Elections présidentielle et législatives en Bosnie-Herzegovine, 1er octobre 2006

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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4 septembre 2006
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Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Le 4 mai dernier, la Commission électorale nationale a annoncé que les 48% de Musulmans, 37% de Serbes et 14,3% de Croates (chiffres de l'année 2000) qui constituent la population seraient appelés aux urnes le 1er octobre prochain pour élire les 3 membres de la Présidence collégiale et les 42 députés de la Chambre des Représentants, Chambre basse du Parlement central de la République de Bosnie-Herzégovine.

Les habitants de la Fédération de Bosnie-Herzégovine renouvelleront également les 98 membres de leur Chambre des Représentants et ceux de leurs dix assemblées cantonales ; les habitants de la République serbe éliront les 83 membres de leur Assemblée nationale, mais également leur Président et leurs vice-Présidents.

48 formations politiques et plus de 9 000 candidats, dont 12 indépendants, seront en lice pour les scrutins du 1er octobre prochain. Une centaine d'organisations non gouvernementales ont adopté une plateforme citoyenne définissant douze priorités pour les formations politiques, parmi lesquelles figurent le chômage, la pauvreté, les retraites, la sécurité sociale et les problèmes des jeunes. La plateforme met également l'accent sur la nécessité des investissements dans le secteur public, la lutte contre la corruption et l'accélération du processus d'intégration européenne.

Le système politique

La République de Bosnie-Herzégovine est une confédération composée de deux entités : la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la République serbe (Srpska). Le pays possède une Présidence collégiale élue pour quatre ans et composée de 3 membres -un Croate, un Serbe et un Musulman- élus au suffrage universel par leur communauté. La direction de la Présidence alterne tous les huit mois entre les différentes communautés :

Sulejman Tihic (Parti d'action démocratique, SDA) occupe actuellement le poste depuis le 28 février 2006,

Borislav Paravac (Parti démocratique serbe, SDS) a remplacé à ce poste Mirko Sarovic limogé en 2003 par le Haut représentant des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine, Paddy Ashdown, pour avoir favorisé la vente d'armes à l'Irak,

Ivo Miro Jovic (Communauté démocratique croate de Bosnie-Herzégovine, HDZ-BH) a pris, le 9 mai 2005, la succession de Dragan Covic, limogé aussi par Paddy Ashdown.

Le président du Conseil des ministres est nommé par la Présidence. Il nomme les ministres et les vice-ministres, ceux-ci ne devant pas appartenir au même groupe ethnique que les ministres dont ils dépendent.

Le Parlement central de la République de Bosnie-Herzégovine est bicaméral et comprend la Chambre des Représentants et la Chambre des Peuples. Celle-ci compte 15 membres (5 Musulmans, 5 Serbes et 5 Croates) désignés par les Chambres basses des deux entités composant le pays : la Chambre des Représentants de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et par l'Assemblée nationale de la République serbe. La Chambre des Représentants compte 42 députés élus par l'ensemble de la population pour 2 ans ; 28 représentent la Fédération de Bosnie-Herzégovine et 14 la République serbe. Mais les institutions centrales disposent de peu de pouvoirs en Bosnie-Herzégovine, chacune des deux entités possédant ses propres institutions politiques, ainsi que ses propres armée, police, système judiciaire, etc.

La Fédération de Bosnie-Herzégovine (51% du territoire et 70% de la population, et dont la capitale est Sarajevo), possède un Président de la République (croate) -Niko Lozancic- et deux vice-Présidents (un Musulman et un Croate) : Sahbaz Dzihanovic et Desnica Radivojevic. Ces personnalités sont élues par le Parlement. Celui-ci comprend 2 chambres : la Chambre des Représentants, composée de 98 élus au scrutin proportionnel, et la Chambre des Peuples comprenant 60 élus (30 Musulmans et 30 Croates) nommés par les dix assemblées cantonales de la Fédération.

La République serbe (49% du territoire et 25% de la population, et dont la capitale est Banja Luka) est dirigée par un Président, Dragan Cavic, leader du Parti démocratique serbe (SPS), élu au suffrage universel direct. Le Parlement est monocaméral, l'Assemblée nationale comprenant 83 élus au scrutin proportionnel.

Les principales formations politiques de la république de bosnie-herzégovine sont:

- le Parti d'action démocratique (SDA), formation du Président en exercice de la Présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine, Sulejman Tihic, majoritaire à la Chambre des Représentants de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ;

- le Parti social-démocrate (SDP) dirigé par Zlatko Lagumdzija ;

- la Communauté démocratique croate de Bosnie-Herzégovine (HDZ-BH) dirigée par le membre de la Présidence collégiale, Dragan Covic, vainqueur de la dernière élection présidentielle du collège croate ;

- le Parti pour la Bosnie-Herzégovine (SB-H) fondé par l'ancien Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Haris Silajdzic. Leader du parti jusqu'en septembre 2001, Haris Silajdzic a été réélu à ce poste, le 20 mai dernier, pour préserver l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine et lutter contre le concept d'une division du pays ;

- le Parti démocratique serbe (SDS), formation dirigée par le Président de la République serbe, Dragan Cavic, et majoritaire à l'Assemblée nationale serbe ;

- le Parti des sociaux-démocrates indépendants (SNSD) dirigé par Milorad Dodik ;

- le Parti du progrès démocratique (PDP) de Mladen Ivanic.

La situation politique et économique

Les dernières élections présidentielle et législatives du 5 octobre 2002, pour lesquelles la moitié des électeurs (54,98%) s'étaient rendus aux urnes, avaient vu la victoire des formations nationalistes au pouvoir dans le pays depuis la fin de la guerre (1995). Le Parti d'action démocratique (SDA), le Parti démocratique serbe (SDS) et la Communauté démocratique croate (HDZ-BH) avaient largement emporté le scrutin. Les 3 sièges de la Présidence collégiale étaient revenus à trois personnalités nationalistes. Sulejman Tihic, le leader du Parti d'action démocratique, Mirko Sarovic (SDS) et Dragan Covic, (HDZ-BH). Dragan Cavic (SDS) avait été élu Président de la République serbe. Deux ans plus tard, les nationalistes avaient remporté les élections locales du 2 octobre 2004 à l'issue d'une campagne électorale centrée sur les thèmes ethniques.

Les accords de Dayton (21 novembre 1995) signés à Paris le 14 décembre 1995, ayant mis fin à la guerre opposant les Serbes, les Croates et les Bosniaques qui a fait plus de 200 000 morts, stipulent que la communauté internationale aide au développement politique et économique de la Bosnie-Herzégovine dans un environnement pacifié et respectueux des principes fondamentaux des Nations Unies (démocratie et respect des droits de l'Homme). 11 ans après la fin de la guerre, le pays, où les réformes indispensables sont régulièrement ralenties, voire empêchées par les forces nationalistes, reste fortement dépendant de l'aide internationale. La communauté internationale est également garante de la stabilité du pays : 6 300 hommes appartenant à l'EUFOR, force militaire de l'Union européenne, assurent la sécurité du pays depuis décembre 2004. Cette mission, baptisée Althéa, comprend des hommes issus d'une trentaine de pays européens, dont 22 Etats membres de l'Union. La force de police internationale de l'Organisation des Nations Unies (ONU) en Bosnie-Herzégovine a été remplacée, fin 2002, par la Mission de police de l'Union européenne (MPUE).

La Bosnie-Herzégovine est une Confédération sous la tutelle du Haut Représentant de la communauté internationale et émissaire de l'Union européenne, Christian Schwarz-Schilling, nommé le 14 décembre 2005 en remplacement de Paddy Ashdown. Le Haut représentant dispose de pouvoirs importants : il peut imposer des lois aux institutions bosniaques ou destituer tout individu dont les actes sont contraires aux principes démocratiques.

La reconstruction nationale est lente et pâtit de l'absence de vision commune des trois groupes composant la population. La majorité des Musulmans souhaitent une Bosnie unifiée, tandis que les plus nationalistes des Serbes ou des Croates rêvent d'un rattachement à leur « mère patrie ». L'institution de services « trans-entités » (douanes, banques, réseau ferré) peinent à se mettre en place. Des progrès ont néanmoins été réalisés et le pays est passé ces dernières années du statut d'économie de sortie de guerre à celui d'économie en transition. La croissance du PIB a atteint 5,3% en 2005, l'inflation est faible et les exportations ont connu ces derniers mois une hausse importante (+ 33,5% entre les quatre premiers mois de 2006 et ceux de 2005). Cependant, si les violences ont beaucoup diminué, la paix reste inachevée et la démocratisation du pays, tout comme sa reconstruction, dépendent fortement de l'action de la communauté internationale. Un quart des Bosniaques (25%) vivent au–dessous du seuil de pauvreté et le chômage touche plus de 35% de la population active. Si la majorité des plus petites entreprises ont été privatisées, les grands monopoles (télécommunications, énergie, etc.) restent propriétés d'Etat. Le Fonds monétaire international (FMI) a d'ailleurs rappelé la Bosnie-Herzégovine à l'ordre mi-juillet, demandant au gouvernement de résister à toute tentation de dépenses pré-électorales. Mais beaucoup reste à faire pour remettre sur pied un pays durement frappé par une guerre à laquelle les accords de Dayton ont mis fin sans toutefois parvenir à jeter les véritables fondations d'un Etat ni atteindre une réconciliation nationale.

Les enjeux du scrutin

Fin avril dernier, la Chambre des Représentants de la République de Bosnie-Herzégovine faisait échouer le projet de modification de la Constitution. Deux voix seulement ont manqué lors du vote: 26 députés ont voté en faveur du texte et 16 contre. Les amendements proposés étaient le fruit d'un accord entre le Parti d'action démocratique, la Communauté démocratique croate, le Parti social-démocrate, le Parti des sociaux-démocrates indépendants et le Parti du progrès démocratique. Pour renforcer l'exécutif bosniaque, ils prévoyaient, entre autres, la fin de la Présidence collégiale et son remplacement par un Président assisté de deux députés présidents - le Premier ministre et le président du Parlement - qui auraient occupé le poste en alternance. Ce rejet des amendements est une victoire pour le Parti pour la Bosnie-Herzégovine dont le leader, Haris Silajdzic, avait critiqué la modification constitutionnelle prévue au prétexte qu'elle ne modifiait pas réellement la structure de la Bosnie-Herzégovine. Il a mené campagne contre la réforme de la Loi fondamentale en se prononçant pour une Bosnie sans entités (« Bez entita » était il y a encore quelques années le slogan de son Parti). De nombreux observateurs l'ont accusé d'avoir défendu le rejet des amendements à des fins électoralistes. L'ancien ministre de l'Intérieur de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, Mehmed Zilic, a enfreint les consignes de vote de son parti et s'est également prononcé contre la modification de la Constitution. Il a justifié son vote en expliquant qu'il était nécessaire, avant de modifier la Loi fondamentale, d'abolir les symboles de la République serbe et d'attendre l'issue du procès instruit par la Cour Internationale de Justice. Le Parti radical serbe-Vojislav Seselj (SRS-VS), la Communauté Démocratique Croate-1990 et les deux députés indépendants ont également voté contre les amendements.

Selon une enquête d'opinion réalisée par l'institut IRI, la majorité des Bosniaques étaient favorables à une modification de la Constitution : 53,5% contre 26% et 19,4% ne se prononçant pas. Les habitants de la Fédération de Bosnie-Herzégovine étaient les plus nombreux à se prononcer en faveur de la modification de la Loi fondamentale (57,5% contre 48,5% parmi les habitants de la République serbe). La communauté musulmane y était la plus favorable (60,6% contre 50,3% parmi les Croates et 44,9% parmi les Serbes).

L'Union européenne a maintes fois signifié aux autorités bosniaques que le maintien du système actuel priverait le pays de tout accès à l'Union européenne. « La Bosnie-Herzégovine risque de manquer sa chance de se rapprocher de l'Union européenne à cause de la lenteur des réformes » a déclaré Reinhard Priebe, chef Elargissement de la Commission européenne. L'ouverture de négociations avec la Bosnie-Herzégovine avait été approuvée après que les deux entités du pays –la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la République serbe- se furent mises d'accord sur la création d'une force de police multiethnique unique. Mais depuis, les leaders de la République serbe ont cessé de participer aux travaux visant à mettre en place cette force de police déclarant qu'ils souhaitent conserver leur propre ministre de l'Intérieur. D'autres réformes économiques ou concernant l'éducation ou les médias sont toujours inachevées. Les négociations sur la modification de la Constitution devraient se poursuivre après les élections du 1er octobre prochain.

Le Conseil de l'Europe a condamné le refus des représentants serbes de participer aux travaux autour de la réforme des forces de police et rappelé que l'organisation d'un recensement de la population au plus tard en 2010 et la mise en place d'une commission en faveur de la vérité et de la réconciliation devront figurer en priorité sur l'agenda du futur gouvernement.

Le Haut Représentant Christian Schwarz-Schilling a également critiqué les membres du Parlement national, et plus spécifiquement les députés croates et musulmans, pour leur mauvaise foi et leur peu de volonté de faire aboutir les réformes. Le 24 mai dernier, il s'est adressé aux parlementaires bosniaques pour leur demander de mettre à profit les cent jours avant le scrutin pour montrer aux électeurs et à la communauté internationale leur volonté d'améliorer les conditions de vie de leurs concitoyens et d'avancer sur la voie de l'intégration du pays au sein des structures euro-atlantiques. Il a rappelé que la non-application de la réforme de la police et de l'audiovisuel public stopperait le processus d'adhésion à l'Union européenne et il a énuméré l'ensemble des lois qui devaient être votées, au premier rang desquelles figurent celles concernant l'éducation et notamment l'enseignement supérieur. Christian Schwarz-Schilling a reproché aux autorités de la République serbe leur obstruction persistante à la réforme de la police.

Le 29 juin dernier, par une résolution votée par 53 voix contre 28, le Conseil de l'Europe a exhorté la Bosnie-Herzégovine à amender sa Constitution au plus tard en octobre 2010 : « Même s'il est peu réaliste de penser que la Bosnie-Herzégovine abandonnera très prochainement son système de représentation basée sur l'ethnicité pour adopter une représentation plus citoyenne, l'adoption d'une nouvelle Constitution serait certainement préférable à toute amélioration de celle issue des accords de Dayton ». Cette résolution prend également position contre la tenue d'un référendum sur une éventuelle sécession de la part de la République serbe. Une telle consultation populaire n'a pas de fondement constitutionnel et la collecte de 50 000 signatures au bas d'une pétition demandant l'organisation d'un référendum n'aurait pas de base légale stipule le communiqué du Conseil de l'Europe.

Le référendum sur l'indépendance du Monténégro, qui s'est déroulé le 21 mai, n'a pas manqué de donner des idées à certains Serbes de Bosnie-Herzégovine. « La communauté internationale ne permettra pas la mise en danger de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. La République serbe n'a pas le pouvoir d'organiser un référendum sur son indépendance et toute action mesure en ce sens briserait les accords de paix de Dayton » a averti Christian Schwarz-Schilling. De leur côté, les Serbes multiplient sur ce sujet les déclarations contradictoires. Ainsi, le 31 mai dernier, le Premier ministre de la République serbe, Milorad Dodik (SNSD), soulignait : « Le référendum représente un outil démocratique et théoriquement, il est possible d'y recourir à l'avenir si nous ne sommes pas en mesure de bâtir une Bosnie appartenant à tous. Si Sarajevo nous lance constamment le même message, selon lequel la République serbe ne devrait pas exister parce qu'il s'agirait d'une entité née d'un génocide, nous allons leur donner une réponse qui s'appelle « le peuple » et « le référendum » ». Quelques jours plus tard, il affirmait : « Je ne suis pas un aventurier qui pense qu'un référendum devrait être organisé car il n'y a aucun fondement pour une telle chose et aucune possibilité de reconnaissance par la communauté internationale ».

Le Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) de l'Union européenne, Javier Solana, et la sous-secrétaire d'Etat des Etats-Unis, Rosemary Di Carlo, se sont élevés contre l'idée d'un tel référendum. En revanche, le président du Parti démocratique de Serbie, formation du Premier ministre serbe, Vojislav Kostunica, s'est rendu à Banja Luka soutenir les positions des dirigeants de la République serbe et a déclaré que, si elle devait être prononcée, l'indépendance du Kosovo ouvrirait la voie à la séparation des deux entités de la République de Bosnie-Herzégovine. Une récente enquête d'opinion, réalisée par l'agence Partner, a révélé que 75% des Bosniaques voteraient en faveur de la séparation de la République serbe et de la Fédération de Bosnie-Herzégovine si un référendum sur le sujet était organisé.

Le Conseil de l'Europe a récemment rappelé aux autorités bosniaques la nécessité de leur coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de La Haye (TPIY) concernant l'arrestation des deux ex-chefs politiques et militaires bosno-serbes - le général en chef des forces militaires serbes en Bosnie, Ratko Mladic, et le « Président » des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic - en fuite depuis leur inculpation en 1995 pour génocide, crimes contre l'humanité (notamment lors du siège de Sarajevo, qui a fait près de 10 000 morts, et du massacre à Srebrenica, 8 000 morts musulmans en juillet 1995) et crimes de guerre pour leur rôle dans la guerre de 1992-1995.

Le 25 mars dernier, le président du Conseil des ministres, Adnan Terzic, a surpris en déclarant qu'une commission chargée d'enquêter sur la disparition des Musulmans et des Serbes des dix municipalités de Sarajevo entre 1992 et 1995 serait prochainement créée. Cette commission sera composée de trois représentants de chacun des trois peuples constitutifs, plus un représentant des « autres », et devrait rendre son rapport d'ici un an. Alors qu'il était opposé à la création d'une telle commission, Adnan Terzic a finalement changé d'avis afin de ne pas donner de prétexte à ceux qui veulent bloquer les travaux du Parlement et les réformes qui s'imposent. Le Président en exercice, Sulejman Tihic, a qualifié « d'hypocrite » l'établissement d'une commission pour Sarajevo, et pas pour Zvornik, Brcko ou d'autres villes, et exprimé le souhait de voir se mettre en place une commission unique pour toute la Bosnie-Herzégovine. « Les victimes ne peuvent pas être réparties selon des critères de nationalité, de religion ou de territoire » a-t-il déclaré accusant les autorités de la République serbe de politiser la question à outrance.

Dans le passé, les autorités de la République serbe ont souvent comparé les crimes commis sur les Musulmans à Srebrenica à ceux commis contre les Serbes à Sarajevo. Selon elles, de 3 à 5 000 Serbes seraient morts à Sarajevo. Les autorités croates et musulmanes de la Fédération de Bosnie-Herzégovine considèrent ce chiffre comme très exagéré. Le Comité Helsinki des droits de l'Homme de Bosnie-Herzégovine avance, pour sa part, le chiffre de 5 à 600 personnes. Il y a trois ans, la Chambre des Représentants de la République de Bosnie-Herzégovine avait ordonné aux autorités de la République serbe d'enquêter sur les circonstances relatives à la chute de Srebrenica. Après l'intervention décisive du Haut représentant, l'entité serbe avait publié un rapport qui, pour la première fois, reconnaissait de façon officielle les crimes de Srebrenica. Le Président Dragan Cavic avait également présenté ses excuses aux familles des victimes.

La commission d'enquête sur Sarajevo pourrait aboutir à la création d'autres commissions destinées à enquêter sur d'autres crimes ayant eu lieu dans d'autres villes du pays.

La campagne électorale

A la Présidence collégiale, le Président en exercice, Sulejman Tihic, et le Croate Ivo Miro Jovic (HDZ-BH) sont candidats à leur réélection.

Le Croate Zeljko Komsic (SDP), les Musulmans Haris Silajdzic, Mirnes Ajanovic (Parti bosniaque, BOSS) et les Serbes Mladen Bosic (SDS) et Nebojsa Radmanovic (SNSD) ont également fait acte de candidature.

Haris Silajdzic, Zeljko Komsic et Nebojsa Radmanovic sont donnés gagnants par les dernières enquêtes d'opinion.

Le Parti d'action démocratique (SDA) est en tête des intentions de vote, mais la différence avec son principal adversaire, le Parti social-démocrate (SDP) va s'amenuisant au fil de semaines. Le SDA est en tête à Zenica-Doboj et Bihac, alors que le SDP mène la course dans à Sarajevo et Tuzla. Le Parti pour la Bosnie-Herzégovine(SBH) arrive en troisième position, à l'exception de la ville de Zenica-Doboj où le Parti patriotique bosniaque le devance.

Principale formation croate, la Communauté démocratique croate (HDZ-BH) est en perte de vitesse. Son leader, Dragan Covic, a renoncé à se présenter aux prochaines élections et son porte-parole, Miso Relota, a mis en garde les autorités contre le risque de voir les Croates du pays devenir une minorité nationale. « Après les élections, les formations politiques majoritaires modifieront la Constitution. Sans représentant croate, cela sera fatal pour la communauté et nous nous battrons contre ces modifications » a-t-il déclaré. « Le Parti pour la Bosnie-Herzégovine a récemment adopté une résolution parlant de discrimination, entre autres contre les Croates, mais la nouvelle Constitution de la Bosnie-Herzégovine doit résulter d'un consensus et être acceptable pour les trois communautés » a ajouté Miso Relota. Les leaders de quatre formations croates - la Communauté Démocratique Croate-1990 de Bozo Ljubic, le Parti croate des paysans (HSS) de Marko Tadic, l'Union chrétienne-démocrate croate (HKDU) de Marin Topic et l'Union démocratique croate (HDU) - ont signé un accord en vue des prochaines élections. La coalition sera dirigée par Bozo Ljubic, fondateur de l'Union démocratique croate après son départ de la Communauté démocratique croate à la suite d'un désaccord avec son leader Dragan Covic. Il a récemment déclaré qu'il souhaitait offrir une véritable alternative aux Croates de Bosnie-Herzégovine et qu'il ne ferait aucune alliance avec le HDZ, la formation s'étant prononcée en faveur des amendements constitutionnels lors du vote, fin avril, au Parlement. Selon Bozo Ljubic, ces amendements étaient préjudiciables à la population croate.

L'échec du vote, fin avril, sur les amendements constitutionnels a contribué à radicaliser la scène politique. Deux blocs s'affrontent au sein de la Fédération de Bosnie-Herzégovine : le Parti d'action démocratique et le Parti social-démocrate ; le Parti pour la Bosnie-Herzégovine, l'Union sociale-démocrate et le Parti bosniaque. En République serbe, le Parti des sociaux-démocrates indépendants, le Parti socialiste et l'Union démocratique nationale s'opposent au Parti démocratique serbe et à d'autres « petites » formations radicales.

L'actuel Président de la République serbe et président du Parti démocrate serbe, Dragan Cavic, est candidat à sa réélection à la tête de l'entité serbe.

Les analystes politiques prévoient une campagne électorale difficile. Ils anticipent le fait que les formations vont s'appuyer sur l'appartenance identitaire des électeurs pour les pousser à se prononcer sur des enjeux principalement ethniques. Les problèmes socio-économiques devraient une nouvelle fois être relayés au second plan. « Nous sommes aujourd'hui au milieu d'une campagne périlleuse. Toutes les formations politiques utilisent les institutions nationales à leur profit » souligne l'analyste politique Tanja Topic qui ajoute « une fois encore, les gens ne vont pas se prononcer sur des programmes mais voter sur des noms alors même que ces noms sont les mêmes depuis des années et des années ». Une enquête a récemment montré que 80% des candidats aux prochaines élections occupent le pouvoir depuis plusieurs années.

La campagne électorale a débuté officiellement le 1er septembre.

Rappel des résultats des élections du 5 octobre 2002

participation : 54,98%

collège musulman

collège serbe

collège croate

Elections législatives

chambre des représentants de la république de Bosnie-Herzégovine

chambre des représentants de la fédération de bosnie-herzégovine

assemblée nationale de la république de serbie

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