution, créée en 1993, pour réaliser l'unification culturelle, surtout linguistique, par des coopérations multiformes entre les républiques et les communautés turcophones de l'ex-URSS et la Turquie [5].

Afin d'approfondir le lien culturel historique et ethnique existant avec les pays turcophones, deux autres institutions d'Etat préexistante, le Conseil de l'Histoire (Turk Tarih Kurumu) et le Conseil de la Langue (Turk Dil Kurumu), travaillent aussi dans cette direction.

D'autres administrations concourent à cette politique :

- Le ministère de la Culture, qui réalise de nombreuses expositions,

- Le ministère de l'Education et le Haut Conseil de l'Education (YOK),

- La direction des Affaires religieuses (Diyanet).

Deux objectifs clés: un alphabet commun et une langue commune

Le TURKSOY réunit chaque année un sommet des pays turcophones dont l'objectif principal est de mettre au point une langue et un alphabet communs pour faciliter l'intégration ethnique de la région.

Les pays turcophones, qui parlent chacun un dialecte et qui utilisent l'alphabet cyrillique, ont des difficultés de se comprendre entre eux et continuent donc à s'exprimer en russe. Pour lever cette entrave à l'unification, la Turquie leur a proposé d'adopter l'alphabet latin et de travailler à la création d'une langue commune.

La Turquie est parvenue, en dépit des efforts de la Russie qui militait pour le maintien de l'alphabet cyrillique, et de l'Iran et de l'Arabie Saoudite, qui souhaitaient un retour à l'arabo-persan [6], à faire admettre l'alphabet latin dans la région.

L'Azerbaïdjan et le Turkménistan ont déjà adopté cet alphabet, alors que l'Ouzbékistan et le Kirghizistan l'ont inscrit à leur programme législatif. La Turquie a donc envoyé massivement en Azerbaïdjan, au Turkménistan et au Kirghizistan des millions de livres, des dictionnaires pour faciliter la transition vers l'alphabet latin [7].

Éducation

Il est évident que l'instrument le plus important est l'éducation. Ankara a mis en œuvre une politique qui tient compte de l'importance de la formation des jeunes de ces pays pour l'unité des républiques turques.

En collaboration avec le ministère de l'Education nationale et le Haut Conseil de l'Education (YOK), la TIKA a entrepris plusieurs initiatives comme, par exemple, un statut spécial et la possibilité de bourses accordées à 10 000 étudiants des pays turcophones poursuivant leurs études en Turquie. A cette politique s'ajoutent la construction d'écoles, la création des cours de turc, des subventions aux universités et aux institutions scolaires, l'envoi de professeurs et des stages de formation pour les enseignants de ces pays.

Ainsi en 2001, 2.962 étudiants des pays turcophones poursuivaient leurs études en Turquie. On comptait 8 écoles publiques ouvertes par l'Etat turc [8] dans les pays turcophones qui avaient reçu à la même date 150 enseignants turcs [9]. En outre, de 1995 à 1999, 910 enseignants locaux ont suivi un stage de deux semaines sur la culture et le système d'éducation turc.

Toutefois, le « Grand projet pour les étudiants » (Buyuk Ogrenci Projesi) lancé par la TIKA n'a pas atteint son but. En 1999, seuls 3.169 étudiants avaient achevé leurs études alors que 7.401 étaient retournés dans leurs pays avant la fin du cycle [10]. La faiblesse du montant des bourses accordées explique, en partie, l'échec initial de ce projet.

La Turquie a aussi contribué à la fondation de deux universités, l'une au Kazakhstan « Hoca Ahmet Yesevi Universitesi » et l'autre au Kirghizistan « Kirgizistan Turkiye Manas Universitesi ».

Un Islam sécularisé au service de la politique turque

Dans le cadre de sa politique, la Turquie a mis en valeur son caractère musulman modéré et séculier dans ses relations avec ces pays qui sont majoritairement musulmans (Turkménistan 77%, Azerbaïdjan 93,4%; Ouzbékistan 88%, Kazakhstan 47% et Kirghizistan 75%). Les positions de la Turquie, pour un islam contrôlé par l'Etat, ont plutôt bien été accueillies par les dirigeants de ces pays aussi bien que par les puissances occidentales qui considèrent la Turquie comme un élément stabilisateur dans une région où l'islam intégriste est une menace pour la sécurité internationale.

La direction des affaires religieuses (Diyanet), rattachée au Premier ministre, règle les questions du culte musulman en Turquie. Dans ce cadre, cette institution a entrepris de créer dans la zone des Conseils pour les Affaires musulmanes et d'y envoyer des représentants religieux.

Grâce à la bourse du Diyanet, 242 étudiants de ces pays ont reçu une formation religieuse au niveau universitaire durant l'année 1999-2000. Cette même direction a aussi contribué financièrement à la construction de mosquées, de séminaires et de facultés qui assurent des formations religieuses apaisées dans les pays turcophones. Pendant la période 1992-1996, la contribution du Diyanet arrivait a un total de 8 millions d'euro [11] .

Les médias : l'instrument le plus puissant

En dehors de la structure institutionnelle, la Turquie utilise les médias et la communication. Le satellite Turkstat diffuse depuis 1992 la chaîne de télévision TRT-Avrasya. Cette chaîne a vocation d'être la télévision communautaire du monde turcophone. Elle est devenue, avec la station de radio "La voix de la Turquie", l'un des plus puissants outils de la politique culturelle turque couvrant environ 70 millions de téléspectateurs et d'auditeurs.

2) La Politique économique et commerciale

Un an après leur indépendance, l'Azerbaïdjan le Kazakhstan, le Kirghizistan le Turkménistan et l'Ouzbékistan ont rejoint l'Organisation de Coopération Economique (OCE) fondée entre la Turquie, le Pakistan et l'Iran en 1985. LAzerbaïdjan et la Géorgie sont devenus, n outre, membres de l'Organisation de Coopération Economique Régionale de la Mer noire (CERM) dont la Turquie est membre fondateur. Les objectifs de ces deux organisations sont similaires: développer des relations économiques et commerciales en coopérant dans divers domaines comme l'énergie, les transports, les télécommunications, la haute technologie.

Au niveau institutionnel, la section de coopération économique et commerciale de la TIKA contribue aux projets d'investissement et de commerce du secteur privé turc. Elle organise des formations pour les fonctionnaires des pays concernés. Jusqu'en 2001 environ 3000 experts et hauts-fonctionnaires ont participé aux séminaires.

Aides financières

Sur une période allant de 1992 à 1996, 96,4% de l'aide économique totale, attribuée par la Turquie, était dirigée vers ces pays pour un montant total de 1,4 milliard d'euro. Dans les premières années, l'aide économique représentait 80% de l'aide générale accordée à ces pays. Toujours à l'époque, les aides turques représentaient 90 % des aides accordées à la région par des pays étrangers.

A l'inverse, cette proportion est devenue marginale par rapport aux aides des autres pays. Dès 1995, la proportion des aides de la Turquie ne représentait plus que 3% des aides totales reçues par cette région [12].

Le commerce extérieur

La Turquie est l'un des premiers pays à avoir noué des relations commerciales avec les pays d'Asie centrale et du Caucase du sud. Toutefois ces relations restent faibles.

Le commerce extérieur de la Turquie avec les pays turcophones et la Géorgie (millier d'euros)

Source : Centre du développement de l'exportation (IGEME) les rapports de pays, http://www.igeme.org.tr

Sous secrétariat du commerce extérieur (DTM), http://www.dtm.gov.tr

Les exportations de la Turquie vers ces pays ont connu une importante augmentation jusqu'en 1998. Elles connaissent une stagnation à partir de cette date, dû à la crise économique russe en 1998, et la baisse des crédit alloués pour l'exportation et l'importation par l'Eximbank [13] à la suite à la dégradation de la situation en Turquie.

Une autre raison de la baisse des exportations est liée au changement des demandes des consommateurs des pays de cette région. Les produits de faible qualité exportés par le secteur privé turc, qui ne trouvaient pas leur place sur le marché de l'UE, [14] ont donné une mauvaise réputation. Il est évident que la concurrence avec les produits importés des pays occidentaux a joué un rôle essentiel dans ce changement. D'autres raisons sont à rechercher : système économique centralisé, insuffisance du système bancaire local, absence de règles commerciales strictes et de mécanismes d'arbitrage international, mauvaises conditions de transports et difficultés liées aux transit obligent les exportateurs à effectuer leurs transactions en liquide,.

Ces échanges représentent toutefois, en 2000, 14% des importations de l'Azerbaïdjan et 18% des importations de la Géorgie.

Les investissements étrangers

Bien que le secteur privé turc soit le premier a avoir investi dans la région, ces investissements sont moindres que ceux des Etats-Unis, de l'Allemagne, du Royaume-uni, de la Russie, du Corée du sud et du Japon. Actuellement, les investisseurs turcs sont plus nombreux que les investisseurs étrangers, mais leur chiffre d'affaires est moins important. 2000 entreprises turques [15] sont installées dans la région, notamment dans les secteurs de l'alimentation, du textile et de la construction, de la finance, de la chimie et du meuble. Mais leur présence dans le secteur énergétique reste modeste.

3) La politique de l'énergie

L'enjeu majeur est celui des ressources énergétiques transformant la Région en une zone de concurrence entre les Etats-Unis, l'UE, la Turquie, l'Iran et la Russie.

Selon les estimations, le bassin de la mer Caspienne dispose de 18 % des stocks mondiaux de pétrole et de gaz [16]. Mais les pays d'Asie centrale, à qui appartiennent les réserves de la mer Caspienne, ne disposent ni des moyens financiers, ni de la capacité technologique indispensable pour pouvoir extraire, raffiner et transporter ces matières premières. La région a besoin d'investissements pour se développer.

Selon le scénario optimiste de US Energy Administration Agency, dès que les investissements nécessaires auront été effectués, la production de pétrole au Turkménistan, au Kazakhstan, en Ouzbékistan et en Azerbaïdjan atteindrait 194 millions de tonnes en 2010. Leurs exportations pourraient alors s'élever à 117 millions de tonnes. La production de gaz naturel de ces pays arrivera à 201 millions de mètre cubes et les exportations à 84 milliards de mètre cubes.

En 1999, l'Europe a consommé 399 millions de mètre cubes de gaz naturel, les Etats-Unis 555 millions, la Turquie 12 millions. La même année, l'Europe a consommé 755 millions de tonnes de pétrole, les Etats-Unis 882 millions et la Turquie 28 millions [17]. Ces chiffres montrent clairement que l'Europe et les Etats-Unis ont besoin de nouvelles sources énergétiques tout en sachant que leurs réserves s'épuisent et que leur consommation ne cesse d'augmenter.

La politique d'Ankara a les mêmes objectifs : satisfaire ses besoins en pétrole et en gaz naturel au prix le plus bas, ouvrir l'extraction et le transport aux investissements étrangers.

Dans cette situation, la Turquie se voit comme le lien principal pour le transport du pétrole et du gaz de la région vers l'Occident. Elle participe aux grands projets en cours.

Le projet d'oléoduc Bakou-Tiflis-Ceyhan

L'accord pour la construction de l'oléoduc Bakou Tiflis Ceyhan (BTC) a été signé en 1998 par la Turquie, l'Azerbaïdjan et la Géorgie. Le projet concerne le transport du pétrole de la mer Caspienne à la mer Méditerranée via la Turquie. La construction de l'oléoduc a commencé en 2002. Les avantages éco-environnementaux du BTC sont primordiaux, mais les estimations sur la rentabilité diffèrent énormément. Ainsi, pour les entreprises européennes, la quantité de pétrole qui serait pompée par jour n'assure pas la rentabilité du projet. Mais pour les experts turcs, le pétrole d'Azerbaïdjan suffirait, à lui seul, à assurer la quantité nécessaire à l'équilibre du projet. Le BTC est achevé à 50 % en dépit des interrogations et d'un manque de ressources financières. Au total, 20 institutions y participent parmi lesquelles la Banque Mondiale, l'Eximbank américaine et la Banque Européenne de Reconstruction et le Développement (BERD). Ce projet, dirigé par "BP", devrait être terminé en 2005 [18].

Le projet de gazoduc Trans-Caspienne - Turkménistan - Turquie-Europe

La Turquie importe de la Russie près de 60% de ses besoins en gaz naturel par le gazoduc "Mavi akim" [19]. Afin de diversifier ses fournisseurs, la Turquie a signé en 1998 avec le Turkménistan un accord de "projet de gazoduc Trans-Caspienne Turkménistan – Turquie - Europe". Au sixième rang mondial pour ses réserves de gaz naturel, le Turkménistan ne bénéficie pas pleinement de cette richesse. L'inaccessibilité de ce pays aux marchés internationaux donne tout pouvoir à la Russie pour contrôler ses exportations énergétiques. Ainsi le Turkménistan ne peut vendre actuellement son gaz naturel à l'Europe que par l'intermédiaire de la Russie qui compte devenir la seule puissance dans le secteur. La réalisation du projet de gazoduc change donc cette situation. Ce projet est aussi soutenu par l'UE et les Etats-Unis pour les mêmes raisons: éviter le monopole de la Russie sur le gaz naturel.

Ce projet est considéré par la Turquie comme la possibilité de renforcer ses relations commerciales avec les pays de la région. Un deuxième avantage serait de pouvoir vendre du gaz naturel à l'Europe. En effet, la Turquie - qui ne peut pas vendre à l'Europe le gaz naturel qu'elle achète de la Russie de par les clauses du contrat qui lie les deux pays - vise à devenir un pays de transport pour le gaz naturel qui transitera vers l'Occident grâce au projet de Trans-Caspienne. La réalisation du projet changerait la place de la Russie dans la région et aurait un effet économique sur les prix de gaz naturel vendu actuellement par la Russie deux fois plus cher que le gaz de Turkménistan.

Conclusion

L'attrait des pays de la région pour la politique turque dans la première moitié des années 90, a laissé place à une certaine indifférence dans la seconde moitié de cette même décennie. Les investissements, les programmes d'aides financières des Etats-Unis et de l'Union européenne dépassent largement les aides de la Turquie. En outre, une dépendance inévitable, à court terme, envers la Russie pour l'exportation de gaz et de pétrole explique les raisons extérieures de ce changement d'attitude.

La Turquie, qui n'avait pas de stratégie bien définie, a déçu les espoirs des pays de la région. Souhaitant réaliser un grand projet, elle a manqué de moyens financiers et de coordination entre les établissements donneurs. A ceci, s'ajoute la crise économique que la Turquie a vécue de 2000 à 2002. Le manque de moyens lui interdisait de suivre une politique durable.

La Turquie, modèle de démocratie dans la région, n'a pas eu de politique claire, envers certains pays comme l'Azerbaïdjan et l'Ouzbékistan. Ne pouvant choisir entre les gouvernements et leurs opposants, elle a subi une altération de son image démocratique. Elle n'a pas pris en considération la diversité des identités de ce pays, ne se basant que sur leur identité linguistique.

De plus, la reconnaissance de la candidature de la Turquie à l'Union européenne à la fin de 1999 a eu une influence directe sur le rayonnement de la Turquie dans cette région. L'Union européenne arrivant au premier rang de la politique extérieure de la Turquie, les relations avec les pays d'Asie Centrale et du Caucase du sud ont été négligées, uniquement considérées comme un atout supplémentaire.

Sources :

http://ekutup.dpt.gov.tr/turkcumh/oik528.pdf : le rapport de la commission des pays turcophones de l'Organisation de Planification de l'Etat 2001

Dr Oner Kabasakal; les relations économiques et commerciales de la Turquie avec les pays turcophones; article en turc, revue Avrasya 2001

Pierre Cyril Cyrus Teymur Pahlavi, Université Mcgil La Turquie à la recherche des éléments fédérateurs de l'identité panturque : le contexte et les causes, Janvier 2003, http://www.diploweb.com

http://www.igeme.org.tr les relations commerciales avec les pays turcophones et la Géorgie

http://www.dpt.gov.tr/dei/eit/eit.htm : Organisation de Coopération Economique (OCE)

http://www.europa.eu.int/comm/trade

Questions et réponses sur les relations de l'Union européenne avec l'Asie centrale

Rapport contenant une proposition de recommandation du Parlement européen à l'intention du Conseil sur la politique de l'Union européenne à l'égard du Caucase du sud; 2003/2225(INI); rapporteur Per Gahrton

http://www.europa.eu.int/comm DG relations commerciales; Les pays d'Asie Centrale et du Caucase du Sud

Strategy Paper 2002-2006 & Indicative programme 2002-2004 for Central Asia 30 octobre 2002

Necdet Pamir; Les objectifs communs de la Turquie et de l'Europe dans le Caucase et au Moyen orient http://www.avsam.org:turkce:analizler:analizler/6_analiw.htm article en turc Novembre 2000

http://www.tpao.gov.tr Partenariat Anonyme Türk Petrol"; les projets extérieurs

Jules Mardisson; "pourquoi les Etats Unis soutiennent-ils l'intégration de la Turquie à l'Union européenne ? http://www.diploweb.com:forum:mardirossian.htm;

Dr Osman Nuri Aras; "L'importance internationale et régionale du point de vue économique et stratégique de l'oléoduc Bakou - Tiflis et Ceyhan"; article en turc; Université du Caucase

http://www.ntvmsnbc.com.tr:news/257377.asp?cp1=1 Bakou Ceyhan oil pipeline to be operational in 2005

Sinan Ogun"le projet de mavi akim: est–il un exemple de stratégie énergétique ou de non stratégie?"; article en turc; ASAM; chercheur spécialisé sur la Russie et l'Ukraine

John T. Nugent, Jr; "The defeat of Turkish Hizballah as a model for counter terrorism strategy" Meria Journal; mars 2004 http://meria.idc.ac.il/journal/2004/issue1/jv8n1a6.html

http://www.mfa.gov.tr Ministère des affaires étrangères de la Turquie

http://www.tika.gov.tr Agence Turque de Coopération Internationale

http://www.turksoy.gov.tr Administration Commune des cultures et des Arts Turcs

http://www.meb.gov.tr Ministère de l'Education Nationale

http://www.yok.gov.tr Haut Conseil de l'Education

http://www.diyanet.gov.tr Direction des Affaires Religieuses

* Cette étude n'analyse pas le cas du Tadjikistan et de l'Arménie

[1] Les aides extérieures de la Turquie, DPT, mars 1998 [2] http://tika.gov.tr [3] Aussi le Tadjikistan non turc mais musulman intéresse moins les nationalistes que les conservateurs [4] http://www.turksoy.org.tr [5] Hamdi Ozdamarlar, prospective du mode turc http://www.geoscopie.com/espaces/e621tpr.html [6] www.diplomweb.com.p4djke1.htm [7] idem [8] Il y a aussi des écoles privées dont on ne connaît pas le nombre mais seulement au Kazakhstan, il existe 25 écoles privées. Le nombre total des écoles privées est inconnu. On en dénombre toutefois 25 pour le seul Kazahkstan. [9] Ministère de l'éducation national de la Turquie httm://www.meb.gov.tr/stats/Apk2002/67.htm [10] idem [11]Les aides extérieures de la Turquie, DPT, mars 1998 [12] idem [13] Banque Turque pour les Crédits à l'Exportation (Turkiye Ihracat Kredi Bankasi) [14] La Turquie réalise 50 % de son commerce extérieur avec l'Union européenne. [15] Organisation de planification d'Etat, huitième plan de développement. Le Rapport de la Commission sur les relations de la Turquie et des républiques turcophones [16] Necdet Pamir; Les objectifs communs de la Turquie et de l'Europe dans le Caucase et au Moyen orient http://www.avsam.org:turkce:analizler:analizler/6_analiw.htm; article en turc, novembre 2000 [17] Idem [18] http://www.ntvmsnbc.com.tr:news/257377.asp?cp1=1, Bakou Ceyhan oil pipeline to be operational in 2005 [19] Sinan Ogun "Le projet de "Mavi Akim: est –il un exemple de stratégie énergétique ou de non stratégie ?"; article en turc ; ASAM.

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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