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Analysis

Les forces de droite favorites à un mois des élections législatives en Slovénie

Elections in Europe

Corinne Deloy

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16 June 2014
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Corinne Deloy

Author of the European Elections Monitor (EEM) for the Robert Schuman Foundation and project manager at the Institute for Political Studies (Sciences Po).

Les forces de droite favorites à un mois des élections législatives en Slovénie

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1,7 million de Slovènes sont appelés aux urnes pour des élections législatives anticipées - les deuxièmes en trois ans - le 13 juillet prochain. La Premier ministre Alenka Bratusek a démissionné de son poste le 5 mai après avoir été battue par Zoran Jankovic lors de l'élection du dirigeant de son parti, Slovénie positive (PS) le 26 avril.

Selon la loi électorale, le président de la République a 30 jours pour proposer un remplaçant à un Premier ministre démissionnaire. Les partis représentés au Parlement ou un groupe d'au moins 10 députés peuvent proposer un candidat. Le chef de l'Etat Borut Pahor, favorable à des élections législatives anticipées, avait choisi de renoncer à son droit de proposer un nouveau candidat. "Il n'y a aucun sens à former un gouvernement qui ne pourrait agir" avait-il déclaré en mettant en avant le fait que le pays avait besoin de réformes. Les partis politiques et les parlementaires ont suivi son exemple. Le 1er juin, Borut Pahor a donc annoncé la tenue d'élections législatives anticipées pour le 13 juillet. Le scrutin doit en effet être organisé dans les 2 mois suivant la dissolution du Parlement et pas moins de 40 jours après l'annonce de leur date.

Une crise politique qui s'éternise

En 2011, le gouvernement conduit par Borut Pahor (Sociaux-démocrates, SD) était contraint à la démission, et la Slovénie à organiser des élections anticipées. Celles-ci, qui se sont tenues le 11 décembre, ont été remportées par Slovénie positive, créée par le maire de Ljubljana et ancien patron de la chaîne de supermarchés Mercator, Zoran Jankovic (PS) et soutenue par l'ancien président de la République (1992-2002) Milan Kucan. Zoran Jankovic, proposé au poste de Premier ministre à l'issue du succès de son parti, a vu sa candidature rejetée par le Parlement. Le dirigeant du Parti démocrate (SDS), Janez Jansa, est devenu chef du gouvernement le 10 février 2012.

Le 8 janvier 2013, la Commission pour la prévention de la corruption a publié un rapport accusant le Premier ministre, Janez Jansa et Zoran Jankovic d'avoir omis de déclarer plusieurs centaines de milliers € de revenus aux services fiscaux (2 millions pour le dernier accusé de fraude fiscale et corruption).

Le gouvernement de Janez Jansa a été démis par un vote de défiance des députés le 27 février 2013. Le 20 mars suivant, Alenka Bratusek devient la première femme Premier ministre de Slovénie. Son gouvernement rassemblait, outre son parti, les Sociaux-démocrates (SD), emmenés à l'époque par Igor Luksic ; la Liste civique Gregor Virant (LGV) et le Parti démocratique des retraités (DeSUS), dirigé par Karl Erjavec.

S'il n'exerce pas le pouvoir au niveau national (sa candidature au poste de Premier ministre a été rejetée par le parlement en dépit du succès de Slovénie positive aux élections législatives du 4 décembre 2011), Zoran Jankovic ne s'est pas pour autant mis en retrait de la politique. Il aime à répéter que son retour est imminent et à rappeler à chacun ce qu'il lui doit ; il n'hésite pas non plus à intervenir dans la vie politique. Le 7 avril dernier, Alenka Bratusek soulignait que Slovénie positive souffrait d'une double présidence de fait et de l'interférence de Zoran Jankovic dans les décisions du parti.

"Nous avons besoin d'appliquer le programme économique adopté lors de notre précédent congrès" a indiqué le maire de Ljubljana, affirmant regretter que le gouvernement n'investisse pas suffisamment dans des grands projets. Il a fini par retirer son soutien à Alenka Bratusek qui s'est éloignée du programme du parti sous la pression de ses partenaires de coalition qu'il qualifie de "spéculateurs qui interfèrent trop dans la ligne de Slovénie positive".

Durant 14 mois à la tête du gouvernement, la Premier ministre a dû sans cesse lutter pour préserver l'unité de sa majorité, et notamment pour obtenir la confiance de son parti. Ainsi, le 5 avril, plusieurs députés de Slovénie positive n'ont pas hésité à aller contre la ligne officielle du parti et à voter contre le ministre de l'Intérieur et de l'Administration publique Gregor Virant, qui était soupçonné d'avoir acheté des billets d'avion à bas prix auprès de la compagnie aérienne Adria Airways en 2008-2010 en dépit des règles d'éthique qu'il défendait lui-même. Gregor Virant, qui réfutait cette accusation, avait finalement obtenu la confiance du Drzavni Zbor (Assemblée nationale), chambre basse du parlement, par 39 voix (contre 23).

A l'automne 2013, Zoran Jankovic a annoncé qu'il souhaitait organiser un nouveau congrès de Slovénie positive. Celui-ci a eu lieu au printemps et le 26 avril, Alenka Bratusek a été désavouée : elle a obtenu 338 voix et Zoran Jankovic 422. "Sans le soutien de mon propre parti, je ne peux plus être la chef du gouvernement car je ne serai plus sur un pied d'égalité avec les autres partis de la coalition gouvernementale" a-t-elle alors déclaré. Les 3 autres partis de la coalition gouvernementale étaient opposées à l'élection de Zoran Jankovic à la tête de Slovénie positive.

"Le temps est venu de remplacer l'irresponsabilité de certains individus par la politique juste, responsable et cohérente des autres" a indiqué Alenka Bratusek à la sortie de sa rencontre avec Borut Pahor le 30 avril.

La Premier ministre sortante se dit fière du travail de son gouvernement et a affirmé ne pas avoir souhaité abandonner son poste. "Il est clair que nous devions prendre le chemin que nous avons pris pour former une coalition en mars 2013" a-t-elle déclaré.

Alenka Bratusek a quitté Slovénie positive suivie par 12 des 27 députés du parti ainsi que le ministre de l'Economie Metod Dragonja et celui de la Défense Roman Jakic. Elle a fondé le 31 mai l'Alliance Alenka Bratusek. "Les élections anticipées sont un fait et il serait juste que les citoyens décident qui doit tenir dans ses mains la destinée du pays dans les 4 années à venir" a-t-elle affirmé lors de l'annonce du scrutin par le président de la République.

A un mois des élections législatives, le Parti démocrate est le grand favori du scrutin en dépit de la condamnation le 5 juin 2013 de son dirigeant Janez Jansa, à 2 ans de prison ferme pour corruption. L'ancien Premier ministre (2004-2008 et 2012-2013) a été reconnu coupable d'avoir reçu de l'homme d'affaires autrichien Walter Wolf, environ 900 000 € de pots-de-vin en faveur de son parti lors de l'achat en 2006 (il était à l'époque Premier ministre) de 135 véhicules blindés par le ministère de la Défense pour un montant de 278 millions € au fabricant Patria, société détenue à 73% par l'Etat finlandais. Cette transaction, rendue obligatoire par l'entrée de la Slovénie dans l'OTAN en 2004, représentait le plus gros contrat militaire jamais signé par Ljubljana. La condamnation de Janez Jansa a été confirmée par la Haute Cour de Slovénie le 28 avril 2014.

Le Parti démocrate a largement remporté les élections européennes qui se ont tenues ne Slovénie le 25 mai dernier. Il a recueilli 24,88% des suffrages et remporté 3 députés. La coalition rassemblant Nouvelle Slovénie et le Parti populaire (NSi-SLS) a obtenu 16,56% des voix et 2 députés. Verjamem (Je crois), parti fondé par Igor Soltes, ancien président de la Cour d'audit, a pris la 3e place avec 10,46% des suffrages et 1 siège devant le Parti démocratique des retraités (8,14%, 1 élu), les Sociaux-démocrates (8,02%, 1 député) et Slovénie positive (6,61%) Le président des Sociaux-démocrates Igor Luksic a démissionné à l'issue du scrutin. La participation a été très faible et s'est élevée à 20,96%.

La scène politique slovène souffre d'une importante fragmentation, notamment à gauche. Outre l'Alliance Alenka Bratusek, 5 partis ont été récemment créés, le positionnement de certains d'entre eux n'étant pas encore bien défini. Il s'agit de Verjamem; Solidarité, alliant 3 groupes engagés dans les manifestations de 2012 contre le gouvernement et la politique d'austérité, dirigée par Uros Lubej, Marina Tavcar Krajnc et Damjan Mandelc ; Concret, parti centriste créé par le député Jelko Kacin, ancien ministre de la Défense (1994-1997) et ex-président des Libéraux-démocrates (LDS) ; le Parti de Miro Cerar, professeur de droit à l'université de Ljubljana, et enfin la Gauche unie, qui regroupe le Parti démocratique du travail (DSD), le Parti du développement durable (TRS) et l'Initiative pour un socialisme démocratique (IDS).

Les Sociaux-démocrates et le DeSUS ont choisi de s'unir pour le 13 juillet sous le nom de Bloc social-démocrate pour toutes les générations. Karl Erjavec, dirigeant de DeSUS, a souligné que les 2 partis partageaient les mêmes opinions sur de nombreux enjeux et considéraient la protection des droits des retraités et la préservation du système de santé et du système éducatif comme des priorités. Il a précisé que l'alliance des 2 partis avait été rendue possible par la démission d'Igor Luksic, jugé trop radical par Karl Erjavec, et son remplacement à la tête des Sociaux-démocrates par Dejan Zidan au début du mois de juin. Les 2 partis poursuivent leurs discussions avec Solidarité et Je crois, avec lesquels ils espèrent renforcer l'union des forces de gauche afin d'éviter la dispersion des voix qui serait très préjudiciable à la gauche, et qui pourrait s'avérer fatale pour les Sociaux-démocrates.

A droite, Nouvelle Slovénie et le Parti populaire se présentent également unis aux suffrages des électeurs.

Une économie sur la voie de l'amélioration

"La Slovénie est sur la bonne voie" a souligné Alenka Bratusek le 5 mai, lors de sa démission. Elle peut en effet se féliciter d'être parvenue à inverser la tendance à la baisse de l'économie. Dès décembre 2013, après sa première année à la tête du gouvernement, Ljubljana était parvenu à recapitaliser ses 3 principaux établissements bancaires (NLB, NKBM et Abanka) minés par des créances douteuses (à hauteur de 7 milliards € selon le FMI, soit 20% du PIB) qui avaient mis en danger les finances publiques. Cette recapitalisation a permis à la Slovénie d'éviter d'avoir à recourir à l'aide financière internationale.

Ljubljana a mis en œuvre une réforme des pensions de retraites et du marché du travail. Il a augmenté les impôts, dont la TVA, et tenté d'instituer une nouvelle taxe foncière, celle-ci a toutefois été annulée par la Cour constitutionnelle.

En 2013, le PIB slovène s'est contraint de 1,1%, soit moins que prévu. La croissance devrait atteindre 0,5% cette année comme en 2015 selon l'agence de notation Fitch qui, le 2 mai dernier, a relevé la note de la dette (BBB +) de négative à stable. L'agence a salué l'action du gouvernement d'Alenka Bratusek en faveur de la stabilisation des banques et souligné que les déséquilibres extérieurs s'étaient réduits au cours des derniers mois.

L'inflation s'élevait à 0,4% en avril dernier et le taux de chômage s'est établi à 10,1% en 2013, soit un chiffre inférieur à la moyenne de l'Union européenne (10,8%). Le salaire minimum atteint 789,15 €, ce qui correspond au niveau moyen de l'UE. La dette publique a en revanche augmenté et s'établit désormais à près de 80% du PIB ; le déficit budgétaire est également en hausse et atteint près de 1milliard €.

L'économie slovène va mieux mais les réformes doivent se poursuivre. Le gouvernement devrait ainsi privatiser plusieurs entreprises. "La Slovénie doit augmenter sa productivité et sa compétitivité et maintenir le niveau de l'Etat-providence en considérant notre position fiscale" a déclaré Alenka Bratusek, très fière d'avoir évité à son pays le recours à l'aide internationale. Le prix à payer pour l'amélioration des résultats économiques est cependant élevé pour une partie de la population qui a pâti des coupes dans les dépenses publiques.

Longtemps bonne élève des pays entrés dans l'Union européenne le 1er mai 2004, la Slovénie a été au cours des dernières années secouée par une forte vague de mécontentement populaire en raison d'une part, des mesures socioéconomiques (gel des salaires de la fonction publique et des pensions de retraite) prises par les différents gouvernements pour relancer la croissance après la crise économique internationale et, d'autre part, des scandales financiers dans lesquels ont été impliqués des hommes politiques. "La classe politique au pouvoir depuis 20 ans est totalement discréditée. 40% de l'économie est encore dirigée par l'Etat. A chaque alternance, les hommes politiques se contentent de placer leurs proches à la tête des grands groupes" indique Damjan Mandelc, professeur de sociologie de l'université de Ljubljana.

En novembre 2012, de nombreuses manifestations ont été organisées dans l'ancien bastion ouvrier de Maribor, contre la privatisation du système de perception des amendes pour excès de vitesse. Le maire Franc Kangler (Parti populaire, SLS) a été contraint à la démission en décembre 2012. Il a été remplacé le 18 mars 2013 par Andrej Fistravec.

Actuellement, l'instabilité politique fragilise la Slovénie.

Le système politique slovène

La Slovénie possède un Parlement bicaméral. Le Drzavni Zbor (Assemblée nationale), chambre basse, compte 90 membres, élus tous les 4 ans au scrutin proportionnel. La Constitution garantit un siège aux 2minorités (italienne et hongroise). Le Drzavni Svet (Conseil national), chambre haute, est élu tous les 5 ans au suffrage indirect et comprend 40 membres : 18 représentants des secteurs professionnels et socio-économiques (4 pour les employeurs, 4 pour les salariés, 4 pour les agriculteurs, les petits entrepreneurs et les travailleurs indépendants et 6 pour les organisations à but non-lucratif) et 22 personnes représentant les intérêts locaux. Le rôle du Conseil national est uniquement consultatif.

Pour les élections législatives, la Slovénie est divisée en 8 unités électorales, elles-mêmes divisées en 11 circonscriptions uninominales qui élisent 88 députés. Les représentants des minorités hongroise et italienne sont élus dans 2 circonscriptions spécifiques.

Les listes de candidats doivent obtenir le soutien de 3 députés, de membres du parti de la liste et de 50 électeurs, ou encore l'appui de 100 électeurs de la même circonscription (pour les listes de candidats soumises par des partis) et enfin de 30 électeurs pour les communautés hongroise et italienne.

Les élections ont lieu au système proportionnel et le vote est préférentiel (l'électeur peut indiquer ses préférences en classant les candidats de la liste). Enfin, les partis politiques doivent impérativement présenter au moins 35% de candidates. Les listes ne comportant que t3 noms, doivent compter au moins un homme et une femme.

Les partis politiques doivent recueillir au moins 4% des suffrages pour être représentés au Drzavni Zbor. La première répartition des sièges se fait au niveau des circonscriptions au moyen du quota de Droop (nombre de suffrages exprimés dans une circonscription, toutes listes confondues, divisé par le nombre de députés élus dans cette circonscription +1). Les sièges restants sont répartis à l'échelon national selon la méthode d'Hondt, les députés sont alors choisis sur les listes bénéficiant des plus forts restes.

7 partis politiques sont représentés dans l'Assemblée nationale :

– Slovénie positive (LZP-PS), parti libéral de gauche fondé par Zoran Jankovic en 2011 et ancien parti de la Premier ministre sortante Alenka Bratusek, compte 28 députés ;

– le Parti démocrate (SDS), parti libéral créé en 1989 et dirigé par l'ancien chef du gouvernement (2004-2008 et 2012-2013), Janez Jansa, possède 26 sièges ;

– les Sociaux-démocrates (SD) fondés en 1993, situés à gauche et issus de l'ancien Parti communiste (PCS), dirigés par l'ancien ministre sortant de l'Agriculture et de l'environnement (2013-2014), Dejan Zidan qui a remplacé Igor Luksic, seul élu du parti aux élections européennes du 25 mai dernier, membres de la coalition gouvernementale sortante, comptent 10 députés ;

– Liste civique Gregor Virant (LGV), parti libéral créé en 2011 par le ministre sortant de l'Intérieur et de l'Administration publique Gregor Virant, membre du gouvernement sortant, possède 8 sièges ;

– le Parti démocratique des retraités (DeSUS), fondé en 1991 et présidé depuis 2005 par le ministre sortant des Affaires étrangères Karl Erjavec et membre de la coalition gouvernementale sortante, compte 6 députés ;

–le Parti populaire (SLS), parti conservateur créé en 1988, dirigé par Franc Bogovic, possède 6 sièges ;

– Nouvelle Slovénie-Parti chrétien populaire (NSi-SKD), parti fondé en 2000 et dirigé par Ljudmila Novak, compte 4 députés.

Le président de la République est désigné au suffrage universel direct tous les 5 ans. Borut Pahor (SD) a été élu le 2 décembre 2012 avec 67,44% des suffrages, battant le chef de l'Etat sortant Danilo Türk, qui a obtenu 32,56% des voix. La participation a été la plus faible depuis l'indépendance du pays en 1991 : 41,95% (48,24% lors du 1er tour le 11 novembre).

Selon les enquêtes d'opinion, le principal parti d'opposition, le Parti démocrate, devrait arriver en tête des élections législatives du 13 juillet. Il serait suivi des Sociaux-démocrates, du DeSUS et de Nouvelle Slovénie. Le parti de Zoran Jankovic, Slovénie positive, serait largement distancé. Reste qu'il demeure difficile pour les instituts de sondage d'anticiper le résultat qu'obtiendront les partis politiques récemment créés.

La campagne électorale a officiellement débuté le 13 juin.

Les forces de droite favorites à un mois des élections législatives en Slovénie

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