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Les Italiens rejettent à une large majorité le projet de réforme constitutionnelle proposé par le gouvernement de Matteo Renzi qui a présenté sa démission

Élections en Europe

Corinne Deloy

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5 décembre 2016
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Les Italiens rejettent à une large majorité le projet de réforme constitutionnel...

PDF | 129 koEn français

Les Italiens ont dit " non " à une large majorité (59,11%) au projet de réforme de la Constitution que leur a proposé le président du Conseil Matteo Renzi (Parti démocrate, PD) et qui visait à renforcer la stabilité du système politique de la péninsule et à faciliter la prise de décision. Il s'agissait de rompre avec le système de bicaméralisme parfait en vigueur dans la péninsule qui accorde des pouvoirs similaires aux deux chambres du parlement (la Chambre des représentants et le Sénat) et qui oblige l'exécutif à posséder la majorité dans chacune des assemblées pour être en mesure de gouverner.

Selon de nombreux observateurs, ce système est responsable de l'instabilité politique du pays. " Le système est coûteux et déresponsabilisant car un gouvernement peut toujours rejeter la faute de son inaction sur le système bicaméral " a déclaré Carlo Fusaro, professeur de droit constitutionnel de l'université de Florence. En Italie, la durée de vie moyenne d'un gouvernement est de 396 jours. Le pays a connu 60 gouvernements depuis 1946 et 36 depuis 1972, dont seulement 6 ont eu une durée de vie supérieure à un an et demi. " En moyenne, il faut 3 ans et demi pour faire adopter une loi. Gouverner peut donc se révéler très complexe " a indiqué Alan Lemangnen, économiste chez Natixis.

Néanmoins, seuls quatre Italiens sur dix ont été convaincus par la réforme proposée par Matteo Renzi (40,89%). La participation a été importante puisque les deux tiers des Italiens se sont rendus aux urnes (65,47%).

Résultats du référendum sur la réforme constitutionnelle du 4 décembre 2016 en Italie

Participation  : 65,47%

Tableau

Source : Ministère de l'intérieur, http://elezioni.interno.it/referendum/scrutini/20161204/FX01000.htm

Le Mouvement 5 étoiles (M5S) de Beppe Grillo, la Ligue du Nord (LN) conduite par Matteo Salvini, Forza Italia (FI), parti de l'ancien président du Conseil (1994-1995, 2001-2006 et 2008-2011) Silvio Berlusconi, les partis d'extrême gauche et une partie du Parti démocrate (PD) de Matteo Renzi emmenée par l'ancien président du Conseil (1998-2000) Massimo d'Alema et l'ancien ministre Pier Luigi Bersani, avaient appelé à voter " non " le 4 décembre.

Le dirigeant de la Ligue du Nord a qualifié le référendum de " grande victoire de la démocratie ". " La propagande du régime et tous ses mensonges sont les premiers perdants de ce référendum. Les premiers vainqueurs sont les citoyens qui ont relevé la tête et sont venus voter en masse " a affirmé Beppe Grillo.

" Ce référendum est un match entre la nostalgie et l'avenir, entre ceux qui ne veulent rien changer et ceux qui regardent l'avenir. Il n'est pas un point d'arrivée mais un point de départ pour moderniser l'Italie " avait répété Matteo Renzi durant la campagne électorale. Celui que l'on surnomme Il Rottamatore (le ferrailleur) (lors de son accession au pouvoir, le président du Conseil avait promis de rottamare [envoyer à la casse] les habitudes politiques italiennes et de créer une nouvelle classe dirigeante) avait choisi de lier son avenir à la tête du gouvernement au résultat de la consultation populaire. Cette personnalisation du vote, à l'heure où remporter un référendum relève du miracle, était une erreur que Matteo Renzi a d'ailleurs très vite reconnue. " Matteo Renzi a commis au départ l'erreur de personnaliser le référendum, pour montrer qu'il constituait le coeur de son action réformatrice, et de radicaliser le débat. Ce faisant, il a favorisé la mobilisation de ses adversaires " a déclaré Fabio Magrini, directeur de la School of Government de l'université Luiss. " C'est presque une élection à mi-mandat mais il n'y a pas d'option alternative à Matteo Renzi " a également souligné Marc Lazar, directeur du Centre d'histoire de Sciences Po.

Comme il l'avait promis, le président du Conseil a donc annoncé sa démission. " Mon expérience de chef de gouvernement s'arrête là. Le " non " a gagné de manière extraordinairement nette (...) nous avons donné aux Italiens l'opportunité de changer les choses à travers une proposition simple et claire. Nous n'y sommes pas parvenus. J'assume toute la responsabilité de la défaite. J'ai perdu. Dans la politique italienne, personne ne perd jamais. Ils disent tous qu'ils n'ont pas gagné. Je suis différent. J'ai perdu et je le dis à voix haute, même si j'ai la gorge serrée " a déclaré Matteo Renzi. " Je voulais éliminer les trop nombreux fauteuils de la politique italienne, ceux du Sénat, des conseils provinciaux, etc. Je n'ai pas réussi, en conséquence le premier fauteuil qui saute c'est le mien. Demain après-midi, je réunirai le conseil des ministres puis je monterai au Quirinal pour remettre ma démission au président de la République " a-t-il conclu.

La réforme proposée par Matteo Renzi prévoyait de transformer le Sénat en une assemblée de 100 élus locaux (74 conseillers régionaux et 21 maires) désignés par les conseils régionaux. Représentante des intérêts locaux, elle aurait conservé un droit de veto en matière constitutionnelle mais n'aurait plus été en mesure de renverser le gouvernement, aurait été saisi de seulement certaines lois. Ses propositions d'amendement auraient pu être refusées par la Chambre des députés. Le Sénat assurant la représentation des territoires au niveau national, les compétences des régions auraient été limitées.

La chambre basse aurait donc constitué le véritable lieu du pouvoir : elle seule aurait voté la confiance au gouvernement comme la majorité des lois. La Chambre des députés doit désormais être élue au scrutin majoritaire, un système de bonus (Italicum) permettant au parti arrivé en tête des élections d'obtenir une majorité. Cette réforme du mode de scrutin doit néanmoins encore obtenir le feu vert de la Cour constitutionnelle italienne.

Pour les adversaires de la réforme constitutionnelle, celle-ci remettait en cause l'équilibre des forces démocratiques en faisant du Sénat une simple assemblée consultative et en permettant un renforcement trop important du pouvoir central et une trop grande concentration des pouvoirs dans les mains du dirigeant du parti politique arrivé en tête aux élections. Matteo Renzi n'a enfin sans doute pas su apprécier la dimension quasi sacrée que possède la Constitution italienne, rédigée en 1946 pour consolider la démocratie italienne après 20 ans de régime fasciste, aux yeux de nombreux Italiens.

Et maintenant ? Qui pour gouverner l'Italie de demain ? Plusieurs scénarios sont possibles. Le président de la République Sergio Matarella peut décider de convoquer des élections parlementaires anticipées (celles-ci sont prévues pour février 2018) ou choisir de nommer un gouvernement technique (auquel Matteo Renzi ne participerait pas) qui serait chargé de réformer la loi électorale. Pour les analystes politiques, ce dernier scénario, que l'Italie a déjà vécu, est le plus probable.

Deux conclusions peuvent être tirées du scrutin : la victoire du " non " renvoie aux calendes grecques la réforme de l'architecture de l'Etat approuvée le 12 avril dernier par le parlement italien et, à l'issue de ce référendum, l'Italie apparaît plus déchirée que jamais. " Personne n'a gagné " écrit le quotidien La Repubblica. En effet, la gauche est menacée d'explosion en raison de ses divisions et dans le camp du " non ", aucun leader ne se détache. Des élections parlementaires anticipées conduiraient très certainement à un nouveau blocage politique.

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