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Entretien d'EuropeLes politiques d'immigration en Europe
Les politiques d'immigration en Europe

Liberté, sécurité, justice

Jean-Miguel Pire

-

8 octobre 2001

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Pire Jean-Miguel

Jean-Miguel Pire

La question de l'immigration fait aujourd'hui l'objet de l'attention communautaire. L'unification du régime de l'asile et la création d'un mandat d'arrêt européen manifestent une volonté européenne nouvelle dans l'aménagement humanitaire et judiciaire de l'espace commun. Ces évolutions s'inscrivent dans le contexte d'une actualité dominée par les évènements américains et la nécessité de lutter contre le terrorisme international. Elles correspondent aussi à la prise en compte de profonds changements relativement à l'accueil des étrangers. Sous la pression croissante d'un besoin de main d'œuvre qualifiée, les Etats européens sont ainsi conduits à revoir complètement les politiques de limitation des flux migratoires qu'ils appliquaient depuis trois décennies. Après une brève présentation des dernières propositions européennes (1) relativement au droit d'asile, et à la création d'un mandat d'arrêt européen, cette note propose une présentation synthétique des législations nationales (2) relatives à l'immigration en vigueur en Allemagne, en Belgique, en Espagne, en France, en Italie, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.

I - Les dernières propositions européennes

La Commission européenne a approuvé le 12 septembre dernier une proposition visant à établir une définition commune du réfugié et des droits dont il doit bénéficier. Cette proposition est destinée à réactualiser une législation déterminée depuis cinquante ans par la Convention de Genève, et aujourd'hui largement contournée par les candidats à l'immigration clandestine. L'objectif poursuivi est double : il s'agit d'accorder une meilleure protection aux personnes ayant réellement besoin de se placer sous la protection internationale, tout en empêchant les demandes abusives qui affaiblissent la crédibilité du système. Cette proposition est conforme aux engagements contractés par la Commission au Conseil européen de Tampere (octobre 1999) relative à la mise en place d'un régime européen de l'asile. L'objectif majeur du texte est de distinguer parmi les demandeurs ceux qui sont « réfugiés » et ceux qui « ont besoin d'une protection internationale ». Il prévoit deux types de protection :

1/ Le statut de réfugié : fondé sur l'interprétation de la Convention de Genève du 25 juillet 1951, il est octroyé à toute personne qui craint d'être persécutée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social et de ses opinions politiques.

2/ La protection judiciaire : fondé notamment sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (1950), elle doit bénéficier aux personnes qui ne remplissent pas les conditions du statut de réfugié mais qui nécessitent une protection internationale car elles encourent « des atteintes graves et injustifiées ».

Les deux types de protection sont identiques mais la seconde entraîne l'attribution d'un permis de séjour d'un an seulement, quoique renouvelable, alors que pour la première, ce permis est de cinq ans. Par ailleurs, la grande nouveauté est l'extension de la protection aux personnes qui sont menacées par des Etats et par des « partis », ou encore par des « acteurs non étatiques dans le cas où l'Etat ne veut ou ne peut accorder une protection effective ». Ce texte sera soumis au vote à l'unanimité du Conseil dans les six mois et devra être transposé dans les législations nationales d'ici trois ans.

Les événements survenus aux Etats-Unis ont accéléré la volonté européenne d'harmoniser la politique judiciaire. Lors de la rencontre des 22 et 23 septembre derniers, les ministres de la Justice des Quinze sont parvenus à un accord politique sur la création d'Eurojust, un embryon de parquet européen qui permettra de stimuler la coopération judiciaire dans l'Union européenne. Ce groupe de magistrats issus des Quinze commencera à travailler dès le 1er janvier 2002 — un groupe informel nommé « Eurojust provisoire » est déjà en place — et la lutte contre le terrorisme figurera parmi ses priorités. Dans le même mouvement, une proposition de décision-cadre émanant de la Commission et datée du 25 septembre, évoque la création d'un mandat d'arrêt européen. Cette réforme constitue une véritable révolution puisqu'elle fait disparaître la protection judiciaire liée à la nationalité. Elle ouvre la voie à la création d'une police fédérale européenne.

II- Les législations nationales relatives à l'immigration

D'une façon générale, on peut dire que les législations nationales relatives à l'immigration demeurent restrictives en droit. Ainsi, depuis le milieu des années 70, la plupart des Etats européens ont réduit de façon drastique l'immigration extra-communautaire à caractère économique. Quelques rares catégories de personnes semblent désormais autorisées à immigrer (étudiants, stagiaires, personnes pouvant faire valoir des qualifications professionnelles exceptionnelles). Les autres voies légales d'immigration se sont limitées au regroupement familial et à la demande d'asile. Au cours des trois dernières décennies, l'ensemble de ces voies a été assorti de conditions d'application toujours plus exigeantes, spécialement pour le droit d'asile. A cette politique s'est ajoutée une lutte intensive et concertée contre l'immigration clandestine. Ce sont donc ces trois aspects qui font l'objet de la présente synthèse.

Allemagne

Le regroupement familial

La loi du 9 juillet 1990 sur l'entrée et le séjour des étrangers précise que le regroupement familial constitue un droit qui se fonde sur la protection constitutionnelle offerte au mariage et à la famille. L'article 6 de la loi fondamentale énonce en effet : "Le mariage et la famille bénéficient de la protection particulière de l'ordre politique". En règle générale, la reconnaissance du droit au regroupement familial se traduit par l'attribution aux membres de la famille d'un permis de séjour d'une durée limitée. Sous réserve du respect de certaines conditions (durée minimale de séjour, maîtrise de la langue allemande...), ce permis peut être transformé en permis à durée illimitée. Les modifications apportées à la loi de 1990 ont multiplié les restrictions au regroupement familial. Les principes généraux s'accompagnent de nombreuses exceptions. En pratique, le regroupement familial concerne essentiellement les Turcs : en 1996, 14.000 conjoints et 1.800 enfants sont entrés en Allemagne au titre du regroupement familial.

Le droit d'asile

L'Allemagne a procédé à une réforme de sa législation sur le droit d'asile avec la loi du 1er juillet 1993. Cette modification était une nécessité, compte tenu de l'augmentation du nombre de demandes d'asile (121.000 en 1989, presque 440.000 en 1992). Or, les demandeurs pouvaient rester dans le pays pendant la durée d'examen de leur dossier, de plus en plus longue en raison de l'encombrement des services administratifs concernés. La réforme a consisté à faire cesser l'utilisation fréquente du droit d'asile comme moyen détourné d'immigration. La loi prévoit ainsi l'exclusion de certaines catégories de demandeurs. Par ailleurs, elle définit un certain nombre de cas dans lesquels la demande d'asile est présumée « manifestement infondée ». Au niveau administratif, cette réforme a entraîné le renforcement de l'Agence fédérale pour la reconnaissance des réfugiés. Des bureaux régionaux ont été créés et son effectif total est passé de 350 personnes en 1985 à 5.500 en 1993. L'ensemble de ces dispositions s'est traduit par une forte diminution des demandes d'asile (environ 127.000 en 1994 et 1995 ; 116.000 en 1996) et la multiplication des requêtes contentieuses. Responsables de l'exécution des décisions d'expulsion, les Länder peuvent suspendre ces décisions pour des raisons humanitaires ou touchant aux droits de l'homme et, ainsi, faire obstacle à la politique fédérale.

La lutte contre l'immigration clandestine

Tous les groupes politiques ont, au cours des derniers mois, présenté des propositions de loi tendant à introduire des quotas annuels d'immigrants. Depuis plusieurs années, l'Allemagne a multiplié les mesures permettant de lutter contre l'immigration clandestine. Elle a procédé à un renforcement important de la protection de sa frontière orientale, réorganisé la Police fédérale des frontières et opéré plusieurs réformes législatives ou réglementaires parmi lesquelles :

- l'aggravation des sanctions applicables aux entrées irrégulières ;

- l'introduction de l'obligation d'un visa pour tous les mineurs ;

- le renforcement des peines sanctionnant le travail clandestin ;

- l'obligation pour les transporteurs de vérifier les papiers des voyageurs.

Belgique

Le texte de base est la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, dite loi Moureaux. Elle a été mainte fois amendée comme le texte réglementaire applicable dans ce domaine : l'arrêté royal du 8 octobre 1981. Les dispositions sur le droit d'asile sont incluses dans la législation générale sur les étrangers.

Le regroupement familial

Le droit au regroupement familial repose sur un principe dérogatoire au droit commun des étrangers : la famille d'un étranger autorisé à séjourner ou à s'établir en Belgique, est admise de plein droit à séjourner. La durée du permis initial accordé aux membres de la famille varie en fonction du statut de l'étranger en Belgique, mais ceux qui obtiennent à leur arrivée un titre de séjour d'une durée limitée peuvent obtenir un titre de séjour d'une durée illimitée au bout d'un an si les résultats de l'enquête menée par l'Office des étrangers ne s'y opposent pas. La loi du 28 juin 1984 a introduit l'interdiction du regroupement familial en cascade. Passé l'année civile au cours de laquelle le droit au regroupement familial a été utilisé et l'année suivante, aucune immigration par regroupement familial ne peut plus avoir lieu autour du même étranger, sauf autorisation expresse. Les dispositions relatives au regroupement familial ne peuvent pas être invoquées par les membres de la famille d'un étudiant étranger bénéficiaire d'un titre de séjour de plus de trois mois, à moins que celui-ci ne prouve qu'il dispose de moyens de subsistance et d'un logement suffisants. Bien que la loi vise la cellule familiale au sens restreint et exclue les enfants majeurs, les ascendants et les collatéraux, ceux-ci peuvent bénéficier du pouvoir discrétionnaire d'accorder des permis de séjour dont dispose le ministre de la Justice, en vertu de l'article 9-3 de la loi.

Le droit d'asile

Les modifications successives apportées à la loi Moureaux de 1980 ont largement concerné la procédure d'examen des demandes d'asile. Confrontée à la croissance des demandes d'asile introduites (moins de 5.000 en 1988, plus de 26.000 en 1993), dont la grande majorité, environ 90 %, s'est révélée infondée, la Belgique a en effet dû réformer sa législation pour accélérer le traitement des demandes et faciliter le rapatriement des demandeurs déboutés. La réforme s'est traduite par la suppression de l'accès automatique des demandeurs d'asile au territoire belge, par l'élimination croissante des demandes avant leur examen au fond, notamment grâce à l'élargissement des motifs d'irrecevabilité, ainsi que par la limitation des recours offerts aux demandeurs déboutés.

La lutte contre l'immigration clandestine

Les modifications apportées à la loi de 1980 sur les étrangers par les lois de 1993, 1995 et 1996 ont beaucoup alourdi le dispositif pénal, en particulier en ce qui concerne l'aide à l'immigration clandestine. Par ailleurs, la Belgique a engagé, à partir de 1993, un important programme de lutte contre le travail au noir, notamment celui des étrangers en situation irrégulière.

Espagne

La loi organique n° 7 du 1er juillet 1985 sur les droits et libertés des étrangers en Espagne détermine les principes généraux relatifs à l'entrée et au séjour des étrangers. Ces principes ont été développés par son règlement d'exécution, approuvé par le décret royal n° 155 du 2 février 1996. Abrogeant le précédent décret, qui datait de mai 1986, ce nouveau texte prétend assurer une meilleure intégration sociale et professionnelle des étrangers en situation régulière et renforcer le contrôle aux frontières. Par ailleurs, le droit d'asile est régi par la loi n° 5 du 26 mars 1984, modifiée en mai 1994, entrée en vigueur en juin 1994 et complétée par le décret royal n° 203 du 10 février 1995.

Le regroupement familial

Les dispositions relatives au regroupement familial sont contenues dans le règlement d'exécution de la loi organique °7 du 1er juillet 1985. Elles ont été précisées par une résolution du 15 février 1994 des trois ministères de l'Intérieur, des Affaires sociales, et du Travail et de la sécurité sociale. La loi reconnaît aux étrangers les mêmes droits fondamentaux qu'aux Espagnols. En conséquence, son règlement d'exécution prescrit que "les membres de la famille des étrangers qui résident légalement en Espagne pourront résider avec eux (...)". La reconnaissance du droit au regroupement familial se traduit par l'attribution d'un titre de séjour dont la durée dépend de celle du titre de la personne autour de laquelle s'effectue le regroupement. La résolution de 1994 conditionne le regroupement à un examen d'ensemble de la situation de l'étranger, notamment pour vérifier la stabilité et l'importance de ses ressources financières. C'est pourquoi l'étranger autour duquel s'effectue le regroupement doit fournir des justificatifs de revenu et d'affiliation à la sécurité sociale. Il doit également apporter la preuve que son logement est suffisamment spacieux. Pour les titulaires du droit d'asile, la situation diffère. En effet, le droit d'asile est étendu aux ascendants et aux descendants du premier degré, au conjoint non séparé ou au concubin stable. L'extension est automatique sauf pour les enfants majeurs ou indépendants : ces situations sont appréciées individuellement.

Le droit d'asile

L'article 13-4 de la Constitution énonce : "La loi établira les termes selon lesquels les citoyens d'autres pays et les apatrides pourront jouir du droit d'asile en Espagne". La loi de 1994 supprime la distinction qui existait auparavant entre "réfugié" et "bénéficiaire du droit d'asile". Désormais, "le droit d'asile reconnu à l'article 13-4 de la constitution est la protection dispensée aux étrangers auxquels la condition de réfugié est reconnue". Pour accélérer l'examen des demandes et empêcher les détournements du droit d'asile, la loi instaure un pré-examen des demandes, et prévoit la possibilité de déclarer irrecevables celles qui sont manifestement abusives ou infondées, ou qui relèvent de la compétence d'un autre Etat. La loi prévoit aussi qu'une déclaration d'irrecevabilité ou une décision de refus se traduit par l'obligation pour l'étranger de quitter le territoire.

La lutte contre l'immigration clandestine

La loi organique et son règlement d'exécution sanctionnent l'entrée et le séjour irréguliers, ainsi que le fait de travailler sans permis et de favoriser les situations irrégulières.

France

La loi du 11 mai 1998 relative aux conditions d'entrée et de séjour, dite « loi Chevènement », repose sur trois objectifs : redonner son statut d'exception au droit d'asile, supprimer les contrôles inutiles et soulager l'administration de tâches superflues, changer l'approche de la lutte contre l'immigration irrégulière.

Le regroupement familial

La loi entend promouvoir l'immigration issue du regroupement familial. Cette volonté se traduit par une simplification des procédures administratives et la facilitation de l'octroi des visas. Pour la première fois, les refus doivent être motivés par l'administration. Le certificat d'hébergement est supprimé et remplacé par une simple attestation d'accueil certifiée, soit par une autorité de police. Le législateur a également cherché à diminuer le nombre de situations litigieuses pour lesquelles il n'existait pas de solution adaptée. La création d'une carte spécifique portant la mention « vie privée et familiale » et ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est susceptible de bénéficier à l'étranger « dont les liens personnels et familiaux avec la France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus. ». Innovation majeure, cette nouvelle carte vise à éviter que ne se développe à nouveau la catégorie des « irrégularisables-inexpulsables ». La condition d'entrée régulière est supprimée pour la délivrance de plein droit de la carte de résident. Le délai d'un an est supprimé pour la délivrance de la carte de séjour temporaire aux conjoints de ressortissants français, afin de faciliter la cohabitation en France de couples mixtes. L'étranger candidat au regroupement familial ne doit plus justifier qu'il dispose d'un logement d'accueil au moment du dépôt de sa demande, mais au moment de l'arrivée de sa famille.

Le droit d'asile

Le droit d'asile bénéficie désormais d'une triple garantie constitutionnelle, conventionnelle et législative. Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 affirme le droit d'asile : « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a le droit d'asile sur les territoires de la République. » A l'occasion de la révision constitutionnelle du 25 novembre 1993, le droit d'asile a été inscrit dans la Constitution à l'article 53-1, qui permet la mise en commun du droit d'asile par l'accord de Schengen en réservant à la France la possibilité de réexaminer une demande d'asile rejetée par un autre Etat partie à l'accord. L'asile fait également l'objet d'une protection internationale. La Convention de Genève du 28 février 1951 définit les conditions de l'octroi du statut de réfugié. Les principes de cette Convention ont été mis en œuvre en France par la loi du 25 juillet 1952 qui crée un établissement public chargé de se prononcer sur les demandes d'admission au statut de réfugié : l'Office national français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA). Ses décisions relèvent d'une juridiction spécialisée, la commission des recours, placée sous le contrôle du Conseil d'Etat. Tout comme celle du Conseil Constitutionnel, la jurisprudence du Conseil d'Etat est fortement protectrice du droit d'asile. Le droit des réfugiés, tel que défini par la Convention de Genève, n'absorbe pas intégralement le droit d'asile. Depuis la loi du 11 mai 1998, l'OFPRA peut désormais délivrer, sur le fondement du droit interne, l'asile « constitutionnel » à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté. Par ailleurs, le ministre de l'intérieur peut, après avis du ministre des Affaires étrangères, délivrer l'asile territorial à un étranger dont la vie ou la liberté sont menacées dans son pays d'origine. Le champ couvert par l'asile territorial, qui ouvre droit à une carte de séjour temporaire, est plus large que celui qui recouvre la qualité de réfugié : des menaces de toute nature, venant ou non des autorités publiques de l'Etat d'origine, permettent de solliciter cette nouvelle protection.

La lutte contre l'immigration clandestine

Les dispositions concernent essentiellement les prérogatives très larges de l'administration en matière d'éloignement :

— arrêté préfectoral de reconduite à la frontière destiné à éloigner les étrangers entrés ou séjournant irrégulièrement sur le territoire national ; des dérogations existent pour les étrangers jugés « inexpulsables » (malades, femmes enceintes, etc.) ; un recours existe auprès du président de chaque Tribunal administratif ;

— l'instauration du principe dérogatoire au motif de « l'urgence absolue » permet de déroger aux garanties de procédures, et d'accélérer l'expulsion, lorsque l'intéressé peut démontrer l'existence d'une « menace présentant un caractère de particulière gravité » ;

A ces mesures s'ajoute l'interdiction du territoire, peine complémentaire susceptible d'être prononcée par le juge judiciaire, en cas d'infraction à la législation sur l'entrée et le séjour, ainsi que pour sanctionner une série de 200 infractions de « droit commun ».

Italie

Le régime italien de l'immigration est réglé par la loi du 25 juillet 1998. Il répond à trois objectifs :

— empêcher l'immigration clandestine et l'exploitation criminelle des flux migratoires ;

— programmer et limiter les entrées régulières ;

— faciliter l'intégration des étrangers séjournant régulièrement en Italie.

Le regroupement familial

La loi reconnaît que le regroupement familial constitue un droit pour les étrangers détenteurs d'un titre de séjour dont la durée de validité n'est pas inférieure à un an. Elle précise que dans toutes les procédures administratives et judiciaires liées à la mise en œuvre de ce droit, il convient de « prendre en considération, de façon prioritaire, l'intérêt supérieur de l'enfant ». Le ressortissant étranger autour duquel s'effectue le regroupement familial doit être titulaire d'un titre de séjour, dont la durée de validité n'est pas inférieure à un an. Ce titre doit avoir été délivré pour des raisons professionnelles. Sauf s'il s'agit d'un réfugié, l'étranger qui fait venir sa famille doit disposer d'un logement satisfaisant aux critères minimaux utilisés pour la construction des logements publics, d'un revenu annuel obtenu de façon licite et dont le montant dépasse un certain plancher, fixé par référence à la législation sociale, et variable selon le nombre de personnes concernées par le regroupement familial. Cette possibilité n'est ouverte que si ces personnes sont à la charge de l'étranger installé en Italie et inaptes au travail selon les critères du législateur italien.

Le droit d'asile

L'article 10-3 de la Constitution italienne dispose que : « Le ressortissant étranger auquel, dans son pays, on a interdit l'exercice effectif des libertés démocratiques garanties par la Constitution italienne, a droit d'asile sur le territoire de la République, dans les conditions fixées par la loi ». La recevabilité des demandes est faite dans les deux jours suivant le dépôt. Une demande est considérée comme inadmissible si ce n'est pas l'Italie qui est responsable de son examen, ou si l'étranger provient d'un Etat signataire de la convention de Genève. Dans ce cas, la demande aurait dû être déposée dans cet Etat, dans la mesure où l'étranger ne courait pas de risques particuliers. Les demandes manifestement non fondées sont celles qui correspondent aux critères retenus par les ministres européens chargés de l'immigration, dans leur résolution du 1er décembre 1992. Il s'agit de celles :

— qui s'appuient sur une crainte de persécution manifestement injustifiée (motifs de la demande ne relevant pas du champ d'application de la convention de Genève du 28 février 1951 ; demande dépourvue de tout fondement ou de toute crédibilité) ;

— qui révèlent une fraude délibérée ou un recours abusif aux procédures d'asile (affirmation d'une fausse identité, présentation de documents faux ou falsifiés, fausses déclarations, destruction de documents, demandes déjà présentées dans d'autres pays, etc.)

La lutte contre l'immigration clandestine

Compte tenu de la longueur de ses côtes et de sa position géographique en Méditerranée, l'Italie est en première ligne pour l'immigration clandestine, en provenance d'Afrique, d'Albanie, de Turquie, du Proche-Orient, voire du sous-continent indien. L'adhésion de l'Italie à l'espace Schengen l'a contrainte à se doter d'une législation lui permettant de lutter efficacement contre ce phénomène. La loi établit une nette distinction entre les étrangers qui entrent et séjournent régulièrement en Italie, et ceux qui entrent ou tentent d'entrer clandestinement. Si l'intégration des premiers doit être facilitée, les seconds doivent pouvoir être expulsés. Le gouvernement italien, installé depuis juin 2001, a récemment fait part de sa volonté de modifier ces dispositions afin de restreindre l'accès et les droits en matière d'immigration. En cours d'élaboration, un projet de loi énonce les propositions suivantes :

— refus de toute régularisation pour les clandestins en provenance des pays autres que ceux de l'Union Européenne ;

— peine de prison pouvant aller jusqu'à quatre ans en cas de récidive, ce qui signifierait la criminalisation des entrées irrégulières ;

— suspension de l'octroi du permis de séjour à la possession d'un contrat de travail régulier ; poursuites sévères des trafiquants et passeurs, désormais passibles de peines de quatre à douze ans d'emprisonnement, ainsi que d'une amende de 30 millions de lires pour chaque étranger introduit irrégulièrement, et de cinq à quinze années de prison s'il s'agit de prostitution.

Pays-Bas

Les règles relatives à l'entrée et au séjour des étrangers sont déterminées par la loi du 13 janvier 1965, plusieurs fois modifiée. Les principales mesures réglementaires sont contenues dans l'arrêté sur les étrangers du 19 septembre 1966, modifié à plusieurs reprises. Les dispositions relatives au droit d'asile sont incluses dans la loi sur les étrangers.

Le regroupement familial

La loi ne comporte aucune disposition sur le regroupement familial, qui est donc régi par la circulaire sur les étrangers et par la jurisprudence. On distingue le regroupement familial de la "formation de famille", selon que le mariage a lieu avant ou après l'installation de l'étranger aux Pays-Bas. Les dispositions applicables sont presque identiques. La principale différence entre les deux régimes concerne les titulaires du droit d'asile, qui ne peuvent faire venir sans conditions aux Pays-Bas les membres de leur famille que si celle-ci existait avant leur admission comme réfugiés dans le pays. L'étranger qui réside légalement aux Pays-Bas et qui détient un titre de séjour, d'une durée limitée ou illimitée, a le droit de faire venir aux Pays-Bas certains membres de sa famille, à condition qu'ils disposent d'un passeport et n'aient aucun passé criminel.

Ils obtiennent alors un permis de séjour valable pour un an renouvelable. L'étranger qui souhaite fonder un foyer aux Pays-Bas doit y résider depuis au moins trois ans. Cette condition n'est pas exigée pour le regroupement familial, qui est subordonné à deux conditions principales : le logement et les revenus. Les conditions de revenu et de logement ne s'appliquent pas lorsque l'étranger est titulaire du droit d'asile, à moins que le regroupement ne concerne d'autres personnes que le conjoint et les enfants mineurs. Compte tenu de la facilité qu'ont les titulaires du droit d'asile de faire venir leur famille aux Pays-Bas, les ambassades ont reçu pour mission de vérifier très rigoureusement la réalité des liens familiaux entre les personnes qui demandent à bénéficier du regroupement familial et les réfugiés.

Le droit d'asile

La réforme du droit d'asile en Allemagne a eu pour effet de déplacer le problème vers les Pays-Bas qui ont enregistré 18 % des demandes d'asile présentées en Europe en 1994, contre 3 à 5 % entre 1985 et 1992. Préoccupé par l'inflation des demandes, le gouvernement a donc fait modifier la législation à plusieurs reprises afin d'éliminer le plus en amont possible certaines demandes. En 1993, la loi sur les étrangers a été amendée par l'introduction, d'une part, des dispositions sur les demandes irrecevables et, d'autre part, de celles sur les demandes manifestement infondées.

La loi du 1er décembre 1994, relative aux "pays d'origine sûrs", entrée en vigueur le 1er janvier 1995, a également modifié la loi sur les étrangers. Elle établit une nouvelle catégorie de demandes manifestement infondées. La loi du 2 février 1995, relative aux "pays tiers sûrs", entrée en vigueur le 8 février 1995, exclut que l'étranger qui a séjourné dans un pays tiers sûr puisse présenter une demande d'asile aux Pays-Bas. Les réformes législatives ont eu pour conséquence une baisse importante du nombre des demandes d'asile. Cependant, en 1997, les chiffres ont à nouveau augmenté : entre le 1er janvier et la fin du mois d'octobre, 23.600 demandes ont été enregistrées.

La lutte contre l'immigration clandestine

Faisant suite aux deux grandes opérations de régularisation réalisées en 1975 et en 1979, la lutte contre l'immigration clandestine constitue une priorité du discours politique depuis le milieu des années 80. En 1989, lors de la formation du gouvernement, les parties de la coalition au pouvoir conclurent un accord aux termes duquel la lutte contre l'immigration clandestine devait devenir une réalité. Peu après, le ministère de la Justice désigna une commission chargée de réfléchir au problème. Elle rendit son rapport au début de l'année 1991 et, depuis lors, plusieurs de ses propositions ont été reprises dans des textes législatifs ou réglementaires. Les principales mesures prises sont les suivantes :

- l'exclusion des étrangers en situation irrégulière du bénéfice de la politique sociale ;

- le développement de la lutte contre le travail clandestin ;

- la prévention des mariages blancs ;

- le renforcement de la surveillance.

Royaume-Uni

L'entrée et le séjour des étrangers au Royaume-Uni sont régis principalement par l'Immigration Act de 1971 et l'Immigration Act de 1988, modifiés depuis leur adoption. La loi de 1988 traite essentiellement du contrôle de l'immigration. De façon générale, ces dispositions s'appliquent seulement aux étrangers qui ne bénéficient pas du droit de résider au Royaume-Uni, droit qui permet de venir vivre et travailler au Royaume-Uni sans restriction et sans être soumis aux dispositions sur l'immigration. En effet, outre les citoyens britanniques, certains citoyens du Commonwealth qui possédaient le droit de résider au Royaume-Uni avant le 1er janvier 1983, date d'entrée en vigueur de la loi de 1981 sur la nationalité, continuent à en bénéficier.

Le regroupement familial

Le droit au regroupement familial ne figure pas dans la loi. Toutefois, les membres de la proche famille peuvent en bénéficier.

Le droit d'asile

Traditionnellement, la procédure d'examen des demandes d'asile n'était prescrite par aucun texte législatif. Conformément aux règlements sur l'immigration édictés par le ministre de l'Intérieur, elle se déroulait de la manière suivante : la police des frontières avait l'obligation de saisir le ministère de l'Intérieur pour toute décision concernant un prétendu réfugié. L'étranger pouvait être mis en garde à vue jusqu'à la décision du ministère, à moins d'obtenir un permis de séjour temporaire. L'importance du flux des demandes d'asile et la nécessité de distinguer les "vrais"; et les "faux" réfugiés ont amené le Royaume-Uni à légiférer sur la procédure d'asile. Les lois de 1993 et de 1996 cherchent avant tout à simplifier la procédure. Elles ont, d'une part, accordé à tous les demandeurs déboutés un droit d'appel susceptible d'être exercé à l'intérieur du Royaume-Uni et, d'autre part, encadré les possibilités d'appel et créé une procédure d'appel accélérée pour les demandes manifestement infondées. Les mesures prises ont eu pour conséquence une baisse importante du nombre des demandes d'asile : un peu moins de 30.000 en 1996, ce qui représente une baisse d'un tiers par rapport à 1995.

La lutte contre l'immigration clandestine

La loi de 1996 sur l'asile et l'immigration a multiplié les moyens permettant de lutter contre l'immigration clandestine. Elle a notamment créé de nouvelles infractions liées à l'immigration, comme l'acquisition ou la tentative d'acquisition frauduleuse d'un titre de séjour. Elle a alourdi les sanctions des infractions préexistantes. Elle a aussi accru les pouvoirs des juges et des fonctionnaires de l'immigration pour arrêter les étrangers en situation irrégulière, et interdit aux employeurs de faire travailler des clandestins.

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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